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Le rassemblement international organisé par la France s’est achevé mardi. Nos journalistes Elise Viniacourt et Amaelle Guiton reviennent sur les grands enseignements de ce Sommet de l’IA.

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00:00Macron qui répond à Trump, Musk qui veut racheter OpenAI, l'Union Européenne qui investit 200 milliards d'euros.
00:05Ces derniers jours, on n'a parlé que d'intelligence artificielle et de l'argent qui va avec au Grand Palais de Paris.
00:10Mais entre les passes d'armes et les grandes annonces, que faut-il vraiment retenir de ce sommet international de l'intelligence artificielle organisé par la France ?
00:18On en parle avec Élise Bignacourt et Amel Guiton, journalistes à Libération, spécialistes de l'IA.
00:23Elles étaient toutes les deux présentes à ce sommet.
00:25Pour comprendre un peu de quoi il s'agit, je pense que concrètement, ça peut être intéressant que tu nous racontes, toi, une anecdote, un moment qui t'a particulièrement marqué lors de ce sommet de l'IA.
00:35Moi, je crois que le moment qui m'a le plus marquée, parce qu'il a semblé vraiment très très long, c'était le premier soir, donc c'était le lundi soir au Grand Palais à Paris.
00:45Emmanuel Macron venait de terminer son discours et nous, les journalistes, pour vous expliquer, on nous avait mis un petit peu dans un espace un peu cadré, duquel on ne pouvait pas sortir.
00:54Et donc, suffisamment proche pour le voir et l'entendre, mais quand même assez loin pour ne pas l'embêter, entre guillemets.
01:00Et on voyait la foule autour de lui et donc, à ce moment-là, il était en train de faire des tours de piste et on ne le voyait pas très bien.
01:05On voyait juste la foule le suivre et donc, on comprenait qu'il était quelque part par là.
01:09Et en fait, on ne pouvait pas partir. On n'avait pas le droit de partir.
01:13Et donc, à ce moment-là, il y avait pas mal de musique techno et électro.
01:16En fait, c'était vraiment une ambiance de boîte de nuit et en même temps, c'était cerclé de grands écrans qui diffusaient des oeuvres d'art générées par l'intelligence artificielle.
01:26Et donc, moi, sur le moment où je plaisantais avec les confrères, j'ai l'impression d'être prise en otage par l'IA.
01:30Mais je trouve que c'est assez représentatif de ce sommet-là, le côté un petit peu grosse fiesta de l'IA, à laquelle on ne peut pas échapper, finalement.
01:39Et puis de l'attitude de Macron, on aura l'occasion d'en parler.
01:42C'est notamment Amal Guitton qui l'écrit dans son papier récit qui revient sur ces deux jours.
01:46Elle dit que quand on regarde l'attitude de Macron lors de ce sommet, on voit et on comprend qu'est-ce qu'il aime ça.
01:52Il a un rapport à l'intelligence artificielle où il est assez fasciné.
01:55On voit aussi son excitation par rapport à ça.
01:57On aura même l'occasion de parler de son petit clip de promotion de l'événement.
02:00Toi, tu l'as senti aussi, cette excitation du chef de l'État pour l'intelligence artificielle ?
02:04Juste avant d'avoir la réponse, je vous encourage à vous abonner à notre chaîne YouTube pour ne manquer aucune de nos prochaines discussions et aucun de nos prochains reportages.
02:11Vous pouvez aussi profiter de l'espace commentaire pour nous souffler des idées de sujets que vous aimeriez retrouver en discussion ou en reportage sur notre chaîne YouTube.
02:19Et je vous laisse tout de suite avec la suite de nos discussions.
02:22Clairement, il était tout sourire sur scène.
02:24C'était vraiment, c'était son moment pour briller.
02:27C'était clairement ça.
02:29Est-ce que tu peux aussi peut-être nous replanter un peu le décor de cet événement-là, de quoi il s'agissait dans les grandes lignes ?
02:34C'était quoi l'objectif et qui était convié à cet événement ?
02:37Oui, tout à fait.
02:37En fait, l'objectif de cet événement qui a été préparé depuis un an par Anne Boubreau, envoyée spéciale du président sur l'IA,
02:48c'était de mettre en avant une IA qui soit européenne et alternative aux IA américaines et chinoises qui, pour l'instant, quand même, dominent le jeu en la matière.
02:59Et en l'occurrence, d'essayer de, sur le papier, de créer des garde-fous, de mettre en avant une IA qui soit plus éthique,
03:07de mettre en place d'éventuels par règles, mais en tout cas de réfléchir à des safeguards, entre guillemets.
03:15Et notamment pour rendre l'IA plus éthique, plus frugale, plus respectueuse de l'environnement.
03:20Sur le papier, c'était ça, l'événement.
03:22Est-ce que cela a été aussi dans les faits ?
03:25Dans les faits, on se rend compte que la réalité est beaucoup plus nuancée et que dans le résultat du sommet,
03:31on voit que toute la tension a été entre mettre en avant l'innovation de l'IA et respecter certains enjeux éthiques.
03:43Et la deuxième partie est peut-être un peu passée à la trappe.
03:46On va revenir aussi tout de suite sur la petite vidéo que je voulais vous montrer du clip partagé sur les réseaux sociaux par Emmanuel Macron.
04:13Et tu voudras qu'elle soit en haine ce soir.
04:17Toulouse, n'hésite pas à t'abonner pour plus de vidéos.
04:19Bisous mes petits loups.
04:21Bien joué.
04:23C'est assez bien fait, ça m'a plutôt fait rire.
04:25Mais plus sérieusement, avec l'IA, on peut faire de très grandes choses.
04:28Changer la santé, l'énergie, la vie dans notre société.
04:31Et donc la France et l'Europe doivent être au cœur de cette révolution pour saisir toutes leurs chances
04:34et pour pousser aussi les principes qui sont les nôtres, ceux en quoi nous croyons.
04:37C'est le but de ce sommet pour l'action sur l'IA, c'est dès demain à Paris.
04:41Alors je compte sur vous.
04:44OK, là, c'est bien, moi.
04:48C'est assez surprenant, quand même, cette façon d'annoncer ce sommet.
04:54Tout à fait, c'est clairement une façon de séduire les jeunes.
04:59C'est une vidéo qui a d'ailleurs été postée sur Instagram, ce n'est pas pour rien.
05:01Qu'est-ce que tu en as pensé, toi, au départ, quand tu as vu ce petit clip d'annonce à mail d'Emmanuel Macron ?
05:06Je suis toujours très partagée, parce qu'à la fois, je vois bien le côté assez malin,
05:11en termes de communication vis-à-vis du public qui va être sur les réseaux sociaux, etc.
05:16Et en même temps, pour parler comme Emmanuel Macron,
05:20c'est évident que par rapport à notamment toute la communauté scientifique,
05:24par rapport aux enjeux diplomatiques du sommet,
05:27par rapport effectivement aussi à tout ce qui est censé en sortir en termes d'annonce, etc.,
05:34on est dans une forme de décalage.
05:36Donc, c'est toujours un peu le risque de jouer avec ce type de code.
05:41C'est que je pense qu'effectivement, ça va parler à un certain public
05:45et pour d'autres, ça va être totalement rédhibitoire.
05:47Moi, j'ai aussi vu des réactions de gens qui disaient
05:51« mais enfin, ce n'est pas possible, on ne peut pas faire des choses comme ça ».
05:53Enfin, voilà, on est toujours effectivement sur ces deux niveaux.
05:56Avant que tu arrives, je citais d'ailleurs les premières lignes de ton papier,
06:01où tu expliques que quand on assiste à ce sommet-là,
06:04quand on regarde l'attitude d'Emmanuel Macron,
06:06on comprend qu'il adore trop ça, qu'il adore trop l'intelligence artificielle.
06:11Est-ce que c'est aussi cette impression que tu as eue, toi, en effet,
06:13en assistant à un sommet, en le voyant parader, sourire,
06:16passer de l'anglais au français, comme tu dis, il est vachement dans cet esprit-là ?
06:18Alors, on est deux à la voix récrie, c'est Arthur et moi.
06:23En fait, c'est un peu la difficulté.
06:25D'ailleurs, il adore le sujet, il adore le numérique, il adore l'IA,
06:30il est effectivement à l'aise avec toute la sphère tech, économique, etc.,
06:35sur ces sujets-là.
06:36Donc, d'une certaine manière, on sent qu'il ne peut pas s'empêcher
06:40de se mettre au premier plan, y compris, évidemment, de ce type d'événements.
06:45Il ne faut aussi pas être dupe du fait qu'on est dans une situation politique
06:49aussi qui est compliquée, où il disparaît un peu, de fait,
06:52et que c'est aussi une manière de se replacer au centre de la photo.
06:55Donc, il y a à la fois le naturel qui revient au galop,
06:58le leader de la start-up nation, et en même temps,
07:02l'enjeu aussi d'en profiter comme un moment de communication.
07:06Et on sent d'ailleurs que c'est un sommet qui a aussi été
07:12très embrassé par l'Élysée aussi, en termes de com,
07:16alors même qu'il y a dans la boucle un écosystème,
07:19y compris institutionnel, qui est plus divers.
07:22D'où cette impression parfois qu'on est, oui, sur des tonalités
07:28qui peuvent être parfois dissonantes, y compris même sur des
07:34manières de poser la question de l'intelligence artificielle
07:37qui peuvent être, elles aussi, assez dissonantes.
