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00:00Alors revenons-en à ce débat sur la fin de vie.
00:04Écoutez, Yannick Noder, le ministre de la Santé,
00:06il était au micro de Pascal Praud, dans Pascal Praud et vous, ce matin sur Europe 1.
00:10Sur les soins palliatifs, je crois qu'on peut arriver à un large consensus.
00:14Ça nécessitera des moyens, mais pas que, surtout de la formation.
00:17Il faut qu'on forme plus de médecins, plus d'infirmiers, plus d'aides-soignants
00:21pour pouvoir prendre en charge ces patients.
00:23Sur l'autre partie, sur l'aide active à mourir, c'est un sujet qui est différent.
00:28C'est-à-dire que, est-ce que le patient le fait lui-même ?
00:32Est-ce qu'il a besoin d'une assistance ?
00:34Qui décide ? Est-ce qu'il faut une décision collégiale ou pas ?
00:38On sait très bien qu'en fonction de votre sensibilité sur ces sujets-là,
00:41il y a des médecins qui auront plutôt tendance à vouloir le faire,
00:45d'autres qui ne voudront pas le faire.
00:46Et il ne faut pas non plus que le patient se retrouve au milieu.
00:49C'est un peu comme l'IVG, c'est-à-dire qu'il y a aussi une clause de conscience.
00:53C'est des sujets sur lesquels il faut qu'il y ait des débats.
00:56Yannick Noder, chez Pascal Praud, et vous ce matin sur Europe 1.
00:59Vous êtes en phase avec le ministre Philippe Juvin ?
01:01Oui, enfin oui et non, parce que je ne sais pas très bien ce qu'il a voulu dire.
01:03Alors pourquoi oui et pourquoi non ?
01:04Non mais globalement, quand la fin de vie devient insupportable, il y a deux solutions.
01:09Soit vous mettez un système en place pour abréger la vie, c'est ce que propose la loi,
01:13soit vous imaginez quelque chose qui permette de rendre la vie moins insupportable.
01:17Moi c'est ce que je crois nécessaire.
01:19Ce que propose la loi aussi, du coup.
01:20Oui, dans sa première partie.
01:22Sauf que, pardon, les soins palliatifs...
01:24Oui, mais les soins palliatifs, ça ne va pas être comme ça.
01:26Pourquoi ? Parce que vous avez beau ouvrir des postes,
01:30ils sont vacants parce qu'on n'a pas formé les gens,
01:32il va falloir pour former un médecin 10 à 15 ans,
01:34ça ne va pas se faire comme ça.
01:35Donc on sait que de toute façon, les soins palliatifs ne seront pas à niveau,
01:39même si on met beaucoup d'argent, et pardon, on en a de moins en moins,
01:41avant 10 à 15 ans.
01:43Ça c'est le premier point.
01:44Deuxième point, vous pouvez avoir des demandes d'euthanasie,
01:47de gens qui ont accès aux soins palliatifs,
01:49mais qui ont des questions sociales, de l'isolement, etc.
01:53Donc la question des soins palliatifs ne règle pas toute la question.
01:55Et puis il y a une question de fond,
01:57est-ce que vous croyez que l'État peut aussi, peut se donner le droit de tuer quelqu'un ?
02:03C'est peut-être ça la vraie question.
02:04Mais c'est la question fondamentale.
02:06Moi je crois que dans aucun cas, un État ne doit se donner le droit,
02:11quelle que soit la procédure, de donner la mort à quelqu'un.
02:14C'est une question de principe.
02:14Est-ce que vous croyez, parce que Gilles William a évoqué le sujet tout à l'heure,
02:18est-ce que vous croyez que si on donne le go pour ça,
02:21certains vont revenir en disant, dans ce cas-là, pourquoi pas la peine de mort ?
02:24Parce que c'est un parallèle qui est souvent fait.
02:26Non, je ne sais pas.
02:27En revanche, ce qui va se passer, c'est ce qui s'est passé dans les pays voisins,
02:31c'est que forcément, rapidement, vous allez avoir une extension des critères.
02:36Je rappelle qu'en Hollande, on a peu à peu élargé les critères,
02:41et en Hollande, en 2021-2022, vous avez eu une quarantaine de déficients intellectuels
02:45et de patients qui avaient de l'autisme qui ont été euthanasiés.
02:49Donc, vous allez inéluctablement...
02:51Mais ils n'étaient pas sous curatel, ou ils n'étaient pas aidés par un père qui était là pour...
02:55Dans la loi que nous allons voter, si nous votons la loi telle qu'elle est,
03:00le fait d'être sous curatel et tutel ne retire rien.
03:03Vous pouvez bénéficier, entre guillemets, de l'euthanasie.
03:06Comprenez cela.
03:07Quelqu'un qui est en prison, par exemple,
03:09et qui en prison n'est pas très libre, quand même, vous conviendrez,
03:12eh bien, en prison, vous pourrez bénéficier de l'euthanasie.
03:13Donc, moi, je crois qu'on met le doigt dans un truc incroyable, par défaut.
03:18Dangereux ?
03:18Extrêmement dangereux.
03:20Enfin, extrêmement dangereux.
03:22Et puis, il y a un économiste qui a posé une question intéressante,
03:26qui est la question économique.
03:28Les Canadiens, l'année dernière, grâce à l'euthanasie,
03:32ont économisé 80 millions de dollars.
03:35Encore une fois, attention, je ne dis pas que cette loi est faite pour faire des économies,
03:38mais il y aura un effet économique évident,
03:40parce que la fin de vie, ça coûte très cher.
03:41On considère que la fin de vie, c'est 10% des dépenses de santé,
03:46et c'est vrai que c'est plus facile d'aller vers l'euthanasie.
03:49J'attire l'attention des Français, encore une fois,
03:52je leur dis, mon expérience, j'ai vu des morts, et j'en vois.
03:57Et les Français n'en voient plus, parce qu'encore une fois, la mort est cachée.
04:01Ils en voient sur Netflix, mais ils n'en voient pas.
04:03Oui, mais ce n'est pas la vraie mort.
04:04Et moi, chaque fois que j'ai eu une demande d'euthanasie,
04:07elle a disparu, parce qu'on arrivait à apporter une réponse,
04:10qui était une réponse de résorption de douleurs psychologiques,
04:14physiques, ou d'isolement social.
04:16Ce que veulent les gens, c'est être aidés.
04:18Pas à mourir, mais être aidés à vivre.
04:20C'est ça qu'il faut mettre en œuvre.
04:21Merci beaucoup, Philippe Juvin.
04:23Merci, professeur, d'avoir été avec nous en direct sur Europe 1.