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00:00Bienvenue au Coeur du Crime, un podcast ici des Archives d'Europe 1.
00:08Savez-vous que plus d'un tiers des crimes et délits commis en France sont traités par la gendarmerie nationale ?
00:18Je m'appelle Jan Kermadek, je suis commandant de gendarmerie.
00:27Je dirige une section de recherche dont la mission essentielle est une mission de police judiciaire.
00:42L'histoire que je vais vous raconter est une histoire vraie.
00:46Tous les faits sont réels et se sont déroulés en France.
00:50Seuls les noms des personnes et des lieux ont été changés.
00:57Gordon reconnaît le petit sifflement des involtes dans le hall et il sait qu'un coup discret à la porte va suivre.
01:09Il voit déjà le visage grêlé du vieil homme au chapeau rond, sa longue mâchoire, son sourire jaune, ses yeux bleus délavés derrière les lunettes à monture d'écaille.
01:23« Tu es laid, Kellerman », pense Gordon. « Tu es laid, malveillant, et je te hais. »
01:32Néanmoins, la solution la plus simple est encore de prélever dans son portefeuille les 40 dollars que réclame Kellerman.
01:42Il n'est pas trop gourmand, ce maître chanteur.
01:45Et de fourrer les billets dans la main ridée de son visiteur afin d'avoir la paix jusqu'au mois suivant.
01:53Cette extorsion de fonds est devenue l'une des dépenses fixes du budget, au même titre que le loyer, la note d'électricité ou l'abonnement de Pamela à son club de gymnastique.
02:06Gordon n'a même pas caché l'existence de Kellerman à sa femme.
02:11Pour Pam, celui-ci n'est qu'un encaisseur parmi d'autres.
02:16Elle ne s'intéresse absolument pas au monde ennuyeux de la finance.
02:20Son monde à elle se compose d'expositions de peinture, de cercles littéraires, de promenades avec ses deux enfants, de cours du soir où elle étudie l'histoire politique.
02:33La seule pensée que Kellerman puisse un jour raconter à Pam la sordide aventure que son mari a eue avec cette fille, photo à l'appui, donne à Gordon la chair de poule et déclenche immanquablement un tic nerveux au coin de son œil droit.
02:50Mais Kellerman ne vendrait pas la mèche, bien entendu.
02:55Ça ne l'intéresse pas de détruire le bonheur des couples.
02:58En bon maître chanteur professionnel qu'il est, Kellerman a un code de l'honneur.
03:04Tant qu'on paye, on peut être assuré de son silence.
03:09Gordon aurait sans doute continué indéfiniment à verser ses quarante dollars par mois s'il n'y avait eu l'inflation.
03:18En effet, un jour, oubliant de gratifier Gordon de son habituel sourire jaune, Kellerman déclare « C'est l'inflation, M. Brinton.
03:28Une augmentation de dix dollars, pas plus. »
03:32Il pétrit entre ses mains blanches son feutre rond aux rubans tachés de graisse, compte tenu de la hausse des prix.
03:42Il est tellement humble qu'on pourrait le prendre pour un employé qu'aimant dans une augmentation.
03:49D'un geste sec, Gordon sort dix billets supplémentaires de son portefeuille.
03:54« Très bien. Autre chose pour votre service ? »
03:57« Allons, allons, » dit Kellerman.
04:01« Ne prenez pas les choses ainsi. »
04:05Il a trouvé tout son entrain quand, une fois la porte refermée, Gordon l'entend descendre l'escalier en sifflotant.
04:14Un soir, quelques semaines plus tard, Gordon emmène leur boxeur Lockcho faire une promenade dans le parc.
04:23Pam est allée à Washington Irwin s'inscrire à un nouveau cours d'adulte, un de plus.
04:30Alors qu'il déambule, Gordon sent un regard fixé sur lui.
04:36Finalement, l'homme se décide à l'accoster et se met à parler avec un débit saccadé, précipité.
04:43« Moins vite, moins vite ! » l'interrompt Gordon.
04:46« Je ne comprends pas un mot de ce que vous racontez là. »
04:50L'homme rougit et reprend plus calmement.