07:39Il y a un autre moment de com dont on a beaucoup parlé,
07:45qu'on a beaucoup vu passer aussi sur les réseaux sociaux,
07:46c'est l'espèce de petite réponse d'Emmanuel Macron à Donald Trump.
07:52Est-ce que vous pouvez nous expliquer un peu ce que c'est cette déclaration
08:12de Macron, à quoi elle sert et qu'est-ce qu'elle dit en fait, cette déclaration-là ?
08:15De toute façon, avec cette déclaration, de manière générale,
08:19comme avec l'annonce des 109 milliards, on est dans une réponse de Macron à Trump.
08:25Honnêtement, c'est quand même un peu un concours,
08:30pour le dire vulgairement, de celui qui a la plus grosse.
08:33On ne peut pas ne pas voir cette séquence sans y penser,
08:36avec y compris une rhétorique, le fameux plug baby plug,
08:39il y a un côté un peu testostéroné de Trump.
08:41Et finalement, la réponse, elle l'est aussi.
08:45Donc, il y a ce côté-là de Trump a annoncé Stargate avec 500 milliards de dollars.
08:51Eh bien, moi, Emmanuel Macron, je vais annoncer 109 milliards de dollars en France.
08:54Stargate, c'est les investissements des États-Unis dans l'intermédiaire officiel.
08:57Et en insistant bien sur le fait que, finalement, rapporter à la population,
09:01eh bien, c'est la même chose.
09:02Et donc, c'est une manière de dire je suis aussi fort que Trump.
09:06Et avec, effectivement, cette réponse-là sur cette petite déclaration plug baby plug,
09:12qui est une manière de dire nous, on a l'électricité.
09:15Alors, ce qui, par ailleurs, pose comme ça soulève un sérieux problème.
09:18C'est-à-dire que tout le monde quand même s'accorde sur le fait
09:21qu'il y a une vraie réflexion à avoir sur les coûts énergétiques environnementaux de l'IA,
09:26parce qu'effectivement, les technologies, en tout cas celles qui se développent actuellement,
09:30l'intelligence artificielle générative, c'est très gourmand en ressources,
09:34c'est très gourmand en énergie.
09:35Et nous, parce qu'on aurait effectivement une énergie décarbonée,
09:39parce qu'elle est essentiellement nucléaire,
09:40tout à coup, magiquement, ça réglerait le problème.
09:44C'est évidemment plus compliqué que ça.
09:46Et je trouve que ce genre de déclaration, effectivement, où chacun montre ses muscles,
09:53ça cache aussi, ça invisibilise ce type de problème.
09:57Et oui, je trouve que le truc un peu démonstration de testostérone et de muscles
10:03n'est pas forcément tout à fait à la hauteur des enjeux, pour le dire aimablement.
10:10Dans le chat, on revient justement sur ce que tu viens de dire,
10:12sur ces 109 milliards annoncés par Emmanuel Macron.
10:15Quelqu'un nous dit donc, si je ne me trompe pas,
10:16les 109 milliards, ce n'est pas des investissements de l'État qui sont prévus.
10:19Alors en effet, Elise, est-ce que tu peux un peu nous détailler ce que sont ces investissements-là ?
10:23Il y a une grande partie de ces investissements qui viennent des Émirats arabes unis
10:26pour construire un grand campus de l'IA et notamment un grand centre de données.
10:30Donc on parlait de la contradiction qu'il y avait entre vouloir promouvoir une IA frugale
10:34et en même temps investir dans ces genres de centres qui sont extrêmement énergivores.
10:39En dehors des Émirats arabes unis, en fait, c'est des investissements privés.
10:44On a Amazon qui va dépenser des milliards pour construire des infrastructures liées au cloud.
10:49On a un fonds canadien qui va investir pareil pour construire un centre de données à Cambrai.
10:55C'est des entreprises pour la plupart qui dépensent ces milliards en France.
11:01Et donc ces milliards, très concrètement, ils servent à quoi ?
11:03C'est des infrastructures pour développer ensuite des outils d'intelligence artificielle ?
11:07Oui, l'essentiel, c'est des infrastructures, c'est des centres de données, c'est des supercalculateurs.
11:12Ce qui peut d'ailleurs poser question, c'est que là on est sur effectivement, par exemple,
11:16un accord cadre avec les Émirats arabes unis sur cinq ans.
11:19Si à un moment donné, ils décident finalement d'aller mettre leurs données ailleurs, que se passe-t-il ?
11:23Enfin c'est pareil, ça c'est des choses dont finalement il y a eu assez peu de débats aussi
11:27sur dans le temps, qu'est-ce que ça signifie ?
11:30C'est-à-dire qu'on a des investissements massifs effectivement dans des infrastructures,
11:34mais on ne sait pas non plus quel sera même l'état de l'art de l'intelligence artificielle dans cinq ans.
11:39Est-ce qu'il n'y aura pas eu aussi des bifurcations ?
11:44En tout cas, ça donne l'impression que cette question-là, on l'interroge assez peu,
11:49alors même que ce type de sommet devrait précisément être le moment où on le fait.
11:53Oui, parce que du coup, une question un peu bête que je me pose quand je vous entends dire ça,
11:58c'est que nous, quel est notre rôle là-dedans ?
12:00Est-ce qu'on a un moment, nous en tant que citoyens je veux dire,
12:02est-ce qu'on a un moment, notre mot à dire dans ces accords, même financiers parfois,
12:06qui sont passés entre différentes entreprises, entre différents états,
12:08ou est-ce qu'on est totalement exclu de ce jeu-là ?
12:11Ben, pour l'instant, on n'a pas particulièrement eu notre mot à dire.
12:14La preuve en est qu'il y a eu plusieurs initiatives qui se sont faites en périphérie du sommet,
12:20qui étaient des initiatives plutôt de la société civile.
12:23On a eu par exemple un contre-sommet qui a été organisé par le philosophe Eric Sadin
12:27et le journaliste de l'Est Républicain, qui du coup était un contre-sommet au cours duquel
12:37on a fait parler des personnes dont l'emploi, la profession était impacté directement par l'IA,
12:42que ce soit des professeurs dans le secteur de l'éducation, que ce soit donc des journalistes,
12:47que ce soit des acteurs, que ce soit des personnes qui fassent du doublage en voix.
12:52On a aussi des associations comme la Quadrature du Net qui ont lancé une coalition qui s'appelle Iatus,
12:59justement pour appeler à limiter drastiquement l'IA et à résister à son déploiement.
13:05Mais ça reste des initiatives qui sont périphériques au sommet.
13:09C'est un peu l'ambiguïté constitutive de l'événement.
13:13C'est-à-dire qu'on est à la fois sur une partie diplomatique classique,
13:17parce qu'il y a des chefs d'État, parce qu'il y a des envoyés de différents pays,
13:20parce qu'il y a une déclaration à la fin, qui est une déclaration vraiment de principe.
13:24Ce n'est pas un accord, ce n'est pas une régulation,
13:26mais il y a quand même un groupe de pays qui se mettent d'accord sur des principes,
13:30en tout cas qui s'engagent à défendre.
13:33Il y a à côté de ça, effectivement, le côté table rond de réflexion, faire venir des gens.
13:39Et de ce point de vue-là, les thèmes qui ont été mis en avant par le contre-sommet,
13:45notamment d'Éric Sadin, qui sont la question du travail beaucoup,
13:48parce que c'est beaucoup des gens qui venaient de professions qui sont directement impactées.
13:51Ces questions-là, c'est-à-dire la question des risques sur l'emploi,
13:54la question des risques sur les processus démocratiques,
13:58la question des risques de sécurité même des systèmes,
14:02ce sont des questions qui ont été discutées dans les tables rondes, ce n'était pas absent.
14:07Mais il y a à côté de ça, en fait, d'une certaine manière,
14:11Macron a un peu transformé le sommet de l'IA en Choose France,
14:16qui est le rendez-vous qui a lieu tous les ans à Versailles et qui vise à attirer des investissements étrangers.
14:21Là, on était effectivement dans un événement hybride qui alliait les deux,
14:27mais avec le chiffre de 109 milliards, c'était spectaculaire.
14:30Il suffit qu'il l'annonce le dimanche soir pour que le lendemain, tout le monde ne parle plus que de ça.
14:36Et donc, à ce moment-là, effectivement, on va dire que le côté de Choose France a quand même pris le pas,
14:40au moins dans le moment médiatique, sur le côté plus diplomatico-réflexif.
14:46Dans les grands investissements annoncés, il y a aussi un autre chiffre qui a été annoncé,
14:50c'est celui des 200 milliards d'euros de l'Union européenne.
14:53Là encore, qu'est-ce qu'ils veulent dire et sur quoi est-ce qu'ils portent ces 200 milliards d'euros ?
14:58Alors, les 200 milliards qui se sont dépensés, ça ne va pas être que 200 milliards de lieux,
15:04il y a une partie, je crois que c'est 50 milliards, si c'est ça,
15:06qui est dépensée effectivement par l'UE, et le reste, en fait, ça vient d'une coalition d'entreprises
15:11qui compte notamment Airbus, L'Oréal, Mercedes, etc.
15:14Donc, c'est une coalition qui a été annoncée au cours du sommet et qui vise à développer une IA européenne puissante
15:20et notamment à simplifier les réglementations européennes en vigueur sur le sujet,
15:26en vigueur depuis pas très longtemps, je crois, à peu près une semaine, deux semaines maintenant ?
