Un déjeuner partagé avec Emmanuel Tjibaou, député "Gauche Démocrate et Républicaine" de Nouvelle-Calédonie, pour parler d'un marché solidaire qui s'est très vite organisé après la fin des émeutes de mai 2024. Le collectif citoyen Solidarité Rivière Salée s'est relevé les manches pour organiser chaque samedi un marché pour s'approvisionner en produits frais, en vêtement, mais aussi pour retrouver du lien social.
Au menu également: la crevette bleue, unique au monde grâce à son goût et à sa texture, une des fiertés de la Nouvelle-Calédonie. Élevée dans les eaux du lagon, elle fait le bonheur des restaurateurs de l'île.
Valérie Brochard et Jean-Pierre Montanay partagent un repas avec une personnalité : politiques, chefs cuisiniers, artistes.... L'occasion d'aborder un thème d'actualité, autour de reportages et d'un menu élaboré avec des plats typiques de leur région, souvenirs d'enfance ou qu'ils apprécient particulièrement. Comment le contenu de nos assiettes impacte-t-il nos modes de vie ? Tout en parlant gastronomie, c'est l'avenir de notre société et les enjeux de demain qu'ils questionnent.
Abonnez-vous à la chaîne YouTube LCP : https://bit.ly/2XGSAH5
Suivez-nous sur les réseaux !
X (ex-Twitter) : https://x.com/lcp
Facebook : https://fr-fr.facebook.com/LCP
Instagram : https://www.instagram.com/lcp_an/
TikTok : https://www.tiktok.com/@LCP_an
Newsletter : https://lcp.fr/newsletter
Retrouvez nous sur notre site : https://www.lcp.fr/
#LCP #Politiquesatable
Au menu également: la crevette bleue, unique au monde grâce à son goût et à sa texture, une des fiertés de la Nouvelle-Calédonie. Élevée dans les eaux du lagon, elle fait le bonheur des restaurateurs de l'île.
Valérie Brochard et Jean-Pierre Montanay partagent un repas avec une personnalité : politiques, chefs cuisiniers, artistes.... L'occasion d'aborder un thème d'actualité, autour de reportages et d'un menu élaboré avec des plats typiques de leur région, souvenirs d'enfance ou qu'ils apprécient particulièrement. Comment le contenu de nos assiettes impacte-t-il nos modes de vie ? Tout en parlant gastronomie, c'est l'avenir de notre société et les enjeux de demain qu'ils questionnent.
Abonnez-vous à la chaîne YouTube LCP : https://bit.ly/2XGSAH5
Suivez-nous sur les réseaux !
X (ex-Twitter) : https://x.com/lcp
Facebook : https://fr-fr.facebook.com/LCP
Instagram : https://www.instagram.com/lcp_an/
TikTok : https://www.tiktok.com/@LCP_an
Newsletter : https://lcp.fr/newsletter
Retrouvez nous sur notre site : https://www.lcp.fr/
#LCP #Politiquesatable
Catégorie
🗞
NewsTranscription
00:00Générique
00:02...
00:18Bonjour à toutes et à tous et bienvenue dans Politique à table,
00:21l'émission qui vous emmène en voyage depuis l'assiette de nos invités.
00:26Cette semaine, on part dans le Pacifique Sud,
00:28grâce à vous, Emmanuel Djibaoui. Bonjour.
00:30Et bonjour à vous, Jean-Pierre Montaner.
00:32Bonjour, Valérie.
00:34Emmanuel Djibaoui, vous êtes aujourd'hui député
00:36de la 2e circonscription de Nouvelle-Calédonie,
00:39inscrit au sein du groupe gauche démocrate et républicaine,
00:42ici, à l'Assemblée nationale.
00:44Un siège que vous avez gagné cet été,
00:47le 7 juillet dernier, suite à la dissolution.
00:50Il y a encore quelques temps, vous étiez à la tête
00:52de l'Agence de développement de la culture canaque
00:55et du centre culturel Djibaoui,
00:57établissement qui a pour objectif de préserver et valoriser
01:00l'histoire de votre île,
01:02une île que vous espérez voir un jour indépendante.
01:05C'est votre combat, c'est aussi l'héritage de votre père,
01:07Jean-Marie Djibaoui, qui a fondé, en 1984,
01:11le Front de libération nationale canaque et socialiste.
01:1440 ans plus tard, quand les événements de mai 2024 surgissent,
01:18c'est pour vous une évidence.
01:20Vous rejoignez les rangs du nouveau Front populaire
01:22et vous tentez de défendre l'autonomie de votre île
01:24en transmettant son identité.
01:26Ses particularités et sa coutume,
01:28une coutume dans laquelle la nourriture joue un rôle primordial.
01:33Et ça tombe bien, vous avez justement choisi un menu très local
01:37que va nous décrire Jean-Pierre.
01:38Oui, le plus traditionnel des plats canaques,
01:40un bougnard au poulet et en dessert, une salade de fruits.
01:44Dans le dessous des plats, on vous emmènera faire le marché,
01:47celui de Rivière-Salé,
01:49un quartier particulièrement touché par les émeutes de mai dernier.
01:53Dans les pieds dans le plat, gros plan sur l'un des trésors
01:55de la Nouvelle-Calédonie, la crevette bleue d'élevage,
01:58crustacé d'exception que les chefs s'arrachent en cuisine.
02:01Voilà pour le menu, maintenant, on passe à table
02:04et je vous propose de nous ouvrir l'appétit
02:06avec Cuisine et Confidence.
02:14Emmanuel Chibahou, figurez-vous qu'à un jour de mai 1998,
02:18je me trouvais sur vos terres, à Yengen,
02:20pour rencontrer les proches, les frères de lutte de votre père,
02:24Jean-Marie, tandis que les accords de Nouméa se négociaient
02:27à cinq heures de piste de là.
02:28Face à la mer turquoise, à l'ombre des cocotiers
02:31bercés par les Alizés, j'avais été chaleureusement accueilli.
02:34L'hospitalité canaque, c'est quelque chose.
02:36Dans un vaste prés, s'affairaient des femmes
02:39autour d'un confins confectionné avec de larges feuilles de bananier,
02:43fumant depuis des heures sur des pierres chaudes
02:45et exhalant de savoureuses effluves de poisson et de lait de coco.
02:49J'ai donc découvert, ce jour-là, le fameux bougnard,
02:52le plat de votre peuple par excellence.
02:54Et voilà qu'aujourd'hui, nous allons partager, avec Valérie,
02:57avec vous, un bougnard, deux bougnards, à 27 ans d'intervalle.
03:00Pour moi, c'est tout sauf un hasard.
03:02Ca veut dire que ce plat est bien plus qu'un totem
03:04de votre cuisine simple et nourrissante,
03:06préparée avec les produits du terroir,
03:08comme l'ignam, le taro,
03:10et puis aussi les bananes, le manioc.
03:14Ce bougnard incarne aussi une façon de vivre.
03:17Il rythme la vie en tribu, symbolise la fête, la solidarité,
03:20le partage.
03:21Sur cet archipel fracturé par des émeutes meurtrières
03:24qui ont ravivé les haines et déchiré entre deux camps,
03:27voire deux destins,
03:28ce bougnard paraît bien dérisoire pour restaurer l'unité.
03:32Qu'importe, faute de restaurant calédonien à Paris,
03:35j'ai cette fois préparé moi-même ce bougnard,
03:37celui de l'espoir,
03:39en souhaitant qu'il soit à la hauteur de vos attentes.
03:41Alors, goûtons-le.
03:42Alors, allons-y.
03:43Alors, est-ce que déjà, ça sent un peu le bougnard bien préparé ou pas ?
03:48Dites-nous.
03:50Oui, ça va.
03:51Je dirais qu'il manque le fumet
03:55qui est celui que l'on a lorsque la préparation est enveloppée
04:00dans les feuilles de bananier couvert à l'étouffée
04:04avec de la terre et puis des roches brûlantes.
04:08Oui, alors ça, c'est évidemment très difficile à resituer.
04:11C'est ça.
04:12Moi, j'ai fait la version un peu intérieure, la version cocotte.
04:16Je raconterai tout à l'heure,
04:18mais on a quand même mis des feuilles de bananier
04:20et tous les ingrédients du bougnard,
04:23mais pas dans un jardin, pas avec des pierres chaudes,
04:25qui donne un goût inimitable.
