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La sécurité européenne à "un tournant", dit Ursula Van Der Layen : faut-il avoir peur d'une extension de la guerre ? Regardez l'analyse de Michel Yakovleff, ancien vice-chef d'état-major du Shape (Otan).
Regardez L'invité d'Amandine Bégot du 18 février 2025.

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Transcription
00:00RTL Matin
00:03Avec Amandine Bégaud et Thomas Soto
00:05Il est 8h16, l'interview d'Amandine Bégaud après la réunion d'hier à l'Elysée,
00:09avant les pourparlers entre Russes et Américains sans les Européens tout à l'heure à Riad.
00:14Amandine, vous avez eu envie d'avoir l'éclairage d'un militaire de haut vol
00:17et c'est le général Michel Yacovleff, ancien vice-chef d'état-major de l'OTAN.
00:21Il est donc votre invité ce matin. Bonjour et bienvenue à vous.
00:24Merci à vous.
00:25Bonjour, merci d'être là. Emmanuel Macron a donc réuni hier à l'Elysée plusieurs dirigeants européens
00:29pour évoquer à la fois la guerre en Ukraine et la sécurité européenne.
00:32Sincèrement, d'après vous, elle a été utile, cette réunion,
00:35ou c'est juste histoire de dire on ne reste pas les bras croisés ?
00:38Forcément, ça se jugera sur le moyen et long terme, si vous voulez.
00:42C'est quand même un bon signe qu'il y ait eu des dirigeants de haut niveau européens,
00:47dont le chancelier allemand, dont c'est la dernière semaine avant l'élection quand même,
00:51il doit y avoir un programme, qui se sont trouvé un créneau pour se rencontrer.
00:58Il y en a au moins un certain nombre qui prennent la mesure des enjeux.
01:01On avait l'impression hier que l'heure était grave. Est-ce que l'Europe joue sa survie ?
01:05C'est ça la question qui se pose aujourd'hui ?
01:07Oui, mais elle ne joue pas sa survie depuis avant-hier ou depuis l'élection de Trump.
01:11L'Europe est en coma stratégique depuis les années 90.
01:15Elle a oublié que le monde réel l'entourait et que ce n'était pas que des bisounours.
01:20Donc ça fait quelques années qu'elle le découvre et maintenant elle découvre qu'elle est seule.
01:27Coma stratégique, l'expression que vous employez, volontairement j'imagine frappante,
01:34ça veut dire quoi ? Que l'Europe a fait preuve de naïveté ?
01:37Oui, elle dort.
01:39A partir de la chute du mur, on s'est dit ça y est, c'est la paix perpétuelle.
01:44La seule menace c'est le terrorisme.
01:46Le terrorisme est une menace, mais il y a des menaces plus existentielles que le terrorisme.
01:52On découvre que des gens qui ont des grosses armées avec l'intention de s'en servir
01:56et qui sont à quelques milliers de kilomètres, sont en mesure de remettre en cause
02:03non seulement la prospérité et la tranquillité de nos nations, mais l'existence même de nos nations.
02:09L'existence de nos nations est aujourd'hui en danger.
02:12Oui, le fait par exemple que nous puissions choisir nos dirigeants,
02:15parce que là depuis Poutine il avait la prétention d'imposer les dirigeants qu'il voulait à l'Ukraine,
02:22il n'y a pas de raison que ça s'arrête si on dit oui.
02:25Si on dit oui, ça va continuer.
02:27Donc le régime Poutine est une menace existentielle pour l'Europe.
02:34Pendant 30 ans on a été en vacances, maintenant les vacances sont finies.
02:38Il va falloir se mettre à bosser.
02:39Il va falloir se mettre à bosser, mais pardon, est-ce que ce n'est pas déjà trop tard ?
02:42Alors, si on dit que c'est trop tard, c'est qu'on est déjà mort.
02:45Donc ce n'est jamais trop tard.
02:47Je fais du parachutisme, ce n'est jamais trop tard pour ouvrir le parachute.