15:30Une dizaine de jours, je crois, on dirait maintenant, selon l'entrée en application.
15:33Et donc, bon, déjà, c'est un peu surprenant que l'UE se soit associée à cette coalition-là,
15:37mais donc, il y a eu cette annonce, effectivement, des 200 milliards globaux qui vont être dépensés
15:43pour construire justement une IA européenne, et notamment, il y a une partie de ce budget-là
15:48qui va aussi aller dans des infrastructures, notamment des Jäger Factory.
15:53Il y a plusieurs remarques et questions dans le chat sur, à chaque fois, des thématiques assez particulières
15:58liées à l'intelligence artificielle. Il y en a notamment une sur, plus le bolet, écologique,
16:02qui nous dit, avec souci de production électrique, avec souci du niveau des fleuves pour les centrales atomiques,
16:08c'est faire des paris contre la planète quand même.
16:10Est-ce qu'on en a parlé des problèmes potentiellement écologiques lors de ce sommet de l'IA ?
16:15Oui, il était censé y avoir une grande coalition autour de ça, et ça a été un sujet qui a été abordé.
16:20Après, comme je le disais précédemment, là, on est face à cette contradiction de...
16:26On a un discours de bonnes intentions, et en même temps, on a des milliards qui sont dépensés
16:30dans des structures très énergivores.
16:32C'est un peu, effectivement, toute la question de...
16:35Là, je trouve que c'est peut-être le sujet sur lequel le grand écart est le plus flagrant,
16:42entre d'un côté, effectivement, une déclaration finale, qui est signée quand même par 60 pays,
16:49donc c'est pas rien, il y a la plupart des pays européens, il y a les BRICS,
16:55pas tous, mais il y a le Brésil, il y a l'Inde et il y a la Chine.
16:58Il y a des grands absences, c'est les Etats-Unis et le Royaume-Uni, c'est ça ?
17:01Les Etats-Unis, de toute façon, les déclarations de J. Divan, c'était extrêmement clair,
17:05ils veulent s'engager à rien, et finalement, moins il y a de normes et mieux ils se portent.
17:08Les raisons de la non-signature du Royaume-Uni sont moins claires,
17:13parce que leur envoyé a dit qu'il y avait des points sur lesquels ils n'avaient pas réussi à se mettre d'accord
17:18sans forcément donner de détails.
17:20Mais en tout cas, il y a vraiment une proclamation,
17:24on veut faire en sorte que l'intelligence artificielle ne soit pas néfaste pour la planète,
17:30et il est beaucoup question, et depuis plusieurs mois, la notion de frugalité notamment.
17:36C'est intéressant, c'est de dire en fait,
17:40véritablement de s'interroger sur les systèmes qui sont développés aujourd'hui,
17:44et essentiellement d'ailleurs, le coût en termes de ressources
17:49et en termes d'énergie de l'IA génératif proprement dite,
17:52parce que je pense que c'est quand même une des plus coûteuses,
17:54et de s'interroger sur est-ce qu'il ne faut pas réussir à sortir de ça, réussir à bifurquer.
17:58Et donc l'idée d'IA frugale, c'est de faire en sorte qu'elle consomme le moins possible.
18:03Et c'est vrai qu'à côté de ça, quand on entend parler de data center géant,
18:07forcément ça interroge.
18:09Et là, on est dans la contradiction entre la proclamation collective et diplomatique,
18:17où on essaie quand même de porter quelques grands principes,
18:20et puis le moment où chacun revient à ses intérêts bien compris,
18:23et les intérêts bien compris aussi côté français.
18:26Manifestement, c'est d'attirer le plus de milliards d'euros possible
18:29pour construire des infrastructures géantes.
18:33Mais comme l'annonce les États-Unis, encore une fois, on retombe,
18:36on sent qu'il y a quand même un peu l'idée qu'il faut sortir de la course,
18:45et en même temps, personne n'en sort.
18:47D'ailleurs, ça me fait penser, je m'étais posé la question,
18:50souvent ce qu'on dit aussi, c'est que l'IA pourrait aider à lutter contre le réchauffement climatique.
18:54Et d'ailleurs, à ce grand sommet sous la Neffe, il y avait plein de stands
18:57qui présentaient plein de projets d'IA, plein de startups, etc.
19:00Et donc il y avait quelques startups qui justement étaient spécialisées,
19:03faisaient des IA pour aider à lutter contre le réchauffement climatique,
19:07sur des enjeux environnementaux, etc.
19:09Et donc j'en suis allée en voir quelques-unes en leur posant la question,
19:12justement puisque ça m'interrogeait.
19:14Je me disais, mais cette contradiction-là, est-ce que vous la voyez ?
19:17Et comment vous l'assumez ?
19:19Comment vous portez un discours qui amène à dire que l'IA va un peu sauver le monde,
19:25et en même temps, tout en acceptant le fait qu'il y ait des data centers qui soient créés, etc.
19:29Et ce qu'on m'expliquait, c'est qu'on mise, on parie sur le fait que les bénéfices vont dépasser le coût,
19:37qu'on va faire des progrès qui vont être tellement phénoménaux
19:41que finalement ça va compenser ce qu'on va perdre avec les data centers.
19:46C'est un peu ça la croyance générale sur ce sujet-là.
19:50C'est quand même aussi un milieu dans lequel la pente vers le solutionnisme technologique, elle existe, on le sait.
19:59Cette idée que, magiquement, les technologies qu'on développe devraient nous permettre de régler les problèmes de la planète,
20:06ce n'est pas neuf.
20:07Et on sait qu'en réalité, ça ne marche pas très bien.
20:10Moi, j'ai entendu aussi le même discours sur Internet, de manière générale.
20:14J'ai entendu aussi un discours très optimiste.
20:19A l'époque, on disait même techno-BA au moment des printemps arabes,
20:23où tout le monde disait « ah oui, c'est formidable, les révolutions Facebook, etc. »
20:26Alors qu'en fait, évidemment que les réseaux sociaux étaient des outils.
20:29Enfin, à un moment donné, quand des régimes autoritaires chutent,
20:34c'est aussi parce qu'il y a des gens qui sont mobilisés de manière très physique,
20:36qui sont allés dans la rue, etc.
20:38Donc, ce n'était pas des révolutions Facebook.
20:39Mais il y a souvent ce mauvais réflexe de croire qu'il y aurait une espèce de qualité forcément positive,
20:49intrinsèque du progrès technologique,
20:52alors qu'on a quand même la possibilité de constater tous les jours que ça ne se passe pas comme ça du tout.
20:58Je ne sais pas, on a notamment l'exemple des réseaux sociaux dont on a le sentiment aujourd'hui
21:02qu'en fait, il y a des choses qui nous échappent totalement
21:04parce qu'il y a des bouleversements d'équilibre.
21:07Notamment, on pense évidemment à Musk, X, etc.
21:10Et que nous, derrière, avec notre très bon texte,
21:13qui est le Digital Services Act au niveau européen,
21:15en fait, non, ça ne suffit pas.
21:17Ça ne suffit pas parce que la techno elle-même va vite,
21:22qu'en fait, les algorithmes changent sans qu'on ait la main dessus.
21:28Et donc, cette espèce de croyance
21:32qu'on réussirait magiquement à régler la crise climatique avec l'IA,
21:37là, pour le coup, j'avoue que oui,
21:40quand Éric Sadin met le doigt dessus en disant
21:43tout ça n'est pas très rationnel et on est dans le solutionnisme technologique chimiquement pur,
21:48il n'a pas tort.
21:49Éric Sadin, l'organisateur, on le mentionnait tout à l'heure du contre-sommet
21:52qui se tenait en même temps que ce sommet de l'IA à Paris.
21:54Pour revenir aussi rapidement sur la déclaration commune
21:58qui a clôturé ce sommet,
22:00qu'est-ce qu'on en retient très concrètement de cette déclaration-là ?
22:03Est-ce qu'il y a des choses contraignantes
22:06ou en tout cas des vraies choses inscrites dans le marbre
22:09qui vont mettre des limites, poser un cadre ?
22:12Ou alors est-ce que c'est simplement une déclaration...
22:13Non, il n'y a rien de contraignant.
22:17Alors, ce n'est pas très étonnant,
22:19c'est-à-dire qu'il faut avoir en tête que
22:21la gouvernance mondiale, comme on dit, de l'intelligence artificielle
22:24à ce stade, elle n'existe pas.
22:27Et on a bien vu notamment que sur des questions comme
22:32par exemple la cybersécurité,
22:35il y a des choses qui mettent vachement de temps à se construire
22:39parce qu'il faut réussir à mettre les gens autour de la table,
22:41il faut réussir à faire en sorte qu'ils puissent éventuellement
22:44se mettre à peu près d'accord sur des trucs.
22:46On sait qu'au final, de toute façon,
22:47il y aura forcément une architecture un peu complexe.
22:50C'était ce que disait l'ambassadeur pour le numérique
22:53dans l'interview qu'on a publiée lundi.
22:55In fine, les gens qui travailleront sur les impacts de l'IA sur le travail
22:59ne seront sans doute pas les mêmes que ceux qui travailleront
23:01sur les normes de sécurité des systèmes.
23:03Mais là, on est vraiment au tout début.
23:05Il y a, je pense, une volonté partagée par beaucoup de gens
23:10et par beaucoup d'États de dire qu'il faut quand même
23:13se mettre d'accord un minimum sur des trucs
23:15pour éviter que ça parte complètement en cacahuète.
