Le jeudi 23 janvier, la délégation aux droits des femmes du Sénat, conjointement avec celle de l’Assemblée nationale, auditionnait Narges Mohammadi, prix Nobel de la paix 2023 et militante iranienne pour les droits des femmes ainsi que les droits humains. Narges Mohammedi a été provisoirement libérée de la prison d’Evin, à Téhéran pour raison médicales, où elle a été incarcérée quatre fois depuis 1998 pour ses prises de position contre la peine de mort et son soutien au mouvement “femme, vie, liberté”. Elle a profité de sa libération provisoire pour s’entretenir avec les commissions du Sénat et de l’Assemblée nationale en visio-conférence. La militante voit sa santé se dégrader en prison, tout comme celle d’une autre femme retenue par le régime, la française Cécile Kohler. Revivez ces échanges. Année de Production :
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00:00:00Générique
00:00:02...
00:00:09Bonjour à tous.
00:00:10Bienvenue dans cette nouvelle édition de 100% Sénat.
00:00:14Aujourd'hui, nous vous proposons de suivre l'audition
00:00:16de la prix Nobel de la paix et militante iranienne
00:00:19pour les droits des femmes, Narjes Mohammadi.
00:00:22Elle doit témoigner de son combat, notamment contre le port
00:00:25du voile obligatoire dans son pays, l'Iran.
00:00:28Narjes Mohammadi a été incarcérée pendant trois ans
00:00:31dans l'une des prisons les plus dures du régime.
00:00:34Elle a été libérée temporairement pour des raisons de santé,
00:00:37mais elle sait déjà qu'elle devra retourner en prison.
00:00:40Elle compte donc faire entendre sa voix d'ici là.
00:00:43Narjes Mohammadi s'exprime devant la délégation
00:00:45aux droits des femmes et à l'égalité des chances
00:00:48entre les hommes et les femmes du Sénat et de l'Assemblée nationale.
00:00:52C'est tout de suite dans 100% Sénat.
00:00:55Bonjour à toutes et à tous.
00:00:58Je suis très heureuse d'être parmi vous aujourd'hui.
00:01:02Je vais essayer d'être le plus claire possible
00:01:10et de lire d'abord une déclaration que j'ai préparée
00:01:14et je reste à votre disposition pour toutes questions
00:01:17que vous aurez par la suite.
00:01:19Madame la vice-présidente, monsieur le vice-président,
00:01:22mesdames et messieurs les sénateurs,
00:01:23les membres de la délégation,
00:01:27je suis très heureuse d'être parmi vous aujourd'hui
00:01:30et je vous remercie pour votre présence à cette séance.
00:01:34Votre participation témoigne de votre engagement
00:01:37en faveur des droits humains et des droits des femmes.
00:01:41Je saisis cette occasion pour vous adresser un message fort
00:01:46et un message clair ainsi qu'à tous ceux qui croient
00:01:49en la démocratie, la liberté et l'égalité à travers le monde.
00:01:52D'abord, j'aimerais préciser que je suis une militante
00:01:55de la société civile qui lutte pour la construction
00:01:58d'une société civile forte en Iran.
00:02:03Je suis une défenseur des droits humains et des droits des femmes
00:02:06engagée contre la violation de ces droits
00:02:08et pour leur réalisation.
00:02:10Je suis convaincue que la démocratie n'a pas de sens
00:02:15sans la garantie des droits des femmes.
00:02:18Dans une société où les citoyens n'ont pas d'institution civile forte,
00:02:23où la liberté d'expression n'existe pas,
00:02:25la liberté de pensée n'existe pas,
00:02:29où les femmes sont privées de leurs droits fondamentaux
00:02:32et où les droits humains ne sont pas garantis,
00:02:35alors même les élections deviennent une illusion
00:02:39et ne peuvent en aucun cas être considérées
00:02:43comme une démocratie.
00:02:46La République islamique réprime nos institutions civiles,
00:02:52prive les femmes de leurs droits fondamentaux,
00:02:56utilise la peine de mort comme un instrument de terreur
00:03:02et viole les droits humains.
00:03:06Un autre point très important,
00:03:09la République islamique étant un régime autoritaire religieux
00:03:14qui n'a par essence pas la capacité d'instaurer une démocratie,
00:03:18de respecter les droits humains et les droits des femmes,
00:03:22a montré au cours des dernières années
00:03:24qu'elle était absolument irréformable.
00:03:30C'est pourquoi je crois en la nécessité de mettre fin
00:03:34à cette tyrannie religieuse
00:03:36et de mettre fin à la République islamique,
00:03:38et je consacre mes efforts à ces objectifs.
00:03:44Depuis 46 ans, les femmes iraniennes mènent une lutte incessante
00:03:49contre la discrimination, l'oppression, la domination.
00:03:56Depuis le 8 mars 1979,
00:04:00lorsqu'elles ont défilé dans les rues
00:04:02pour protester contre le rôle obligatoire
00:04:05jusqu'au mouvement Marsa Jina Amini,
00:04:08ce magnifique mouvement Femmes, Vie, Liberté,
00:04:14les femmes n'ont jamais cessé leur combat.
00:04:18Nous n'avons pas gardé le silence, nous avons résisté.
00:04:22Nous avons été arrêtées, jetées dans les cellules d'isolement,
00:04:27des cellules des prisons sécuritaires.
00:04:29Nous avons été jugées, condamnées à de lourdes peines de prison,
00:04:33incarcérées.
00:04:35Nous avons perdu nos emplois, nos enfants, nos vies.
00:04:40De nombreuses femmes, anonymes, oubliées,
00:04:46sous l'oppression et la discrimination systémique
00:04:50d'un régime religieux ont péri depuis les recoins cachés
00:04:55de leur foyer jusqu'aux rues, jusqu'aux potences des prisons.
00:05:04Je déclare que ce régime impose aux femmes,
00:05:09sous prétexte de la loi, de la religion, de la culture,
00:05:13de la propagande, des médias d'Etat et d'éducation,
00:05:19ce qu'elle impose aux femmes
00:05:23est un apartheid de genre flagrant.
00:05:27Chers représentants,
00:05:33en tant que défenseurs des droits des femmes,
00:05:35je vous exhorte à vous lever
00:05:39pour criminaliser l'apartheid de genre.
00:05:43C'est une mission historique,
00:05:47féministe et mondiale.
00:05:50Lutter contre l'apartheid de genre
00:05:54n'a pas pour objectif unique de libérer les femmes
00:05:57de l'asservissement et de la soumission,
00:06:00mais c'est aussi ouvrir la voie à la démocratie,
00:06:02à la paix et à la liberté.
00:06:06On ne peut pas réduire à l'asservissement
00:06:09la moitié de la société et l'invisibiliser
00:06:13et prétendre défendre la démocratie,
00:06:15la liberté et l'égalité.
00:06:17Chers représentants,
00:06:20alors que je suis en train de vous parler,
00:06:24les potences se dressent dans les prisons de mon pays
00:06:28aux mains des bourreaux du régime.
00:06:31Chaque jour, dans ce pays
00:06:34de jeunes vies sont suspendues aux cordes des potences
00:06:40et la société est de plus en plus en colère.
00:06:45La République islamique, après 15 ans,
00:06:47a repris les exécutions des femmes.
00:06:51Ils sont en train d'essayer de se venger
00:06:53du mouvement Femmes, Vie, Liberté
00:06:58en exécutant les femmes.
00:07:00La corde de la potence est au-dessus de la tête
00:07:03de Parshan Azizi et Valéché Mouradi,
00:07:06qui sont incarcérés dans la section des femmes
00:07:08de la prison des Vines
00:07:11afin de terroriser les femmes courageuses d'Iran
00:07:15et les obliger à battre en retraite.
00:07:17Je vous demande de briser cette corde,
00:07:21de leur sauver la vie
00:07:24et de nous tendre la main à cet effet.
00:07:29Je vous exhorte à être la voix du peuple iranien
00:07:33et à soutenir leurs revendications.
00:07:39Nous avons pris la décision de tourner la page
00:07:43de ce régime tyrannique et autoritaire
00:07:46et vous demandons d'être à nos côtés.
00:07:50Pour stopper l'escalade des exécutions,
00:07:52pour garantir les droits humains,
00:07:54pour garantir les droits des femmes,
00:07:57faites pression sur le régime de la République islamique.
00:08:03Au lieu de normaliser un régime coupable de crimes
00:08:06contre l'humanité,
00:08:08mettez en place les mécanismes judiciaires internationaux,
00:08:13tels que la compétence universelle,
00:08:15pour les tenir responsables.
00:08:19Et faites de cela une priorité.
00:08:23Aujourd'hui, j'appelle le gouvernement français
00:08:27à travers le Sénat et son Assemblée nationale.
00:08:31J'appelle à faire des droits humains
00:08:34une condition préalable à toute négociation
00:08:38avec la République islamique d'Iran.
00:08:42Je souligne que toute négociation avec la République islamique
00:08:48qui ne prend pas en compte les droits fondamentaux
00:08:51du peuple iranien, les droits humains,
00:08:54les droits des femmes et la société civile,
00:09:01ne fera que renforcer la tyrannie religieuse
00:09:05et nier la lutte du peuple iranien
00:09:08pour la démocratie, la liberté et l'égalité.
