À la veille des dix ans de l’attentat contre le journal satirique, la dessinatrice Coco nous parle de sa vie d’après, de ses peurs, de ses indignations et de son amour inchangé du rire et de la liberté.
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00:00On continue parce qu'ils sont là, parce qu'ils nous ont jamais quittés depuis le 7 janvier.
00:06C'était le premier attentat d'une longue série, c'était un choc pour tous.
00:12Il y a eu des dessinateurs, des journalistes, des policiers, des juifs
00:15qui ont été tués pendant ces trois jours d'attentat de janvier 2015.
00:22C'est sûr que c'était un moment de sidération épouvantable.
00:25Les gens ont réagi avec beaucoup d'émotion et sont descendus dans la rue.
00:29Pour énormément de raisons, pour la liberté, la liberté d'expression, pour dire non au terrorisme.
00:37C'est vrai que dix ans après, le pays a été éprouvé par énormément d'attentats.
00:44C'est des choses qui ont presque intégré notre vie et on ne devrait pas s'habituer à ça.
00:51Les gens ne défilent plus dans la rue après chaque attentat
00:55mais ils sont effectivement très sensibles, inquiets.
00:59Est-ce qu'ils sont charlis ? Est-ce qu'ils défendent la liberté d'expression ?
01:02Oui, c'est quand même quelque chose de précieux.
01:04Je dis toujours les choses telles que j'ai envie de les dire, avec la plus de liberté possible.
01:11Si on commence à se censurer dans ce métier-là, c'est la mort du métier.
01:15Ça n'aurait eu aucun sens de continuer le journal après l'attentat islamiste des Kouachi
01:21si ce n'était pas pour revendiquer pleinement notre droit à dessiner,
01:26notre droit à dessiner librement et sur tous les sujets.
01:32C'était évident de faire quelque chose pour eux, pour dire qu'ils nous manquent.
01:39On avait à cœur de parler de tout ce qu'ils ont donné pour ce journal qu'on continue
01:46parce qu'ils sont là, parce qu'ils ne nous ont jamais quittés depuis le 7 janvier.
01:52Souvent, dans nos têtes, on entend leur rire.
01:55Il y a leur dessin dans la rédac.
01:58Ce n'est pas que de la tristesse ou de la nostalgie de penser à eux.
02:02C'est aussi beaucoup de joie, beaucoup de vie qu'ils ont laissée.
02:08Dans ce livre, on voulait justement parler de cette vie, de leur vie.
02:15Au-delà de ça, c'est aussi une manière, je pense, de montrer le talent qui a été assassiné,
02:21l'intelligence qu'on a perdue.
02:25Les terroristes ont tué le talent, la gentillesse.
02:31Et ça, on ne pardonnera pas ces trucs-là, on ne pardonnera pas ça.
02:36Tout est pardonné, c'était vraiment très ironique.
02:39Quand on dit l'esprit Charlie, c'est eux aussi.
02:43C'est toute cette grande liberté dont ils ont usé toute leur vie pour dessiner,
02:48pour critiquer le monde avec, je ne sais pas, la finesse.
02:53On parle souvent de Charlie maintenant comme on vit dans un bunker,
02:58il y a la protection policière.
02:59Souvent, c'est ce que les gens retiennent de nous.
03:02Mais en fait, à l'intérieur du bunker, c'est le bordel.
03:04Il y a plein de vies, il y a plein de dessins, il y a plein de couleurs,
03:07il y a plein de...
03:09Ça s'engueule comme avant, ça rit à nouveau, c'est vraiment...
03:14Tout ça s'est reconstruit parce que c'est notre esprit,
03:17c'est notre état d'esprit.
03:18Et puis c'est aussi peut-être notre combativité dans l'après,
03:23parce qu'en fait, on en a vu tellement
03:29que là, maintenant, c'est reparti pour vingt ans.
03:37Sous-titrage Société Radio-Canada