23:18Et ça, c'est un truc qu'on sent notamment très fort depuis 2022, 2023, 2024,
23:23notamment parce qu'il y a eu des alertes de chercheurs.
23:28Alors, bon, est-ce que ça portait vraiment sur le risque existentiel ?
23:34Car à un moment donné, des systèmes d'intelligence artificielle
23:36peuvent représenter un risque pour l'humanité.
23:40Est-ce qu'on en est là à court terme ? Probablement pas.
23:42Moi, il y a aussi des gens qui m'ont dit qu'en réalité,
23:45le risque à court terme, c'est plus celui d'un duopole
23:49qui écrase tout le monde avec d'un côté les IA américaines
23:52et de l'autre côté les IA chinoises.
23:54Et ça, évidemment, c'est un truc qui a été moins discuté jusqu'à maintenant.
23:59C'est vraiment les leaders incontestés, Etats-Unis, Chine ?
24:01Ils ont une longueur d'avance sur tout le monde.
24:05Et y compris, évidemment, quand on est les Etats-Unis,
24:06qui est la première économie mondiale et qui, en plus,
24:09là, avec une administration qui a décidé de ne plus du tout s'embarrasser de limites,
24:13on peut raisonnablement penser que oui, effectivement, ça risque d'aller vite.
24:17Et donc, il y a, je pense, une volonté partagée par beaucoup de gens
24:20de dire qu'il faut qu'on pose des principes,
24:25il faut qu'on prenne en compte, effectivement,
24:26les inquiétudes qui montent de la société civile,
24:28parce qu'elles sont extrêmement fortes sur la question de l'environnement,
24:30sur la question du travail aussi.
24:32Là, pour le coup, c'est ce fameux contre-sommet.
24:34C'était quand même essentiellement là-dessus,
24:36parce qu'il y avait des gens de plein de professions, en fait,
24:38qui disent mais attendez, nous, on voit débarquer des trucs,
24:41on a l'impression que tout ça n'est pas abordé, etc.
24:44Et donc, ce genre de texte, on va dire, il a le mérite d'exister,
24:47mais évidemment, il n'est pas du tout contraignant.
24:49Et donc, moi, j'allais dire, en fait,
24:50il y a presque deux aspects qui sont importants.
24:54D'abord, c'est des gens qui disent,
24:55on veut pousser à mettre en place une gouvernance internationale.
24:58Donc, ça veut dire qu'à minima, ils s'engagent à continuer à discuter.
25:00Bon, ça, c'est toujours ça de pris.
25:02Et puis, c'est les signataires aussi.
25:04Donc, évidemment, le fait que les États-Unis n'en fassent pas partie,
25:07c'est extrêmement signifiant.
25:10Mais le fait que la Chine en fasse partie, c'est aussi signifiant.
25:12C'est-à-dire qu'ils considèrent qu'il faut qu'il y ait du multilatéralisme
25:18sur le sujet.
25:20Et on a, dans le profil des différents pays,
25:24voilà, ils sont nombreux.
25:26Et puis, il y a des grandes puissances en dehors,
25:29effectivement, des États-Unis et du Royaume-Uni.
25:31Et ces gens-là se disent, il faut qu'il y ait du multilatéralisme.
25:34Et ça, disons que dans le monde dans lequel on vit,
25:36où on sent venir des logiques d'affrontement de plus en plus,
25:40on va dire, nues, quoi, ou plus perturbées,
25:42qui embarrassent tellement de faire semblant,
25:44et notamment côté américain,
25:46dans ce moment où, effectivement, ça devient très violent
25:48et où ça se fragmente,
25:49le fait qu'il y ait quand même une espèce de socle d'États
25:53qui disent, nous, en fait, on pense qu'effectivement,
25:55il faut du multilatéralisme.
25:57Il y a des discussions à l'ONU, par exemple.
25:59Ça, vraiment, c'est toujours ça de pris.
26:02Je pense que c'est plutôt ça qu'il faut retenir.
26:04Quand tu parles d'affrontement,
26:06moi, ça me fait penser aussi à un des sujets
26:08qui est concerné par la question de l'intelligence artificielle,
26:11c'est le sujet de la défense,
26:12sur lequel tu travailles aussi à Libération,
26:15et tu as pu travailler aussi cette semaine,
26:16puisque lundi, il y avait eu un rendez-vous
26:18autour de ces questions d'intelligence artificielle et de défense.
26:20On sait aussi, et Libération a notamment documenté des choses là-dessus,
26:23que l'IA était utilisée parfois par Tzahal,
26:27par exemple l'armée israélienne dans le conflit en Palestine.
26:31De quoi il s'agissait lundi,
26:32quand on a pu parler d'IA et de défense,
26:36et quels sont un peu les grands enjeux par rapport à ça ?
26:39Alors, effectivement, c'était des tables rondes
26:41dans lesquelles il y avait des hauts-gradés de l'armée,
26:45il y avait un représentant de la Hollande aussi,
26:51des Pays-Bas qui étaient là,
26:52il y avait un représentant du Comité international de la Croix-Rouge,
26:57si je ne me plante pas,
26:58il y avait des entreprises aussi du secteur de la défense,
27:00et je pense que l'idée, c'était un peu de poser les grands enjeux avec...
27:04Bon, là, pour le coup, on est dans un truc un peu particulier,
27:06y compris, je trouve, qui pose aussi la question de manière très crue,
27:11encore une fois, c'est que ce que disent les militaires,
27:14c'est qu'aujourd'hui, de toute façon, de l'IA, il y en a de plus en plus,
27:17il y en a de plus en plus dans la défense
27:19pour des choses aussi diverses que la gestion RH
27:23ou, effectivement, la détection et l'analyse de cibles,
27:29la détection de véhicules ennemis, etc.
27:31Donc, on sent que ça va de plus en plus vite.
27:34On voit aussi, et ça, c'est sans doute ce qui est le plus alarmant en réalité,
27:38on voit aussi que sur les terrains de conflit,
27:40il y en a de plus en plus,
27:41avec les deux exemples dont absolument tout le monde parle,
27:44qui sont la guerre en Ukraine et la guerre à Gaza,
27:47avec des choses très différentes,
27:49c'est-à-dire que la guerre en Ukraine,
27:50l'IA permet de corriger le rapport du faible au fort,
27:55c'est-à-dire qu'en fait, face à une armée russe qui est plus nombreuse,
27:57l'Ukraine se sert beaucoup d'IA,
27:58et notamment, effectivement, pour détecter des objets ennemis, etc.
28:03Ils utilisent beaucoup d'intelligence,
28:05enfin, ce qu'on appelle de renseignements en sources ouvertes, etc.
28:08La guerre à Gaza, c'est l'inverse,
28:10ça aggrave le rapport du fort au faible,
28:12avec effectivement tout le travail qu'a fait Check News
28:14sur l'utilisation de systèmes d'intelligence artificielle
28:17pour détecter des cibles,
28:19avec une campagne de bombardement
28:21qui était d'une intensité assez inédite
28:24et qui a été extrêmement meurtrière.
28:26Et ça pose vraiment question,
28:28parce qu'il y a à la fois l'idée qu'il faut se mettre au niveau,
28:34parce que là, se mettre au niveau
28:35est une question de vie ou de mort sur le champ de bataille,
28:38en tout cas, c'est le discours des haut-gradés,
28:41et ce n'est pas faux, d'une certaine manière,
28:43c'est-à-dire les conflits de demain, ça va être ça.
28:44Et en même temps, tout le monde se rend bien compte
28:47qu'il va falloir mettre des curseurs à certains endroits.
28:51Et en fait, la vraie difficulté,
28:53je me souviens notamment qu'il y a encore quelques années,
28:55le débat était sur système totalement autonome
28:58ou système avec un humain dans la boucle.
29:00Bon, aujourd'hui, le débat, il n'est plus là.
29:02Et d'ailleurs, c'est très intéressant de voir le rapport sur l'IA
29:06que vient de sortir le comité d'éthique de la Défense.
29:09En fait, la question, bon, l'humain dans la boucle, d'accord,
29:12mais à quel niveau et à quel point ?
29:14C'est-à-dire qu'il y a notamment un papier de deux chercheuses
29:18de l'Institut français de relations internationales
29:21qui est paru dans une revue qui s'appelle Politique étrangère.
29:24Elles, elles disent, l'utilisation de l'IA sur les champs de bataille,
29:28on ne va pas vers une guerre plus propre,
29:29en fait, on va faire une guerre, entre guillemets, plus sale.
29:32C'est-à-dire que ça intensifie, en réalité,
29:37il y a de plus en plus de cibles, effectivement,
29:39qui sont détectées et donc choisies.
29:43Et la place de l'humain là-dedans, enfin, c'est-à-dire que
29:46entre la proposition que fait la machine
29:50et le goût qui est donné par l'humain,
29:53il se passe un temps tellement faible
29:56que d'une certaine manière, on a le sentiment que l'humain,
29:59en fait, il valide ce que lui propose la machine.
30:01Et là, c'est un vrai sujet, c'est-à-dire que
30:02un humain dans la boucle, en réalité, ce n'est pas suffisant.
30:05Il va falloir, à un moment donné, effectivement,
30:08et le rapport, d'ailleurs, du comité d'éthique dit,
30:11il faut des systèmes qui soient en capacité de faire varier
30:15le degré d'autonomie, entre guillemets.
