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  • 10/03/2025
" Bien sûr que les Etats-Unis sont des alliés" de l'Union européenne, assure Ursula Van Der Layen. Mais l'Europe peut-elle encore vraiment compter sur les Etats-Unis ? Regardez l'analyse du général Jean-Paul Palomeros, ancien commandant suprême de l'Otan.
Regardez L'invité d'Amandine Bégot du 10 mars 2025.

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Transcription
00:00RTL Matin, Thomas Soto et Amandine Bégaud.
00:05Il est 8h16, l'interview d'Amandine Bégaud, plus que jamais au coeur de l'actualité.
00:08Rarement nous aurons connu période aussi instable et inquiétante autour de la guerre en Ukraine
00:12et de ses conséquences que l'on redoute mondiales.
00:14Ce matin, Amandine, vous avez donc choisi de recevoir le général Jean-Louis Paloméros,
00:18ancien commandant suprême de l'OTAN. Bonjour et bienvenue à vous.
00:21Bonjour général, et merci beaucoup d'être avec nous ce matin.
00:24Les Etats-Unis sont-ils toujours, d'après vous, les alliés de l'Europe ?
00:29Alors, sur le plan purement formel, oui, ils font partie de l'Alliance Atlantique,
00:34ils n'ont pas dénoncé cette appartenance.
00:37Maintenant, l'amour c'est bien, mais les preuves d'amour c'est mieux.
00:41Et là on manque de preuves d'amour ?
00:42On manque de preuves d'amour, et on est dans l'incertitude,
00:45parce qu'il se trouve que Donald Trump, si on regarde bien,
00:48ne s'est pas prononcé clairement sur ce sujet,
00:51si ce n'est toujours un peu le même langage,
00:54compréhensible sur le pourcentage du PIB, des choses comme ça.
00:57Mais ça, ça ne crée pas une alliance.
00:58C'est les éléments nécessaires, les outils nécessaires,
01:01mais ça ne crée pas une alliance en soi.
01:02Jean-Paul Paloméros, selon un journal suédois,
01:05et c'est aussi pour ça que je vous posais la question,
01:06les Etats-Unis auraient même déjà indiqué
01:09qu'ils ne participeraient plus aux exercices de l'OTAN l'an prochain, en 2026.
01:13Est-ce que l'OTAN peut se passer des Etats-Unis ?
01:16Est-ce que l'OTAN aurait encore une raison d'être, d'ailleurs, sans les Etats-Unis ?
01:20L'OTAN, vous le savez, c'est 32 pays.
01:23Moins un, ça fait 31, alors c'est un gros...
01:25C'est sûr que ce n'est pas n'importe quel pays.
01:26Certes, mais il faudrait l'alliance dans les Etats-Unis.
01:32On peut se projeter sur l'avenir, ça serait une autre alliance.
01:35Mais elle ferait sens malgré tout,
01:38et en particulier avec le centre de gravité du continent européen.
01:42Une alliance élargie à partir de l'UE,
01:46les 23 pays de l'UE qui participent à l'OTAN sur 32, c'est énorme,
01:50avec la Suède, la Finlande qui en rejoint.
01:53Et donc, on peut imaginer, et on l'a vu d'ailleurs à l'oeuvre en Grande-Bretagne récemment,
01:57la Grande-Bretagne, la Turquie, pourquoi pas, et la Norvège.
02:01Donc, on peut recréer quelque chose,
02:03mais il y aura des trous dans la cuirasse, si vous voulez.
02:07C'est normal, on ne remplace pas les Américains comme ça,
02:09instantanément, dans des domaines comme la défense antimissile, la masse,
02:12et les choses, ou le renseignement même, peut-être.
02:14Des trous dans la cuirasse.
02:16Je reprends votre expression pour évoquer cette fois
02:19ce qui est déjà beaucoup plus concret,
02:21c'est-à-dire ce retrait américain progressif en Ukraine.
02:25En tout cas, la suspension des livraisons d'armes,
02:28la suspension aussi du renseignement américain.
02:31Qu'est-ce qui pose le plus de problèmes ?
02:32Le renseignement, ça c'est un vrai sujet ?
02:34C'est quand même les deux, parce que
02:36le renseignement sur les armes, ça ne sert à rien,
02:38mais les armes sur le renseignement, ça ne sert à rien.
02:40Donc, c'est très complémentaire, et c'est là,
02:42c'est un peu la catastrophe, parce que
02:45retirer l'ensemble,
02:47c'est vraiment ne pas permettre aux Ukrainiens de mener une guerre,
02:51non pas à parité, mais avec des éléments
02:53qui étaient discriminants jusqu'à présent.
