Donald Trump fait officiellement son entrée, ce lundi, à la Maison Blanche comme 45e président des États-Unis. Et il obtient "cette fois", le renfort des plus grands patrons de la tech, analyse la sociologue Valentina Grossi, maître de conférence à l'Université de Strasbourg.
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00:00C'est un geste symbolique chez nous en Alsace à quelques heures de l'investiture aux Etats-Unis de Donald Trump.
00:08Terminé les tweets, plusieurs élus, dont la maire de Strasbourg, Jeanne Barséguian,
00:12où la députée Cendré rigole, le président de la région Grand Est aussi,
00:15Franck Leroy, quitte le réseau social X, l'ancien Twitter,
00:19récemment mis au service de la campagne du nouveau locataire de la Maison Blanche par son grand patron Elon Musk,
00:25qui ne cache plus lui ses ambitions de faire de la politique.
00:28Alors vous songez vous aussi à quitter les réseaux ou pas ?
00:31Vous réagissez, je vous redonne le numéro, vous êtes les bienvenus pour échanger 0388 25 15 15.
00:35Bonjour Valentina Grossi, spécialiste des réseaux sociaux, maîtresse de conférences à l'université de Strasbourg,
00:42au QEJ aussi, l'école de journalisme de Strasbourg.
00:46Il y a cette image, ce dessin qui m'a fait rire un petit peu dans la presse ce week-end,
00:51dessin de chapate où l'on voit Donald Trump et Elon Musk,
00:55tous les deux, la main sur la Bible avec ces mots, nous jurons solennellement.
01:00Est-ce que c'est de ça dont il s'agit ?
01:02Clairement, Donald Trump n'arrive pas tout seul cette fois à la Maison Blanche,
01:05mais avec son armée de patrons de la tech.
01:08Oui, effectivement, il y a eu cette image assez drôle et significative
01:15qui fait penser au fait que les patrons de la tech, cette fois, sont plutôt alignés avec Donald Trump,
01:21contrairement à ce qui s'était passé lors du premier mandat, où ils avaient manifesté une forme de résistance.
01:28Pour Elon Musk, pas trop de surprises, parce que ça fait plusieurs mois, voire années,
01:34qu'il est plutôt aligné sur des visions plutôt libertariennes.
01:38Et il a poussé la campagne de Donald Trump aussi.
01:40Voilà, sur X. En revanche, ce qui est plus étonnant, c'est tous les autres,
01:44à partir de Zuckerberg, qui avait plutôt jusque-là une image de progressiste, on pourrait dire.
01:52Et là, il y a quelques semaines, à plusieurs reprises, a manifesté la volonté de se rapprocher de Donald Trump.
02:02Et puis, bien sûr, on peut mentionner Bezos, Tim Cook, Sam Altman de OpenIA,
02:10plein de patrons de la tech.
02:12Les patrons d'Amazon, d'Apple, de PayPal aussi, qui rejoignent Donald Trump.
02:17Qu'est-ce que ça veut dire, très concrètement, Valentina Grossi ?
02:20Quelles conséquences pour nous, pour les utilisateurs de ces réseaux sociaux, en France et en Alsace ?
02:25Quelles conséquences sur notre utilisation ?
02:27Pour nous, la question est un peu différente par rapport à ce qui se passe pour les citoyens des Etats-Unis.
02:34C'est-à-dire qu'on est en Europe, et il y a un contexte législatif un peu particulier,
02:39très différent de celui américain.
02:42Parce que, voilà, depuis 2023, en Europe, on voit qu'il s'appelle le Digital Service Act,
02:49contraint les plateformes à une série de choses, notamment à de la modération sur les plateformes.
02:57Donc le Facebook aux Etats-Unis n'est pas le Facebook en Europe ?
02:59Ce n'est pas tout à fait le même, non.
03:00Et ça, ça ne peut pas changer ?
03:01Alors là, le problème, ce qui nous inquiète maintenant,
03:06c'est qu'effectivement, Zuckerberg a dit vouloir assouplir la modération aux Etats-Unis.
