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Ce jeudi 13 février, devant le tribunal correctionnel de Pointe-à-Pitre, un nouveau moniteur d’auto-école a été condamné à dix-huit mois d’emprisonnement avec sursis pour mauvaise conduite. Âgé de 58 ans, il s’est vu par ailleurs infligé une peine complémentaire d’interdiction définitive d’exercer cette profession. Reportage de Richard GARNIER.

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00:00Ce jeudi 13 février, devant le tribunal correctionnel Point 3, c'était le troisième
00:07moniteur d'auto-école en quelques mois à être condamné avec sursis pour mauvaise conduite
00:12sexuelle. En l'occurrence, cet homme de 58 ans était reconnu coupable d'agression sexuelle
00:17contre 10 victimes, dont seulement deux étaient présentes à l'audience. Il a été condamné à
00:2118 mois d'emprisonnement avec sursis. C'est bien moins que les réquisitions du ministère public,
00:26qui demandait lui une peine de trois ans d'emprisonnement, dont deux ans avec sursis,
00:29soit un an ferme. Cependant, le procureur, soulignant qu'il tentait sa chance avec tout
00:34le monde, par des caresses sur les cuisses ou sur les hanches des jeunes filles élèves,
00:38et envoyé à certaines des SMS équivoques, il a été suivi dans sa demande de peine complémentaire
00:44d'interdiction définitive d'exercer son métier. Représentante de la partie civile,
00:48maître Arianna Rodriguez, a rappelé que la base des cours de conduite et de mettre les élèves en
00:53confiance, pour l'avocate, le prévenu instaurait au contraire, dans sa voiture école, un cadre
00:59sexuel. Alors, ce qu'on entendait par là, c'est toutes les insinuations que monsieur faisait aux
01:05élèves, les petits noms, les pseudonymes utilisés, le fait, la familiarité, le fait qu'il leur
01:11caressait les cuisses. Dans ce cadre là, on n'était plus dans un cadre d'instruction, mais on était
01:17dans un cadre de séduction. Et ça allait bien au-delà de ses fonctions, parce que ce n'est pas
01:22ce que ma cliente attendait de ces cours d'auto-école. Et tous les témoignages d'ailleurs
01:27des victimes étaient convergents. C'est ça. En réalité, vous avez différents élèves qui ont
01:33pris des cours avec ce prévenu, qui finalement ont le même discours et répètent le même mode
01:41de fonctionnement. Et c'est pour cela, il me semble, que le tribunal est entré en voie de
01:46condamnation aujourd'hui. Une condamnation, mais avec une peine avec sursis. Vous le regrettez
01:53quelque part ? On n'est jamais véritablement satisfait par une peine. Ce qui nous satisfait,
01:59c'est qu'en tout cas, la voix de ma cliente en tant que victime a été reconnue et que sa
02:06souffrance également a été reconnue. Après, compte tenu de l'absence de casier judiciaire,
02:11je ne m'attendais pas non plus à une peine ferme. De son côté, l'avocat du prévenu,
02:16maître Pierre Uchiko, tentait alors une plaidoirie risquée, celle de dédramatiser
02:21les gestes de son client tout en plaidant la nature même de l'homme. Alors tout d'abord,
02:26j'ai l'habitude de dire que je plaide en sincérité. Je suis contre la culture de l'esbrouf. J'ai
02:31exposé doctement, après une longue période d'instruction de plus de 18 mois, avec une
02:40enquête et le ressenti que j'avais par rapport à ce dossier en tentant de mettre en évidence
02:47l'aspect psychologique. C'est d'ailleurs pour cette raison que j'ai fait état des conclusions
02:54de l'expert psychiatre, deux, excusez du peu, qui indiquent qu'il n'y avait pas de volonté de
03:02faire mal, ni de volonté de combattre une infraction pénale, mais qu'avec une explication
03:08pédagogique, mon client aurait pu très bien comprendre ce qu'on lui reproche. Et cette
03:14observation me permet de dire à quel point aujourd'hui les hommes doivent adapter leur
03:21comportement au nouveau contexte, c'est-à-dire qu'une simple blague ou alors un comportement
03:28tactile d'un collègue vis-à-vis d'une collègue peut tout à fait conduire un individu qui n'a
03:33jamais connu les circuits de la police et de la justice devant le tribunal correctionnel.
03:38Vous avez dit en gros qu'il fallait considérer ces faits sous l'angle de la morale et non pas
03:44du droit pénal, en disant qu'il avait tout à fait le droit de draguiller, comme vous l'avez dit.
03:48Absolument, l'expression draguiller, enfin le verbe draguiller a été employé par le procureur,
03:54et dans ces dossiers-là, il faudrait savoir sur quel terrain on se place. Est-ce qu'on se place
03:58sur le terrain de la morale, ça veut dire est-ce que quelqu'un a le droit, un collègue a le droit
04:04de draguer une collègue ? Est-ce qu'une collègue a le droit de draguer un collègue ? Là, on n'est
04:08pas sur le terrain. Là, c'était des clientes, en tout cas des jeunes élèves du cours du moniteur
04:14d'auto-école. Absolument, mais dans l'immense majorité des cas, à part pour la victime qui
04:22s'est présentée et qui a indiqué qu'elle était âgée de 17 ans et plus, l'immense majorité des
04:28clients de cette école étaient des majeurs, et on ne sait jamais quelles sont les conversations
04:34qui sont entamées dans les voitures à ce moment-là. Et j'ai indiqué, en étant d'une sincérité
04:40brutale, que j'étais persuadé que mon client avait autant été dragué que lui, il a pu draguer. Et
04:45donc, ce sont des dossiers qui sont particulièrement techniques, parce que j'ai mis en évidence
04:49également le fait que pour moi, l'élément moral de l'infraction n'était pas constitué, dans la
04:56mesure où, lorsque mon client a pu donner une tape en guise de correction, ou lorsqu'il a pu toucher
05:04des cheveux, ou lorsqu'il a pu toucher une cheville, et qu'il n'y avait pas de sa part la conscience
05:11qu'il commettait une infraction pénale. Et j'ai indiqué là aussi, en sincérité, qu'il y avait un
05:15travail de pédagogie qui devrait désormais être fait auprès des jeunes garçons, auprès des hommes,
05:21pour leur expliquer qu'on est désormais dans un contexte normatif différent, et que la manière
05:26d'interagir avec les femmes, désormais, doit être complètement différente, parce que, je le répète
05:33encore une fois, un comportement qui était banalisé, qui était considéré comme normal auparavant, est
05:40considéré désormais comme étant des attouchements, et également comme une agression sexuelle au
05:46sens pénal du terme. Le moniteur d'auto-école est comme donc d'une peine d'avertissement, mais ne
05:50pourra désormais plus jamais exercer sa profession. Il est également frappé d'une interdiction pour
05:55dix ans de toute activité avec des mineurs, et sera inscrit au fichier des auteurs d'infractions
05:59sexuelles ou violentes.

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