30:18Mais ce qui veut dire que, d'une certaine manière,
30:19ça valide aussi cette idée, aujourd'hui,
30:21que selon les contextes, selon l'intensité du conflit,
30:27le degré d'autonomie du système va être plus ou moins élevé.
30:30Et donc, là, on voit bien qu'on est en train de rentrer dans un truc
30:33dont on ne sait pas très bien où ça nous mène.
30:35Je pense qu'il y a quand même une conscience,
30:37en tout cas, dans le discours du ministre des Armées,
30:39Sébastien Lecornu, il était, là, c'est pareil,
30:43il était un peu sur les deux.
30:44Il disait, il faut qu'on ait ces capacités techniques
30:47parce qu'en fait, il faut qu'on assure notre défense.
30:50Mais il y a un moment où il va falloir faire attention
30:53à la fuite en avant et il faut se poser cette question-là.
30:56Et il disait, de manière un peu ironique,
30:58quand nous, Européens, on dit ça,
30:59on passe toujours pour, effectivement, ceux qui veulent tout freiner.
31:02Mais là, l'histoire nous enseigne
31:03qu'il va falloir, effectivement, faire très attention.
31:06Et évidemment, tout le monde a en tête la question du nucléaire
31:09et de la prolifération.
31:10Et il va falloir se poser clairement la question
31:12d'une forme de contre-prolifération
31:16et, effectivement, de doctrine d'emploi
31:20et de la façon aussi dont il va falloir...
31:22Parce que là, ça vient clairement...
31:24Enfin, on voit que ça commence à percuter le droit interne.
31:27Quand on voit, effectivement, la manière
31:28dont les systèmes d'IA ont été utilisés à Gaza,
31:32il va y avoir un travail d'ajustement à faire
31:35et là encore, un travail de négociation.
31:36Et on sait que c'est très long.
31:38Et c'est ça qui, effectivement, est très compliqué
31:40et quand même un peu angoissant.
31:41C'est qu'on sait que les négociations multilatérales
31:44prennent toujours beaucoup de temps
31:46et que la techno, elle, elle va à toute vitesse.
31:49Et que donc, effectivement, là, on est...
31:51Disons qu'on est sur un sujet où les États-Unis
31:54disons qu'on est sur un sujet où les enjeux d'éthique,
31:57les enjeux de droit et les risques,
32:01tout ça est quand même extrêmement élevé.
32:02Et j'en profite pour saluer nos nombreux nouveaux viewers
32:06qui nous ont rejoints via le Red de Samuel Etienne.
32:08Merci beaucoup, Samuel Etienne, pour ce Red,
32:10pour vous restituer un petit peu l'objet de nos discussions.
32:12On revient sur le sommet de l'IA
32:14qui se tenait à Paris ces deux derniers jours.
32:16On parle de tous les sujets qui sont liés, finalement,
32:18à l'IA et dont il a été question lors de ce sommet.
32:22Comme d'habitude, et donc, je l'indique pour ceux
32:25qui nous rejoignent pour la première fois,
32:26vous pouvez nous poser vos questions dans le chat.
32:28Et puis, je les relaie ensuite à nos deux invités.
32:30Aujourd'hui, nous sommes avec Élise Vignacourt et Amael Guiton,
32:32qui étaient au sommet de l'IA
32:34et qui font partie de nos journalistes spécialistes,
32:36notamment de ces questions d'intelligence artificielle
32:38ici à Libération.
32:40Pour poursuivre nos discussions,
32:41Élise, je voulais revenir aussi sur un épisode
32:44dont on a aussi pas mal parlé lors de ce sommet
32:47parce que finalement, il n'était pas présent physiquement.
32:49Mais Hélène Mosque, on en a parlé.
32:51Il s'est manifesté, notamment lors d'un épisode...
32:53Il était là par la pensée.
32:55C'est un peu le spectre qui...
32:56Il a réussi à faire parler de lui, en tout cas.
32:57D'ailleurs, il y a un biais d'Arthur Serre dans l'idée
33:00qui se plaint en quelque sorte de ce personnage
33:03un peu encombrant de ce sommet de l'IA.
33:06Hélène Mosque, il y a eu du coup un petit échange,
33:09finalement, avec Sam Altman.
33:11Est-ce que tu peux nous parler un peu de cet épisode, Élise ?
33:13Oui, tout à fait.
33:14Alors, ça s'est passé en heure française
33:16de la nuit de lundi à mardi,
33:18où on a découvert que...
33:20Hélène Mosque a annoncé qu'il proposait de racheter OpenAI,
33:24donc la société derrière ChadGPT,
33:27qui est donc dirigée par Sam Altman,
33:30pour 97 milliards de dollars.
33:33Une proposition qui est donc faite avec un consortium d'investisseurs.
33:36Alors qu'elle est évaluée à 30 milliards, non ?
33:38Oui, après, le point un peu technique,
33:41c'est que lui propose de racheter la partie non-profit de la société
33:46qui est plutôt valorisée autour des 30 milliards.
33:49Ça, c'est pour le point technique.
33:51Mais donc, cette proposition de rachat non-demandée,
33:55par ailleurs de Hélène Mosque,
33:56suscite évidemment une réaction de Sam Altman,
33:59qui lui répond dans un premier temps directement
34:01sur son propre terrain de jeu, qui est le réseau social X.
34:03Il lui dit merci, mais non merci.
34:06Par contre, si tu veux, moi, je peux te racheter Twitter
34:08pour quelques 9 milliards de dollars, voilà.
34:11Sam Altman, je pense que c'est un sujet qui a dû bien le suivre
34:14tout le long de son voyage parisien mardi.
34:18Quand on l'a vu arriver au Grand Palais,
34:20c'est l'une des premières questions qui lui ont été posées
34:22par les journalistes présents.
34:23Alors, OpenAI, à vendre ou pas à vendre ?
34:25Évidemment, pas à vendre, a-t-il répondu.
34:28C'est une question également qui lui a été posée
34:30par la ministre déléguée à l'intelligence artificielle,
34:34Clara Chappaz, sur la scène de la station F,
34:37qui était à un autre lieu du sommet.
34:38Alors, OpenAI, à vendre ou pas à vendre ?
34:40Réponse de Sam Altman, non, toujours pas.
34:44Donc voilà, en fait, cette proposition de rachat-là,
34:47elle était inattendue,
34:50mais au vu des tensions personnelles
34:53qui associent Sam Altman et Elon Musk,
34:55elle n'est pas non plus hyper surprenante,
34:58surtout quand on connaît le personnage de Musk,
34:59qui a tendance à faire des grandes déclarations
35:03qu'il tient ou ne tient pas, ça dépend.
35:06Sur le sérieux de cette proposition-là,
35:07les spécialistes que j'ai eus, par ailleurs,
35:09m'ont plutôt pensé que ce n'était pas très sérieux
35:12et que c'était plus pour déstabiliser OpenAI qu'autre chose,
35:15ce que Sam Altman a lui-même souligné
35:17dans une interview à Bloomberg.
35:19Donc, sur le passif des deux personnages,
35:21il faut savoir qu'ils ont quand même
35:22une relation assez intéressante,
35:23puisqu'ils font tous les deux partie du groupe de personnes
35:25qui a fondé OpenAI en 2015.
35:29Donc, à cette époque-là, OpenAI,
35:31c'était une fondation
35:34qui était à l'époque entièrement à but non lucratif
35:39et qui voulait, sur le papier,
35:42déployer une technologie, une intelligence artificielle
35:44qui serait en faveur de l'ensemble de l'humanité,
35:47qui serait ouverte, qui serait éthique, etc.
35:52Il se trouve que trois ans plus tard,
35:53Elon Musk a quitté cette société
35:55pour des raisons de conflits d'intérêts,
35:56notamment avec sa société Tesla.
35:58Et depuis, le divorce a été amorcé
36:01entre Sam Altman et Elon Musk,
36:03qui se prennent très souvent la tête.
36:05Dernièrement, ça a été autour du projet Stargate
36:07qu'Elon Musk a très très mal pris
36:08puisqu'il n'a pas été dans la boucle,
36:10là où Sam Altman, lui, en fait partie.
36:13Cet épisode, est-ce qu'il est en vrai plutôt anecdotique
36:17ou est-ce qu'il nous raconte d'autres choses
36:18sur le rapport à l'IA des géants de la tech ?
36:23Non, il n'est pas anecdotique
36:25dans le sens où Elon Musk aussi
36:26possède lui-même sa propre société
36:29d'intelligence artificielle, XAI,
36:30avec son propre chatbot qui est Grok.
36:33Je pense que ça montre aussi
36:36la concurrence qu'on peut voir
36:38du côté des grandes techs américaines
36:41qui se déroulent également.
36:44D'ailleurs, on redemande dans le chat
36:46le projet Stargate.
36:47On en a parlé au début du stream,
36:48est-ce que vous pouvez rappeler
36:49peut-être ce qu'est ce projet Stargate ?
36:50Oui, effectivement, c'est en fait
36:52les Etats-Unis qui ont annoncé
36:53qu'avec un groupe d'entreprises
36:56parmi lesquelles OpenAI,
36:59le fait que 500 milliards de dollars
37:00vont être dépensés pour la construction
37:02notamment d'infrastructures
37:03pour rendre les IA plus puissantes
37:05et plus performantes.
37:07Dans le chat, je vois une remarque aussi
37:09qui nous dit
37:10très inquiets pour le monde de l'art,
37:12auteur de BD entre autres.