04:27On en parlera tout à l'heure.
04:29Là, vous venez de le goûter.
04:30Est-ce qu'il ressemble à celui que vous mangez chez vous ?
04:34Je dirais que c'est différent.
04:35Après, je pense aussi que c'est rattaché aux ingrédients qu'on prend.
04:41L'importance qui est celle de l'ignam,
04:44c'est aussi la terre, le terroir qui l'accueille.
04:48Et donc, du coup,
04:49la Tiedanit, chez moi, c'est une terre d'alluvion,
04:52au bord de rivières.
04:54C'est là où, généralement, ça pousse,
04:57autant que sur les flancs de montagne.
04:59Ça donne un goût... On a un goût différent.
05:02Chaque ignam, il y a presque 300...
05:04Sortes, variétés ?
05:05De variétés.
05:06Et sur les îles, du fait du sol calcaire
05:10et le sol volcanique...
05:12Voilà celui qui a servi à l'élaboration de cette recette.
05:15Je ne sais pas d'où il vient.
05:17C'est très beau.
05:18C'est très beau.
05:20Nous, traditionnellement, on fait ça,
05:24pour savoir le...
05:25Les tchébis.
05:26Qu'est-ce que vous faites exactement ?
05:28Avec l'ongle.
05:29Vous le grattez un peu ?
05:31Gratter pour voir...
05:32La chair ?
05:33Quelle couleur il est.
05:34Ah !
05:35Lorsqu'on prépare les plants pour les planter,
05:39ça, c'est à partir de juillet-août.
05:42Les travaux, c'est le moment où on fait cet exercice.
05:45Il prend le nom de cette action de griffer avec l'ongle
05:48pour déterminer quelles semences on va planter
05:51pour la saison suivante, pour la récolter la saison suivante.
05:55Celui-ci ne ressemble pas à celui de Nouvelle-Calédonie,
05:58à celui de votre terroir ?
06:00Si, il ressemble un petit peu.
06:02Je ne sais pas.
06:03Ça ressemble un peu à un koubuit.
06:06Mais voilà, il y a des parties mauves à l'intérieur
06:09que je ne retrouve pas, là.
06:11Alors, justement, c'est ce que vous faites,
06:14justement, j'allais vous demander.
06:16Est-ce que vous le faites, vous, le bouignan ?
06:20Je crois que c'est très particulier.
06:22C'est-à-dire que les tâches sont bien séparées.
06:25Les hommes préparent le feu, ce fameux feu avec les pierres chaudes.
06:28Les femmes s'affairent plutôt à la confection du bouignan.
06:31C'est comme ça que ça se passe ?
06:34Le bouignan, on dit que c'est un plat
06:37qui a l'image de la société.
06:40Il y a l'ignam en soi.
06:43C'est un cycle qui prend une maturité de neuf mois.
06:46C'est un peu le même cycle que les bébés dans le ventre.
06:49Quand on le consomme, on le célèbre pour les premières récoltes,
06:53à l'occasion d'une fête, on dit fête de l'ignam.
06:56Et donc, là, dans ce plat-là, c'est un plat du quotidien,
06:59c'est un plat de célébration, parce qu'il comprend à l'intérieur
07:02le goût de la terre, du terroir, l'ignam,
07:05qui représente l'homme,
07:09puisque c'est un tubercule noble par excellence
07:12qui est partagé à l'occasion des cérémonies coutumières,
07:15et offert. Et puis, les tubercules féminines,
07:18comme les tarots, qui poussent pour les tarots
07:21sur des cultures irriguées.
07:23Les tarots d'eau et de montagne ?
07:26C'est un peu à l'image de la société traditionnelle,
07:29où il y a des influences qui viennent des vallées,
07:32des influences qui viennent du bord de mer,
07:35plus l'arrosé de lait de coco.
07:37C'est l'influence polynésienne que vous retrouvez
07:40sur les îles de Wallis, de Fidji,
07:44jusqu'en Polynésie et en Haute-Terre,
07:47à Nouvelle-Zélande.
07:48A propos du lait de coco, on en trouve maintenant
07:51dans les supermarchés, dans la grande distribution.
07:54Il y a 74 % de pulpe de coco, de l'eau.
07:58J'ai vu sur les vidéos, en Nouvelle-Calédonie,
08:01que vous le faites vous-même, vous râpez le coco,
08:04vous rajoutez de l'eau.
08:06Ca se fait dans un linge où on extrait ce jus ?
08:09Ca donne un petit peu la base
08:12qui constitue le liquide
08:16dans lequel tout ça va cuire.
08:19Quand je disais que ça représente
08:22un peu l'image de la société,
08:25c'est que le travail du four,
08:28c'est réalisé par les hommes,
08:32et la confection en elle-même du plat,
08:35c'est le travail des femmes.
08:39L'épluchage, c'est les garçons qui le font.
08:42Ils le grattent aussi, les jeunes garçons, généralement.
08:45Après, le pressage, c'est les mamans qui vont presser.
08:48Elles ramassent l'ensemble de la pulpe
08:51qu'elles vont poser dans un torchon.
08:55Après, elles vont l'arroser et le presser
08:58à deux mains, et le jus qui va servir
09:01de base.
09:02Il doit être aussi meilleur que le lait de coco.
09:05Là, il s'avère que c'est un bounir avec du poulet,
09:08mais est-ce qu'on le fait plus souvent avec du poisson,
09:12où les deux se valent ?
09:14On fait avec du poisson, avec du poulet,
09:17avec des langoustes...
09:19Peu importe, en fait.
09:21C'est ce que vous avez sous la main,
09:25ou il y a des codes et des rites particuliers ?
09:28Il y a des bouniers qui sont offerts
09:31uniquement à certaines cérémonies,
09:34à certains clans qui peuvent réaliser,
09:37pour les autorités coutumières,
09:39un type de bounir spécifique,
09:42qui est, je le disais tout à l'heure,
09:45une fonction statutaire sociale qui leur est dédiée.
09:48Chacun vient à l'occasion de la cérémonie des ignames,
09:51amène ce bounir qu'ils offrent à la chefferie,
09:54selon un ordre ritualisé,
09:58et la célébration est faite au moment
10:01où on découvre le plat enveloppé
10:04dans les feuilles de cocotier
10:06et les feuilles de bananier.
10:08Lorsque le fumier exhale sur la grande terre,
10:12au moment de la cérémonie des ignames,
10:15c'est là où on demande les bénédictions aux esprits,
10:18d'accompagner tout ce qui va être les travaux de la communauté,
10:22que ce soient les diplômes, les décisions politiques,
10:25les mariages, etc.
10:27C'est pas n'importe quel plat ?
10:29Non. La feuille de bananier,
10:31on en parle depuis tout à l'heure,
10:33ça donne un goût ?
10:34Ou c'est juste pour recouvrir,
10:36on aurait pu prendre n'importe quoi ?
10:40Je pense que ça donne un goût.
10:42Là, la différence, c'est que nous,
10:44au moment où on prépare,
10:46on prend les jeunes feuilles de bananier
10:49et on les passe au feu pour les assouplir.
10:53Lorsque vous avez ce type de feuilles,
10:56lorsque vous allez recouvrir, elles vont se percer.
10:59C'est trop dur, la texture.
11:01Je pense que ça participe aussi du goût,
11:04puisque c'est à l'intérieur de ça qu'on les occupe.
11:07J'ai passé à la flamme ces feuilles de bananier.
11:11Pour les assouplir ?
11:12J'ai tapissé la casserole.
11:14Pour les assouplir, on peut aussi les blanchir.
11:17C'est vrai qu'ils cuisinent de façon exotique.
11:20Ce qu'ils donnent dans la recette du bougnard,
11:24il faut le voir, quand elles s'effarment,
11:27la feuille est complètement brûlée.
11:29Elle donne un peu de goût.
11:31Mais c'est surtout le fumet.
11:33Je ne trouve pas que ça soit une feuille
11:36qui se donne le plus de goût à l'aliment.
11:40On parle du bougnard,
11:42mais j'imagine qu'il y a plein d'autres plats traditionnels
11:45en Nouvelle-Calédonie. Lesquels ?
11:47Nous, on a essentiellement la culture...
11:50C'est...
11:54Il y a les nourritures crues,
11:57les nourritures bouillies et les nourritures cuites.
