Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT, était en direct dans "Apolline de 9 à 10" ce mercredi.
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00:00Sophie Binet qui est avec nous en direct. Sophie Binet, vous êtes la secrétaire générale de la CGT. J'ai envie de vous dire la grève, mais quelle grève ?
00:11Bien écoutez, il faut sortir de votre bureau. Les transiliens ont été extrêmement perturbés en Ile-de-France. Il y a aussi une grève très suivie sur les intercités.
00:20Maintenant, la balle est dans le camp de la direction de la SNCF qui doit annoncer au plus vite qu'elle ouvre un cycle de négociations pour répondre aux exigences des cheminotes et des cheminots sur deux aspects.
00:32D'abord, la question des plannings, puisque les roulants, les contrôleurs, les conducteurs et conductrices sont soumis à des contraintes horaires et temporaires très importantes avec des plannings qui peuvent changer au dernier moment.
00:45Et c'est un énorme problème pour leur vie personnelle, pour leur vie de famille. Et puis, le deuxième sujet dont nous voulons parler, c'est la question des primes dont les modalités de distribution doivent être revues
00:56parce que nous considérons qu'aujourd'hui, elles défavorisent un certain nombre de cheminotes et de cheminots, à commencer par les femmes.
01:04Alors, j'ai évidemment entendu le fait qu'elle était très difficile, cette grève, pour tous ceux qui prennent le train au quotidien.
01:10Je reprends les mots de la SNCF, qui dit, les patrons de la SNCF, qui nous disent non, non, il n'y aura pas de problème, ce sera quasiment un dollar.
01:17Est-ce que ça veut dire d'ailleurs qu'au fond, vous entendez dans le discours des patrons de la SNCF, eux, ils répondent TGV et vous, vous parlez train du quotidien ?
01:30Oui, c'est sûr que la direction de la SNCF, elle se focalise sur là où le chiffre de la SNCF est le plus important.
01:37Par contre, il y a des millions de Françaises et de Français qui sont concernés par les transiliens et les trains intercités.
01:48D'ailleurs, la direction de la SNCF le sait bien et donc il faut qu'elle réponde au plus vite aux revendications des cheminotes et des cheminots.
01:55La CGT a pris ses responsabilités parce que nous avons appelé à la grève lundi, de façon à laisser le temps à la direction de la SNCF,
02:03d'annoncer et de répondre aux exigences sociales. C'est une façon de faire les choses en amont de ce grand week-end.
02:09Et maintenant, c'est à la direction de la SNCF de concrétiser des annonces très fortes pour permettre aux cheminots et aux cheminotes
02:15de pouvoir travailler ce long week-end et assurer les missions de service public auxquelles ils sont très attachés,
02:22tout en ayant une réponse à leurs revendications qui sont légitimes.
02:25Oui, sauf qu'effectivement, la SNCF pour l'instant n'a pas l'air de ressentir la pression de la grève et notamment pour une raison,
02:32c'est qu'ils ont, semble-t-il, formé davantage de cadres pour qu'ils soient en mesure, ponctuellement,
02:38et quand les situations l'exigent comme ce week-end, de remplacer les cheminots grévistes et notamment tous ceux qui sont dans l'accompagnement à bord
02:46et notamment les contrôleurs. Et c'est comme ça qu'ils vont réussir à tenir les trains ce week-end.
02:54Non seulement ils leur ont proposé cette formation, mais avec également une compensation budgétaire.
02:59Je voudrais que vous écoutiez Alain Krakowicz, il était mon invité sur RMC ce matin, c'est le directeur, justement, des trains intercités et TGV.
03:04Écoutez.
03:06On a des réservistes, on a effectivement des volontaires.
03:09Oui, parce que ça me semble très normal que des volontaires qui, normalement, travaillent à la finance ou au RH
03:17aient aussi la volonté de savoir quel est notre cœur de métier.
03:22C'est un grand classique à la SNCF que l'ensemble de l'encadrement et la vision de ce qu'est le cœur de métier de l'entreprise.
03:30En théorie, je suis bien d'accord. Mais là, dans les faits, c'est surtout aussi pour pouvoir pallier au problème de la grève.
03:35Les deux.
03:36Qu'est-ce que vous répondez à ça, Sophie Binet ?
03:39Malheureusement, ce n'est pas nouveau. La direction de la SNCF fait ça à chaque conflit.
03:44Et c'est un vrai problème parce qu'on a des cadres qui sont mis sous pression et qui sont soit obligés de remplacer des grévistes,
03:52soit obligés de se déclarer eux-mêmes ou elles-mêmes en grève.