04:53« Je voudrais vous parler d'Ed Kellerman. »
04:57En entendant ce nom dans la bouche d'un inconnu, Gordon a l'impression qu'un glaçon se faufile le long de sa colonne vertébrale.
05:07Il examine le visage de l'homme, remarque ses yeux bouffis et ses lèvres minces, exsangues.
05:13C'est un visage rongé par l'angoisse.
05:18« Je ne connais personne du nom de Kellerman. »
05:21finit par répondre Gordon.
05:25« Si on s'asseyait pour bavarder cinq minutes, c'est un boxer votre chien, n'est-ce pas ? »
05:32Il s'installe sur un banc libre et l'homme se présente.
05:39« Je m'appelle Dave Bliss. »
05:41larche-t-il entre deux brefs bouffées de cigarettes.
05:45Inutile, bien évidemment, que Gordon se présente.
05:48Dave Bliss connaît son adresse, comme l'existence de sa femme Pamela et celle de leurs deux filles, puisqu'il l'a abordée.
05:55Il est aussi au courant pour Kellerman.
05:59« Je ne vous demanderai pas comment il vous tient, »
06:01dit Dave Bliss en tirant de brefs bouffées de sa cigarette, « et j'imagine que vous en ferez autant avec moi.
06:09Je voudrais simplement vous poser une question, si vous n'y voyez pas d'inconvénient.
06:13Combien lui donnez-vous ? »
06:15« Moi, il m'extorque cinquante dollars par mois. »
06:19« Idem, » dit Gordon du noir auc.
06:23« Avant, c'était quarante dollars, mais il a augmenté récemment. »
06:26« Oui, oui, oui. Voyez-vous, c'est à ce moment-là que j'ai décidé de le suivre,
06:30histoire de voir ce que je pouvais apprendre sur son compte et s'il y avait d'autres victimes.
06:37J'ignore quel est votre métier, monsieur, mais moi, je travaille dans un bureau de poste.
06:42Et ces cinquante dollars, ça fait un sacré trou dans mon budget. »
06:47« Je suis représentant de commerce, » dit Gordon.
06:49« Je ne suis pas salarié, mais payé à la commission, et certains mois sont vraiment très, très durs.
06:55Et Dieu sait jusqu'où peut aller Kellerman maintenant qu'il commence à se montrer gourmand. »
07:02« Alors comme ça, monsieur Bliss, vous l'avez suivi. Et qu'avez-vous découvert ? »
07:12« Si, comme Gordon, vous voulez le savoir, rendez-vous dans un instant. »
07:24Les exigences grandissantes de son maître chanteur, Ed Kellerman, poussent Dave Bliss à réagir.
07:32Il décide de le suivre et de remonter la filière qui le mènera aux autres victimes.
07:38Il rencontre ainsi Gordon qui promène son chien Lockshaw en bas de son immeuble.
07:45Il lui révèle le résultat de ses investigations.
07:51« Vous avez donc suivi Kellerman et c'est lui qui vous a mené jusqu'à moi ? » reprend Gordon.
07:59Lockshaw se met alors à aboyer sans raison apparente.
08:02« Silence, Lockshaw ! » dit Gordon.
08:06Le chien se calme et vient se coucher au pied de son maître.
08:11« J'ai découvert qu'il a une grosse clientèle. » Enchaîne Bliss en souriant.
08:16« Je l'ai suivi à une douzaine d'adresses différentes.
08:19Ils s'y rendent sans document, compromettant les mains dans ses poches. »
08:24« Nous ne sommes donc pas les seuls ? » dit Gordon.
08:30« Non, et c'est plutôt une bonne nouvelle.
08:33Une petite ordure comme Kellerman ne mérite pas de vivre, même si on laisse de côté l'aspect financier.
08:40Vous réalisez le mal qu'il fait aux gens ? Ils nous minent tous ! »
08:46« Et alors ? » interroge Gordon.
08:50« Qu'est-ce que vous voulez qu'on y fasse ? »
08:54Bliss jette la cigarette qu'il vient à peine d'allumer.