12:00Les premiers aliments qu'on va manger
12:03lorsqu'on est petit garçon, c'est des nourritures bouillies.
12:06Pour éviter les contaminations, les maladies, etc.
12:09Et puis après, tous les fruits.
12:12Plus on avance dans les séquences de vie,
12:15c'est là où on va manger les nourritures grillées.
12:18Par exemple, les cigales grillées.
12:20On fait des brochettes de cigales à la saison des cigales.
12:23On les enfile et c'est un peu un apport de protéines
12:27aussi. Parce que chez nous, autrefois,
12:30on n'avait pas de gibier.
12:32On avait juste des petits insectes
12:35et puis un oiseau qui s'appelle le notou.
12:38C'est une forme de gros pigeon noir que l'on consomme.
12:42Vous parlez du gibier.
12:45Il y a le cerf, la présence du cerf,
12:48très conséquente en Nouvelle-Calédonie.
12:51Est-ce que vous le chassez ? Comment ça s'organise ?
12:55Le cerf est arrivé avec les Européens.
12:58Je pense aussi comme le cochon sauvage.
13:01A la Calédonie, à la différence des îles du Pacifique,
13:05c'est la seule île où on n'a pas de cochon,
13:08où on n'a pas de cava.
13:10C'est une boisson qu'on consomme sur l'ensemble du Pacifique.
13:13Pour ce qui concerne le cerf, comme le cochon sauvage,
13:16généralement, c'est...
13:20Ou le bétail, arrivé aussi avec la colonisation,
13:23c'est en salade, en brochette, en rôti.
13:26C'est un peu ça qu'on...
13:29Je lisais que vous mangez des brochettes de cerf.
13:32Ca se fait assez...
13:35Il y en a beaucoup sur les marchés.
13:39Si vous allez sur la route du Nord,
13:42à partir, je pense, dès que vous passez Boulou-Paris,
13:45en allant vers le Nord, jusqu'à l'extrême Nord,
13:48Poidimier, Connais, vous allez trouver des endroits
13:51où les gens, sur les petits marchés, vous proposent
13:54des brochettes de cerf ou de poulet.
13:58Pour remonter sur la question de Valérie,
14:01qui parlait de la consommation du cerf et de la chasse,
14:04l'espèce rusin du cerf est quasiment invasive.
14:07Elle fait d'énormes dégâts dans les cultures néo-calédoniennes.
14:10La chassée, c'est aussi régulé. Autrement, on ne s'en sortirait pas.
14:15Je crois que tout le monde chasse, en plus.
14:18Oui, la tradition de chasse, c'est vraiment quelque chose
14:21qui est commun chez nous. Les familles,
14:24tout le monde a un fusil dans sa maison pour aller à la chasse.
14:28Soit un fusil plongé ou un fusil de chasse,
14:32parce que ça fait partie des apports réguliers
14:35où les gens n'ont pas forcément besoin.
14:38C'est ce qui a été le cas, par exemple,
14:41durant la période de Covid, où les gens étaient en tribu
14:44au bord de mer, avaient la possibilité de pouvoir...
14:47...de se nourrir, quoi.
14:50Vous parlez du kava.
14:52Vous pouvez nous expliquer ce que c'est, exactement ?
14:55Le kava, c'est une variété de poivre
14:58qui pousse sur, généralement, un substrat volcanique.
15:03Sur l'ensemble des îles du Pacifique,
15:07en Polynésie et en Mélanésie,
15:10on consomme la racine,
15:14que l'on va râper.
15:16On la broie un peu.
15:18Il y a des effets... Comment on va dire ça ?
15:21J'avais lu, anesthésiant.
15:23C'est ça ?
15:25C'est exact.
15:26Donc on le boit, mais on peut recracher les résidus ?
15:29C'est ça ?
15:30En fait, lorsque l'opération,
15:33qui est aussi ritualisée, si c'est un kava traditionnel
15:37ou si c'est un kava...
15:39On dit aujourd'hui les kavabars sur Vanuatu,
15:42si c'est quelque chose qui est consommé de manière régulière,
15:47ce traitement est fait au préalable pour enlever les fibres.
15:51D'accord.
15:52Quand on le boit, on le boit en entier.
15:56Il y a un goût de terre, aussi, à l'intérieur.
15:59C'est un médicament, finalement ?
16:01Un peu, un peu.
16:02Pour revenir à ce bougnat,
16:06vous le disiez, on peut mettre toutes sortes de viandes,
16:10mais aussi du poisson.
16:13Qu'est-ce qu'on met comme poisson en Nouvelle-Calédonie
16:16dans le bougnat ?
16:17Je lisais l'aloche, le vivano, c'est ça ?
16:20Oui, on peut mettre tous les poissons qu'on veut.
16:23Le vivano, ça désigne plein d'espèces.
16:26C'est pas un poisson très spécifique.
16:28Ça désigne plein de sous-espèces, non ?
16:30Il y a plein d'espèces. Nous, on est une île.
16:33Il y a 1 500 espèces, je crois.
16:35Il y a plein de poissons qui poussent,
16:37qui sont plutôt dans les lacs, dans les rivières,
16:41comme les lapias, les petits lochons,
16:45les anguilles, aussi.
16:47On met de l'anguille dans le bougnat ?
16:49Ça se consomme aussi avec ça.
16:51Et sur le bord de mer, l'idée d'avoir ce poisson-là,
16:55c'est qu'il sale aussi, le plat.
16:57Mais oui, il y a toutes les espèces de poissons.
17:00Que vous pêchez...
17:02On a compris que vous récupérez dans certaines rivières,
17:05mais comment s'organise la pêche en Nouvelle-Calédonie ?
17:08Il y a la pêche professionnelle.
17:11Nous, on parle essentiellement de pêche traditionnelle,
17:14pêche de subsistance, parce que ça fait partie aussi
17:17de l'éducation première de tous les garçons et les filles
17:20qui grandissent à proximité de petits crics ou de ruisseaux,
17:23ou en bord de mer, de savoir lancer les perviers
17:27pour attraper des sardines.
17:29Et puis, dès qu'on a cette...
17:31Ou aller à la pêche à la ligne,
17:33on a la chance d'avoir un bateau,
17:35on peut aller faire de la plongée sous-marine aussi.
17:38Donc ça fait partie de la première éducation qu'on a
17:42en tant que garçons et filles, c'est d'abord de...
17:45Comment dire ?
17:47D'être en capacité de se mettre au service de la communauté
17:50pour les travaux collectifs.
17:52Donc la pêche, autant que les plantations,
17:56autant que, je disais, la partie qui concerne la cuisine
18:00est très, comment dire, marquée.
18:02Très codée.
18:04Mais c'est notre éducation première,
18:06je dirais, être agriculteur, pêcheur,
18:08ça fait partie de ce qu'on apprend.
18:11Si on arrive à trouver un bon poisson
18:13ou une bonne viande, comme ici du poulet,
18:16et des feuilles de bananier, on peut faire un merveilleux bougnat,
18:19même si on n'a pas un jardin
18:21ou fabriquer un four avec des pierres chaudes.
18:24Expliquez-nous.
18:25J'aimerais bien avoir un jardin pour faire un vrai bougnat
18:28et pour que monsieur Thibaut soit encore plus content,
18:31j'ai pris des feuilles de bananier
18:34qu'on peut trouver dans des magasins asiatiques,
18:36je les ai passées un peu à la flamme,
18:38comme Emmanuel Thibaut nous le disait,
18:40elles se sont un peu ramollies,
18:42j'ai tapissé une grande casserole avec ces feuilles un peu torréfiées,
18:45un peu carbonisées,
18:47et puis ensuite, j'ai mis mon poulet,
18:49parce que ces feuilles vont donner un petit goût de fumée,
18:51un petit goût sympathique, même dans la cuisine.