03:55Ça n'est pas acceptable d'instrumentaliser de cette manière l'encadrement qui n'est pas là pour remplacer des grévistes.
04:02Est-ce que c'est légal ?
04:03Oui, la loi est l'interdit de remplacer des grévistes par des salariés extérieurs à l'entreprise.
04:12Donc après, c'est un problème dans le fonctionnement du corps social de faire ça parce que, encore une fois, pour les cadres, c'est les mettre sous pression et leur demander de faire des missions qui ne sont pas les leurs.
04:24Ils et elles ne sont pas là pour remplacer des grévistes.
04:26Ils et elles sont là pour assumer les tâches qui sont les leurs au sein de l'entreprise.
04:31Et on leur fait un chantage qui n'est pas acceptable.
04:35Sophie Binet, j'ai bien entendu que vous disiez qu'on a encore le temps de revenir à la table des négociations pour qu'il n'y ait pas grève ce week-end.
04:43Est-ce qu'à l'inverse, si, comme on l'entend, la direction de la SNCF non seulement ne répond pas à une ouverture immédiate des négociations comme vous le souhaitiez,
04:52mais aussi continuent à dire que c'est une grève indolore, est-ce que ça pourrait pousser un certain nombre de cheminots et de cheminotes, comme vous dites,
05:02à rentrer en grève alors qu'ils ne l'avaient pas forcément prévu ?
05:06Est-ce que la situation peut être plus compliquée que la direction de la SNCF n'a l'air de le dire pour ce week-end ?
05:13Ou est-ce que les dés sont jetés ?
05:14Bien sûr, tout dépend des annonces que la direction de la SNCF va faire aujourd'hui ou pas.
05:21La grève, elle est décidée par les cheminots et les cheminotes, c'est eux et elles qui le décident.
05:26Ils et elles se réunissent en Assemblée Générale, aujourd'hui, ce soir, demain, et c'est là où vont se décider la grève,
05:33et évidemment sur la base des annonces de la direction de la SNCF.
05:36Donc il faut que la direction réponde aux exigences des grévistes et des cheminots et des cheminotes,
05:43sinon évidemment qu'ils et elles prendront leurs responsabilités.
05:45Mais je le rappelle, on ne fait jamais grève de gaieté de cœur.
05:49Faire grève, ça fait perdre au moins 100 euros de salaire par jour.
05:53Faire grève, ça va contre ces convictions, parce que quand on travaille à la SNCF notamment,
05:58on est là pour défendre le service public, là pour défendre un moyen de transport décarboné.
06:03Donc ça n'est pas de gaieté de cœur que les cheminots et les cheminotes en sont acculés à cela.
06:07Et donc là, l'exigence, c'est que la direction réponde et annonce un cycle de négociations conséquent au plus vite
06:14pour répondre aux exigences sociales des cheminots et des cheminotes.
06:18Une dernière question. Emmanuel Lechypre, vous voulez vous interroger, Sophie Binet ?
06:20Oui, à un peu plus moyen terme, Sophie Binet, le patron de la SNCF va changer.
06:28Il y a quand même eu un nombre d'accords qui ont été signés au cours des dernières années,
06:32sans précédent, sur la revalorisation des métiers et des salaires.
06:34Et pourtant, il y a toujours autant de grèves. Donc ma question, c'était quel bilan vous faites finalement
06:38de la présidence de Jean-Pierre Farandou ? Et qu'est-ce que vous attendez de son successeur
06:43qui, pour le moment, si on en croit finalement ce qui se dit, le successeur qui tient l'accord,
06:50ce serait plutôt Jean Castex ?
06:54Là-dessus, il vaut mieux interroger les cheminots et les cheminotes.
06:58Ça n'est pas mon cas. Sur la suite, la CGT n'a pas de candidat pour être PDG de l'entreprise.
07:07Par contre, il y a des prérequis qui semblent évidents.
07:09L'attachement au service public ferroviaire, et puis la culture du dialogue social,
07:15de la démocratie sociale, parce que la SNCF, c'est pas une entreprise comme les autres.
07:20C'est une entreprise avec une forte dimension d'expertise et de technicité.
07:24Et donc, ça nécessite d'avoir une direction qui sache négocier pour reconnaître ses exigences
07:32et cette technicité. Voilà les attendus et les exigences qui sont importantes.
07:36Merci Sophie Binet. Un mot encore. L'année dernière, la CGT avait appelé à voter pour le nouveau Front populaire.
07:41Vous étiez d'ailleurs le seul syndicat à prendre position ainsi.