02:51On peut l'ouvrir un peu bas, mais voilà.
02:53Mais comment l'Europe peut arrêter ce rouleau compréteur ?
02:56On ne peut pas laisser faire les Etats-Unis et la Russie sans souci de l'Ukraine, sans souci de l'Europe.
03:03Comment on peut peser ? C'est possible ou pas d'après vous ?
03:06On peut et on doit peser.
03:08Déjà, le temps que nous avons devant nous, ce sont les Ukrainiens qui le gagnent pour nous.
03:14Ça fait trois ans qu'ils se battent pour nous, c'est eux qui prennent la tempête.
03:20Pour l'instant, c'est la guerre d'Ukraine qui est en train de réveiller l'Europe
03:24et de nous donner du temps pour se mettre en route.
03:28Maintenant, nous sommes seuls.
03:34Nous sommes lâchés par les Américains.
03:36Vous diriez que ce ne sont plus nos alliés, les Américains ?
03:39Alors, on juge un arbre à ses fruits.
03:43Ils nous traitent comme des ennemis et ils vont faire la cour à notre ennemi, notre adversaire,
03:53notre challenge stratégique.
03:55Vous voyez, on cherche des mots polis.
03:57Mais fondamentalement, quand on a le président des Etats-Unis
04:01qui se sent beaucoup mieux avec des dictateurs qu'avec des démocrates,
04:05on a un vrai problème.
04:08Bon, les discussions vont se poursuivre, mais en tout cas formellement.
04:13Aujourd'hui, à Ariadne, on évoque une rencontre Poutine-Trump dans les jours qui viennent.
04:20C'est une question de jours, d'après vous, ce cessez-le-feu ?
04:23Le cessez-le-feu lui-même, non.
04:27Si tout va bien, je compterais plutôt en semaine.
04:33Mais ce qui m'inquiète dans ce rendez-vous de Trump et de Poutine annoncé,
04:37c'est que Trump a déjà perdu.
04:40Il a déjà perdu.
04:42Si Poutine se déplace, c'est pour emballer Trump,
04:46le retourner, le fariner, le remettre au four.
04:49Il a déjà gagné.
04:52Et pourtant Trump a l'impression, en tout cas c'est comme ça qu'il le vend,
04:55de gagner en trouvant une solution à ce conflit.
04:59Il se paye de mots, il n'a rien compris à celui qu'il avait face à lui,
05:03parce que face à lui, c'est une équipe de professionnels.
05:06Poutine, il sait exactement ce qu'il veut.
05:10Il sait ce qu'il est prêt à concéder.
05:13En anglais, on dit le war game.
05:16Ils ont testé les solutions, ils ont joué.
05:19Il a dans son équipe proche, un ancien ambassadeur à Washington,
05:24qui quand il était à Washington,
05:26ils ont des diplomates admirables, les Russes.
05:30Ils ont une école de la diplomatie, comme Lavrov.
05:33Ils ont des gars qui sont très très forts.
05:36Mais c'est quoi le vrai projet de Poutine, Général Yacob-Lev ?
05:39Quand on vous entend, on a l'impression qu'il veut aller bien au-delà de l'Ukraine.
05:42Ah oui.
05:44Poutine, il fait la guerre à l'OTAN.
05:46Il veut que l'OTAN meure.
05:48Il veut que l'OTAN...
05:50On ferme.
05:52On transforme les bâtiments à Bruxelles en logement social.
05:56On met la clé sous la porte.
05:58Il est en train de gagner là.
05:59Ça s'est fait tout seul, grâce à Trump.
06:01Quand vous entendez que la Suède et le Royaume-Uni se disent prêts à envoyer des soldats au sol en Ukraine
06:05pour assurer le maintien de la paix, en cas de signature de cesser le feu.
06:09Une sorte de casque bleu, si j'ai bien compris.
06:12C'est souhaitable, c'est possible ?
06:14Ah non.
06:15Surtout pas ?
06:16Sûrement pas.
06:17Alors déjà, il y aura peut-être des déploiements, on verra plus tard.