03:14Donc il ne va pas la supprimer même aux Etats-Unis, mais il va l'assouplir.
03:18C'est-à-dire qu'il y a des propos qui nous paraissent très choquants pour nous, Européens, voire discriminants,
03:25peuvent être proférés à partir de maintenant.
03:31Or, ce qui va se passer en France et en Europe, on ne sait pas encore.
03:36C'est-à-dire qu'ils disent vouloir respecter les règles européennes.
03:40Est-ce que ça va être le cas ?
03:42On ne sait pas, parce qu'en fait, la modération, la maison de mer, en tout cas,
03:48donne des lignes de rétrice en termes de modération.
03:51Donc c'est possible aussi que la modération en France suive une petite évolution
03:56vers un assouplissement quand même envers certains propos haineux, discriminants, etc.
04:02Donc c'est possible qu'en termes d'effet, on ait quand même un environnement un peu plus toxique,
04:09peut-être moins qu'aux Etats-Unis.
04:11Souhaitez-vous quitter les réseaux sociaux ? Songez-vous à le faire ? On vous pose la question.
04:15Ce matin, Eric nous rejoint depuis Strasbourg. Eric, bonjour !
04:18Bonjour Eric !
04:19Bonjour !
04:20Pour vous, les réseaux sociaux, c'est bientôt fini ? Ou vous continuez à les avoir ?
04:24Ah non, non, non, non, non, non, net, hors de question.
04:28Hors de question de citer tout ce petit monde de réseaux sociaux.
04:34De toute façon, les réseaux sociaux, on le sait tous, c'est énormément, énormément de mensonges.
04:39Et c'est ça ce qui est un peu marrant.
04:41Alors, on sait, chacun, de faire la part des choses et de voir ce qui est vrai et pas vrai.
04:47Donc moi je dis, on est dans un pays de libre-expression, entre parenthèses.
04:53Si vous ne dictez pas ce que la gauche et les médias de gauche disent, vous êtes tout de suite censurés.
05:00Je me permets de vous interrompre, Eric, qu'est-ce que vous entendez par liberté d'expression ?
05:06Liberté d'expression totale, ça peut aller jusqu'à des propos racistes, jusqu'à des propos homophobes.
05:13C'est ça que vous entendez dans la liberté d'expression ? Parce que c'est ça aussi le fond du sujet,
05:18quand on parle de modération des réseaux sociaux.
05:22Attendez, il y a certains magazines qu'on accepte de faire des propos idéales.
05:32Ah oui, parce que c'est la liberté d'expression.
05:35Alors si d'autres gens, des particuliers, publient, disent quelque chose,
05:42on les traite tout de suite de racistes et de tout et de machin chose.
05:46Non, c'est la liberté d'expression pour tout le monde.
05:51Il faut continuer avec les...
05:53Dans des plais à certains partis politiques et à certains médias.
05:56Mais si ceux-là, ils veulent quitter ces réseaux sociaux, qui le quittent ? C'est leur problème.
06:01On vous a entendu Eric, et merci d'avoir échangé ce matin sur votre radio.
06:06On l'entend, il faut garder les réseaux sociaux pour la liberté d'expression, selon Eric.
06:10Oui, Eric, très d'accord avec ce qu'affirme Elon Musk en fait ces derniers mois.
06:15C'est exactement la ligne d'Elon Musk, peut-être de Zuckerberg tout doucement,
06:19de dire on peut tout dire sur nos plateformes. Est-ce que c'est un danger, Valentina Grossi ?
06:24En tout cas, Eric, il est très en ligne avec la liberté d'expression au sens étasunien.
06:31Or, en France, c'est un peu différent, c'est-à-dire qu'on considère qu'elle a des limites.
06:36On est libre, mais à la fois responsable.
06:40Ça implique des droits, en fait, mais aussi des devoirs.
06:45Ces limites, finalement, on ne peut pas dire certaines choses qui vont susciter de la haine.
06:58Il y a aussi une question de paix sociale dans la vision de la liberté d'expression telle qu'elle est conçue en France.