00:09:13J'ai l'espoir et j'ai la certitude
00:09:16que la lutte du peuple iranien
00:09:19pour se libérer de cette tyrannie
00:09:22et de parvenir à une transition pacifique
00:09:25vers la démocratie aboutira
00:09:28et que vous serez témoin de notre victoire.
00:09:31Et jusqu'à ce jour, femmes, vie, liberté.
00:09:40Merci beaucoup, madame, pour votre témoignage
00:09:43à la fois poignant, inquiétant et tellement vrai
00:09:46par rapport à ce que vivent les femmes en Iran.
00:09:50Je vais pas être tellement plus longue dans un premier temps
00:09:53et je vais passer la parole à mes collègues
00:09:56à la fois sénateurs, sénatrices et députés
00:09:59qui sont avec moi ici dans la salle Clémenceau au Sénat.
00:10:04Peut-être avant, si juste les présidents...
00:10:08Non. Donc s'il y a des questions d'ores et déjà,
00:10:12peut-être de la part de mes collègues.
00:10:14Bon, alors, écoutez, moi, je vais peut-être,
00:10:16en attendant qu'il y en ait une qui arrive, en poser une.
00:10:21Vous vous battez pour le voile, contre le voile, essentiellement,
00:10:25et pour les droits humains.
00:10:27Comment voyez-vous, depuis l'Iran,
00:10:30les débats sur le voile que nous avons, nous, ici, en France ?
00:10:43Voyez-vous...
00:10:46J'aimerais expliquer le sujet du voile obligatoire.
00:10:49Le voile obligatoire
00:10:51est un outil de domination et d'oppression
00:10:56du système de la République islamique en Iran.
00:10:58Le voile obligatoire,
00:11:01depuis les premiers jours de la République islamique,
00:11:07a été utilisé comme un...
00:11:10au coeur de la stratégie du système de la République islamique.
00:11:13Pourquoi ?
00:11:16Selon moi,
00:11:18on ne peut pas caractériser le voile obligatoire
00:11:22seulement à travers sa perspective religieuse.
00:11:28Nous ne pouvons pas croire
00:11:30au slogan de la République islamique qui disait
00:11:34que nous allons proposer le voile aux femmes iraniennes
00:11:39pour qu'elles puissent être en sécurité,
00:11:41car nous voulons les défendre au sein de la société.
00:11:44Nous ne pouvons pas croire ces mots-là.
00:11:46Selon moi,
00:11:48pour le régime de la République islamique,
00:11:50un régime autoritaire, tyrannique et religieux,
00:11:54le voile obligatoire
00:11:56est un outil de domination, d'oppression
00:12:00et de marginalisation des femmes au sein de la société.
00:12:06Les femmes font partie intégrante de la société,
00:12:09du foyer aux rues, aux emplois, au travail.
00:12:13Et si ces femmes sont soumises à un voile obligatoire,
00:12:17à une domination, à un asservissement,
00:12:22à une invisibilisation,
00:12:26alors la domination sera entière au sein de la société.
00:12:34Ainsi, pour arriver à la démocratie
00:12:37et pour briser la domination et l'oppression
00:12:39de ce régime tyrannique et religieux,
00:12:42nous luttons contre le voile obligatoire.
00:12:45La lutte contre le voile obligatoire
00:12:48est une manière de réaliser pleinement les droits des femmes,
00:12:51de libérer les femmes de l'asservissement
00:12:54et une voie pour arriver à la démocratie.
00:12:57Par conséquent, je suis contre le voile obligatoire.
00:13:01Je lutte contre l'obligation du voile.
00:13:03Et jusqu'à la mise à terme du voile obligatoire en Iran,
00:13:10je continuerai la lutte.
00:13:13Par conséquent, je demande aux femmes françaises
00:13:18de soutenir les femmes iraniennes dans ce combat
00:13:22et de lutter contre le voile obligatoire,
00:13:26qui sera une manière de couper
00:13:31une des voies d'action de ce régime tyrannique et religieux.
00:13:36Merci beaucoup.
00:13:37Je vais passer la parole au président Perrin.
00:13:40Merci, madame.
00:13:41Est-ce que vous pourriez nous dire
00:13:45de quelle manière, aujourd'hui, et de quels moyens,
00:13:47même s'ils sont, évidemment, très limités,
00:13:50les femmes en Iran peuvent se battre
00:13:55contre, évidemment, cet état de fait
00:14:02qui vous met dans une situation extrêmement compliquée.
00:14:07Aujourd'hui, on est admiratif de votre courage.
00:14:09On vous auditionne, on vous voit, on vous entend.
00:14:13Quelles sont les conséquences pour vous d'une telle audition ?
00:14:16C'est-à-dire, quel risque vous prenez aujourd'hui en nous parlant ?
00:14:20Et par ailleurs, est-ce que vous avez des nouvelles
00:14:22de cette jeune étudiante qui, le 4 novembre dernier,
00:14:25a été arrêtée après s'être dévêtue à l'université Azad ?
00:14:28On a très peu de nouvelles d'elle.
00:14:30Est-ce que vous savez, aujourd'hui, ce qu'elle est devenue ?
00:14:33Il semble qu'elle soit internée dans une unité psychiatrique.
00:14:36Est-ce que vous en savez plus ? Merci beaucoup.
00:14:45Concernant la lutte des femmes,
00:14:48je dois d'abord souligner que cette lutte
00:14:53a commencé dès l'instauration de la République islamique en Iran.
00:14:58Les manifestations du 8 mars 1979
00:15:04ont été l'une des plus puissantes manifestations
00:15:07des femmes contre le voile obligatoire
00:15:10dans les rues de Téhéran.
00:15:12Vous avez été témoin que, dans cette manifestation,
00:15:15les femmes de différentes couches de la société,
00:15:18de différents groupes d'opposition,
00:15:19de différents groupes d'opinion ont participé
00:15:23à cette manifestation et ont montré leur lutte.
00:15:26A cette époque,
00:15:29le soutien que l'on a vécu en 2022
00:15:35suite au mouvement Femme, Vie, Liberté n'existait pas.
00:15:39Nous avons dû attendre 4 décennies,
00:15:42nous avons dû vivre 4 décennies de cette oppression
00:15:45pour atteindre le reste du monde.
00:15:47Au cours de ces années, je me souviens très bien,
00:15:52lorsque j'ai commencé mes études universitaires,
00:15:55de nombreuses pressions existaient déjà sur les femmes
00:16:01et de nombreuses lois discriminatoires.
00:16:04J'ai étudié dans une université publique,
00:16:08nous devions porter un tchador dans l'université.
00:16:10Au-dessus de notre pantalon, de notre manteau,
00:16:13de notre voile, nous devions encore porter un tchador.
00:16:18Même dans les laboratoires,
00:16:21ce tchador était obligatoire pour les femmes.
00:16:24C'était obligatoire pour les étudiantes iraniennes,
00:16:28alors même que j'étais étudiante en physique
00:16:30et que je n'étais pas...
00:16:34et que j'étais pas obligée de porter ce tchador.
00:16:36Ce que j'essaie de vous dire,
00:16:37c'est que la République islamique use de tous ses pouvoirs,
00:16:40de tous ses outils, de tous ses instruments
00:16:43pour imposer le voile obligatoire et réprimer les femmes.
00:16:47Et ces femmes ont payé le lourd prix,
00:16:50un prix sécuritaire,
00:16:54car elles ont été arrêtées de nombreuses fois,
00:16:57incarcérées dans des cellules d'isolement,
00:16:59elles ont été soumises à la torture.
00:17:03Même dans leur foyer, les femmes ne sont plus en sécurité.
00:17:10Les femmes ont payé un lourd prix,
00:17:12un lourd tribut.
00:17:14De nombreuses institutions culturelles
00:17:18et de médias ont été utilisées
00:17:20pour imposer cette pression sur les femmes
00:17:24et imposer le voile obligatoire.
00:17:29Contre ce type, contre ce système, contre ce régime,
00:17:32la lutte des femmes iraniennes...
00:17:36Les femmes iraniennes tiennent debout et continuent la lutte.
00:17:40Vous avez vu cette lutte dans le mouvement Femmes, Ville, Liberté,
00:17:44mais cette lutte est une des formes de la réalisation
00:17:48de cette lutte dans ces 46 dernières années.
00:17:52Je me souviens très bien lorsque nous avons lancé
00:17:55la campagne des 1 million de signatures
00:17:57pour mettre un terme aux lois discriminatoires en Iran
00:18:01et que nous avons mené cette lutte.
00:18:04Des femmes extrêmement nombreuses ont été arrêtées,
00:18:08ont subi des pressions.
00:18:11Cette voie n'a jamais été facile pour nous,
00:18:13pour les femmes iraniennes.
00:18:14Ca a été une voie pleine de sacrifices,
00:18:18mais malgré tout, les femmes iraniennes
00:18:21se tiennent encore debout.
00:18:25Si vous avez observé des évolutions
00:18:28dans la situation des femmes en Iran,
00:18:31elles ne sont pas dues aux réformes du régime,
00:18:34elles ne sont pas dues à l'évolution du régime.
00:18:36Elles sont toutes dues au courage et à la force
00:18:39des femmes iraniennes.
00:18:41Ce sont les femmes qui sont responsables
00:18:43de toutes les évolutions qu'elles arrachent
00:18:46à la République islamique
00:18:48et à tous les reculs de la République islamique.
00:18:51Vous pouvez actuellement voir dans toutes les rues
00:18:54des villes en Iran des femmes qui ne portent plus
00:18:57ce voile obligatoire.