06:20C'est prématuré pour l'instant.
06:21Mais en tout cas, une chose qu'il ne faudra sûrement pas, c'est des casques bleus.
06:25Pourquoi ?
06:26Il n'est pas question de faire comme la finule au Liban.
06:28On va échigner des soldats tous les kilomètres dans des miradors.
06:31Ce n'est pas ça qu'il faut.
06:33Mais qu'est-ce qu'il faut alors ?
06:34C'est une force de garantie, comme les Américains ont en Corée.
06:37La zone démilitarisée en Corée, elle est patrouillée par les Coréens.
06:42Et c'est derrière qu'il y a une force américaine.
06:45Donc là, l'idée c'est, s'il y a un déploiement militaire, c'est pas sûr.
06:49Mais s'il y a un déploiement militaire, c'est une force de contre-attaque.
06:54Donc ça n'a rien à voir avec une force d'interposition.
06:57Mais on a les moyens de cette force de contre-attaque ?
07:00On aurait, oui.
07:01Ah oui ?
07:02Oui.
07:03Le président Zelensky dit...
07:04On est sur 25 ou 30 000 hommes.
07:05On va vraiment s'arracher, mais à plusieurs pays européens, on peut y arriver.
07:09Ce qui serait bien, c'est qu'il y ait les Américains dedans, pour le principe.
07:12Bon, on sait déjà qu'ils ne veulent pas.
07:14Le président Zelensky disait qu'il faudrait 200 000 hommes le long de cette frontière.
07:18Ah oui, mais est-ce qu'il parle d'Européens ?
07:20Je ne suis pas sûr.
07:21Vous voyez ce que je veux dire ?
07:22On en parle comme ça, mais je n'ai pas vu le transcript de ce qu'il a dit.
07:26Qu'il faille, en situation de cesser le feu,
07:30qu'il faille 200 000 hommes sur la frontière, 1 000 kilomètres.
07:33Enfin, sur la frontière, pas la frontière, la ligne de cessez-le-feu.
07:36La ligne de cessez-le-feu.
07:38Ça me paraît logique, mais je ne suis pas sûr qu'il demande aux Européens
07:43ou aux Américains de venir faire le job.
07:45En tout cas, quand Trump dit, aidant cette force, qu'il n'y aura pas d'Américains,
07:49qu'il faudrait qu'il y ait, par exemple, du Chinois ou de l'Indien,
07:53ça prouve qu'il est complètement à côté de ses chaussures.
07:56Il n'a rien compris au film.
07:58Il ne sait pas de quoi il parle.
08:00Mais c'est très inquiétant tout ça.
08:02Juste, d'un mot, comment vous, vous n'êtes pas le seul à être inquiet,
08:06vous qui connaissez parfaitement tout ça,
08:08comment vous voyez les choses pour ces prochains jours et ces prochaines semaines ?
08:11Alors, je préfère raisonner en semaines qu'en jours.
08:17Déjà, si Trump veut commencer la négociation,
08:22il faut que ça se calme sur le front avant qu'ils se rencontrent.
08:28Il n'a jamais posé cette condition.
08:31Donc, c'est quand même frappant de se dire que Trump se prépare à aller rencontrer Poutine
08:36sans avoir dit un truc aussi basique que tu arrêtes l'artillerie, tu arrêtes les drones,
08:40tu arrêtes les Italiens aussi, bien sûr.
08:43Qu'il y ait un cessez-le-feu de fait, après, on peut parler.
08:47A aucun moment, il n'a dit ça.
08:49Donc, il est prêt à rencontrer Poutine alors que la guerre continue.
08:53C'est fou, ça.
08:55Ça, c'est déjà un facteur d'inquiétude.
08:59Donc, techniquement, s'il posait cette condition,
09:03peut-être qu'en quelques jours, il pourrait y avoir,
09:06non pas un accord de cessez-le-feu avec toutes les conditions qui vont avec,
09:10mais au moins qu'on arrête de s'entretuer.

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