37:13C'est vrai que la question,
37:14enfin plus généralement,
37:15le secteur de la culture est aussi touché
37:18par les questions liées
37:19à l'intelligence artificielle.
37:20Est-ce qu'il en a été question
37:21lors de ce sommet de l'IA,
37:22de la culture et des impacts potentiels
37:24sur ce monde ?
37:25Oui, tout à fait.
37:25Il y a deux jours qui ont été dédiés
37:27notamment pendant le week-end
37:28et qui ont été couverts
37:29par notre collègue
37:30Ève Beauvalet du service Culture.
37:34Ces deux jours qui ont notamment mis
37:36en avant plutôt des artistes
37:38qui utilisaient l'IA.
37:40Ce qui a d'ailleurs été fortement critiqué
37:41par Éric Sadin,
37:42le philosophe à l'origine du Contre-Sommet,
37:45qui lui a plutôt invité
37:46des représentants de la culture,
37:48que ce soit des acteurs
37:49ou des doubleurs de voix,
37:50pour montrer à quel point l'IA
37:52pouvait aussi menacer leur emploi,
37:55poser des questions
37:56en termes de droit d'auteur.
37:58Ceci dit, il faut quand même rappeler
38:00que la position historique
38:02et de la France et de l'Europe,
38:04elle est très en faveur du droit d'auteur
38:06et que donc pour le coup,
38:08d'une certaine manière,
38:09alors les créateurs,
38:10ils ont au moins l'avantage
38:12d'être entendus dans leurs préoccupations,
38:15en tout cas sur cette question-là,
38:17c'est-à-dire en gros sur celle
38:18du pillage tel qu'ils le vivent,
38:23des œuvres pour entraîner
38:25les intelligences artificielles,
38:26parce qu'il est aussi question de ça.
38:28C'est au moins un sujet
38:29sur lequel ils sont entendus
38:30et sur lequel leur parole est relayée.
38:33Et ça, c'était présent effectivement,
38:34je pense que c'était à la fois présent
38:37dans le fameux Week-end.
38:38Il me semble que ça a été aussi redit
38:42pendant le sommet lui-même au Grand Palais.
38:47La question effectivement,
38:50c'est d'ailleurs assez intéressant
38:51quand on a vécu aussi,
38:53ce qui est mon cas,
38:55tous les débats qu'il y a pu y avoir
38:57au début des années 2000
39:00sur la question effectivement
39:03de l'Internet,
39:03du partage de fichiers,
39:05le MP3, etc.
39:07et des artistes.
39:08Et effectivement, à l'époque,
39:11il y avait aussi cette question
39:12du droit d'auteur qui se posait
39:13et cette question du partage de la valeur.
39:15En fait, ce qui est assez frappant
39:18dans le débat actuel,
39:19c'est qu'on retrouve des choses
39:20très voisines,
39:22sauf que là, il n'y a plus
39:24l'internaute lambda
39:25qui a envie de partager
39:26des MP3 avec des gens.
39:29Il n'y a que les boîtes d'un côté,
39:32les boîtes d'IA en gros,
39:33et de l'autre,
39:34le secteur des industries culturelles
39:36dans un affrontement
39:37et dans une tension.
39:38Mais en tout cas, ce qui est sûr,
39:39c'est que cette question
39:40du partage de la valeur
39:42ou d'une forme de rémunération,
39:43au moins, elle est posée.
39:45Effectivement, peut-être que le point
39:46sur lequel ils peuvent le plus...
39:49ou en tout cas,
39:52qui est sans doute d'ailleurs
39:53leur inquiétude très immédiate
39:56et qui, pour le moment,
39:57n'est pas encore énormément posée,
39:59ça va probablement changer,
40:01c'est ce sur quoi Sadin,
40:03effectivement, a mis le droit.
40:04On peut lui reconnaître ça.
40:06C'est effectivement,
40:07les doubleurs s'interrogent,
40:10en fait, les créateurs s'interrogent
40:12sur les impacts
40:15directs sur leur emploi.
40:16Et là, ce n'est pas une question
40:18de droit d'auteur,
40:18c'est véritablement aussi
40:20une question de droit du travail,
40:21de comment on borde les choses,
40:24aussi de comment, en fait,
40:25tout le reste de la société
40:29prend le sujet.
40:31Juste pour rappeler, nous,
40:32par exemple, à Libé,
40:32on s'est fixé comme règle
40:35qu'on utilise éventuellement
40:37des images générées par IA
40:38uniquement si ça a
40:40un sens éditorial
40:41par rapport à des papiers
40:43qui parlent d'intelligence
40:44artificielle générative.
40:45Mais on s'interdit évidemment
40:49d'utiliser, par exemple,
40:50des photos générées
40:51par l'intelligence artificielle
40:52pour illustrer des articles.
40:56La plupart des grands médias,
40:58ils ont pris cet engagement-là
40:59très vite,
41:00mais on voit bien que
41:02ce n'est pas forcément le cas
41:03partout. Et donc, effectivement,
41:04oui, par exemple,
41:05les photographes,
41:06ils s'inquiètent aussi.
41:07Il n'y a pas que les doubleurs,
41:08c'est aussi les photographes.
41:09Et ça, c'est un sujet
41:10qui est presque un sujet
41:12qui est aussi un sujet éthique.
41:14Pour nous, c'est clairement
41:15une question de déontologie,
41:16mais c'est un sujet éthique
41:18de manière générale
41:18pour l'ensemble de la société,
41:21finalement.
41:21Et d'ailleurs, sur le sujet
41:23du piège de données
41:24et de comment on fait pour protéger
41:26le droit d'auteur sur ça,
41:27dans le cadre du Sommet,
41:29une des solutions, entre guillemets,
41:30qui a été avancée,
41:31c'est celle de la transparence,
41:33notamment sur les bases de données
41:35qui sont utilisées pour entraîner
41:38les modèles de langage,
41:41les intelligences artificielles.
41:43Un des soucis principaux
41:45qu'on a sur ce sujet-là,
41:46c'est que, par exemple,
41:47les grandes intelligences
41:48artificielles américaines,
41:49on ne sait pas vraiment
41:50quel est le corpus de textes
41:51sur lesquels elles ont été entraînées
41:52ou le corpus d'images
41:53ou de vidéos qui constituent
41:56en fait la base de cette IA
41:57et qui explique aussi parfois
41:59ce qu'elle peut livrer
42:00ou ne pas livrer.
42:02Ce manque de transparence,
42:03évidemment, pose forcément
42:04la question de à quel point
42:05est-ce que ça a été des œuvres
42:06d'artistes qui ont été utilisées
42:08contre leur gré,
42:09des livres, des photos, etc.
42:11Et donc, dans le cadre du Sommet,
42:15il y a une fondation
42:15qui a été montée
42:17qui s'appelle Current AI,
42:19qui donc est une fondation
42:20qui vise justement
42:23à rendre disponible
42:24et à investir et à aider
42:25au développement
42:26d'outils open source
42:27et ouverts
42:29et donc transparents techniquement.
42:31Pour permettre à qui le voudrait,
42:33des acteurs mondiaux,
42:35des acteurs économiques,
42:36de créer leur propre
42:36intelligence artificielle.
42:38Et dans le cadre
42:40de cette fondation-là,
42:41il y a notamment une start-up
42:43qui s'appelle Playas
42:44qui est associée au projet
42:45et qui, elle, par exemple,
42:47a monté un corpus
42:49à partir de textes
42:50qui sont intégralement
42:53publics en fait,
42:54qui viennent des archives numériques
42:56de la BNF,
42:58qui viennent d'articles scientifiques
42:59qui ont été rendus publics.
43:00Et d'ailleurs,
43:05l'entrepreneur derrière
43:06cette société-là
43:07m'expliquait,
43:08pour revenir sur le problème
43:11du manque de transparence
43:12base de données,
43:13je vais y arriver,
43:14qui a été utilisée,
43:15par exemple, par ChatGPT
43:16ou même par Meta
43:17pour créer leur propre système.
43:20Par exemple,
43:20à l'heure actuelle,
43:21on a Meta
43:23qui est poursuivie aux Etats-Unis
43:24par plusieurs auteurs
43:26et une actrice aussi,
43:29par rapport à l'utilisation,
43:32qui accuse Meta
43:32d'avoir utilisé leurs œuvres
43:33pour entraîner leur système
43:34d'intelligence artificielle
43:36et qui accuse notamment Meta
43:37de cette basée
43:38sur une librairie
43:40pirate sur Internet
43:42pour créer sa propre
43:43intelligence artificielle.
43:44Ça, pour le coup,
43:45je trouve que c'est
43:46cette histoire d'initiative
43:48Fondation Current AI.
43:50Ça, c'est un des aspects
43:51les plus intéressants, vraiment.
43:53Y compris d'ailleurs,
43:54si on reprend toujours un peu
43:55cette comparaison
43:56entre des débats
43:56qui ont pu exister avant,
43:58même au moment
43:59de l'émergence de l'Internet,
44:00et l'intelligence artificielle
44:02aujourd'hui. Pourquoi est-ce
44:02qu'il y a Internet
44:03partout dans le monde ?
44:04Même si, évidemment,
44:04il peut y avoir des endroits
44:05où la connectivité
44:07n'est pas la même.
44:08Il ne s'agit pas, évidemment,
44:09de nier qu'il y a
44:09des inégalités d'accès.