08:57Lockshaw s'approche du mégot, mais l'homme ramène le chien à lui, tout en le caressant.
09:02« Nous allons le tuer ! » dit-il en fixant tranquillement Gordon dans les yeux.
09:09« Nous allons le tuer ! »
09:12« Voilà mon idée géniale. »
09:16« Mais vous êtes fou ! »
09:18« Un meurtre ? Mais c'est pire que du chantage ! »
09:22« Le mot meurtre n'est pas approprié, monsieur.
09:26Disons plutôt qu'il s'agit de rectifier une erreur de la nature, c'est tout. »
09:34Tous deux gardent le silence pendant un bon moment.
09:39« Écoutez, monsieur Bliss, oubliez cette idée.
09:42Je ferai comme si je n'avais jamais rien entendu. »
09:45Reprend Gordon.
09:48Bliss allume une autre cigarette. Il semble maintenant plus détendu.
09:54« Au début, tous les autres ont réagi comme vous.
09:57Ne vous en faites pas.
09:59Vous allez vous faire à cette idée.
10:01Il faut que je vous explique comment je vais procéder.
10:03Ensuite, vous verrez, vous allez, comme tous les autres, vous allier à moi. »
10:09« Qui ça, tous les autres ? »
10:12« Gordon, je vous ai dit que la bonne nouvelle,
10:15c'est qu'on est beaucoup à être victime du chantage de Kellerman.
10:19Les autres, eh bien, ce sont ceux qui sont sur la liste de Kellerman.
10:24J'en ai déjà rencontré douze.
10:27Lorsqu'ils ont compris à quel point c'était facile et sans risque,
10:31ils ont dit d'accord.
10:33Vous savez, quand on a affaire à une crapule comme Kellerman,
10:36il n'y a pas de problème de conscience à se poser.
10:39La seule chose qui importe est de ne pas se faire prendre.
10:43Or, avec mon idée, ce risque est exclu.
10:46Oui, c'est ce que s'imaginent tous les criminels, dit Gordon.
10:49Non, monsieur, non, non, non.
10:52En l'occurrence, il ne s'agit pas d'un crime
10:54et personne ne se fera prendre pour la bonne raison
10:57qu'il n'y aura même pas de meurtre, non.
11:00Ce sera un accident.
11:03Si jamais quelqu'un a des ennuis, ce sera moi, moi seul.
11:06Voilà mon idée géniale.
11:08Écoutez-moi, je vais renverser Kellerman avec ma voiture
11:11un soir où il fera la tournée de ses victimes.
11:13J'ai déjà choisi l'heure et l'endroit.
11:15Carroll Street, un peu avant minuit.
11:19Oui, bien sûr.
11:22Bien sûr, monsieur Bliss.
11:24Un accident.
11:27Vous voyez le service que je vous rends ?
11:31Mais écoutez-moi, monsieur Bliss,
11:33prenez-vous la police pour un ramassis d'abrutis ?
11:36Vous avez une mauvaise lecture.
11:39Figurez-vous que les meurtriers se font souvent attraper
11:41même quand ils maquillent leur crime en accident.
11:45Mais cette fois, ce sera différent, dit Bliss,
11:47car j'aurai des témoins.
11:50Comment ça ?
11:51Oui, j'aurai des témoins en ma faveur,
11:53beaucoup de témoins, tous dignes de foi.
11:55Pas moyen d'établir le moindre lien entre eux.
11:58Aucun faux part douté.
12:00Ils raconteront tous la même chose,
12:02à savoir que c'est la faute de Kellerman
12:04qui s'est traversée par ma voiture.
12:07Gordon se lève.
12:09Ne poursuivez pas davantage, monsieur Bliss.
12:11Vous m'en avez déjà trop dit.
12:13Non, monsieur, il ne faut pas...
12:15Il faut que vous compreniez.
12:17Vous faites partie du plan, comme tous les autres.
12:20Vous ne voyez donc pas que mon idée est sans faille ?
12:24On ne peut pas mettre en doute les témoignages concordants
12:26de citoyens honorables.