00:19:02Il existe encore de nombreuses punitions
00:19:05pour ces femmes-là.
00:19:08La loi du voile obligatoire est encore en cours,
00:19:12mais les femmes continuent à lutter.
00:19:15Ces femmes sont punies, elles subissent des amendes,
00:19:18elles sont menacées.
00:19:21La République islamique crée des situations
00:19:25qui ne sont pas sécuritaires pour elles
00:19:27dans les rues, dans leur foyer.
00:19:31Concernant votre question sur Ahroud Alioui,
00:19:34cette étudiante, lorsque j'étais en prison,
00:19:37j'ai entendu les informations concernant Ahroud Alioui
00:19:41et j'ai publié une tribune, une déclaration.
00:19:45Lorsqu'Ahroud Alioui est entrée dans l'université,
00:19:48elle s'est retrouvée dans une situation
00:19:54de mise sous pression par les autorités de l'universitaire.
00:19:58En réponse à cette situation, elle se dénude
00:20:02et se balade devant et à l'intérieur
00:20:05de son université nue.
00:20:07J'ai vu ces images, j'ai vu ces images puissantes
00:20:10face à cette puissance, face à cette force.
00:20:14Alors, la République islamique,
00:20:20dans son objectif de réprimer tout type de contestation
00:20:25et dans son objectif de briser les femmes,
00:20:31a essayé de se venger de cette femme.
00:20:33Elle a fait interner en psychiatrie
00:20:35et malheureusement, elle sera internée
00:20:38pendant un très long moment
00:20:40et depuis, nous n'avons aucune information
00:20:44concernant sa situation.
00:20:46J'ai beaucoup demandé,
00:20:48mais je n'ai eu aucune information.
00:20:50Mais, chers représentants,
00:20:56j'aimerais beaucoup mettre un sujet sur la table
00:20:59entre défenseurs des droits humains et des droits des femmes.
00:21:06J'aimerais...
00:21:09J'espère, j'espère que vous serez en mesure
00:21:13de faire de la France un pays à l'avant-garde
00:21:16de la criminalisation de l'apartheid de genre.
00:21:19J'ai été incarcérée dans la prison des Vines,
00:21:22la prison de Zanjan.
00:21:24J'ai été retenue dans les cellules d'isolement
00:21:26du quartier 209 de la prison des Vines.
00:21:28J'y ai été témoin d'agressions sexuelles,
00:21:32du harcèlement sexuel des autorités.
00:21:36J'ai été témoin de l'enfermement
00:21:39des femmes contestataires
00:21:41dans des établissements et des hôpitaux psychiatriques.
00:21:45J'ai été témoin
00:21:48de leur internement.
00:21:53Je me souviens, il y a environ un an, un an et demi,
00:21:58j'ai rencontré une jeune femme dans la prison des Vines
00:22:02qui était sous pression des autorités
00:22:06pour donner un certain nombre d'informations.
00:22:08L'information qu'elle n'était pas prête à leur donner
00:22:11a été envoyée du jour au lendemain
00:22:13dans un établissement psychiatrique.
00:22:16Cette jeune fille, après son retour à la prison,
00:22:19a essayé deux fois de se suicider.
00:22:23Chacune de ces deux fois,
00:22:26en criant,
00:22:29je l'ai emmenée
00:22:33à l'infirmerie de la prison.
00:22:36Sur toute cette route, cette jeune fille me disait,
00:22:40je suis inquiète, je ne veux pas qu'ils m'envoient
00:22:43dans cet établissement à nouveau.
00:22:45Il m'électrocutait là-bas, il me donnait des médicaments
00:22:48qui me faisaient oublier les derniers jours.
00:22:50Je ne veux pas aller à cette prison, la prison d'Amin Abad.
00:22:53Je suis prête à mourir, mais à ne pas y retourner.
00:22:57Il existe des dizaines de témoignages similaires
00:23:01de femmes des prisons politiques
00:23:04aux prisons de doigts cumul à travers le pays.
00:23:07J'aimerais vous rappeler une femme du nom de Rouya,
00:23:10dans la ville de Tabriz, qui criait des slogans
00:23:13contre la République islamique et qui a été incarcérée,
00:23:16qui a été transférée dans un établissement psychiatrique.
00:23:20Son avocat a déclaré que cela a été illégal.
00:23:23Même cet avocat a été transféré
00:23:26dans un établissement psychiatrique.
00:23:29Les outils de la République islamique
00:23:32pour stopper les femmes contestataires
00:23:35sont des traitements inhumains,
00:23:38qui ont pour objectif de nous maintenir
00:23:42dans des cellules d'isolement, sous la torture blanche.
00:23:45Mais ce ne sont pas leurs seuls outils.
00:23:48Ce sont des outils de la République islamique
00:23:51qui ont pour objectif de nous maintenir
00:23:54dans des cellules d'isolement, sous la torture blanche.
00:23:57Mais ce ne sont pas leurs seuls outils.
00:24:00Ils utilisent également des méthodes de torture
00:24:04psychologique et mentale contre les femmes contestataires.
00:24:07Concernant la situation de Angou Daryoui,
00:24:10concernant cette femme qui a été arrêtée dans la ville de Tabriz,
00:24:13et concernant des dizaines d'autres femmes,
00:24:16anonymes, oubliées, qui ont peur
00:24:19et qui subissent des pressions,
00:24:22qui ne peuvent pas partager leurs témoignages,
00:24:26et même si elles m'ont partagé un certain nombre
00:24:29de leurs témoignages, m'ont demandé de rester anonyme,
00:24:32car elles avaient peur des risques, j'aimerais tout de même
00:24:35que le monde sache que la République islamique
00:24:38utilise des traitements dégradants
00:24:41et inhumains pour silencier les femmes
00:24:45et les citoyens contestataires en Iran.
00:24:48Concernant votre 3e question,
00:24:51concernant les risques que j'étais en train de prendre
00:24:54avec cette entrevue, j'aimerais vous répondre
00:24:57très simplement.
00:25:00Je suis une femme de 52 ans.
00:25:03J'ai 2 enfants,
00:25:07et ça fait 10 ans que je ne les ai pas vus.
00:25:10C'est la 10e année que je vis
00:25:13sous l'emprisonnement,
00:25:16et j'ai vécu de nombreuses années,
00:25:19même avant cela, d'emprisonnement.
00:25:22Je l'ai fait 9 fois jusqu'à aujourd'hui,
00:25:25et j'ai encore de nombreux procès en cours
00:25:29pour lesquels je serai très probablement condamnée.
00:25:40Je pense que nous sommes
00:25:43sur une route...
00:25:47Nous sommes arrivés à un point dans nos retours
00:25:50pour arriver à la démocratie, à la liberté, à l'égalité.
00:25:57Notre situation
00:26:00est une situation où on ira toujours en avant.
00:26:03On ne peut plus retourner en arrière.
00:26:06On se devra de défendre les revendications
00:26:08du peuple iranien. Pour moi, il n'y a aucune différence
00:26:11de ce côté ou de ce côté-là du mur de la prison.
00:26:14De chacun des côtés, je continuerai la lutte
00:26:17et je suis prête à en payer tous les risques.
00:26:21Je les paye déjà. Je continuerai la lutte
00:26:24de manière consciente de ces risques.
00:26:27Je vous remercie.
00:26:29Merci. Je vais passer la parole
00:26:31à notre collègue Olivia Richard,
00:26:34sénatrice des Français de l'étranger.
00:26:38Merci, madame la présidente. Bonjour, madame.
00:26:41Je suis Olivia Richard. Je représente les Français
00:26:44établis partout dans le monde, notamment en Iran.
00:26:47Je voulais vous dire à quel point vos déclarations
00:26:50sont bouleversantes, à quel point vous avez,
00:26:53et je pense ne pas être la seule, tout mon soutien.
00:26:56En écho à la question du président Perrin,
00:26:59on mesure, d'après ce que vous nous dites,
00:27:03la torture, le viol comme arme de terreur
00:27:06pour faire taire les femmes.
00:27:08On mesure tout le courage qui est le vôtre
00:27:12de nous parler aujourd'hui. J'aimerais vous en remercier.
00:27:15J'ai plusieurs questions, mais je ne vais pas trop m'attarder
00:27:18pour laisser aux autres l'occasion de vous parler.
00:27:21Nous avons eu l'occasion d'entendre une afghane
00:27:25à cette délégation au Sénat qui nous a décrit
00:27:28l'apartheid de genre qui est mis en place et notamment
00:27:31l'interdiction pour les femmes, les jeunes filles,
00:27:34d'accéder à l'instruction et à l'école,
00:27:37ce qui, malgré tout, les autres mesures effrayantes
00:27:40qui sont prises contre les femmes en Afghanistan
00:27:43et qui ont fait tout espoir de futur
00:27:46pour la moitié de la population de ce pays.
00:27:50Pouvez-vous nous décrire le quotidien des femmes iraniennes ?
00:27:53Pouvez-vous nous parler plus du rapport à l'école,
00:27:56de l'accès à l'instruction dans votre pays ?
00:27:59J'ai une 2e question. Vous avez été...
00:28:02Vous avez reçu le prix Nobel de la paix.
00:28:05Quel impact cela a-t-il eu pour vous ?
00:28:09Sentez-vous une différence dans la portée de votre message ?