07:05C'est la fin du fact-checking aussi, qui est souvent avancé par ses grands patrons des réseaux sociaux,
07:11de la vérification de l'information, et c'est un peu ce dont parlait aussi Eric à l'instant.
07:18Il y a de plus en plus d'informations non vérifiées, voire erronées. Est-ce que ça va s'arranger ces prochains mois ?
07:24Alors là aussi, les annonces de Zuckerberg concernent les Etats-Unis.
07:30Rien ne nous dit qu'il va les supprimer aussi en France, le fact-checking professionnel.
07:36En tout cas, si c'est le cas, il me semble que c'est peut-être la chose la moins grave.
07:41Désolée pour les médias traditionnels, mais apparemment, ces explications de contexte,
07:50les messages de contexte qu'il veut insérer à la place du fact-checking, fonctionnent plutôt pas mal,
07:56contrairement aux craintes initiales. C'est-à-dire qu'à la place des journalistes,
08:01finalement, c'est des internautes qui font un petit travail d'enquête, et un travail collaboratif.
08:08C'est comme Wikipédia, finalement, on constate que sur Wikipédia, il y a très peu de fausses informations
08:16qui circulent, parce que le travail collaboratif fait émerger une forme de consensus.
08:21Est-ce qu'il faut quitter ces réseaux sociaux pour les personnalités politiques que vous entendez ce matin
08:26avec ici Alsace, qui décident de partir pour ne plus participer quelque part à ce marasme des fausses idées
08:33et des idées malsaines, ou est-ce qu'il faut rester, comme le propose par exemple le député insoumis Fernandez,
08:40le député alsacien, pour justement combattre certaines idées parfois néofascistes ?
08:45On pourrait aller jusque-là sur certains réseaux sociaux. Qu'est-ce que vous en pensez, Valentina Grossi ?
08:49Alors, à titre individuel, chacun fait ce qu'il veut, évidemment. Après, en tant que sociologue, j'alerte sur le fait
08:58que ce n'est pas une décision si individuelle que ça, c'est-à-dire que les réseaux sociaux sont sujets à ce qu'on appelle
09:04les effets de réseau. Si vous allez dans une agence matrimoniale, par exemple, et vous êtes le seul inscrit,
09:12ça n'a aucun intérêt d'y être. Or, notre intérêt à être sur les réseaux sociaux dépend étroitement du nombre de connexions
09:20qu'ils y font. Et donc, on la présente comme un choix individuel. Or, est-ce que la plupart des personnes y sont ou pas ?
09:31Finalement, si on quitte les réseaux sociaux, c'est pour aller où aussi ?
09:39Donc, est-ce qu'un autre réseau social, finalement, va absorber la grosse partie des internautes ?
09:48À ce moment-là, on peut assister éventuellement à un point de bascule où les internautes vont aller vers le même réseau social.
09:56Et à ce moment-là, ça sera intéressant de voir lequel, éventuellement.
10:01Et c'est un peu ça toute la question, la massification des réseaux sociaux. On se demande bien où on va pouvoir aller
10:06ces prochains temps pour voir de simples petites vidéos de chats toutes mignonnes comme on les adore sur les réseaux sociaux.
10:11On a l'air bien loin de tout ça, désormais, alors que Donald Trump fait son entrée aujourd'hui à la Maison Blanche.
10:17Merci d'être venu décrypter pour nous ce monde assez opaque d'Internet et des réseaux sociaux.
10:22Valentina Grossi, sociologue, maître de conférence à l'Université de Strasbourg et au QH, notamment l'école de journalisme.
10:29Merci à vous.
10:30Merci.
10:31Je vois Benoît qui écrit « Mauvaise idée de quitter les réseaux sociaux, c'est le seul endroit où on peut discuter entre genres d'opinions différents ».
10:35Patrick, lui, précise qu'il faudrait sérieusement aller contrôler ces réseaux parce que c'est un outil de propagande qui peut faire des dégâts.
10:42Merci de vos témoignages, merci de vos messages laissés sur votre radio, ici, à Alsace, il est 7h55.