12:28Oui, oui, oui, je dis bien honorables.
12:30Un professeur d'université, deux médecins,
12:32deux femmes au foyer, un barman, deux hommes d'affaires
12:34et quelques employés de bureau dans mon genre.
12:36Ils marchent tous avec moi à Brinton.
12:38Tous, sans exception.
12:44Tant de témoins, monsieur Bliss,
12:46pour un malheureux accident de la circulation.
12:50Non, Brinton, certains ne seront pas interrogés par les flics.
12:54N'empêche qu'ils seront tous sur les lieux au cas où.
12:59Nous voudrions que vous y soyez également, Brinton.
13:08Vous êtes vraiment cinglés, tous, autant que vous êtes.
13:11Je refuse d'être mêlé à ce complot.
13:13J'ai beau exécrer Kellerman, je ne vais pas pour autant le tuer.
13:18Mais je vous...
13:19Non !
13:20Un meurtre est un meurtre.
13:24L'interromps sèche, mon Gordon.
13:26Remarquez qu'il y a du bon dans votre idée de s'unir contre Kellerman.
13:30Si nous allions tous ensemble nous plaindre à la police,
13:33peut-être qu'elle trouverait un moyen de le mettre hors d'état de nuire.
13:37C'est ça.
13:38C'est ça, Brinton.
13:40Et Kellerman se mettrait à tout raconter sur nous.
13:43Non, vous n'y pensez pas.
13:45Non, non, merci, mon vieux.
13:47Je préfère de beaucoup ma solution.
13:51Votre solution est abjecte, dit Gordon.
13:55Je vous conseille d'y renoncer.
13:58Gordon saisit la laisse de Lockshaw.
14:01Allez, gros lourdeau, on s'en va.
14:04Gordon se lève et s'éloigne.
14:06Toujours assis sur le banc, Bliss l'interpelle.
14:09Brinton !
14:11Que ferez-vous si l'on passe à l'acte ?
14:15Gordon continue son chemin comme s'il n'avait rien entendu.
14:20Seul, Lockshaw se retourne.
14:26On est jeudi soir. Le téléphone sonne.
14:29Pam répond, mais elle a du mal à saisir le nom de la personne qui est à l'autre bout du fil.
14:34Gordon, je pense que c'est pour toi, mais je ne sais pas qui c'est.
14:38Je le prends dans la chambre, dit Gordon.
14:42Bonsoir, Brinton, dit Dave Bliss.
14:44Vous vous souvenez de moi ?
14:47Oui.
14:48Vous êtes pris demain soir ?
14:51Comment ça ?
14:52Quelques-uns d'entre nous se retrouvent demain soir vers onze heures à l'angle de Carroll Street et de la neuvième avenue.
15:00Que diriez-vous de vous joindre à nous ?
15:02Il y a de fortes chances pour que vous assistiez à un spectacle intéressant.
15:09Gordon murmure d'une voix tendue.
15:12Vous n'oserez pas ?
15:15Nous sommes dans le bain tous ensemble, si ça se trouve.
15:18Vous n'aurez strictement rien à faire, mais vous savez ce que c'est, la force du nombre.
15:25On ne commet pas impunément un acte aussi grave, croyez-moi sur parole.
15:28Aucun problème si nous nous serrons les coudes, dit Bliss.
15:33Tous, sans exception.
15:37Ne comptez pas sur moi, en aucun cas.
15:41Il raccroche brutalement pour bien montrer sa détermination.
15:45Kellerman aurait dû venir toucher son argent le samedi suivant,
15:50mais ce jour-là, Gordon n'entend pas le sifflement habituel et des involtes dans le hall.
16:00Pourquoi Kellerman ne vient-il pas ?
16:04s'interroge Gordon.
16:07Il redoute de connaître la réponse à cette question.
16:11À force de garder sa main moite au fond de sa poche au contact des cinquante dollars qu'il a préparés,
16:18les billets sont devenus humides.
16:23Le soir venu, des pas résonnent dans le hall.
16:28C'est Pam qui revient d'un vernissage.