18:53Ensuite, on découpe le poulet en morceaux,
18:56ou alors, là, ce sont des escalopes de poulet
18:58que j'ai découpées en morceaux,
19:00et on rajoute ensuite tous les tubercules,
19:02les patates douces qu'on coupe en petits morceaux,
19:04le manioc, le taro, l'igname, qu'on peut même gratter,
19:06bien sûr, bien les éplucher,
19:09parce que la peau est assez coriace,
19:11et puis on peut mettre même, à la fin,
19:13ça, c'est le point 3, des oignons verts,
19:15des tomates, quelques bananes,
19:17là, vous repliez ça avec les feuilles de bananier,
19:20vous couvrez, alors, en Nouvelle-Calédonie,
19:22les femmes, elles ont une façon de retresser ce couffin,
19:24c'est tout un art,
19:26elles le tressent, elles le ferment
19:28pour qu'il soit bien enfermé,
19:30là, c'était un peu plus à la hussarde,
19:33et j'ai fait cuire 3-4 heures,
19:35il faut que ça mijote à feu doux,
19:37parce que c'est du lait de coco,
19:39donc les aliments vont cuire moins vite
19:41que dans de l'eau bouillante,
19:44comme le lait est un peu sirupeux, ça cuit.
19:46Donc, il faut avoir 3-4 heures devant soi.
19:48Voilà, mais moi, je m'y suis pris dans l'après-midi,
19:50parce que je voulais réussir ce bougnard,
19:52et je trouve ça très bon.
19:55Non, mais c'est vrai, vous confirmez,
19:58la preuve, c'est qu'Emmanuel Dibéou se resserre,
20:00donc c'est qu'il n'est pas si mauvais,
20:02il est très réussi.
20:04Et quand on voit que c'est un plat si codé
20:06qu'il y a tellement d'importance,
20:09c'est aussi intéressant de s'attacher à ces plats
20:11et de les préparer.
20:13Et alors, pour accompagner ce plat traditionnel,
20:15vous nous avez demandé
20:17une tisane à la fleur d'oranger.
20:20Pourquoi ?
20:22Tisane à la fleur d'oranger,
20:24peut-être préciser aussi que dans la cuisson,
20:27il y a une manière
20:29de placer les aliments.
20:31Le bas, il est tapissé par les ignames,
20:33parce qu'elles mettent plus de temps à cuire.
20:35Vous allez mettre au-dessus
20:38les patates douces,
20:40par exemple,
20:42parce que c'est un tubercule
20:44qui huit plus vite.
20:46Du coup, les séquences, comme le feu,
20:49il est d'abord par le bas,
20:51on met les premiers aliments
20:53qui ont plus de temps en bas.
20:55Donc, c'est...
20:57Et puis, c'est ce qui fait, après,
20:59qu'on met généralement les patates douces,
21:02on met le sucré ou les poingos, les bananes,
21:04les plantains, on met généralement...
21:06J'avais vu des tutoriels qui sont très bien faits
21:08par des Nouvelles-Calédoniennes,
21:10j'avais respecté un peu ces sous-couches
21:13et j'avais fini par tout ce qui est très facile,
21:15c'est-à-dire les tomates, les oignons verts et les bananes.
21:17La cuisson se fait par le bas,
21:19par contre, le jus, il redescend.
21:21C'est ce mélange
21:23de la fumée et la cuisson par le bas
21:26qui fait que, finalement,
21:28le goût est imprégné au travers du gibier
21:30et des oignons.
21:32Donc, parlez-nous un petit peu
21:34de cette boisson.
21:37Pourquoi vous avez choisi ça, exactement ?
21:39J'ai choisi ça
21:41parce que, traditionnellement aussi,
21:43lorsqu'on termine les repas,
21:45on a l'habitude
21:48de boire de la tisane,
21:50des feuilles de tisane, de la citronnelle,
21:52ou des feuilles d'oranger
21:54ou de citron.
21:56Généralement chaud,
21:58parce qu'une fois qu'on a fini de manger,
22:01c'est le moment où on parle,
22:03où on échange.
22:05C'est aussi pourquoi
22:07on prend ce type de boisson chaude
22:09à la fin, pour faire descendre
22:12et digérer.
22:14Mais pas d'alcool ?
22:16Ca veut dire qu'on ne boit pas d'alcool
22:18en général à la fin d'un repas ?
22:20Aujourd'hui, oui, parce que c'est l'héritage français.
22:22Du vin, du Bordeaux...
22:25Avec ça, généralement,
22:27c'est Bordeaux,
22:29parce qu'on est sur du gibier.
22:31Après, si on a du poisson,
22:33on va plus privilégier du vin blanc
22:36ou du Chablis.
22:38Je disais qu'il y avait de la bière aussi
22:40qui était brassée en Nouvelle-Calédonie.
22:42Elle s'appelle la Number One, si je ne dis pas de bêtise.
22:44C'est une bière que vous appréciez aussi ?
22:47Oui, aussi. Sur les repas traditionnels,
22:49autrefois, on n'avait pas de cava,
22:51pas d'euphorisant,
22:54pas d'anesthésiant.
22:56C'était uniquement de la tisane
22:58ou de l'eau.
23:00Grâce à vous, Emmanuel Djibaoui,
23:02on apprend énormément de choses sur la culture canaque,
23:05mais on va essayer d'en savoir un peu plus
23:07grâce à deux animaux emblématiques de votre île.
23:09C'est tout de suite dans le quiz.
23:11...
23:13...
23:16Oui, on n'a pas évoqué
23:18la roussette encore.
23:20Mais la roussette peut faire partie du bounia.
23:22La roussette, c'est une grosse chauve-souris poilue.
23:24C'est un gibier aussi très prisé en Nouvelle-Calédonie.
23:27Emmanuel Djibaoui, sauriez-vous nous dire
23:29si ces affirmations concernant la roussette
23:31sont vraies ou sont fausses ?
23:33Une fois cuites,
23:35ces fameuses roussettes ont une saveur
23:38proche du pigeon.
23:40...
23:42Je n'ai jamais mangé de pigeon.
23:44Vous ne pouvez pas comparer ?
23:47Alors ?
23:49Je dirais que c'est un fumet plus fort.
23:51Vraiment fort.
23:54Mais pigeon,
23:56je ne saurais pas dire.
23:58Ni lapin, tout ça, on n'a pas ça.
24:00Je fais le sous-texte.
24:02M. Djibaoui pense que c'est non, faux.
24:05Il a raison.
24:07Ça a plutôt un goût de poulet,
24:09mais comme M. Djibaoui le dit, c'est un goût de gibier,
24:11donc c'est assez fort.
24:13Mais en tous les cas, pas du pigeon, qui est un peu plus raffiné.
24:15Une fois sur l'île,
24:18la chasse à la roussette est ouverte uniquement
24:20les samedis et les dimanches de juillet ?
24:22Oui, c'est réglementé, parce que c'est une espèce
24:24qui est en voie de disparition.
24:26Qui est protégée ?
24:29Protégée, oui.
24:31Je répète, samedi et dimanche de juillet ?
24:33Juillet...
24:35Protégée ?
24:37Je n'ai pas compris.
24:40La chasse à la roussette est ouverte uniquement
24:42les samedis et les dimanches du mois de juillet ?
24:44Faux, c'est en avril.
24:46C'est au moment de la fête des Indiens.
24:48Exactement, donc c'est réglementé
24:50et on ne peut pas faire n'importe quoi
24:53et les fenêtres de tir, si j'ose dire, sont réduites.
24:55Pardon, mais on chasse comment une chauve-souris ?
24:57Comment on fait pour chasser la chauve-souris ?
24:59Ce n'est pas les petites chauves-souris qu'on connaît.
25:01Je sais bien, j'imaginais, mais comment on fait pour chasser la chauve-souris ?
25:04On a plusieurs techniques.
25:06On peut faire des filets avec des bois,
25:08les faire tomber,
25:10et puis aujourd'hui, avec les fusils de chasse.
25:13C'est très réglementé aussi
25:15du fait que, je disais,
25:17c'est une espèce qui est en danger
25:19et qui se déplace
25:22sur l'ensemble de la province,
25:24soit du nord jusqu'aux îles, jusqu'au sud.
25:26D'accord.
25:28Les grosses roussettes sont surnommées
25:30renards volants. Est-ce que c'est vrai ou faux ?
25:33Je n'ai jamais entendu ce nom.
25:35Ah bon ?
25:37Je l'ai retrouvé partout. Oui, vrai,
25:39parce qu'effectivement, elles sont poilues,
25:41mais quand elles se déploient,
25:43elles peuvent avoir 1,70 m d'envergure.
25:46Ils sont peut-être...
25:48C'est parce qu'il n'y a pas de renards chez nous.
25:50En tous les cas, c'est leur surnom.