02:55Un bon renseignement, ça peut pallier en quelque sorte
02:59peut-être à un moindre armement,
03:02en termes de quantité.
03:03Ça peut pas permettre d'optimiser les opérations,
03:06et ça les Ukrainiens le font très bien.
03:07S'ils sont coupés du renseignement américain,
03:09les Français, les Anglais peuvent faire ce qu'ils veulent,
03:12mais c'est quand même pas le même niveau,
03:14et la même permanence surtout du renseignement.
03:16Vous diriez général que les Etats-Unis accélèrent la chute de l'Ukraine ?
03:19Ben, de facto.
03:21Quand vous coupez le cordon milical,
03:24quand vous coupez l'alimentation en oxygène,
03:27oui, vous finissez par tuer le malade.
03:29Alors face à ça, on le voit, les Européens tentent de s'organiser.
03:32Il y aura notamment cette réunion des chefs d'Etat-major
03:34européens demain autour d'Emmanuel Macron.
03:37Quelle est l'urgence, d'après vous ?
03:39Ah ben, il y a une urgence à définir.
03:41C'est toujours en trois temps, le court, le moyen et le long terme.
03:44Le court terme, c'est la survie de l'Ukraine.
03:46Il faut qu'on détermine avec les Ukrainiens
03:49quelle est désormais leur stratégie.
03:51Mais ça veut dire quoi ? Des moyens ?
03:53Oui, forcément.
03:55Comment les trouver ? Bien sûr, on a déjà,
03:57si vous avez l'expression, raclé un peu les fonds de tiroirs.
04:00C'est de beaux fonds de tiroirs, mais peut-on faire plus ?
04:03J'ai entendu que, par exemple, l'Italie
04:05a envoyé un nouveau système avancé
04:07construit en coopération
04:09de défense antiaérienne.
04:11Voilà un exemple très concret, très précis.
04:13Il faut qu'on essaye de voir dans des domaines très spécifiques,
04:16surtout pour la protection, finalement, de l'Ukraine,
04:18la défense antiaérienne. J'ai entendu que
04:20les Mirage 2000 qu'on leur a donnés
04:23ont agi.
04:25Dans ce sens, c'est les petits ruisseaux
04:27qui vont faire peut-être la rivière
04:29et vont améliorer la protection d'Ukraine
04:32sans le soutien américain.
04:34Mais ça ne peut pas durer très longtemps, quand même.
04:36Il faut être réaliste.
04:37On n'a pas les moyens, sur le moyen terme,
04:39de remplacer complètement les Etats-Unis ?
04:42Là, la question, c'est de savoir jusqu'à quel point
04:44on affaiblit nos propres moyens.
04:47Et là, l'équilibre est difficile à trouver.
04:49Mais je pense que les chefs d'Etat-major,
04:51autour d'une table, qui réfléchissent ensemble,
04:52ça c'est très positif.
04:54Parce qu'eux vont trouver peut-être des solutions
04:56qu'on n'a pas encore imaginées.
04:57C'est positif. Est-ce que ce n'est pas aussi
04:59un peu un moyen, j'allais dire, de
05:01montrer les muscles face à Vladimir Poutine ?
05:04Il y a un aspect diplomatique ou pas là-dedans ?
05:06Ou pas du tout ? Ça c'est des histoires de commentateurs.
05:08Vladimir Poutine, son ennemi héréditaire,
05:12c'est l'OTAN.
05:13Donc si tout ce qui peut affaiblir l'OTAN
05:15et voir l'Union Européenne, c'est tout bon pour lui.
05:17Donc pour l'instant, on lui sert ça,
05:20M. Trump lui sert ça sur un beau plat doré.
05:22Est-ce que ça va durer ?
05:24Ce n'est pas du tout évident.
05:25Il peut y avoir un renversement de situation.
05:27C'est-à-dire ?
05:29Il y a un moment donné quand même où
05:31l'administration américaine,
05:33où on est aujourd'hui, va se rendre compte que
05:36en fait, ce sont les Russes qui ne veulent pas
05:39venir à la table de négociation.
05:40Ils veulent venir, mais dans des conditions
05:42qui sont extrêmes.
05:43Alors ça sera le test, le test ultime,
05:45de voir si vraiment les Américains
05:47veulent des négociations de paix
05:49pour établir une paix durable
05:51entre la Russie et l'Ukraine
05:53et donc entre la Russie et quelque part
05:55l'Union Européenne, ou non.