00:28:12Et enfin, dans votre pays, madame,
00:28:15rencontrez-vous le soutien des hommes
00:28:18ou les femmes sont-elles seules à se battre ? Merci beaucoup.
00:28:21...
00:28:24...
00:28:27...
00:28:31...
00:28:34...
00:28:37Selon moi, la situation des femmes afghanes
00:28:42est une situation plus qu'inquiétante
00:28:45pour les femmes du monde entier.
00:28:48Voyez-vous, dans un monde
00:28:51où tout est devenu universel, où tout est mondialisé,
00:28:54et où au quotidien, vous êtes témoin
00:28:58de ces événements,
00:29:01nous, les femmes, devons lutter
00:29:04pour la mondialisation
00:29:07et l'universalité de l'égalité des femmes et des hommes.
00:29:10Il n'est pas possible
00:29:13qu'une partie des femmes dans certains pays
00:29:16se voient nier tous leurs droits humains
00:29:20et dans d'autres parties du monde,
00:29:23les femmes, d'autres femmes...
00:29:26...
00:29:29D'autres femmes les invisibilisent et les oublient.
00:29:32C'est pourquoi, à chaque fois que je parle des femmes afghanes,
00:29:35étant donné que je suis moi-même
00:29:39une femme du Moyen-Orient, une femme en Iran,
00:29:42une femme qui vit sous un système de tyrannie religieuse,
00:29:45je ne peux maintenir cette inquiétude
00:29:48au peuple iranien. Non.
00:29:51Nous toutes sommes inquiètes
00:29:55concernant les femmes afghanes. Elles font partie de nous.
00:29:58Elles font partie de notre lutte.
00:30:01Dès que j'entends que les femmes afghanes ne sont pas en mesure
00:30:04d'aller à l'école, je repense à ma propre fille
00:30:07qui y en a, qui va à l'école. C'est elle que je vois.
00:30:10...
00:30:14J'aurais espéré
00:30:17que toutes les femmes dans tous les pays,
00:30:20dans tous les coins du monde puissent,
00:30:23de manière tranquille, aller à l'école
00:30:26et construire leur vie et leur éducation.
00:30:30C'est pourquoi nous nous tenons aux côtés des femmes afghanes
00:30:33et nous avons une responsabilité à leur côté.
00:30:36Nous devons mener le travail pour reconnaître
00:30:39et criminaliser l'apartheid de genre,
00:30:42pour les soutenir dans leur lutte contre la domination
00:30:45et l'oppression et l'accès à leurs droits les plus fondamentaux
00:30:48et les droits des femmes. Concernant l'apartheid de genre
00:30:52en Iran, je devrais d'abord parler des lois.
00:30:55...
00:30:58Les législations ont un pouvoir extrêmement important
00:31:01dans la mise en place de la discrimination systématique
00:31:04contre les femmes en Iran.
00:31:07...
00:31:10Si on jette un oeil aux lois de la République islamique,
00:31:13...
00:31:17il s'avère que ces lois sont de manière fondamentale
00:31:20à l'encontre des femmes.
00:31:23Ces lois ont fondamentalement pour objectif
00:31:26d'invisibiliser les femmes dans la société,
00:31:29au foyer, à leur lieu de travail,
00:31:32dans les universités et encore plus dans les écoles.
00:31:36...
00:31:39Ajoutez à ces lois une religion obligatoire.
00:31:42Voyez quel pouvoir elles peuvent avoir sur les femmes.
00:31:45La République islamique utilise ces deux sources
00:31:48pour asseoir un apartheid de genre
00:31:51et une discrimination systématique et puissante
00:31:54contre les femmes en Iran.
00:31:58...
00:32:01A chaque fois que ces lois
00:32:04...
00:32:07Ces lois basées, prétentument basées,
00:32:11sur des lois religieuses,
00:32:14il s'avère que ce sont les droits des femmes
00:32:17qui sont niées.
00:32:20Et alors, la contestation contre ces lois discriminatoires
00:32:24devient alors une contestation contre Dieu.
00:32:27...
00:32:31...
00:32:34Voyez les expériences des femmes.
00:32:36Vous les avez probablement déjà vues.
00:32:38Vous avez probablement
00:32:41déjà entendu parler
00:32:43des exécutions des femmes dans les prisons de droit commun.
00:32:47...
00:32:50Lorsque j'ai été incarcérée dans la prison de Zanjan,
00:32:53j'ai été emprisonnée pendant plusieurs années avec une femme
00:32:56qui, en raison d'une relation
00:32:59...
00:33:02qui était considérée comme illicite,
00:33:05...
00:33:09a été pendue.
00:33:12Imaginez...
00:33:15Imaginez l'enfer qu'elle a dû vivre
00:33:18pendant les 9 années
00:33:21qui ont précédé sa pendaison, son exécution.
00:33:24...
00:33:28Il ne faut pas sous-estimer
00:33:31le pouvoir de la République islamique
00:33:34...
00:33:37Ce régime est en mesure d'utiliser tous les outils
00:33:40à sa disposition, la culture, les médias, la propagande,
00:33:43...
00:33:46...
00:33:50pour asservir les femmes
00:33:53et imposer des lois discriminatoires et patriarcales.
00:33:56...
00:33:59Et ils ont même utilisé le prétexte religieux
00:34:02pour créer un niveau d'oppression sur les femmes.
00:34:05Les jeunes filles de 6-7 ans qui vont à l'école,
00:34:08par exemple, qui a un homme à propre fille,
00:34:11quand elle avait 6 ans, je voulais l'envoyer à l'école.
00:34:15L'école a dit que le voile était obligatoire
00:34:18pour ma fille, il y a 6 ans.
00:34:21J'ai vécu exactement la même chose.
00:34:24On avait dit à ma mère de mettre un voile sur ma tête
00:34:27avant de m'envoyer à l'école.
00:34:30Ma mère, il y a plusieurs décennies,
00:34:33et mes interrogations,
00:34:37il y a quelques années,
00:34:40par rapport à la République islamique,
00:34:43étaient la même.
00:34:46Est-ce que vous ne dites pas
00:34:49que les femmes sont pubères dès 9 ans
00:34:52et doivent suivre les lois de la République islamique dès 9 ans ?
00:34:56Nous avons 6 ans. Nous n'avons même pas encore 9 ans.
00:34:59Pourquoi est-ce que nous sommes soumis à ces lois-là ?
00:35:03Pourquoi est-ce que vous pensez que cet événement a lieu ?
00:35:06Est-ce que vous pensez qu'ils sont inquiets
00:35:09du fait que l'on voit les cheveux sur la tête
00:35:12d'une jeune fille de 6 ans ? Non, pas du tout.
00:35:15Ils sont en train de mettre en place un mécanisme,
00:35:18un mécanisme systémique dans lequel la femme,
00:35:21dès son plus jeune âge, dès sa naissance presque,
00:35:25et jusqu'à sa mort,
00:35:28doit vivre sous la domination patriarcale
00:35:31et un système de discrimination systémique.
00:35:34La domination
00:35:37de ce système patriarcal
00:35:40doit être maintenue sur la tête des femmes
00:35:43de leur naissance à la mort.
00:35:47Et il ne faut pas le sous-estimer.
00:35:50Il ne faut pas sous-estimer ces petits éléments.
00:35:53Toutes les lois,
00:35:56tous les décrets,
00:35:59tous les amendements de la République islamique,
00:36:02actifs actuellement, tous les organes,
00:36:05toutes les institutions, toutes les universités
00:36:09sont des outils à cet effet.
00:36:12Encore aujourd'hui,
00:36:15le fait de chanter pour une femme est un crime.
00:36:18Il ne faut pas sous-estimer ce genre d'événement.
00:36:21C'est une manière d'invisibiliser les femmes.
00:36:25De séparer les femmes des hommes
00:36:28et pas de séparer,
00:36:32même d'inférioriser les femmes.
00:36:35Je n'ai pas pour objectif
00:36:38de prendre l'apartheid racial
00:36:41qui a déjà été reconnu
00:36:44et de l'appliquer aux femmes iraniennes.
00:36:47Moi, j'ai pour objectif
00:36:50de définir l'apartheid de genre.
00:36:54La vie quotidienne des femmes iraniennes,
00:36:57des femmes afghanes est une définition
00:37:00de l'apartheid de genre.
00:37:03Cette oppression quotidienne en Afghanistan
00:37:07où ils ont confisqué même le droit de vivre
00:37:10des femmes iraniennes et des femmes afghanes,
00:37:13je veux le montrer au reste du monde.
00:37:16Nous avons lutté pour définir
00:37:19l'apartheid de genre.
00:37:22Je veux le montrer, en témoigner
00:37:25et l'expliquer au reste du monde.
00:37:29Ca n'a pas été exempt de sacrifices pour nous.
00:37:32Il faut que vous l'entendiez.
00:37:35Si vous portez
00:37:38un intérêt aux prisons,
00:37:41même de droits communs en Iran,
00:37:44même celles desquelles on a le moins d'informations,
00:37:47même si certaines d'entre nous y ont été informées,
00:37:51même si certaines d'entre nous y ont été incarcérées,
00:37:54nous avons un certain nombre de leurs témoignages,
00:37:57il s'avère que ces femmes
00:38:00sont en énorme souffrance.
00:38:03Le temps est venu
00:38:06que le monde entier le voie
00:38:09et en témoigne.