44:10Mais enfin, grosso modo,
44:11Internet fonctionne
44:12partout dans le monde
44:13parce que les standards
44:14sont ouverts, en fait.
44:16Et ça,
44:18y compris d'ailleurs,
44:18c'est un truc
44:19qu'il faut avoir en tête,
44:20c'est que
44:23la création de l'Internet,
44:25c'est beaucoup des chercheurs.
44:26Ça vient beaucoup des universités.
44:27Ça vient aussi de la Défense.
44:29Mais les universités
44:30sont hyper présentes.
44:31Et on se retrouve, en fait,
44:32avec un système technique,
44:35ou même plus tard,
44:36des chercheurs,
44:36je pense notamment
44:37Anne-Sib Berners-Lee,
44:38qui bossait au CERN
44:39et qui a inventé le Web.
44:41Ces gens-là,
44:42ils ont l'habitude
44:43d'utiliser des standards
44:44ouverts, c'est-à-dire
44:45transparents,
44:46dont tout le monde
44:46peut se saisir,
44:47interopérables.
44:50Et ils ont ça en tête
44:51dès le début.
44:51Et en fait, on se retrouve
44:52effectivement avec
44:53une architecture technique
44:55dans laquelle
44:55chacun peut participer.
44:58Pourquoi est-ce que
44:59le mail fonctionne ?
45:00C'est parce qu'en fait,
45:00c'est un protocole
45:02ouvert et documenté
45:04et que moi,
45:05avec mon adresse
45:06atliberation.fr,
45:07je peux discuter
45:08avec n'importe qui
45:09qu'à chez Gmail
45:10ou dans sa boîte, etc.
45:13Y compris d'ailleurs,
45:14tous les gens qui disent
45:15aujourd'hui, les réseaux sociaux
45:16devraient être interopérables.
45:17C'est ça qu'ils ont en tête,
45:18c'est-à-dire des systèmes
45:19ouverts
45:20dans lesquels, en fait,
45:20chacun peut venir
45:21avec sa brique.
45:23Et la difficulté
45:24qu'on a effectivement
45:25là avec l'IA,
45:25c'est que c'est parti
45:26des boîtes privées.
45:27Et les boîtes privées,
45:28elles n'ont pas exactement
45:30la culture des standards ouverts.
45:31Alors, la particularité
45:33d'OpenAI,
45:34c'est effectivement,
45:35au départ,
45:35c'est une fondation.
45:36Et d'ailleurs, la fondation
45:37existe toujours.
45:38Et qu'au départ,
45:38ils disent,
45:39on va faire des trucs ouverts.
45:41Bon, puis au bout de...
45:42Voilà, petit à petit,
45:43ils referment.
45:44Parce qu'effectivement,
45:44quand les intérêts économiques
45:46sont en jeu,
45:46en général,
45:46c'est un peu comme ça
45:47que ça se passe.
45:48Et l'idée de la fondation,
45:50moi, pour le coup,
45:51je trouve intéressante,
45:51c'est de dire,
45:52si on veut précisément
45:54sortir de ce côté course
45:56et faire en sorte
45:57qu'il y ait des briques
45:59que tout le monde puisse utiliser,
46:00et notamment
46:01dans les économies émergentes,
46:02parce que ça,
46:03c'est clairement le truc
46:04qui est en toile de fond
46:05de cette histoire,
46:06c'est de faire en sorte
46:07qu'effectivement,
46:08il y a un accès
46:09qui ne soit pas un accès
46:10hyper inégalitaire
46:11à la technologie.
46:12Eh bien, pour ça,
46:13en fait,
46:13il faut faire
46:14comme on a toujours fait
46:15dans l'Internet
46:16depuis le début,
46:16c'est-à-dire,
46:17il faut des standards ouverts,
46:18il faut des bases
46:19de données ouvertes,
46:20etc.
46:21Et ça,
46:22bon, là,
46:23je trouve qu'en tout cas,
46:24il y a pour moi
46:25un positionnement
46:26qui est intéressant.
46:28Quand on parle d'IA inclusive,
46:31bon, c'est un peu un buzzword,
46:33mais c'est ça derrière,
46:34c'est l'idée effectivement
46:35qu'il faut des briques ouvertes,
46:37parce qu'en fait,
46:37c'est comme ça
46:38qu'on arrive à partager
46:40un peu le truc,
46:40et qu'on arrive à faire en sorte
46:42que les technologies,
46:43chacun puisse s'en saisir.
46:45Et peut-être d'ailleurs,
46:48effectivement,
46:49trouver à un moment donné
46:50des bifurcations.
46:52D'une certaine manière,
46:53d'ailleurs, on commence à le voir.
46:55Il y a quand même des gens
46:56qui disent,
46:56ben oui,
46:58que ce soit OpenAI
46:59ou toutes les boîtes
47:00qui font de l'IA générative,
47:01en fait,
47:01elles partent du principe
47:02que plus on a de données
47:04et meilleur sera le modèle.
47:08Mais il y a des scientifiques
47:09qui disent,
47:09il y a potentiellement,
47:10en fait,
47:11d'autres voies
47:12qui ne reposent pas forcément
47:14sur l'exploitation
47:15d'immenses bases de données.
47:17Alors moi, j'avoue que celle-là,
47:18c'est le moment,
47:18clairement, on ne va pas se mentir,
47:20où je touche un peu
47:21à ma limite de compétence
47:23en termes scientifiques.
47:24Parce que, bon,
47:25c'est aussi des trucs
47:26qui sont compliqués,
47:26d'avoir le nez dedans et tout.
47:28Et ni Élise, ni moi,
47:29on est Yann Lequin.
47:30Mais même Lequin,
47:31il commence à le dire
47:32qu'en fait,
47:32ben voilà,
47:34il y a aussi des choses
47:35à penser différemment.
47:37Et je trouve que ce type d'initiative,
47:38ça peut nous y aider.
47:39Et du coup,
47:40pour sortir effectivement
47:41d'une logique
47:42où, en gros,
47:43pour exister
47:44et pour avoir des trucs qui marchent,
47:46il faut avoir
47:47le plus de données,
47:48le plus de puces,
47:50le plus d'énergie,
47:51ben en fait,
47:51il y a un moment
47:52où, effectivement,
47:52il faut peut-être réussir
47:54à sortir,
47:55enfin, il va falloir,
47:57en fait,
47:57il va falloir,
47:58on n'aura pas tellement le choix,
47:59il va falloir sortir
48:00de cette logique-là.
48:01Et je pense que là,
48:02pour le coup,
48:02ce type d'initiative
48:04va à mon sens,
48:05enfin, voilà,
48:05ça va plutôt dans le bon sens.
48:06– Quelqu'un rebondit
48:08sur ce que vous dites
48:08en disant
48:09« Dipsyche,
48:09c'est la même chose,
48:10soit disant ouvert,
48:11sauf les données. »
48:11– Alors moi,
48:13j'avoue,
48:14je pense que tu connais
48:14mieux Dipsyche que moi.
48:15– Oui,
48:16alors,
48:16sur les données,
48:18je ne sais pas,
48:19au moment où Dipsyche était sorti,
48:21c'était encore assez flou
48:22et effectivement…
48:22– Peut-être que je peux rappeler
48:23aussi rapidement
48:24ce qu'est Dipsyche.
48:24– Oui, Dipsyche,
48:25alors c'est une start-up chinoise
48:27qui a lancé
48:28un chatbot
48:29qui a fait beaucoup parler,
48:31je crois que c'était
48:32une semaine avant le sommet.
48:34D'une part,
48:34parce que ce chatbot
48:35était,
48:35selon certaines études,
48:37aussi compétent
48:38que les dernières versions
48:40de ChatGPT
48:41et d'autre part,
48:42parce qu'il avait été créé
48:44à moindre frais,
48:45je ne sais plus à combien de millions
48:48c'était exactement,
48:49mais c'était beaucoup moins cher
48:51que ce que OpenAI
48:52a pu dépenser
48:54pour créer ChatGPT,
48:55par exemple.
48:57Et donc effectivement,
48:58Dipsyche,
48:59la différence,
48:59c'est qu'il est open source
49:01sur la structure de l'IA.
49:04Sur les données,
49:05c'est vrai que les échanges
49:06que j'avais eus
49:07avec les chercheurs,
49:08si je me souviens bien,
49:08m'expliquaient que les données
49:09n'étaient effectivement
49:10pas encore accessibles.
49:11– Il y avait une question aussi
49:13pour revenir
49:13sur la question des droits d'auteur,
49:16et quelqu'un nous demandait
49:16très précisément
49:17est-ce que je peux appliquer
49:18des droits d'auteur
49:18à une oeuvre que j'aurais généré par l'IA ?
49:20Est-ce que vous avez la réponse là-dessus ?
49:22– Oh, la colle !
49:28Alors en fait,
49:31j'aurais tendance à penser,
49:32mais bon,
49:33alors ça va être un peu
49:34au doigt mouillé,
49:35donc je garantis pas
49:36que ma réponse soit vraiment exacte,
49:38mais il faut quand même,
49:41le droit d'auteur peut jouer
49:43à partir du moment
49:43où il y a un auteur, en fait.
49:45C'est-à-dire que si,
49:47par exemple,
49:47si je demande à Groc
49:48une image de n'importe quoi,
49:52en fait, je suis pas l'auteur du truc.