25:52Peut-être dans un pays voisin ou sur une île voisine,
25:54mais en tous les cas, c'est le surnom
25:57des roussettes un peu grandes.
25:59En France, seules les chauves-souris
26:01issues des grottes situées en Provence,
26:03c'est-à-dire dans le sud de la France,
26:05sont consommées. Vrai ou faux ?
26:08Je ne connais pas les grottes de Provence.
26:10C'est faux, parce qu'en France,
26:12on ne mange pas les chauves-souris.
26:14Et pour une raison, mais c'est intéressant,
26:16et après, vous passerez à votre quiz,
26:18et je parle sous le contrôle d'Emmanuel Chimahou,
26:21c'est que les roussettes, elles se nourrissent
26:23de fruits de baie, donc leur chair
26:25est assez intéressante gustativement.
26:27Or, nos chauves-souris, elles sont un peu rabourries,
26:29elles ne bouffent que des moustiques.
26:32Aucun intérêt.
26:34Pour ceux qui n'aiment pas se faire piquer par les moustiques,
26:36c'est pratique d'avoir une chauve-souris.
26:38Je vous avais promis d'en apprendre un peu plus
26:40sur deux animaux, et bien maintenant,
26:42c'est l'heure du bulime de l'île des Pins.
26:45C'est un gros escargot, un cousin de celui
26:47qu'on a l'habitude de déguster dans l'Hexagone.
26:49Alors, saurez-vous nous dire si ces affirmations
26:51sur les gastéropodes sont vraies ou fausses ?
26:53Le bulime est une espèce menacée.
26:56A l'île des Pins, oui.
26:58C'est vrai. Vous avez raison.
27:00De plus en plus difficile à trouver.
27:02On envisage même de créer des élevages sur l'île
27:04pour préserver cette filière.
27:07Deuxième affirmation.
27:09L'escargot de Bourgogne, cette fois,
27:11était le préféré des Romains sous l'Antiquité.
27:14Je ne sais pas.
27:16Je pense que oui.
27:18C'est vrai. Vous avez raison.
27:20On l'engraissait même avec du lait.
27:22Au Moyen-Âge, lors du carême,
27:25l'escargot remplaçait la viande sur les tables.
27:27Je dirais oui aussi.
27:29Vous avez raison. Vous avez une bonne intuition.
27:31Absolument, c'est vrai.
27:33Et puis, les plus gros consommateurs d'escargots
27:35sont les Chinois.
27:38C'est vrai ou c'est faux ?
27:40Je ne sais pas.
27:42C'est faux. Figurez-vous que 30% des escargots
27:44consommés dans le monde le sont par des Français.
27:46Et oui, qui devancent les Espagnols et les Marocains.
27:49Les Chinois sont loin derrière.
27:51Parce que chaque plat est un voyage dans l'espace,
27:53mais aussi dans le temps,
27:55on va se balader ensemble dans vos souvenirs,
27:57tout de suite, dans la brève de Comptoir.
28:03Emmanuel Thibault, pour préparer cette émission,
28:05on vous a demandé de plonger dans votre mémoire
28:07et de retrouver un souvenir qui mêle politique et cuisine.
28:09Et vous nous emmenez sur votre île,
28:11évidemment, avec un moment très particulier,
28:13la dégustation des ignames.
28:16Racontez-nous.
28:18C'est une anecdote qui...
28:20Ça parle de...
28:22Tous les ans, on mange les ignames chez nous.
28:24Et quand on est petit,
28:27on a conscience que l'igname,
28:29c'est quelque chose qui est important.
28:31On le cultive.
28:34En tant que jeune garçon,
28:36ça fait partie des travaux qu'on nous inculque.
28:38On l'offre à l'occasion des cérémonies.
28:40Et la première fois qu'on la mange,
28:42parce que c'est ritualisé,
28:45c'est le moment où toutes les communautés,
28:47tous les clans de la tribu se rejoignent
28:49et amènent leurs offrandes auprès de la cheferie.
28:51Et puis on organise un repas
28:53qui va être consommé ensemble.
28:56Et donc, c'est là où les choix politiques
28:58sont faits.
29:00Et pour la vie de la tribu,
29:02les mariages,
29:04accompagner les naissances,
29:06accompagner aussi l'ensemble de la vie
29:09qui est celle de ces petites communautés.
29:11Et quand on a fini les rituels,
29:13on va prononcer...
29:15Au moment où on va faire cuire les ignames.
29:17Et au moment où on va
29:20manger les ignames,
29:22on va ouvrir la marmite.
29:24Et puis à l'intérieur de laquelle
29:26les ignames ont été uniquement bouillis
29:28avec de l'eau.
29:30Sans apport autre
29:33que celui de l'igname cuit avec l'eau.
29:35Et puis,
29:37on va ouvrir la marmite
29:39et dans les vapeurs de la marmite
29:41qui vont sortir,
29:44il y a un vieux qui est désigné
29:46qui va demander,
29:48au moment où la vapeur sort,
29:50aux esprits qui sont autour de nous
29:52de nous accompagner dans l'ensemble
29:55de la vie qui va être...
29:57Enfin, on dit de donner les esprits
29:59de donner les bénédictions pour l'année.
30:02C'est un rapport au politique
30:04qui parle de l'intimité,
30:06qui parle aussi du fait qu'on mange
30:08ce qu'on produit et qui rapporte
30:10aussi cette communion
30:13que l'on a avec la nature et avec les autres.
30:15Elle se traduit
30:17dans cette communion autour
30:19du politique et le manger.
30:21Une fois qu'on a demandé
30:24à cet officiant
30:26de demander les bénédictions
30:28pour l'ensemble des travaux
30:30qui vont être engagés pour nous tous,
30:32il prononce ces mots
30:35dans les vapeurs de la marmite
30:37et on dit que les vapeurs montent
30:39et qu'elles recouvrent le pays
30:41et que tous les esprits
30:43qui ont cheminé avec nous
30:46depuis des siècles et des millénaires,
30:48c'est eux qui nous accompagnent
30:50à chaque fois qu'on fait ces cérémonies
30:52et qui nous accompagnent encore aujourd'hui
30:54lorsqu'on fait les choix,
30:56au travers du manger.
30:59On reste en Nouvelle-Calédonie,
31:01plus précisément à Nouméa,
31:03dans le quartier de Rivière-Salée
31:05où, vous allez le voir dans un instant,
31:07le marché a pu renaître après les émeutes
31:10de l'année dernière.
31:12On va remplir ensemble notre cabas
31:14dans le Dessous des Plats.
31:21L'association Solidarité Rivière-Salée
31:23s'est organisée très vite
31:25à la fin des émeutes en mai 2024
31:28alors que le centre commercial a été détruit
31:30en très grande partie.
31:32Cette association citoyenne s'est relevé les manches
31:34pour organiser chaque samedi matin
31:36un marché pour s'approvisionner
31:39en produits frais, en vêtements,
31:41mais aussi pour retrouver du lien social.
31:43Redonner de la vie au quartier
31:45grâce à son marché,
31:47c'est ce que va vous montrer notre reporter Clément Perreault.
31:55Nouméa, particulièrement touchée par les émeutes.
31:58Ici, tous les commerces alimentaires
32:00ont été détruits.
32:02Impossible pour les habitants
32:04de s'improvisionner près de chez eux.
32:06C'est dans ce contexte de crise
32:09qu'affleurit cet étonnant marché.
32:11Il n'est pas géré par la mairie
32:13ou une quelconque collectivité territoriale, non.
32:15C'est un collectif citoyen
32:17qui l'organise tout seul, bénévolement,
32:20chaque samedi.
32:22On s'est senti mis beaucoup de côté
32:24parce qu'on fait partie des quartiers normes, malheureusement.
32:26Le quartier, en plus, Rivière-Salée,
32:28qui a été banalisé, stigmatisé.
32:30Nous, en tant que résidents,
32:33si on aime le quartier où l'on vit,
32:35qu'on puisse se bouger tout simplement.
32:37On a décidé de prendre les choses en main.
32:39Et ça marche.
32:41Plus de 160 exposants
32:44ont répondu présents.
32:46Pour les producteurs, à l'heure où les commerces
32:48sont à l'arrêt, ce marché offre une chance
32:50inespérée d'écouler leurs marchandises.
