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00:00On retrouve Catherine Ney. Bonjour Catherine !
00:03Bonjour ! Bonjour tout le monde !
00:05Demain, pour le pape François qui émet si peu les fastes et la pompe, les funérailles seront grandioses,
00:11une page se tourne Catherine.
00:12Question, pourquoi le pape n'est-il jamais venu en visite d'État à Paris ?
00:16Certes, il est venu à Strasbourg devant le Parlement européen, à Marseille,
00:20je ne viens pas en France, précisait-il,
00:22et en Corse, qui correspondait à sa vision modeste et décentrée de l'Église,
00:26comment vous l'expliquez ?
00:28Eh bien, le pape, qui était très politique, avait forcément ses raisons.
00:31Alors, on se demandait si la familiarité du président Macron,
00:34on l'a vu, qui le touchait, l'embrassait, le tutoyait comme un vieux copain.
00:38Tiens, François, je t'ai apporté un livre de Comte, est-ce que cela lui déplaçait ?
00:43Et c'est vrai que le président Macron lui a rendu visite trois fois à Rome.
00:46Bon, une désinvolture qui a en tout cas choqué beaucoup de catholiques en France.
00:51Mais le pape a sûrement eu l'impression aussi que le président français le roulait dans la farine,
00:55en incluant l'IVG dans la constitution française,
00:59et avec un projet de loi sur la fin de vie où il craignait une dérive vers l'euthanasie.
01:03Mais il y avait aussi une autre raison, Catherine.
01:06Oui, et celle-là est fondamentale.
01:08Le pape demeurait meurtri que la constitution européenne,
01:11et biffait de son préambule le rappel de ses racines chrétiennes.
01:15Au départ, elles y figuraient bien, mais avaient été retirées à la demande insistante de Jacques Chirac,
01:20et ce, après plusieurs années de controverses,
01:23et malgré la réprobation de la plupart des autres pays européens.
01:26Oui, le pape François, en voulant à la France,
01:30la fille est née de l'Église,
01:31pour lui, ça n'était pas un péché véniel, mais un péché mortel.
01:34Quelles étaient les motivations de Jacques Chirac ?
01:37Bon, d'abord, il faut le rappeler, c'est lui qui avait porté le projet.
01:39Il voulait que les Européens se dotent d'une constitution en raison de ses élargissements.
01:44Il avait aussi fait enteriner par ses pères que ce travail immense
01:47soit supervisé par Valéry Giscard d'Estaing, un grand Européen.
01:51Mais Jacques Chirac était bien le seul à faire une fixation sur les racines chrétiennes.
01:55Sur ce sujet, nos échanges tournaient toujours court,
01:57regrettait alors le président de la Conférence des évêques de France.
02:01Mais que plaidait Jacques Chirac ?
02:02Que la France est un État laïque, cela veut dire que l'on doit respecter la laïcité.
02:06Et il ne voulait pas de façon détournée que l'on privilégie une religion,
02:10car les autres se sentiraient écartés.
02:12La communauté musulmane, qui en pourcentage en France était la plus grande d'Europe,
02:17et la communauté juive, qui elle aussi était la plus grande d'Europe en France.
02:21Donc il fallait les effacer, ces racines chrétiennes.
02:24C'était capital, disait-il, pour notre sérénité.
02:27Selon vous, Jacques Chirac avait-il raison ?
02:28Non, reconnaître un fait historique indéniable ne s'apparente pas à une injonction prosélyte
02:33pour une religion et n'entaille pas le concept de laïcité.
02:36Au contraire, cela le rabaisse, puisqu'il en faisait une sorte d'idéologie laïciste.
02:41Une myopie culturelle qui est tenée chez un président qui, par ailleurs, avait la vista,
02:45mais toujours très multiculturelle.
02:48A l'époque, on s'en souvient, Jacques Chirac plaidait pour l'entrée de la Turquie en Europe.
02:53Projet auquel les Français n'adhéraient pas du tout,
02:56ce qui était une forme d'invite à la déchristianisation.
02:59Ce qu'ils n'apercevaient pas, mais que l'on voit bien aujourd'hui,
03:02à l'heure d'un islam conquérant.
03:04On perd toujours face à des guerriers déterminés,
03:06surtout quand on devient passif, incapable de dire non,
03:09surtout quand on ne sait pas dire qui l'on est.
03:11Oui, on se demande pourquoi tant d'églises sont brûlées en France.
03:14Mais on note aussi un regain de la foi dans la jeunesse,
03:17ce qui répond peut-être à une recherche chez eux d'une quête d'espérance,
03:20peut-être aussi un sauf-qui-peu culturel.
03:23Jacques Chirac se disait anticlérical ?
03:25Ah oui, ça c'était un héritage familial,
03:27il avait un père et un grand-père, instituteurs, francs-maçons, laïcs,
03:31ça a sûrement compté.
03:32Mais au Vatican, on a de la mémoire et son refus n'a pas été oublié.
03:36Le pape Benoît XVI déplorait que l'Europe se soit livrée à une apostasie d'elle-même.
03:42Le pape François l'avait rappelé à Strasbourg.
03:44Pour lui, les difficultés de la construction européenne, la montée des populismes,
03:48s'expliquait justement parce que l'Europe n'avait pas été capable d'assumer son héritage.
03:53Tout ce qui vit et prospère meurt faute de racines, disait-il.
03:57Ils n'en ont pas voulu, Dieu s'est vengé.
03:59Le pape allait à Lampedusa, dans l'île Lesbos,
04:02pour inciter l'Europe à ouvrir grand les bras à des migrants,
04:06en grande majorité musulmans.
04:08Des musulmans, c'était aussi une invite à accepter une forme de déchristianisation.
04:13Et là, c'est tout le paradoxe du pape.
04:15Cette décision, Catherine, de Jacques Chirac, a-t-elle eu une incidence politique ?
04:19Et comment ?
04:20Le 29 mai 2005, la France votait non au référendum sur la Constitution à 54,8% des voix.
04:27Un score énorme.
04:28J'avais rencontré Bernadette Chirac quelques jours après cet échec.
04:32Elle m'avait dit, mais vous savez, je l'avais annoncé à mon mari,
04:34les catholiques n'iront pas voter.
04:35Votre combat pour effacer les racines chrétiennes de la Constitution
04:38a été une énorme blessure pour eux, comme pour moi, Jacques.
04:42Elle qui aimait révéler que dans son petit sac, il y avait toujours un rouge à lèvres
04:45et un chapelet offert par le pape Jean-Paul II.
04:49Bernadette, elle, était une catholique fervente.
04:51Merci beaucoup, Catherine, pour cet éclairage signature Europe 1.
04:56Très bonne journée à vous.
04:58Dans un instant, la revue de presse d'Olivier Delagarde.
05:00A tout de suite sur Europe 1.
05:01Sous-titrage Société Radio-Canada