00:38:12Concernant la dernière question, le prix Nobel,
00:38:15la récompense du prix Nobel de la paix,
00:38:18j'étais en prison quand j'ai entendu cette nouvelle.
00:38:21Et je ne peux pas dire que...
00:38:24...
00:38:29J'ai pu le célébrer
00:38:32avec les femmes prisonnières politiques
00:38:36de la section féminine de la prison des lignes.
00:38:39Les slogans femmes, vie, liberté
00:38:42ont été entendus si fort dans le quartier général
00:38:45de la prison des femmes des lignes.
00:38:48...
00:38:51Le son, le bonheur a été entendu
00:38:55et une des voix a été la mienne.
00:38:58...
00:39:01Je suis extrêmement honorée d'avoir été récompensée
00:39:04du prix Nobel de la paix, et ce, particulièrement après
00:39:07l'initiation du mouvement Femmes, Vie, Liberté,
00:39:10un mouvement incroyable qui est toujours en vie.
00:39:14...
00:39:17Et dans ce contexte, obtenir ce prix Nobel
00:39:21a été pour moi une manière d'honorer les femmes de mon pays,
00:39:24les femmes iraniennes qui ont lutté en Iran
00:39:27depuis les premiers jours de l'instauration
00:39:30de la République islamique et qui ont sacrifié leur vie.
00:39:33...
00:39:36Je les remercie et je leur suis reconnaissante.
00:39:40...
00:39:43Et je continuerai cette lutte jusqu'à ce que l'oppression
00:39:46des femmes iraniennes disparaisse à tout jamais.
00:39:49Cela fait maintenant un an,
00:39:52depuis la récompense du prix Nobel,
00:39:55que j'ai été interdite de contact téléphonique
00:39:59de manière complète.
00:40:02Je n'ai même pas eu l'occasion de parler à mon père,
00:40:05et 3 mois après avoir perdu mes droits téléphoniques,
00:40:08mon père a perdu la vie,
00:40:11et je n'ai même pas été autorisée à me rendre à son enterrement,
00:40:14malgré mes demandes répétées.
00:40:18...
00:40:21Je n'ai pas non plus accepté de porter le voile.
00:40:24J'ai continué à publier des tribunes et des déclarations,
00:40:27et petit à petit, j'ai perdu de nombreux autres droits,
00:40:30notamment l'accès aux services de santé.
00:40:33J'avais besoin de faire une angiographie,
00:40:36je n'ai pas été autorisée.
00:40:40Mais ces sacrifices, en comparaison
00:40:43avec les sacrifices que les femmes et les hommes d'Iran
00:40:46paient dans les rues du pays
00:40:49au cours des mouvements contestatoires
00:40:52des 46 dernières années, notamment Femmes, Vie, Liberté,
00:40:55est insignifiant.
00:40:59Je suis entièrement reconnaissante
00:41:02de leurs sacrifices.
00:41:05La dernière question, le soutien des femmes aux hommes en Iran.
00:41:08...
00:41:11La société iranienne est très diverse.
00:41:15...
00:41:18Mais unie.
00:41:21Les hommes sont présents dans les manifestations,
00:41:24dans les rues, soutiennent les femmes.
00:41:27Mais ne serait-ce que dans les 45 dernières années
00:41:30où je suis en permission,
00:41:34et à travers les discussions que j'ai eues,
00:41:37avec les différentes couches de la société,
00:41:40...
00:41:43je suis témoin du soutien des hommes
00:41:46envers les femmes iraniennes.
00:41:49Et j'en suis extrêmement fière.
00:41:52...
00:41:56Témoin d'un soutien considérable.
00:41:59...
00:42:02Et je leur rends honneur pour ce soutien inébranlable.
00:42:06Merci beaucoup. Je vais passer la parole à la présidente
00:42:09Véronique Riotton, et ensuite, ça sera Laurence Rossignol
00:42:12et Marie Mercier, et d'autres, bien entendu.
00:42:17Merci, madame la présidente. Pardonnez-moi,
00:42:20parce que je devrais vous quitter aux alentours de 10h.
00:42:23C'est la raison pour laquelle je vous pose une question.
00:42:27Vous voulez définir l'apartheid de genre.
00:42:30Nous avons évidemment tout à fait entendu.
00:42:33Dans vos propos liminaires, vous avez questionné,
00:42:36finalement, à travers la voix du Sénat et de l'Assemblée nationale,
00:42:39le gouvernement à mettre la pression contre le régime.
00:42:42Or, quelques initiatives ont déjà été faites
00:42:45au niveau international.
00:42:48Le président de la République a dénoncé, le mois dernier,
00:42:51dans la conférence des ambassadeurs, l'Iran
00:42:54comme une des principales menaces de la région pour l'Occident.
00:42:57L'Iran est également sanctionné par l'Union européenne,
00:43:00ses Etats membres, et finalement...
00:43:03Ah ben, elle n'est plus en ligne.
00:43:06Euh... Voilà.
00:43:09Je me tourne vers vous, madame Ardakani.
00:43:13Ma question, ce serait de dire,
00:43:16finalement, dans l'histoire,
00:43:19la pression économique sur l'Iran,
00:43:22puis la crise nucléaire, a permis de sortir
00:43:25de cette situation-là.
00:43:27Que pensez-vous des conditions actuelles
00:43:31pour que l'histoire se répète face à cette libération ?
00:43:34C'est-à-dire que vous avez ici
00:43:37des parlementaires engagés,
00:43:40vous avez des gouvernements occidentaux
00:43:43qui mettent la pression. De votre point de vue,
00:43:46quelles seront les actions efficaces
00:43:50pour faire le changement, en fait, de la situation en Iran ?
00:43:53Je ne sais pas si on m'entend.
00:43:56Je ne sais pas si on m'entend. Je vous remercie.
00:43:59Peut-être un propos liminaire pour expliquer
00:44:02ce qui vient de se passer. On n'est évidemment pas dupes
00:44:05de ce qui se passe en Iran. La connexion coupe
00:44:08précisément à un point qui est particulièrement délicat
00:44:12pour les autorités iraniennes. Il faut bien comprendre
00:44:15le contexte dans lequel intervient cette audition.
00:44:18C'est-à-dire qu'on a une femme qui est prix Nobel de la paix,
00:44:21que j'ai le plaisir de représenter pour être son avocate.
00:44:24Évidemment, elle a une permission de sortir de quelques jours.
00:44:27Elle est sortie le 4 décembre dernier
00:44:30pour raisons médicales graves, puisqu'en réalité,
00:44:33il y a aussi un refus systématique de prodiguer des soins
00:44:37aux femmes prisonnières politiques qui a fait que Narges Mohammadi
00:44:40a pu sortir quelques semaines pour avoir à se trouver
00:44:43aujourd'hui parmi nous. Evidemment que ces connexions-là
00:44:46sont aléatoires parce que le régime iranien utilise la censure.
00:44:49Elle est rendue possible grâce à la formidable mobilisation
00:44:52d'un certain nombre de personnes qui en iront au péril
00:44:55d'ailleurs de leur propre vie, organisent cette audition
00:44:59en mettant en place un système de contournement, des VPN
00:45:02pour justement pallier la censure du gouvernement.
00:45:05Et le simple fait, par exemple, pour moi qui suis une binationale,
00:45:08de me retrouver aujourd'hui devant vous fait qu'effectivement,
00:45:11je ne pourrai à la fois jamais retourner en République islamique
00:45:14mais aussi que mes proches sont également en danger.
00:45:18C'est dans ces conditions qu'on recueille aujourd'hui
00:45:21la parole de Narges Mohammadi.
00:45:23Il n'y a rien qui ne se paye pas en République islamique
00:45:26et pour même tenir aujourd'hui cette réunion,
00:45:29ce sont les sacrifices des uns et des autres.
00:45:32On est obligés de pallier le direct, c'est toujours comme ça
00:45:35quand on milite en Iran. Les militants défenseurs
00:45:38des droits humains, des femmes, ont l'habitude de devoir
00:45:41s'auto-organiser et on avait prévu que je sois là en plan B
00:45:44si jamais la connexion, de façon tout à fait fortuite,
00:45:47était amenée sur un point sensible à se couper.
00:45:51C'est ce qui se passe. Je vais essayer de vous répondre
00:45:54bien modestement car je ne suis pas le prix Nobel de la paix,
00:45:57je ne suis qu'une pâle copie, mais qu'est-ce que je peux vous dire ?
00:46:00Narges Mohammadi, ce qu'elle demande, c'est une mobilisation
00:46:03de tous les canaux possibles. On sait que la diplomatie
00:46:06parlementaire est un canal puissant. D'ailleurs, le président
00:46:09de la délégation des affaires étrangères le disait tout à l'heure,
00:46:13il y a un certain nombre de rencontres bilatérales
00:46:16aujourd'hui qui sont faites. Et qu'est-ce que cherchent
00:46:19aujourd'hui les autorités iraniennes ? C'est de se normaliser,
00:46:22c'est de montrer que ce serait un régime avec lequel, finalement,
00:46:25les négociations sont possibles, que ce serait un régime
00:46:28qui ne serait pas le même régime qu'auparavant,
00:46:32qu'on a un président qui serait un président réformateur...
00:46:35Ah, pardonnez-moi, je ne sais pas si la connexion est revenue.
00:46:38Je vais laisser la parole à Narges Mohammadi
00:46:41et c'est fort heureux. Je vois qu'on a de nouveau
00:46:44une connexion. Narges Jeanne, je vous en prie,
00:46:47c'est à vous.