16:30Il espère, et l'espère-t-il vraiment, qu'elle a acheté le journal au kiosque.
16:37Parfois, elle oublie.
16:39« Bonsoir, mon chéri », dit-elle.
16:41« Pas de problème avec les enfants ? »
16:43« Non, pas plus que d'habitude. Est-ce que tu as pris le journal ? »
16:47« Oui. »
16:49Elle l'a posé sur la table de l'entrée.
16:52Gordon parcourt les faits divers.
16:54Un entrefilé en page intérieure l'arrête.
16:58Un piéton écrasé par une voiture.
17:01Un homme identifié comme étant Edward Kellerman.
17:05Soixante-et-un ans.
17:07Demeurant dix-huit-onze.
17:09Sudworth, à Queens.
17:12A été renversé et tué par une automobile, vendredi un peu avant minuit,
17:17à l'angle de Carroll Street et de la neuvième avenue.
17:21Le conducteur du véhicule, David Bliss, résidente à Manhattan,
17:26a été relâché après interrogatoire.
17:30Quatre personnes présentes sur le lieu au moment de l'accident.
17:33Quatre personnes présentes sur le lieu au moment de l'accident ont témoigné
17:36que la victime, Kellerman, avait traversé à l'instant précis
17:41où la voiture débouchait au coin des deux rues.
17:46En refermant le journal, Gordon éprouve un sentiment bizarre.
17:52Diffus.
17:54Un sentiment qui n'est pas de la joie.
17:58Il ne saurait pas dire pourquoi, mais il est incapable de se réjouir
18:01de la mort d'un homme qu'il déteste pourtant.
18:05Il découpe l'article et le range dans un tiroir.
18:08Pendant une semaine, bien qu'il y pense sans arrêt,
18:13il n'y touche pas.
18:17« Je dois revoir Bliss », ne tarde pas à se dire Gordon.
18:23« Je dois revoir Bliss ».
18:27Il trouve son numéro de téléphone dans l'annuaire.
18:30Bliss se montre d'abord réticent, mais accepte finalement
18:34de rencontrer Gordon le surlendemain matin.
18:37Il lui donne rendez-vous chez Yank, un bar de la douzième rue.
18:42Chez Yank est un établissement familial situé en front de mer.
18:47Quand Gordon arrive, il aperçoit à travers la vitre du bar
18:50Bliss, qui est déjà installée sur un grand tabouret à l'extrémité du comptoir.
18:55Il joue machinalement avec un trousseau de clés.
19:01« Il apparaît plus en forme que le soir de notre première rencontre
19:06dans le parc. Plus calme », se dit Gordon.
19:12Il est encore tôt, à peine sept heures, et de rares clients
19:16sont assis dans la salle.
19:19Gordon rejoint Bliss. Le barman leur apporte deux express.
19:24Lorsqu'il s'est éloigné, Bliss dit
19:29« Vous avez lu le journal, c'est ça ? »
19:32« Oui, je l'ai lu. »
19:34Bliss esquisse un sourire.
19:37« On se sent mieux, hein ? Fini des versements mensuels.
19:41J'ai payé ce type si longtemps que, pour moi, ces cinquante dollars,
19:46c'est comme si j'avais reçu une augmentation de salaire. »
19:51« Les témoins dont parle le journal, étaient-ils tous... »
19:56« Naturellement. Ne vous avais-je pas dit que c'était sans risque ?
20:01Les flics n'en ont interrogé que quatre, mais il y en avait d'autres à proximité. »
20:07« Astucieux, » dit Gordon.
20:12« Vous êtes très audacieux. »
20:15« C'est vrai, on ne peut pas mettre en doute la parole d'autant de témoins
20:20au-dessus de tout soupçon, M. Brinton.
20:23Je vous avais dit que c'était un jeu d'enfant. »
20:27« Mais si un témoin vend la mèche... »
20:31« Personne ne vendra la mèche, il n'y a aucune raison. »
20:34« Enfin, ils ont bien une conscience, non ? »
20:38« Kellerman en avait-il une, lui ? »
20:41« Enfin, Kellerman n'était pas un meurtrier ! »
20:44« Il était pire que ça, Brinton. Pire. »
20:48« Selon vous, Bliss, ce qui fait votre force, c'est le nombre. »
20:52« Mais c'est à double tranchant. »
20:54« Car plus il y a de monde au courant, plus... »
20:58« Nous avons rendu service à l'humanité, » dit Bliss.