49:55En revanche,
49:56les artistes qui travaillent
49:58à partir de modèles
50:00type Mid-Journey, etc.,
50:02mais qui en font des choses
50:03avec une singularité,
50:05c'est-à-dire que c'est leur oeuvre,
50:07eux, oui.
50:09Mais le droit d'auteur,
50:10de manière générale,
50:11qui soit ce qu'on appelle
50:13patrimonial ou moral,
50:17parce qu'il y a deux aspects
50:18dans le droit d'auteur,
50:18c'est un truc très français,
50:20mais il y a le droit patrimonial
50:21de, effectivement,
50:22l'exploitation d'une oeuvre
50:23va rapporter des sous.
50:26Et puis, il y a le droit moral,
50:27c'est-à-dire que
50:27quand un auteur est vivant,
50:30ou même, je pense,
50:31un certain nombre d'années
50:32après sa mort,
50:33de la part de ses ayants droit,
50:34on peut pas en faire n'importe quoi.
50:36Ça pose, par exemple,
50:37notamment,
50:38le droit de parodie existe,
50:40mais si, par exemple,
50:42j'écris, je sais pas,
50:44je fais une BD
50:46en utilisant Tintin
50:47et j'en fais un album
50:48de 50 pages
50:49où je lui fais faire n'importe quoi,
50:52y compris des choses
50:53qui seraient pas du tout
50:54dans l'esprit de départ
50:55ou j'en sais rien,
50:57sans demander l'autorisation
50:59et que les ayants droit d'hergé
51:01disent « c'est pas possible »,
51:03ça, ça relève du droit moral, en fait.
51:05Il n'y a pas qu'une histoire
51:06de droit patrimonial.
51:07Mais à chaque fois,
51:07ça se pose quand même
51:09sur la singularité d'une oeuvre.
51:12Donc oui, non, effectivement,
51:13c'est un truc Café Mid-Journey
51:16ou un truc Café Grok.
51:18Si je l'utilise,
51:19je peux pas, moi,
51:20revendiquer d'appliquer
51:22les droits d'auteur dessus.
51:23Je relaie aussi cette question
51:24parce que ça me faisait penser
51:25à ce qu'on se disait
51:26juste avant le stream, Elie,
51:27sur le clip promotionnel
51:30d'Emmanuel Macron
51:31pour annoncer ce sommet de l'IA
51:32et sur lequel un journaliste
51:34lui a posé la question de «
51:35mais est-ce que vous êtes bien certain
51:36d'avoir les droits d'auteur
51:37pour relayer toutes ces petites
51:38vidéos-là ? »
51:39Oui, tout à fait.
51:40C'est une question qui a été posée
51:42à l'Élysée par un journaliste
51:44et on n'a pas eu la réponse.
51:45Non, on n'a pas eu la réponse,
51:46mais du coup, effectivement,
51:47j'aurais tendance à penser
51:48qu'en fait,
51:52un prompt,
51:52c'est pas une oeuvre.
51:53Donc si c'est l'IA
51:55qui génère Macron
51:56avec des couettes,
51:59la personne qui a demandé
52:00une vidéo de Macron
52:01avec des couettes,
52:02elle peut pas revendiquer
52:02du droit d'auteur.
52:04Pour refermer cette discussion,
52:05j'aimerais, Amèle, te poser
52:06la question que j'avais posée
52:07en ouverture à Élyse.
52:10C'est une question peut-être
52:10un peu compliée comme ça,
52:11spontanément,
52:12mais peut-être que tu auras
52:13une réponse, quelque chose
52:14qui va tout de suite
52:15venir à ton esprit,
52:16c'était d'évoquer
52:18le moment,
52:19qu'il soit anecdotique ou non,
52:21en tout cas, qui a raconté
52:21quelque chose qui t'a, à toi,
52:22le plus marqué
52:23lors de ce sommet de l'IA,
52:25une rencontre,
52:26quelque chose que tu as vu,
52:28que tu as appris,
52:30quelque chose qui t'aurait marqué
52:31pendant ce sommet de l'IA,
52:32pendant ces deux jours.
52:33Marqué à titre personnel,
52:35je pense que j'ai encore
52:36un peu la tête dans le guidon
52:37pour ça.
52:37Non, ce qui m'a fait rigoler,
52:38c'est qu'effectivement,
52:39au moment où j'arrive
52:40au Grand Palais,
52:40je vois direct Cédrico,
52:43qui est là,
52:43et donc, effectivement,
52:44on voit bien,
52:45on voyait bien que l'écosystème
52:47était très présent.
52:48Donc, Cédrico,
52:49qui est l'ancien secrétaire
52:50d'État au numérique,
52:50mais qui surtout,
52:51aujourd'hui,
52:52fait beaucoup de conseils
52:54et de lobbying pour Mistral,
52:55y compris en tenant des positions
52:57qui peuvent être, à mon sens,
52:58assez contraires à celles
52:59qu'il tenait quand il était
53:00au gouvernement,
53:01en matière de régulation.
53:02Donc, effectivement,
53:03il y a ce côté un peu marrant
53:05de voir tout ce petit monde
53:06qui est là.
53:07Mais non, moi,
53:08j'ai plutôt envie, effectivement,
53:10de remettre l'accent
53:12sur ce que je trouve
53:14moins intéressant, en tout cas,
53:16dans toutes ces discussions,
53:17c'est ce qui émerge, oui,
53:19en termes de, voilà,
53:19on veut des standards ouverts,
53:20on veut des données ouvertes.
53:22En gros, si je devais le résumer,
53:24j'ai tendance à penser,
53:25alors peut-être c'est du
53:26wishful thinking,
53:26mais bon,
53:27je pense qu'une autre réalité
53:28qui est très importante,
53:29c'est qu'il n'y a pas
53:30Mais bon,
53:31je pense qu'une autre RIA
53:32est possible.
53:33Mais pour qu'une autre RIA
53:34soit possible,
53:35il va falloir,
53:36à un moment donné,
53:36sortir de ce truc
53:38de paradigme de la puissance,
53:40qui est quand même assumé
53:41un peu par tout le monde.
53:42Bon, on l'a dit tout à l'heure
53:43avec Macron,
53:44mais finalement,
53:45Von der Leyen,
53:46quand elle dit
53:46on veut avoir...
53:48Elle dit quand même
53:50le leadership n'est pas pris,
53:52et ça peut être l'Europe.
53:53En fait, la question,
53:54c'est est-ce qu'on a envie de ça ?
53:54C'est-à-dire, est-ce qu'on a envie
53:56que ce soit une question
53:56de leadership ?
53:58Moi, personnellement, non.
54:00Et du coup, voilà,
54:00moi, j'ai plutôt envie
54:01de retenir de ce sommet
54:03des gens qui portent cette voie-là,
54:04de dire,
54:05la question,
54:06c'est pas de faire la course,
54:07la question,
54:07c'est comment on partage,
54:08la question,
54:08c'est comment on fait en sorte
54:09que les technologies
54:11aient un impact plus positif
54:13que négatif.
54:13La question,
54:14c'est comment on sauvegarde
54:15nos droits sociaux,
54:16comment on sauvegarde
54:17notre délibération démocratique
54:18pour que tout ça
54:18soit pas court-circuité,
54:20voire bousillé par les IA.
54:22Et la question,
54:23effectivement,
54:24c'est comment on continue
54:25à faire société
54:26en maîtrisant ce truc.
54:29Et moi,
54:29que cette voie-là existe,
54:32je me dis,
54:32ouais, j'ai plutôt envie
54:34de l'entendre plus.
54:36– Et cette voie-là,
54:37elle existe ?
54:38On la voit, elle est audible ?
54:40– Elle existe,
54:42mais d'une certaine manière,
54:44elle est toujours un peu écrasée,
54:45et c'est ça qui est parfois un peu...
54:47Alors moi, oui,
54:48je trouve que c'est un peu rageant,
54:49c'est que c'est toujours un peu écrasé
54:51par le côté
54:52course aux investissements.
54:53– Il y a un côté moins
54:54wow effect avec cette voie-là,
54:56et qui du coup,
54:57est moins médiatisé.
54:58– C'est sûr que quand on dit,
55:00et d'ailleurs,
55:00c'est ce qu'il y a dans notre papier
55:01avec Arthur,
55:02c'est un représentant
55:03donc de la Société des auteurs
55:04et compositeurs dramatiques.
55:06Lui, alors avant d'ailleurs
55:07que Macron ait répondu
55:09à Drill Baby Drill de Trump
55:11par Plug Baby Plug,
55:12lui dit Regulate Baby Regulate.
55:15Et évidemment,
55:16oui, ça vend moins du rêve,
55:18mais on sait que c'est ça
55:19qu'il faut faire,
55:20parce qu'on sait
55:20que c'est ça
55:22qui peut nous permettre,
55:24effectivement,
55:24qu'on n'aille pas dans le mur
55:26avec tout ça,
55:26parce qu'il y a quand même
55:27un risque qu'on se prenne
55:28un mur à un moment.
55:29Et ce n'est pas le risque existentiel,
55:31c'est beaucoup plus
55:32le risque environnemental,
55:33le risque social,
55:34le risque démocratique.
55:35– Merci beaucoup
55:37d'avoir été avec nous
55:38et merci beaucoup
55:38à Maëlle et Élise
55:39d'avoir été avec nous ce midi
55:40pour revenir sur ce sommet de l'IA.
55:42– Merci à toi.
55:42– Bonne journée à tout le monde.

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