32:52Au quartier des émeutes, il y a eu un moment
32:54où il n'y avait plus du tout de vent.
32:57On a été bloqués, on n'a eu plus de revenus.
32:59Et le problème, c'est qu'on a des produits
33:01qui sont au champ, qui ne peuvent pas être écoulés.
33:03On a eu la chance d'avoir ce point de vent.
33:05Sinon, on n'aurait pas d'autre endroit
33:08que se mettre sur le bord de la route.
33:10Ce n'est pas uniquement les politiques
33:12qui peuvent organiser des choses.
33:14Tout le monde ici peut organiser des choses.
33:16Et ça, c'est de l'entraide aussi.
33:19Après le traumatisme des émeutes,
33:21ce marché est plus qu'un simple point de vente
33:23pour les Calédoniens.
33:26Il leur permet aussi de retrouver un peu de vivre ensemble.
33:28On se reparle, on en discute.
33:30Mais ce qui s'est passé avec les émeutes,
33:32ça a été très difficile.
33:34Avant, c'était chacun pour soi.
33:37Maintenant, on se retrouve main dans la main,
33:39comme on dit.
33:41Avec les événements, on s'est un peu éparpillés.
33:43Et maintenant, des trucs comme ça,
33:45ça rassemble le monde.
33:48Ils sont calédoniens.
33:51Ce marché est un symbole
33:53d'une société calédonienne
33:55qui reprend vie en s'organisant seul,
33:57sans attendre les aides politiques
33:59ou institutionnelles.
34:02Est-ce que vous le connaissez, ce marché ?
34:04Est-ce que vous y êtes allé ?
34:06Non. J'habite à Koné.
34:08Il y a 300 km au nord.
34:10Mais j'ai de la famille
34:13qui participe.
34:15Et ça fait partie
34:17des démarches qui ont été engagées
34:19juste après le 13 mai,
34:21de solidarité, dans la mesure aussi
34:23où le fait d'avoir
34:26la possibilité
34:28de s'approvisionner dans les grands magasins,
34:30ça a démontré aussi
34:32les limites d'un système
34:34où on est dépendant pour beaucoup
34:37des apports de l'extérieur.
34:39Ça aussi,
34:41c'est dans le cadre
34:43de la dynamique que nous, on porte,
34:45où on doit être autosuffisant au niveau alimentaire
34:48et que c'est,
34:50comment on appelle ça,
34:52un gage de sécurité alimentaire
34:55et aussi de santé.
34:57Dans la mesure où on s'attache
34:59à produire localement
35:01sur des circuits courts
35:03et avec des produits qui sont frais.
35:06Plutôt que des produits
35:08qu'ils ont fait trois fois le tour de la planète.
35:10Justement, vous parlez de ces démarches
35:12dont vous faites partie
35:14aujourd'hui, que vous nourrissez aujourd'hui.
35:17On en est où concrètement aujourd'hui
35:19et comment se reconstruit,
35:21au moment où on se parle, la Nouvelle-Calédonie ?
35:23A l'heure où on est aujourd'hui,
35:25on a un quart du PIB
35:28qui est à terre,
35:30des entreprises qui ont été détruites.
35:34C'est assez compliqué.
35:36Chômage partiel,
35:38on est dépendant aussi
35:41de l'apport,
35:43de la solidarité nationale
35:45et c'est là, je pense aussi,
35:48où on doit se projeter
35:50pour dire quel projet de société on porte.
35:52Nous, on est indépendantistes
35:54parce qu'on pense qu'on est capables
35:56de produire localement.
35:59C'était le cas jusque dans les années 70
36:01et à partir du moment
36:03où on a intégré, je pense,
36:05le boom après le choc pétrolier,
36:07le travail qui était
36:10celui de la terre,
36:12le fait de l'exode massif des populations
36:14vers les centres urbains
36:16a aussi généré des besoins
36:18dans la construction d'équipements,
36:20d'infrastructures et a détaché
36:23pour partie le lien à la terre
36:25et au travail qui est affecté
36:27à se nourrir soi-même
36:29en bénéficiant des ressources.
36:31C'est là où on se reconstruit
36:34par des initiatives solidaires
36:36dans les quartiers nord de Nouméa.
36:38On a aussi sur Tindu,
36:40on a aussi à Normandie,
36:42le même type de démarche
36:44qui est engagée avec les communautés.
36:47Vous parlez beaucoup de la solidarité.
36:49Vous ne croyez plus au pouvoir du politique ?
36:51Le politique ne peut plus rien
36:53pour la Nouvelle-Calédonie ?
36:55Vous discutez avec le nouveau ministre
36:58des Outre-mer, Manuel Valls,
37:00notamment depuis quelques jours.
37:02Qu'est-ce que vous répond le pouvoir politique ?
37:04Je pense qu'il y a une vraie défiance
37:06aujourd'hui du politique.
37:09C'est pas propre à nous.
37:11C'est propre partout.
37:13Aussi du fait de l'incapacité
37:15que, à un moment donné,
37:17les responsables de tous bords
37:20ont mené les discussions
37:22avec les limites qui étaient la nôtre,
37:24peut-être avec les limites
37:26de l'exercice au niveau
37:28du gouvernement français.
37:31C'est une responsabilité collective.
37:33C'est ce qui est aujourd'hui
37:35mis en oeuvre par la communauté.
37:37C'est aussi de se...
37:39De se prendre en responsabilité.
37:41Si on doit se projeter,
37:44il faut d'abord montrer l'exemple.
37:46L'exemple, c'est d'abord les familles,
37:48c'est d'abord les chefferies.
37:50À un moment donné, dans les quartiers,
37:52il y a beaucoup d'autorités coutumières
37:55qui ont fait venir des containers
37:57de nourriture pour alimenter,
37:59justement, et rappeler
38:01la condition de faire pays,
38:03c'est d'abord soutenir ceux
38:06qui sont dans la difficulté.
38:08Autre chose, autre leçon à prendre,
38:10puisque c'est notre éducation
38:12qui nous a fait de cette manière-là.
38:14Le champ du politique doit reprendre sa place.
38:16Mais, voilà, prendre l'exemple
38:19sur les dynamiques engagées au niveau local,
38:21c'est déjà aussi se rappeler
38:23qu'on est d'abord des hommes et des femmes
38:25et que la terre, c'est notre premier capital.
38:27C'est là où c'est important
38:30de tirer les leçons
38:32de ce qui s'est passé.
38:34Je pense que le 13 mai,
38:36c'est aussi les limites d'un système
38:38où la répartition des richesses est inégale.
38:40J'ai travaillé avec des géographes
38:43en Nouvelle-Calédonie
38:45pour la rédaction de l'Atlas de la Nouvelle-Calédonie
38:47qui me disait qu'il y a plus de Porsche Cayenne
38:49au mètre carré en Calédonie
38:51qu'à Dubaï.
38:54C'est bien la preuve
38:56qu'il y a une répartition inégale
38:58des richesses. Et la solidarité
39:00affichée dans le reportage,
39:02c'est généralement
39:05le premier geste d'humanité
39:07que l'on se doit vis-à-vis
39:09de cette communauté que l'on dit
39:12commune, de partager
39:14une destinée commune ou un avenir ensemble.
39:16Ça n'a de sens que si déjà
39:18on partage le présent.
39:20C'est la volonté et la perspective
39:23dans laquelle on s'inscrit aujourd'hui
39:25en allant à la table des discussions
39:27avec le Fonds de Libération Canac,
39:29le FLNKS.
39:31On est résolus à avancer sereinement
39:34pour que l'Etat prenne ses responsabilités
39:36et l'ensemble de nos communautés
39:38et l'ensemble des pouvoirs publics
39:40sur le rétablissement
39:42d'un système qui soit
39:45peut-être plus vertueux
39:47que capitaliste.
39:49C'est trivial de dire ça,
39:51mais c'est aussi la réalité
39:53qu'on vit en Martinique,
39:56qu'on peut vivre en Guyane,
39:58qu'on vit aussi en Polynésie française.
40:00Le fait de passer sur la chaîne parlementaire
40:02pour dire ça, je pense que ça retombe
40:04aussi sur les débats
40:06que l'on partage au sein du groupe GDR.
40:09C'est pour ça qu'on vous invite.
