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Jean-Pierre Mercier, délégué SUD Stellantis à Poissy (Yvelines), invité d'ici Paris Île-de-France, le 12 février 2025.

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00:00C'était un fleuron de l'industrie francilienne mais voilà, aujourd'hui le secteur automobile est en perte de vitesse.
00:05Est-ce que ça vous inquiète ? Que faut-il faire ? Acheter par exemple plus de voitures françaises ?
00:10On attend vos réactions au 01 42 30 10 10 et à l'occasion de notre journée spéciale emploi et désindustrialisation,
00:17notre invité est une figure syndicale chez Stellantis à Poissy dans les Yvelines.
00:21Bonjour Jean-Pierre Mercier, délégué syndical chez SUD et pour vous, aucun suspens,
00:27l'usine Stellantis, ex-PSA à Poissy, va bel et bien fermer ? Vous avez même une échéance en tête ?
00:32Oui, deux ans, 2027-2028, déjà si on arrive à fin 2027, ça sera déjà bien.
00:39Mais oui, aucun suspens, il n'y a pas de nouveaux véhicules après l'Opel Mokka que nous fabriquons aujourd'hui.
00:44La DS3 Crossback va s'arrêter bien avant son terme, c'est-à-dire bien avant 2028, on n'en fabrique pas beaucoup.
00:51Et derrière, oui, c'est un gros problème des 2500 salariés qui restent aujourd'hui, ouvriers, techniciens, ingénieurs, cadres, sur leur avenir.
01:02Et la question qui se pose dans la tête de tous ces salariés, c'est qu'est-ce qu'on va devenir après la Mokka ?
01:07Justement, à qui la faute d'abord pour vous ?
01:10À la direction centrale de Stellantis, Carlos Tavares du temps où il était aux commandes,
01:15mais à la direction générale du groupe, bien sûr, avec toujours ce souci d'augmenter la rentabilité, d'augmenter la productivité,
01:24mais en le faisant avec la peau de l'ensemble des travailleurs et sur le dos de l'ensemble de la société.
01:31C'est eux qui sont vraiment les responsables, parce qu'on ne vend pas moins de voitures à l'échelle mondiale, c'est pas vrai.
01:37Par contre, il y a toujours cet appétit vorace des actionnaires d'en avoir plus.
01:43Jusqu'à maintenant, c'était 25% des bénéfices qui étaient donnés aux actionnaires, ils en demandent 30%.
01:51Et ces 5%, pour la direction, ils veulent les trouver à coût de licenciement, de suppression d'emploi et de fermeture d'usine.
01:59Vous n'en voulez pas au pouvoir public ?
02:01On a un président, par exemple, qui disait « j'aime la bagnole », et puis aujourd'hui on voit ce constat en Île-de-France.
02:06Bien sûr que j'en veux au pouvoir public, j'en veux à toutes ces politiques des différents gouvernements
02:10qui ont eu, comme seule politique, d'abord de donner des milliards d'argent public chez ces grands groupes industriels.
02:19Stellantis, c'est quand même près de 60 milliards en moins de 5 ans de bénéfices.
02:25Et puis c'est d'accompagner, de soutenir en toute complicité tous les plans de fermeture d'usine dans toute la filière automobile.
02:32Parce que quand un donneur d'ordre comme Stellantis décide d'augmenter sa rentabilité,
02:36ce n'est pas que les salariés du donneur d'ordre qui seront touchés, c'est les salariés des sous-traitants, Lierre, Valeo,
02:41il y a Plasticonium, il y a Forvia, on a autour de nous beaucoup de salariés qui se mobilisent
02:50pour défendre leur peau, pour défendre leur gain de pain, pour continuer à remplir le frigo à la fin du mois.
02:54Et vous en voulez aussi aux collectivités locales, peut-être, je ne sais pas, la région, même indirectement la mairie de Paris ?
03:00Oui, vous savez par expérience j'ai fait, j'ai vécu la fermeture de PSA Holnay, y compris celle de Saint-Ouen.
03:09Il y a à peu près 10 ans, enfin en tout cas aujourd'hui.
03:10Voilà, il y a 12 ans même maintenant, et on a eu les politiques à tous les niveaux, mairies, régions, départements et gouvernements bien évidemment, contre nous.