00:46:49Elle a bien entendu ?
00:46:52Oui.
00:46:53Vous aviez entendu la question, hein ?
00:46:56Je pense que vous aviez entendu la question, madame...
00:46:59Ah, non. On va essayer de faire...
00:47:01Non, elle n'a pas entendu. Ah, pardon.
00:47:03Excusez-moi.
00:47:05En quelques mots, je disais que nous avions bien entendu
00:47:08votre définition de l'apartheid de genre, que pour autant,
00:47:11vous demandiez finalement au gouvernement
00:47:15à travers notre voix de mettre la pression
00:47:18sur la République islamiste, et l'histoire a montré
00:47:22que finalement, les sanctions économiques
00:47:25que nous connaissons encore actuellement
00:47:28contre l'Iran ont permis finalement que les choses bougent.
00:47:33Ma question, c'est, est-ce que vous pensez
00:47:35qu'aujourd'hui, les conditions de sanctions économiques
00:47:38pourraient être suffisantes pour que les choses changent
00:47:42en Iran ?
00:47:44...
00:47:50...
00:47:51...
00:47:52...
00:47:53...
00:47:55...
00:47:56...
00:47:57...
00:47:58...
00:47:59...
00:48:00...
00:48:02...
00:48:03...
00:48:04...
00:48:05...
00:48:06Il existe de nombreux mécanismes qui pourraient permettre
00:48:09de mettre un terme à la République islamique,
00:48:12et je suis de tout coeur avec chacun de ces mécanismes.
00:48:17...
00:48:18...
00:48:19...
00:48:20...
00:48:21...
00:48:22...
00:48:24...
00:48:25...
00:48:26...
00:48:27...
00:48:28...
00:48:29...
00:48:31...
00:48:32...
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00:48:40...
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00:48:43...
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00:49:11...
00:49:12...
00:49:14...
00:49:15...
00:49:16...
00:49:17Ils ont arrêté les militants, les activistes.
00:49:20Ils les ont incarcérés.
00:49:25Et cela permet de réprimer un des droits fondamentaux
00:49:29inaléables du peuple iranien, celui de se rassembler.
00:49:34...
00:49:36...
00:49:37pour mettre un terme aux systèmes tyranniques et religieux
00:49:41et mettre un terme à la République islamique.
00:49:44Nous avons besoin de redonner le pouvoir aux perps iraniens,
00:49:47le peuple qui est en train de lutter,
00:49:53à travers toutes les couches de la société,
00:49:55dans toutes les villes du pays,
00:49:57les enseignants, les ouvriers, les étudiants,
00:50:01les défenseurs des droits humains,
00:50:03les défenseurs de l'environnement, tous, même les retraités.
00:50:07Les couches les plus faibles de la société, même.
00:50:13Les employés, même, gouvernementaux,
00:50:16ont pris les rues pour montrer leur contestation.
00:50:20La réalité, c'est que nous avons besoin
00:50:25d'institutions civiles fortes pour pouvoir les organiser.
00:50:29La société iranienne est une société très différente
00:50:34d'autres pays dans la région.
00:50:36C'est une société civile extrêmement forte.
00:50:39Pour en arriver à la démocratie, à la liberté, à l'égalité,
00:50:44ils ont fait preuve d'énormément de sacrifices.
00:50:48Mais de la même manière, les manifestants et les opposants
00:50:52ont fait preuve d'énormément de sacrifices.
00:50:55De la même manière, les manifestants et les opposants
00:50:59ne s'arrêtent pas.
00:51:00La République islamique ne s'arrêtera pas non plus.
00:51:04Pendant les 30 dernières années, à travers mon militantisme,
00:51:08je me souviens, j'ai participé à tel groupe ou tel groupe.
00:51:12Aucune de ces institutions, aucun de ces organes,
00:51:15aucun de ces groupes n'a survécu, la République islamique.
00:51:19Le comité de défense pour la défense des droits humains
00:51:23était une organisation non gouvernementale
00:51:26qui défendait les droits humains et qui, à mon sens,
00:51:29était en train d'effectuer un travail avant-gardiste
00:51:33et extrêmement important pour défendre les droits humains en Iran,
00:51:37pour garantir les droits humains en Iran.
00:51:43Mais nous n'avons pas eu le soutien international escompté
00:51:47et nous en avons besoin aujourd'hui.
00:51:49Quand nous les avons obtenus, nous avons pu aller de l'avant.
00:51:53Si le soutien international des droits humains...
00:52:01Si nous obtenons ce soutien international et si nous...
00:52:05Nous sommes en train de l'obtenir actuellement,
00:52:06mais si, sans ce soutien,
00:52:10nos avancées deviendraient extrêmement compliquées en Iran.
00:52:13Pour garantir les droits humains en Iran,
00:52:15pour garantir les droits des femmes en Iran,
00:52:19nous avons besoin d'institutions civiles fortes
00:52:25à l'intérieur de l'Iran
00:52:28et du soutien international dans ce sens,
00:52:33pour que nous puissions arriver aux droits humains.
00:52:39Par conséquent, ce que j'aimerais dire,
00:52:41c'est qu'en parallèle des mécanismes internationaux,
00:52:45tels que les sanctions internationales,
00:52:47la compétence universelle,
00:52:49qui, selon moi, sont très utiles et sont à poursuivre,
00:52:54sont des efforts qui sont à poursuivre,
00:52:58car ils auront un vrai impact sur le peuple,
00:53:00nous devons également avoir un travail fort
00:53:04de la société civile en Iran.
00:53:06Le peuple iranien doit pouvoir s'exprimer
00:53:09dans des institutions civiles fortes
00:53:11que vous connaissez en Europe, que vous connaissez en France,
00:53:15dont vous connaissez les apports,
00:53:19car vous l'expérimentez au quotidien.
00:53:22Evidemment, aucune société ne pourrait se maintenir
00:53:27sans institutions civiles fortes.
00:53:30C'est pourquoi j'aimerais insister sur le fait
00:53:34que si on peut pousser à la mise en place de ces institutions,
00:53:39alors je pense que nous pourrons être plus fortes.
00:53:45Pour mettre en place ce type d'institutions,
00:53:49nous avons besoin d'un soutien international.
00:54:02J'ai entendu des informations ces derniers jours,
00:54:06notamment concernant les condamnations
00:54:12des enseignants en Iran
00:54:15qui travaillaient dans certaines organisations,
00:54:18et je pense que,
00:54:24à partir du moment où la société est en mesure
00:54:28de contester ces événements-là,
00:54:31alors c'est une première étape pour la mise en place
00:54:34d'organisations et de la société civile.
00:54:37J'aimerais d'ailleurs déclarer tout de suite
00:54:39que le Comité de défense des droits humains en Iran
00:54:43est une organisation non gouvernementale, légale,
00:54:50mais que la République islamique a tenté de silencier
00:54:55et d'invisibiliser.
00:55:01Tous les membres de cette organisation
00:55:04ont subi des pressions, ont été emprisonnés.
00:55:07D'ailleurs, ma camarade, Mme Shirinevadi,
00:55:11également récipiendaire du prix Nobel de la paix,
00:55:14a été obligée à l'exil.
00:55:18Il est arrivé le temps que ce comité, cette organisation,
00:55:24se reconstitue avec un bureau, avec un conseil d'administration
00:55:27au sein de Téhéran
00:55:29et continue son travail pour la défense des droits humains,
00:55:33et c'est dans ces objectifs-là que je demande votre soutien.
00:55:38Merci beaucoup.
00:55:39Je vais passer la parole à...
00:55:41Je vais prendre deux questions, peut-être.
00:55:43Je vais passer la parole à notre collègue Laurence Rossignol
00:55:46et ensuite Marie Mercier.
00:55:49Pardon. Merci. Bonjour, madame.
00:55:51D'abord, je voulais vous dire
00:55:52à quel point nous sommes à la fois émus
00:55:56de cette rencontre ce matin,
00:55:57parce que nous savons les risques que vous prenez
00:56:01en parlant avec nous, ce qui n'est pas notre cas.
00:56:03Bien entendu, il faut toujours se rappeler
00:56:05que dans le combat féministe mondial,
00:56:08on ne se bat pas toutes avec les mêmes armes
00:56:10et les mêmes risques.
00:56:12Je voulais insister et répondre à votre interpellation
00:56:16sur la reconnaissance du concept d'apartheid de genre.
00:56:20Et bien en préciser, le contenu,
00:56:23ce n'est pas un concept flou.
00:56:28C'est un concept très sérieux
00:56:30qui permet de désigner les systèmes politiques
00:56:34qui ont légalement organisé les discriminations
00:56:39et les atteintes aux droits fondamentaux des femmes.
00:56:42Et la reconnaissance de ce concept,
00:56:44moi, je ne parle pas au nom du gouvernement français.
00:56:46Ça va, la traduction ? Je ne parle pas trop vite.
00:56:48Je ne parle pas au nom du gouvernement français,
00:56:50mais la reconnaissance au droit international
00:56:55de l'apartheid de genre
00:56:57est aujourd'hui déterminant,
00:56:59d'abord pour les femmes d'Iran et d'Afghanistan,
00:57:03qui en sont malheureusement les victimes les plus emblématiques.
00:57:06Mais ce concept est un concept subversif
00:57:10dans de nombreux pays.