40:11Je ne dis pas que c'est une opportunité,
40:13mais profitons que beaucoup de choses
40:15ont été détruites pour reconstruire différemment.
40:17Là, ces images, elles ont été tournées
40:20en novembre. Est-ce que ces marchés,
40:22ces centres commerciaux, ces grandes aires
40:24de commerce, le Roi Merlin,
40:26quelques enseignes qui ont été complètement détruites,
40:28est-ce qu'on commence à reconstruire
40:30différemment pour justement, pourquoi pas,
40:33essayer d'atténuer ces disparités sociales
40:35que vous avez mises en avant ?
40:37On peut reconstruire.
40:39La problématique
40:41qui se pose aujourd'hui vis-à-vis
40:44des petites entreprises
40:46et moyennes entreprises, c'est la question
40:48des assurances, qui est aussi
40:50à Mayotte, qui est aussi
40:52en France, après les...
40:55Non seulement qui payent, mais surtout
40:57garantie anti-émette.
40:59Si on rembourse,
41:01est-ce que je reprends une assurance
41:03et que je n'ai pas la possibilité
41:05d'avoir cette garantie ?
41:08En cas de dégradation,
41:10si il y a des dégradations,
41:12je vais récupérer ma mise.
41:14Alors aujourd'hui, sur la question
41:16des assurances et de la reconstruction,
41:19la problématique est posée à cet endroit.
41:21Comment reconstruire
41:23si on n'a pas
41:25les assurances qui nous soutiennent
41:28et derrière une stabilité
41:30politique et institutionnelle,
41:32qui est quand même la garantie
41:34de pouvoir relancer l'économie ?
41:37Tous ces petits commerces
41:39n'ont pas bougé depuis 7 mois.
41:41On est toujours sur un marché
41:43qu'on bricole au milieu.
41:45Le dur n'a pas été reconstruit.
41:48Il faut aussi signaler
41:50que c'est un métier de détruire.
41:52On a beaucoup de constructeurs,
41:54mais c'est un métier
41:56qui est réglementé.
41:59Les dégradations
42:01et les destructions étaient
42:03aujourd'hui à tel niveau
42:05qu'on n'a pas d'entreprise
42:07qui est en Nouvelle-Calédonie
42:10qui est en capacité
42:12de pouvoir assumer la charge
42:14de la destruction
42:16pour pouvoir assainir.
42:18Je vous propose
42:21de revenir à la cuisine calédonienne
42:23avec l'un des trésors
42:25de sa gastronomie,
42:27l'obsiblu. C'est un crustacé
42:29naturellement bleu, élevé
42:31dans le plus vaste lagon du monde.
42:34Une crevette qui met les pieds dans le plat.
42:41Unique au monde, grâce à son goût
42:43et à sa texture, la crevette bleue
42:45est l'une des fiertés de la Nouvelle-Calédonie.
42:47Élevée dans les eaux translucides du lagon,
42:50elle fait le bonheur
42:52des restaurateurs de l'île,
42:54des restaurateurs de la vie.
42:56On vous prépare un autre
42:58nouveau reportage en Nouvelle-Calédonie
43:00pour LCP de Clément Perrault
43:03et de Maxime Simoulin.
43:05...
43:07Face à l'océan Pacifique,
43:09le port de Nouméa et son marché.
43:11Embarquement pour un voyage au gré des Étales,
43:14où se met l'influence océanienne, bien sûr,
43:16mais aussi réunionnaise, vietnamienne,
43:18thaïtienne, reflet des communautés
43:20installées dans l'archipel.
43:22Canot vient tous les samedis y piocher les ingrédients de sa cuisine métissée.
43:27Tu connais le lang en français?
43:29J'ai de la mangue vietnamienne, de la livèche, du shiso.
43:34Donc ça, c'est plus dans les herbes vietnamiennes.
43:37C'est ce que j'aime bien utiliser parce que vraiment, là, ça apporte de la fraîcheur, du peps.
43:42Et pour une note de douceur, un fruit est incontournable, la mangue.
43:47Moi, ce que je vais rechercher, c'est une mangue qui va donner un peu d'acidité en verre.
43:51Et après, en mûre, une un peu plus douce.
43:54Je vais te donner la pilou en verre.
43:56Et puis la mangue péter, sans mûre, alors.
43:58En mûre, ok, voilà.
43:59On part comme ça?
44:00Ok, super.
44:03Une fois les emplettes terminées, place à la cuisine, près de la baie des Citrons.
44:08Voilà le restaurant de David Canot.
44:11Sa recette du jour met à l'honneur un trésor de la gastronomie calédonienne, la crevette bleue.
44:18C'est la couleur du lagon?
44:21J'épluche les crevettes en faisant attention d'enlever le boyau.
44:25Elles sont nourries au planton local.
44:27Elles n'ont pas le goût de vin, ce qu'on va retrouver dans certaines crevettes qui viennent d'autres pays.
44:32Elles sont iodées, mais pas trop fortes non plus.
44:35Elles sont vraiment très délicates, ils les utilisent beaucoup au Japon.
44:37Je rajoute un tout petit peu d'eau pour éclairer un peu la vapeur.
44:51La vinaigrette de mangue, c'est un plat d'été, un plat qui met en valeur les produits calédoniens.
45:09La crevette, la mangue, c'est un plat qui a plein de fraîcheur, qui est parfait pour la saison chaude.
45:17Saison chaude qui nous paraît lointaine dans l'Hexagone,
45:22loin de l'hémisphère sud où le soleil brille autant que les saveurs.
45:27Alors, on a beaucoup parlé de l'Ignam avec ses codes et ses rites.
45:30Là, c'est une autre fierté de l'île.
45:31Mais alors ça, c'est très récent en fait, la crevette bleue,
45:34parce qu'elle n'existait pas naturellement dans les eaux du lagon, si j'ai bien compris.
45:38Nous, on a des crevettes de cric chez nous.
45:41On a des crevettes aussi de bord de mer.
45:44Mais la crevette bleue, ça fait partie des marchés, des stratégies qu'ils ont été engagés
45:49après les premiers accords politiques de 98.
45:52Dans les années 90, oui.
45:53Voilà.
45:54Et aujourd'hui, elle a trouvé, enfin c'est un marché de niche sur le Japon notamment,
46:00et puis quelques chefs gastronomiques ici, voilà.
46:05Ce chef est sur l'île, il est à Nouméa.
46:07Oui, je le connais, David Canon.
46:09Vous allez connaître son restaurant ?
46:10Oui, oui.
46:11Et vous aimez la crevette bleue personnellement ?
46:13Ah oui, c'est très bon.
46:14C'est des repas qui sont, je veux dire, surtout à l'occasion des fêtes, des fêtes où on apprécie
46:22beaucoup les crustacés, que ce soit les langoustes, les crabes ou les crevettes.
46:26Mais c'est un produit de luxe, si je comprends bien.
46:28Tout le monde ne peut pas en manger tous les matins, quoi.
46:31À midi, plutôt.
46:32Oui, à midi.
46:33C'est vrai que, à mon avis, ça passe mieux, vous avez raison.
46:37Non, ce n'est pas vraiment un produit de luxe chez nous, dans la mesure où les formats
46:44– il y a des formats qui sont destinés à l'export et puis il y a des formats qui
46:47sont destinés au marché local.
46:50Oui, c'est ça, je lisais que sur 1 200 tonnes produites par an, 800 partent directement
46:55au Japon, c'est ça ?
46:56C'est ça.
46:57Oui, mais on en a dans les grandes surfaces ici, où on peut en acheter.
47:01Moi, je suis basé sur Kone et juste à une dizaine de kilomètres plus au nord, on a
47:08les fermes aquacoles, où on peut s'empourvoir directement des fermes aquacoles, du producteur.
47:16Alors, c'est une crevette d'élevage, attention, semi-intensif, est-ce que vous
47:23vous êtes assez satisfait, parce que vous avez envie de maintenir l'écosystème calédonien,
47:29est-ce que vous êtes satisfait des conditions d'élevage de ces crevettes ? Est-ce qu'elles
47:32mettent en péril l'écosystème, la biodiversité, l'environnement en Nouvelle-Calédonie,
47:37où vous pensez que la Sopaque respecte de façon drastique ses règles ? On a vu que
47:43c'était un plus pour la Nouvelle-Calédonie, est-ce que ça peut être aussi un danger
47:46pour son environnement ?