05:57Ce n'est pas en coupant les vivres
06:00qu'ils vont améliorer la situation.
06:02On peut le répéter, on peut le redire.
06:04Il faut qu'il y ait un doute qui s'installe
06:06quand même dans l'esprit de Poutine,
06:07parce que là, c'est trop facile pour lui.
06:09Mais ce qui complique les choses,
06:10c'est l'attitude de Donald Trump.
06:11Est-ce que vous, au cours de votre carrière,
06:13vous avez eu comme ça à faire
06:15un personnage, j'allais dire, aussi changeant ?
06:18Non.
06:19C'est difficile ?
06:20Non, non, non.
06:21C'était même imprévisible
06:23dans les prévisibilités, si je puis dire.
06:25En 2016, quand Donald Trump est arrivé,
06:28il était très entouré, bien entouré.
06:30En particulier dans le domaine militaire.
06:33J'en connais, c'est le général Matisse,
06:35ancien, précédé,
06:37poste de commandant de l'OTAN
06:39pour la transformation.
06:41Et qui était tout à fait
06:43responsable et raisonnable.
06:45Aujourd'hui, c'est plus du tout ça.
06:47Si on est fidèle,
06:49c'est presque une secte.
06:51Et donc, à part M. Witkoff,
06:54qu'on ne connaît pas,
06:55mais qui est le négociateur central,
06:56qui va être à Doha,
06:58qui va être pendant...
06:59On a ramassé le titre.
07:01Là, on a du mal, vraiment, aujourd'hui,
07:03et c'est pour ça que tout à l'heure,
07:04on parlait d'alliance.
07:05Je ne sais plus vous dire aujourd'hui
07:07si les Américains font réellement partie de l'Alliance
07:10et s'ils sont prêts à assumer
07:11cette défense collective
07:13qui est la clé de l'Alliance Atlantique.
07:15Et forcément, dans ce contexte-là,
07:16c'est compliqué et d'anticiper la suite
07:19et d'imaginer comment se réarmer.
07:23Il y a beaucoup de questions de nos auditeurs
07:26autour de l'effort de guerre qu'il faut faire,
07:28que la France doit faire.
07:29Des questions aussi autour du service militaire obligatoire.
07:32Est-ce que vous, vous pensez qu'il faut y songer
07:35ou en tout cas relancer le débat ?
07:37Le débat, il doit être évidemment national.
07:40C'est la prise de conscience
07:42que notre liberté, notre démocratie a un coût
07:46mais n'a pas de prix, en quelque sorte.
07:48Et que oui, comme d'autres générations l'ont vécu,
07:52on a tendance à l'oublier avec le temps qui passe,
07:55cet effort de défense, de sécurité,
07:58il est national.
07:59C'est l'esprit d'un peuple qui se défend.
08:01C'est un peuple avec...
08:03Mais la guerre a changé aussi de nature,
08:06donc on reste quand même sur des guerres professionnelles.
08:09Donc moi, dans un premier temps, en tout cas,
08:13je milite pour renforcer notre réserve
08:15qui est vraiment un atout considérable.
08:17Sans remettre le service militaire ?
08:19Non, pas à ce stade, mais on peut...
08:21Pas à ce stade ?
08:23Ça ne peut se faire que par étapes
08:26et il faut le faire vraiment avec conscience
08:29de l'impact que ça a sur une population.
08:32On voit la difficulté qu'a M. Zelensky à choisir
08:35entre la mobilisation de ces jeunes
08:37et la vie de l'Ukraine, l'avenir de l'Ukraine.
08:40Donc il faut mettre tout ça.
08:42Mais déjà, si on renforce très sensiblement
08:44le volontariat et la réserve,
08:46il y a plein de jeunes français, jeunes françaises
08:48qui, chacun dans leur domaine,
08:50pas forcément en portant des armes,
08:52le cyber combattant, le guerrier de l'information,
08:55le guerrier de l'intelligence artificielle,
08:56tout ça c'est extrêmement précieux.
08:58Un peu de leur temps pour leur pays.
09:00Quand on est français,
09:02on a des droits, beaucoup de droits,
09:04et on a des devoirs.
09:05Et maintenant, c'est l'heure, je pense, des devoirs.
09:08Merci beaucoup Général Palomero
09:10d'être venu ce matin sur RTL pour nous aider
09:12et voir un peu plus clair.
09:14C'est quasiment une secte autour de Donald Trump,
09:16nous avez vous dit.

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