03:19Quand on s'est mobilisés justement pour défendre l'emploi, c'était la cause nationale, c'est toujours la cause nationale,
03:25on les avait contre nous. Ils sont toujours du côté des gros, du côté des actionnaires, du côté de ces grands capitaines d'industrie qu'on nomme,
03:34d'une manière assez mensongère, mais qui sont des liquidateurs d'emplois.
03:38Mais Jean-Pierre Mercier, il y a une réalité, c'est la concurrence chinoise, notamment sur l'électrique, ça c'est un constat, une réalité.
03:43Alors si on veut parler de la concurrence chinoise, vous avez Carlos Tavares qui avait acheté un constructeur chinois,
03:50Lipmotor, qui fabrique en Chine, en pièces détachées, et qui passe les frontières de l'Europe, qui sont montés dans une usine polonaise Fiat en Pologne,
04:01et qui va envahir le marché européen. Ça veut dire que c'est la famille Peugeot, la famille Agnelli, les actionnaires de Stellantis,
04:09qui utilisent cette concurrence chinoise, mais pour se remplir les poches.
04:12Mais est-ce qu'on a loupé en Ile-de-France le virage de l'électrique ? Est-ce qu'on a du retard ? Vous dites on n'a pas préparé l'après-mocha par exemple.
04:20Ce qu'ils préparent eux c'est la rentabilité, ce qu'ils préparent c'est les dividendes et les profits.
04:26Pas suffisamment préparer l'électrique, vous savez, ils se sont engouffrés, les capitalistes de l'automobile, les constructeurs d'automobiles,
04:35ils se sont engouffrés dans l'électrique parce que ça pouvait être un marché juteux, à coût de milliards d'argent public et de subventions publiques.
04:41Il y a une importance de la transition écologique quand même, il y a une importance de la transition écologique à ce niveau-là.
04:45Oui alors ça c'était le prétexte, parce qu'au fil des débats, au fil des années, on a compris que l'électrique c'était pas forcément si écologique que ça.
04:52Mais en tout cas quand c'est devenu beaucoup moins juteux ou que l'espoir de faire des bénéfices il est moins grand, ils font un rétro-pédalage.
05:00Et aujourd'hui dans les usines automobiles, à Poissy par exemple, on fabrique que 8% d'électrique, tout le reste c'est du thermique.
05:068h20 sur votre radio locale ici Paris Ile-de-France, journée spéciale emploi et désindustrialisation.
05:11On vous pose cette question ce matin, pensez-vous que la désindustrialisation automobile en Ile-de-France est inévitable ?
05:15Faut-il acheter des voitures françaises peut-être pour soutenir la filière ?
05:18Appelez-nous au 01 42 30 10 10, on a Denis d'ailleurs qui nous a laissé un message.
05:22On vante les mérites de la voiture électrique mais on aura toujours des soucis, car les voitures coûtent cher et les bornes de recharge aussi.
05:28Il faudrait qu'il y ait moins de normes et moins de taxes.
05:30Voilà le message que nous a laissé Denis Désiveline.
05:32Jean-Pierre Mercier, délégué syndical Sud-Cheste-et-Lantis, votre réaction ?
05:36Il faudrait qu'il y ait... Ce qui coûte cher dans la voiture, c'est pas les salaires des ouvriers.
05:41Je crois que ça fait maintenant la masse salariale d'une voiture, ça représente à peine 8%.
05:45Ce qui coûte cher, c'est les actionnaires.
05:47C'est les dividendes qu'on est obligé de verser à tous ces actionnaires.
05:52Et bien sûr qu'on pourrait diminuer le prix des voitures si les actionnaires étaient beaucoup moins gourmands.
05:58Mais vous savez, on est dans un système où c'est la concurrence, c'est la loi, c'est la concurrence, c'est la propriété privée, c'est le marché.
06:07Et là-dedans, c'est le consommateur ou le salarié qui sont piégés.
06:12Petit coup d'œil dans le rétroviseur, cette fermeture, on en parlait au Nez-sous-bois, l'usine PSA St-Lantis.
06:17Il y a la question des reclassements, ces salariés qui ont fait plusieurs usines, qui demandent des garanties aujourd'hui parce qu'ils ont peur à Poissy ?
06:23Bien sûr, ils sont inquiets sur l'avenir.
06:27Certains ont vécu la fermeture d'Aulnay, ils ont été reclassés à Saint-Ouen, Saint-Ouen a fermé, ils ont été reclassés à Poissy.