47:47Alors, le marché de la crevette, moi je ne suis pas spécialiste, mais c'est un marché
47:51qui est très fébrile.
47:53Les formats dans lesquels aujourd'hui on est, ils correspondent à des formats qui
47:59sont acceptables pour nous.
48:01On a 70 à 80% de biodiversité, on est sur des zones qui sont situées en bord de mer.
48:08Nous, on a aussi ces contraintes-là que l'on souhaite, et donc l'ensemble des projections
48:16qui ont été faites depuis les années 90 sur les productions, en tout cas la mise en
48:21place de la filière Aquacol, elle prend en compte aussi ces réalités-là du fait de
48:28la nécessaire préservation de l'environnement.
48:31Mais ce n'est pas extensif, on ne va pas faire des kilomètres carrés.
48:38Voilà, c'est exactement ce sur quoi j'allais vous relancer, c'est qu'il y a déjà 17
48:42fermes, est-ce qu'il faudra en faire plus ? C'est un modèle qui vous convient ? C'est
48:47un modèle qu'il faudrait contenir, au contraire développer ?
48:49Je pense que c'est un modèle pour l'instant qui correspond au marché qu'on a trouvé.
48:56Je disais, c'est un marché de niches.
48:59Après, la concurrence, je ne vais pas dire qu'elle est sévère, mais elle est ce qu'elle
49:07l'est.
49:08Nous, on a trouvé des niches, je le disais tout à l'heure, essentiellement au Japon
49:12et puis un petit peu en Europe, mais à l'heure d'aujourd'hui, si on s'avance sur des
49:16formats peut-être plus grands, c'est aussi le risque sur ce type de dispositif de générer
49:24aussi derrière l'apparition de parasites, de maladies.
49:28Je crois que c'était aux Philippines où on a eu déjà ce type de projection qui a
49:34été remise en question du fait que plus on augmente, plus on génère aussi du stress
49:40sur les crevettes.
49:41On n'a pas le temps d'en parler, mais disons qu'il y a eu 900 emplois créés parce qu'il
49:44y a une usine de congélation qui a été montée au nord, donc c'est intéressant, on n'a
49:47pas le temps, il faut qu'on passe à autre chose, mais ça a permis d'équilibrer un
49:50peu les offres d'emplois en installant cette usine au nord.
49:53On parlait des disparités, des cayennes, etc.
49:56Donc c'est intéressant aussi.
49:57Et comme on ne finit jamais un repas sans une note sucrée, vous le savez bien Jean-Pierre,
50:01voici maintenant l'heure du Pêcher Mignon.
50:03Alors Emmanuel Chibahou, vous voulez une salade exotique, de fruits exotiques.
50:11On va se contenter de quelques kiwis et des clémentines qui peuvent être de corse, donc
50:19c'est un peu exotique, et quelques ananas.
50:21Mais c'est vrai qu'on n'a pas la diversité de vos fruits.
50:24Parlez-nous de ces fruits de la Nouvelle-Calédonie.
50:26Qu'est-ce qu'on trouve en Nouvelle-Calédonie ?
50:27Alors là, aujourd'hui, on est à la saison des mangues.
50:30Au moment du reportage, vous avez vu, c'était la saison des litchis.
50:35À chaque fois, on respecte le calendrier des saisons.
50:40On a des importations qui arrivent chez nous directement de Nouvelle-Zélande, sur des
50:46poires, sur des pommes.
50:48Mais généralement, quand on est dans l'intérieur ou sur les îles, on mange les fruits de saison.
50:56Mais quelles sont-ils ?
50:58Alors vous nous disiez, litchis, mangues, qu'est-ce qu'on trouve ?
51:01Litchis, mangues, papayas, ananas, des oranges, des mandarines, des citrons…
51:09Pommes lianes, qu'est-ce que c'est ? Ça ne ressemble pas à nos pommes.
51:12C'est les fruits de la Passion.
51:14C'est un cousin des fruits de la Passion ou c'est le fruit de la Passion ?
51:16C'est très bon en jus.
51:19C'est très énergétique.
51:21C'est le fruit de la Passion. J'ai regardé sur Internet, je n'ai pas bien compris.
51:23C'est le fruit de la Passion.
51:25Est-ce que les cultures de fruits en Nouvelle-Calédonie, elles se font de manière intensive ?
51:32Elles se font dans chaque parcelle ?
51:36Tout le monde a un peu son arbre fruitier duquel il se sert un peu ?
51:44Il y a des grandes cultures. Comment ça se passe exactement ?
51:46Quand on est calédonien, en général, on a son petit jardin.
51:50Si vous allez en Calédonie, vous allez chez l'habitant.
51:55Une fois qu'on fait les gestes pour se saluer, pour se dire bonjour quand on est un étranger,
52:01la première chose que l'on fait, traditionnellement, c'est que les gens vous emmènent visiter leur jardin.
52:06À l'intérieur desquels on va retrouver...
52:09Et chaque plante, elle raconte finalement la carte d'identité de celui qui vous accueille.
52:15J'ai planté cet arbre à un mariage à Puebo.
52:18J'ai planté cette citronnelle parce que c'est ton cousin qui me l'a donnée à Yaté.
52:25Cette orange-là, elle vient parce que j'ai récupéré le pied ou la graine lorsqu'on est parti à Lifou.
52:35C'est là aussi où on voit la mixité des relations et la complexité de qui on est.
52:42On est un pays qui est multiple, qui est mélangé.
52:45De la même manière qu'on se retrouve au sein de ce dessert, les saveurs se mélangent.
52:50C'est finalement ça, notre chance.
52:53C'est aussi le projet de cette altérité qui se construit au contact de l'autre.
52:57C'est la règle dans la coutume.
52:59C'est la règle aussi qu'on souhaite voir valorisée.
53:04Parce que c'est aussi prendre en compte qu'on vient tous d'une origine différente.
53:10Mais il faut se mélanger pour finalement créer cette identité nouvelle qui s'appelle celle des Calédoniens.
53:19Qu'on choisisse, pour nous, c'est la dépendance. D'autres veulent rester dans la...
53:22C'est votre chantier. C'est plus compliqué qu'une salade de fruits.
53:27Et donc, pas de rhum dans celle-ci, je crois ?
53:30Si, un tout petit peu.
53:32Vous voulez du rhum, parce que c'est une histoire récente, le rhum et la Nouvelle-Calédonie, non ?
53:37C'est aussi l'histoire, je disais...
53:40Très vite, très vite.
53:43On a une rhumerie venue avec les maristes, installée sur Saint-Louis.
53:48Et puis, c'est aussi l'héritage de nos compatriotes antillais.
53:52Et réunionnais, notamment, qui s'étant enfouis de la France après la royauté,
53:59se sont installés à La Réunion et certains sont venus chez nous avec ces traditions-là
54:03qu'on a intégrées aussi dans notre patrimoine culinaire.
54:06Et pour accompagner ces fruits, vous avez choisi une musique qu'on écoute tout de suite.
54:23Alors, c'est « Kanaki, mon pays » du groupe Bwangep, je le dis bien ?
54:27Bwangep, c'est ça ? Qu'est-ce que ça veut dire, Bwangep ?
54:29Bwangep, c'est le nom de l'instrument à percussion que l'on entend qui marque le rythme et la temporalité.
54:35Instrument traditionnel, pourquoi vous avez choisi cette musique ?
54:38J'ai choisi cette musique parce qu'en décembre 2024,
54:42c'était les 40 ans de la première levée du drapeau du FLNKS, le drapeau de Kanaki, que je porte ici.
54:49Bien sûr.
54:51En Nouvelle-Calédonie et qui marque finalement la trajectoire sur laquelle on est aujourd'hui
54:56d'amener notre pays vers une émancipation qu'on voudrait souveraine.
55:02Et les relations, elles sont aussi à partager avec l'ensemble de nos compatriotes
55:08et en particulier l'État français.
55:10Donc c'est ça le sens de cette musique.
55:12Merci.
55:13Merci infiniment Emmanuel Djibawou d'avoir partagé votre culture et ce repas avec nous aujourd'hui.
55:19Merci à vous.
55:20Jean-Pierre.
55:21Merci Emmanuel Djibawou.
55:22Et puis on se retrouve évidemment très vite pour un prochain numéro de Politique à table.
55:26Salut.