00:57:12Puisque je voulais échanger avec vous aussi
00:57:16sur le fait que nous vivons actuellement
00:57:18une attaque assez...
00:57:21Je crois qu'on est encore coupé, mais je vais parler pour Chirine.
00:57:24Une attaque assez...
00:57:27Une attaque majeure contre les droits des femmes.
00:57:31Et cette attaque passe par l'atteinte
00:57:33aux droits sexuels et reproductifs dans les démocraties.
00:57:36Donc notre combat est un combat international
00:57:39et internationaliste.
00:57:42Je voulais poser la question à Narjesque,
00:57:45savoir où est-ce qu'elle identifiait ses points d'appui
00:57:49sur la scène internationale
00:57:51et comment, nous, on peut contribuer
00:57:55aussi à renforcer ce mouvement de la société civile,
00:57:59puisque c'est un peu compliqué depuis la France,
00:58:03d'apporter l'appui à la société civile iranienne
00:58:11et savoir aussi comment elle appréhendait
00:58:15les nouveaux enjeux géopolitiques de la planète
00:58:19en ce qui concerne l'évolution de l'Iran.
00:58:23Puisque si je comprends bien quand même,
00:58:25la chute du gouvernement de la République islamique
00:58:28est une condition à l'émancipation
00:58:31et aux droits des femmes en Iran.
00:58:33Je ne crois pas que ce régime soit réformable,
00:58:35de près, ce que je comprends de ce qu'elle dit.
00:58:37Voilà.
00:58:38Merci beaucoup, chers collègues.
00:58:41Je vais désormais passer la parole à Marie Mercier
00:58:43pour sa question et ensuite, je vous laisserai répondre.
00:58:45Merci.
00:58:46Oui, je voulais faire part aussi de notre respect,
00:58:48de notre admiration
00:58:51et poser une question très pratique
00:58:53d'organisation du quotidien en médecine,
00:58:55en matière de santé.
00:58:58Y a-t-il des femmes médecins ?
00:59:00Peuvent-elles prendre en charge des patients masculins ?
00:59:02Est-ce que les hommes médecins
00:59:04s'occupent des patientes ?
00:59:07Comment ça s'organise ?
00:59:09Et ma 2e remarque, en fait,
00:59:11j'aimerais savoir son sentiment.
00:59:13Le port du voile est vraiment un signe de domination.
00:59:17On a compris ça,
00:59:20que c'était quasi un signe d'aliénation.
00:59:22Qu'est-ce qu'elle dirait aux jeunes filles
00:59:24qui, chez nous,
00:59:27choisissent de porter le voile
00:59:29justement au signe de liberté ?
00:59:31Je suis libre de porter le voile.
00:59:33Quelle serait sa parole pour ces jeunes filles ?
00:59:35Merci beaucoup.
00:59:38Je vous laisse répondre
00:59:40en attendant que Narges...
00:59:42Evidemment, je ne peux pas me substituer
00:59:44à sa parole, mais peut-être pour répondre
00:59:46à madame la sénatrice Rossignol.
00:59:50Merci déjà de votre soutien.
00:59:52Sur l'apartheid des gens,
00:59:54ce qu'on pourrait attendre
00:59:56comme point d'appui,
00:59:58évidemment, je parlais tout à l'heure
01:00:00de la diplomatie parlementaire.
01:00:03Moi, j'y crois vraiment.
01:00:05Je pense que les parlementaires,
01:00:07sénateurs ou députés,
01:00:09peuvent parfois prendre des initiatives.
01:00:11Je sais qu'il y a eu une résolution
01:00:14qui a été votée à l'initiative du Sénat.
01:00:16Je sais qu'il y a un projet de résolution
01:00:18similaire à l'Assemblée nationale.
01:00:21C'est de faire un travail d'avant-garde.
01:00:23C'est de dire que l'apartheid de genre,
01:00:25comme le disait madame la sénatrice Rossignol,
01:00:27ce n'est pas un concept flou.
01:00:29C'est un concept qu'on appelle de nouveau
01:00:32à faire inscrire dans le droit international.
01:00:34Aujourd'hui, on le voit.
01:00:36Quand on est du côté du respect
01:00:38de l'état de droit international,
01:00:40il faut un certain nombre
01:00:43de nouvelles criminalisations.
01:00:45Quand on assujettit des femmes
01:00:47dans certains endroits du monde,
01:00:49comme le cas des afghanes et des iraniennes,
01:00:51il y a des menaces qui pèsent aujourd'hui
01:00:54à bien d'autres endroits du monde.
01:00:56Il ne s'agit pas de faire une comparaison
01:00:58qui serait évidemment ridicule
01:01:00entre les iraniennes, les afghanes et d'autres femmes
01:01:02qui peuvent par moments subir,
01:01:05mais là encore, il faut être vigilant,
01:01:07des attaques sur leurs droits reproductifs,
01:01:09sur leurs droits sexuels.
01:01:11Parfois, on voit que ça commence comme ça.
01:01:13C'est ce que disait Narges Mohammadi.
01:01:16On s'attaque d'abord aux droits des femmes
01:01:18et plus largement à la démocratie.
01:01:20C'est cet état de vigilance
01:01:22que rappelle Narges Mohammadi
01:01:24et ce qu'elle demande à la diplomatie parlementaire,
01:01:27c'est de mobiliser les parlements nationaux
01:01:29sur ces questions-là,
01:01:31parce que parfois, les parlementaires sont plus libres
01:01:33de leur parole et aussi parce qu'il y a
01:01:35un effet domino et c'est de rappeler au gouvernement
01:01:38qu'ils ont une place
01:01:40dans le banc des nations.
01:01:42Quand nos ambassadeurs de France
01:01:44à la représentation permanente,
01:01:46d'ailleurs, nous avons eu une entrevue avec Mme Isabelle Rohm,
01:01:48qui nous a d'ailleurs beaucoup soutenues
01:01:51dans ce combat-là, d'aller
01:01:53sur la place des Nations Unies, rappeler
01:01:55que oui, on ne peut pas assujettir les femmes,
01:01:57on ne peut pas les lapider en place publique
01:01:59et qu'effectivement, il faut que ça rentre
01:02:02parmi les crimes contre l'humanité
01:02:04et il faut qu'un jour, les persécuteurs
01:02:06rendent compte devant qui ?
01:02:08Devant des juridictions internationales
01:02:10parce qu'il n'y a pas d'état du droit
01:02:13s'il n'y a pas la fin de l'impunité
01:02:15de ces états bourreaux à l'encontre des femmes
01:02:17et donc c'est ce que demande Narges Mohammadi,
01:02:19c'est faire en sorte d'inscrire
01:02:21dans le droit positif international
01:02:24une notion qui n'existe pas aujourd'hui.
01:02:26On a d'autres outils juridiques
01:02:28dans la Convention de Rome et le statut de Rome,
01:02:30on a effectivement reconnu les persécutions
01:02:32à raison du genre, mais aujourd'hui,
01:02:35il n'y a pas de notion d'apartheid de genre.
01:02:37Qu'est-ce que ça veut dire, l'apartheid de genre ?
01:02:39C'est dire qu'il y a finalement, de la même façon
01:02:41qu'il y avait au XIXe, au XXe siècle,
01:02:44des résidus d'apartheid fondés sur la race,
01:02:46eh bien aujourd'hui, des états qui utilisent la loi
01:02:48comme étant des lois de ségrégation
01:02:51à raison du genre, c'est-à-dire de considérer
01:02:53qu'il y a finalement un groupe
01:02:55qui domine par la loi sur l'autre
01:02:57en assujettissant les femmes
01:02:59dans tous les domaines de leur vie civile,
01:03:02économique, sociale, et que juridiquement,
01:03:04elles sont infériorisées.
01:03:06Voilà, donc c'est une exigence de justice
01:03:08et donc ça suppose un travail de plaidoyer
01:03:10et je crois que cette discussion
01:03:12et je crois que cette diplomatie parlementaire
01:03:15peut être un premier point d'appui
01:03:17dans le cadre de cette diplomatie forte
01:03:19qu'on appelle la diplomatie des droits humains.
01:03:21Là encore, je crois que ce n'est pas un vœu pieux,
01:03:23je crois que ce n'est pas une démarche d'utopiste
01:03:26d'appeler à cela.
01:03:28Alors le deuxième élément, pour aller très vite,
01:03:30comment est-ce qu'on peut d'ici,
01:03:32parce que vous le disiez, on est un peu loin,
01:03:34pour appuyer les mouvements de la société civile ?
01:03:37Parce que ce que disait Narges Muhammadi,
01:03:39c'est que notre combat ici, c'est un peu comme à l'époque,
01:03:41Nelson Mandela, quand il arrivait,
01:03:44il se battait depuis sa prison, son cachot politique
01:03:46et quand il arrivait, il avait mis en place
01:03:48un certain nombre de mouvements
01:03:50qui étaient des mouvements de droit civique,
01:03:52de résistance évidemment pacifique,
01:03:55parce que c'est aussi ce que dit Narges Muhammadi,
01:03:57la force des femmes organisées, c'est aussi
01:03:59donc une démarche légaliste, une démarche de droit humain,
01:04:01mais aussi pacifiste, c'est pour une transition,
01:04:03pas par la violence, pas par les armes.
01:04:06Le peuple iranien, il ne demande pas à être bombardé,
01:04:08il ne demande pas à être libéré
01:04:10par la violence et par la force,
01:04:12c'est par la transition démocratique,
01:04:14pacifiste, légaliste.