06:33Vous voyez un peu l'avis ?
06:35Et dans la tête, ça devient très compliqué. Et pour remplir le frigo, ça devient aussi très compliqué.
06:40Oui, la question que tout le monde se pose, c'est comment on va remplir le frigo après la mocha ?
06:45Et c'est aujourd'hui qu'on doit obtenir des garanties auprès de notre patron sur qu'est-ce qu'on va devenir en fonction de son âge, de sa situation personnelle et familiale.
06:54Pour les plus anciens, ça sera sans doute des systèmes de pré-retraite, mais pour les plus jeunes, et quand j'y ai le plus jeune, c'est des fois même 50, 52 ans, 53 ans, puisque l'âge de la retraite a été reculé.
07:05Et c'est d'avoir un CDI, continuer à avoir un CDI, et ça c'est l'obligation de l'employeur de le donner, et puis d'avoir des primes, des dénommagements, des supras légales qui sont incontournables.
07:15Poissy ferme, vous allez où ? On l'entendait dans l'info d'ici, les salariés disaient on va aller à Sochaux, on va aller à Rennes, on va aller ailleurs, pas en Ile-de-France en tout cas.
07:24J'ai pas encore fait mon choix, mais c'est certain que si je peux pas atteindre l'âge de la retraite, je serai reclassé dans une usine de silentis parce que j'arrêterai pas le combat contre la famille Peugeot.
07:33Continuez de nous appeler 0142 30 10 10, on a Pascal d'ailleurs qui est avec nous de TI dans les Yvelines.
07:38Bonjour Pascal, alors vous, vous êtes dans le milieu automobile justement, et pour vous, les voitures françaises, on est forcément en concurrence avec les voitures chinoises aussi, donc c'est compliqué quoi.
07:46Bah voilà, moi je sais que c'est 5 ans, 6 ans que j'ai une voiture électrique, donc une Tesla pour pas la nommer la première fois, parce qu'à l'époque on avait pas non plus forcément les voitures électriques qui pouvaient nous permettre de nous déplacer un petit peu partout en France.
07:59Bon maintenant, entre Peugeot et Renault, effectivement les voitures commencent à arriver. Le problème c'est le prix, et le prix aujourd'hui on ne sera jamais en concurrence avec les chinois.
08:08Quand vous voyez aujourd'hui que Renault, Peugeot, ils envoient les études, les études sur lesquelles on travaille pour la tollerie, la robotique, en Chine, en Inde, même nous actuellement en étant, comment dire, sous traitant, on a du mal aujourd'hui à s'en sortir.
08:21Donc le problème c'est aussi le prix des recharges. Quand vous voyez aujourd'hui que vous avez le prix qui est vendu entre 5 et 10 centimes le kWh et qui est revendu dans certaines stations à 0,85, c'est sûr que ça nous donne pas envie d'acheter une voiture électrique.
08:36C'est le problème aujourd'hui.
08:38Merci beaucoup Pascal pour votre réaction au 01-42-30-10. Merci.
08:43Jean-Pierre, merci. Votre réponse à Pascal. Une mesure, qu'est-ce qu'on fait ? Quelle est la solution ?
08:47La solution c'est, excusez-moi, mais ça va être toujours de prendre sur les profits gigantesques.
08:53Je rappelle quand même que l'année dernière Stellantis a fait 18,3 milliards de profits. Un record monumental, enfin historique.
09:01C'est près de 55 milliards de bénéfices qui ont été engrangés, accumulés.
09:05Et ça, ça se fait, il a raison le salarié, ça se fait sur le dos des salariés, des donneurs d'ordre, des sous-traitants.
09:13Et la seule politique des constructeurs c'est de mettre en concurrence les travailleurs, les uns contre les autres.
09:19Que ça soit donneurs d'ordre ou sous-traitants, mais que ça soit aussi les travailleurs en Chine, les travailleurs en France, en Europe.
09:25Et pour avoir la solution, ça serait d'avoir le même niveau de vie que les travailleurs en Chine.
09:31C'est juste pas possible. La seule solution, c'est de se battre pour défendre nos intérêts, nos salaires et nos emplois.
09:38Le message est passé, merci beaucoup Jean-Pierre, merci aux délégués syndicales chez SUD, Stellantis, Ex-PSA d'avoir été l'invité d'ici Paris-Ile-de-France pour notre journée spéciale emploi.

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