21:02« Ne pouvez-vous comprendre ça ? »
21:06« Non. Vous avez tué un homme. Si j'avais ça sur la conscience,
21:10je serais incapable de dormir une nuit de plus. »
21:13« Dédans, mon vieux Brinton. »
21:16« Si vous avez l'intention... »
21:19« Et comment que je l'ai ! »
21:21« Je n'ai pensé qu'à ça toute la semaine. »
21:25« Vous débloquez, Brinton. Vous débloquez. »
21:28« Grâce à nous, vous n'avez plus de soucis à vous faire pour votre fric. »
21:31« Enterrez votre passé. »
21:33« Vous n'allez tout de même pas nous dénoncer pour ça. »
21:37« Les mains de Gordon tremblent tellement. »
21:41« Les mains de Gordon tremblent tellement qu'il doit les coincer entre ses genoux. »
21:47« Je n'ai jamais voulu de votre aide. »
21:49« Je ne vous ai jamais demandé de commettre un meurtre pour moi. »
21:52« Je ne l'oublierai jamais. Ce serait trop facile. »
21:56« Pauvre idiot. »
21:59J'ai mis Bliss d'un air attristé.
22:03« Pauvre idiot. »
22:05Il appelle le barman qui est dans l'encadrement de la porte de la cuisine.
22:10« Hé, Yank ! »
22:12« La même chose. »
22:15Le barman s'approche d'eux, sa serviette blanche posée sur l'avant-bras.
22:20Il s'adresse à Bliss.
22:22« Des ennuis ? »
22:24« Oui. »
22:26Répond Bliss.
22:28« Des ennuis. »
22:30« À nous de jouer. »
22:33Comme par un tour de prestidigitation, un calibre 45 apparaît sous la serviette.
22:39Gordon lève vivement les yeux vers le barman et lit sur son visage une implacable détermination.
22:46Lorsque le canon du revolver s'enfonce dans sa poitrine,
22:49Gordon essaie de l'écarter de ses deux mains.
22:51Du coin de l'œil, il voit Bliss bondir de son tabouret,
22:54puis le coup de feu retentit avec un rugissement assourdissant
22:57qui noie la dernière pensée de Gordon.
23:02« Comment c'est arrivé, Yank ? »
23:04Demande le flic.
23:05« Comment a-t-il reçu la balle ? »
23:07« Bon Dieu, t'as qu'à leur demander, » dit le barman.
23:11« Tu permets que je me serve un bébé, Franck ? Je suis encore sous le choc. »
23:16« Vas-y, vas-y, » dit le flic.
23:18« Quel est votre nom, monsieur ? »
23:20« Walton. Je travaille à la compagnie du téléphone. »
23:24« Et vous, madame ? »
23:26« Chester, » répond la femme au foyer.
23:29« Et moi, je suis le docteur Adams, » déclare le vieil homme.
23:32« J'exerce à la polyclinique. »
23:34« Il était aussi juste à côté de moi, » explique Dave Bliss.
23:38« J'ai fait un bond en arrière quand il a sorti son revolver. »
23:42« Un hold-up, voilà ce que c'était, » dit le barman.
23:46« J'ai même pas réfléchi à ce que je faisais.
23:48Je lui ai saisi le poignet pour le désarmer,
23:50et c'est à ce moment-là que le coup est parti. »
23:53« Exact, » confirme Walton.
23:56« Oui, c'est comme ça que ça s'est passé, » ajoute le docteur Adams.
24:01Et les autres acquiescent.
24:04Moins d'une heure plus tard, la police a fait enlever le corps.
24:07Peu de temps après, les témoins sont autorisés à quitter les lieux du drame,
24:13et chacun retourne à ses occupations.
24:26Sous-titrage Société Radio-Canada

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