01:04:16Et ce qu'elle nous dit, c'est qu'il y a des mouvements
01:04:19aujourd'hui de la société civile, il y a des mouvements
01:04:21de droit des femmes, il y a des mouvements
01:04:23sociaux, il y a des mouvements,
01:04:25elle le disait, d'enseignants,
01:04:27mais le problème, c'est que quand vous avez
01:04:30une répression, pas de liberté d'association
01:04:32et effectivement, on l'a vu pendant deux ans,
01:04:34le mouvement Femmes et Libertés,
01:04:36des gens qui sont massivement arrêtés par milliers
01:04:38détenus dans des cachots politiques,
01:04:40ce qu'elle demande, c'est qu'on visibilise
01:04:43ces combats-là et que, précisément,
01:04:45cette tenue de cette réunion visibilise
01:04:47aujourd'hui le mouvement de la société civile.
01:04:49Et c'est donc de considérer aujourd'hui que le peuple
01:04:51iranien considère que le gouvernement de la République
01:04:54islamique n'est plus son représentant
01:04:56et qu'il se maintient par la force
01:04:58physique et la violence et qu'il faut
01:05:00donner des tribunes d'expression, y compris
01:05:02dans nos parlements, y compris par le biais
01:05:05de cette diplomatie un peu informelle,
01:05:07ces visages qui incarnent ces mouvements
01:05:09de la société civile. Et c'est par là,
01:05:11par la base, qu'on va pouvoir faire émerger
01:05:13une solution sans doute assise
01:05:16sur les mouvements de Droïm.
01:05:18Voilà, donc c'est un moyen, voilà,
01:05:20comme celui-là. Alors, sur la question concrète,
01:05:22bon, évidemment, moi, je pourrais pas vous répondre
01:05:24avec la précision de Narges.Mahdi, puisque
01:05:27je suis ici, j'ai grandi ici, fort heureusement
01:05:29pour moi, parce que j'ai une mère qui a eu
01:05:31le courage de mettre à l'abri
01:05:33ses filles, qu'elle ne voulait pas
01:05:36voir grandir ni naître
01:05:38en Iran. Alors, j'ai eu cette chance-là,
01:05:40mais effectivement, il y a un vrai péril
01:05:42aujourd'hui sur la santé des femmes. Alors, il n'est pas
01:05:44de même nature que celui en Afghanistan, puisque
01:05:47les femmes en Afghanistan ne peuvent plus
01:05:49être soignées, donc en définitive, elles sont
01:05:51condamnées à la mort. En Iran, c'est quand même
01:05:53pas pareil. On a des femmes qui sont
01:05:55médecins, on a des femmes qui sont soignantes.
01:05:58De plus en plus, les femmes qui sont soignantes
01:06:00et médecins, d'ailleurs, sont entravées
01:06:02dans leur outil professionnel. On leur permet
01:06:04de moins en moins, et puis alors, il y a
01:06:06un certain nombre à chaque fois de bureaucratie
01:06:08qui leur rend la vie impossible.
01:06:11Je laisse la parole à Mme Mohammadi,
01:06:13peut-être pour répondre précisément à cette question,
01:06:15et puis ensuite, peut-être à Mme Rossignol.
01:06:17Alors, je sais qu'à la cabine de traduction,
01:06:19peut-être qu'on peut lui faire
01:06:22un petit update sur les deux questions.
01:06:24Je fais un petit update, un instant.
01:06:26Merci beaucoup.
01:06:28Oui, c'est bon, c'est en train d'être fait.
01:06:30Mme Mohammadi, vous voulez juste, initialement,
01:06:32s'excuser de la qualité d'Internet en Iran,
01:06:37et vous priez, effectivement, de l'excuser
01:06:39en raison de ces petits problèmes techniques.
01:07:00que vous n'aviez pas eu les questions
01:07:03qui avaient été posées par nos collègues
01:07:06Laurence Rossignol et Marie Mercier.
01:07:09Il y avait une question, la dernière, notamment sur le voile
01:07:13et ces jeunes filles qui, par exemple, en France,
01:07:16portent le voile en signe de liberté.
01:07:19Qu'est-ce que vous leur diriez, aujourd'hui, vous, depuis l'Iran,
01:07:23où le voile est un signe d'oppression des femmes,
01:07:26un signe d'invibilisation des femmes ?
01:07:29Merci.
01:07:49Il y a de nombreuses discussions en Iran,
01:07:50même parmi les intellectuels, concernant le port du voile,
01:07:56mais la liberté de se vêtir,
01:08:01le choix de la manière de se vêtir
01:08:06fait partie d'un droit fondamental de tous les êtres humains.
01:08:13Lorsque nous, en Iran, nous parlons du voile obligatoire,
01:08:21de nombreuses personnes qui, elles-mêmes, en Iran,
01:08:23portent le voile par choix, portent le tchador,
01:08:26soutiennent notre combat.
01:08:33J'ai entendu de nombreux témoignages
01:08:35qui vont dans ce sens
01:08:40de la part de femmes
01:08:47qui indiquaient que des femmes voilées les ont défendues
01:08:50quand elles étaient dans les rues, quand elles manifestaient,
01:08:53quand elles se faisaient éventuellement arrêter
01:08:55par des gardes.
01:08:58Et donc...
01:09:04C'est pourquoi même les femmes qui croient en le voile
01:09:10ne défendent pas le voile obligatoire.
01:09:12Notre lutte est essentiellement contre l'obligation du voile,
01:09:17car elle nie les droits les plus fondamentaux
01:09:19des êtres humains à se vêtir.
01:09:23Je n'entends plus.
01:09:24Merci pour ce complément de réponses.
01:09:27Je vais prendre les 2 dernières questions.
01:09:30Monsieur... Pardon.
01:09:32C'est coupé.
01:09:33On va quand même poser les questions, on va poursuivre.
01:09:37Donc, M. Mathias Tavel, député,
01:09:41et M. Etienne Blanc, sénateur.
01:09:46Merci, madame la présidente.
01:09:49Je voulais...
01:09:50Est-ce que vous entendez ma voix ?
01:09:57Et c'est justement la lutte contre les lois d'obligation
01:10:00du voile obligatoire contre lesquelles nous nous battons.
01:10:06Car ces lois sont utilisées pour défendre les droits
01:10:10des femmes et des hommes.
01:10:13Et c'est justement la lutte contre les droits
01:10:16des femmes et des hommes.
01:10:17Ces lois sont utilisées pour la domination
01:10:21et la marginalisation d'une partie de la société.
01:10:23C'est pour ça que je suis contre le voile obligatoire
01:10:27et pour le choix de se vêtir de tous les êtres humains.
01:10:32Et je précise encore une fois que les hommes et les femmes
01:10:35qui constituent le peuple iranien
01:10:37se battent contre le voile obligatoire.
01:10:40Merci beaucoup pour ces précisions.
01:10:42Je vais passer la parole aux 2 intervenants suivants,
01:10:45qui sont, pardon,
01:10:47M. Mathias Tavel, qui est député,
01:10:49et M. Etienne Blanc, sénateur.
01:10:54Merci, madame la présidente.
01:10:56Je voulais d'abord dire l'émotion devant votre témoignage
01:11:00et puis saluer votre courage,
01:11:02celui de tous les Iraniens et toutes les Iraniennes
01:11:04qui luttent pour la liberté, pour la démocratie,
01:11:07contre cette tyrannie religieuse que vous avez dénoncée
01:11:11et pour la liberté, notamment des femmes,
01:11:14qui n'est pas seulement la liberté des femmes,
01:11:16mais qui est la liberté de toute l'humanité.
01:11:18Et je crois que c'est important, vous l'avez dit vous-même,
01:11:20de le souligner, et que cet apartheid de genre,
01:11:23c'est aussi une violence contre l'humanité des hommes
01:11:28et pas seulement des femmes,
01:11:29même si, évidemment, les femmes en sont les premières victimes.
01:11:32C'est une négation de ce que nous avons en commun
01:11:34en tant qu'êtres humains.
01:11:37Et l'universalité de cette bataille,
01:11:39je vous rejoins là-dessus également aussi.
01:11:41J'avais quelques questions peut-être plus concrètes.
01:11:45D'abord sur vous-même, votre santé,
01:11:47savoir comment vous allez
01:11:48et les perspectives qui sont devant vous
01:11:50pour les semaines qui viennent,
01:11:52et comment nous pouvons-nous aider aussi
01:11:54à ce que votre situation s'améliore.
01:11:57Ensuite, à combien de femmes emprisonnées
01:12:00vous pouvez estimer aujourd'hui les victimes de la répression
01:12:05par le régime iranien ?
01:12:07Et puis enfin, par rapport au mouvement
01:12:08Femmes, Vies, Libertés qu'on a évoqué
01:12:10et qui nous fait tant espérer,
01:12:14quelles sont les perspectives que vous voyez
01:12:16pour ce mouvement face à la répression ?
01:12:18Voilà, pour cette audition de la militante iranienne
01:12:21pour les droits des femmes et prix Nobel de la paix,
01:12:23Narges Mohammadi, je rappelle qu'elle s'exprimait
01:12:25devant la délégation aux droits des femmes
01:12:27et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes
01:12:29du Sénat et de l'Assemblée nationale.
01:12:32Vous pouvez retrouver son témoignage en intégralité
01:12:35sur notre site publicsenat.fr.