07:45Vous avez vu les révélations du livre Lameute, qui montre que le fonctionnement au sein de la France insoumise
07:50est un fonctionnement décrit comme sectaire, avec une logique de purge et de culte du chef.
07:55Est-ce que vous estimez que vous avez bien fait d'appeler à voter pour le nouveau Front populaire ?
08:00Est-ce que Jean-Luc Mélenchon a toujours sa place à la France insoumise ?
08:05D'abord, je n'ai pas lu ce livre. Ensuite, ça n'est pas à la CGT de commenter le fonctionnement des partis.
08:12Et cette position que la CGT a prise en juin-juillet dernier,
08:17elle s'inscrivait dans un contexte extrêmement particulier,
08:21celui où Emmanuel Macron était prêt à laisser les clés de Matignon à l'extrême droite et à Jordan Bardella.
08:28Et c'est grâce au fait que la CGT, comme la société civile,
08:32de nombreuses autres organisations syndicales, aient pris leur responsabilité
08:36que l'extrême droite n'est pas rentrée à Matignon.
08:38Donc évidemment que si c'était à refaire, nous le referions.
08:42Et ce que nous avions dit à l'époque, c'est que face à l'extrême droite,
08:45dire non ne suffit plus pour empêcher l'extrême droite d'arriver au pouvoir.
08:50Ce qu'il faut, c'est offrir, ouvrir des perspectives sociales, répondre aux exigences sociales.
08:56C'est ce qu'il faut faire aujourd'hui.
08:58C'est la raison pour laquelle nous appelons les fonctionnaires à se mettre en grève le 13 mai prochain
09:02pour dénoncer l'austérité salariale dont il et elle sont victimes
09:06et tirer la sonnette d'alarme sur l'état de nos services publics.
09:09En particulier, je veux alerter sur l'état des hôpitaux, des écoles, des universités, de la recherche.
09:13Emmanuel Macron nous dit qu'il veut accueillir les chercheurs et chercheuses américains,
09:17mais il vient de couper 500 millions d'euros de financement pour la recherche française.
09:22C'est très grave.
09:24Et puis, nous appelons l'ensemble des salariés, et je le disais déjà,
09:27à faire grève et manifester le 5 juin prochain pour gagner l'abrogation de la réforme des retraites.
09:32Je le comprends parfaitement votre réponse, mais vous ne répondez pas tout à fait à ma question.
09:36Lorsque le journal Libération interroge dans son éditorial sur la pratique du pouvoir,
09:41la question même d'une forme presque de harcèlement de ceux qui sont en dessous du chef, en quelque sorte,
09:46ça, vous, ça devrait vous parler.
09:48C'est-à-dire la question aussi du respect, de la liberté de chacun, de ne pas être dans un harcèlement moral qui est décrit.
09:55Et le journal Libération pose même cette question, puisque vous vous intéressez aussi à cette question de la démocratie, comme vous dites.
10:01Le journal Libération dit, mais qu'est-ce qu'il arriverait si Jean-Luc Mélenchon, avec cette pratique qui, disent-ils, n'est pas démocratique, prenait le pouvoir ?
10:11Pour la CGT, la démocratie, c'est central.
10:16Et donc, nous sommes très vigilants dans notre organisation à avoir des pratiques démocratiques par en bas,
10:21permettant que ce soit les salariés, les syndiqués qui décident à bannir toute forme de violence.
10:27Ça, c'est notre responsabilité.
10:29Et effectivement, je pense très important que l'ensemble des forces politiques et des forces sociales soient attentives sur ce point,
10:38parce que ça n'est pas un point qui peut être secondaire.
10:42Jamais la fin ne justifie les moyens.
10:44Et donc, évidemment, que la question de la pratique démocratique est centrale.
10:48Vous serez donc vigilante sur ce point ?
10:50Nous sommes toujours vigilants sur ce point, à commencer par notre devoir d'exemplarité en interne,
10:59parce qu'avant de juger et de commenter la situation des autres,
11:02ma responsabilité, c'est d'abord le fonctionnement de la CGT et nos pratiques.
11:06Et donc, c'est pour cette raison-là que je vous dis que la démocratie ne peut jamais être secondaire
11:11et que nous sommes extrêmement attachés à nos pratiques démocratiques
11:14pour permettre que, quand on se syndique à la CGT,
11:17ça permette davantage de démocratie, de décider sur son avenir
11:21et de reprendre son avenir et sa vie en main.
11:24C'est pour ça que j'appelle un maximum de salariés à se syndiquer à la CGT
11:28pour reprendre en main leur travail et leurs conditions de vie.
11:31Merci beaucoup, Sophie Binet, d'avoir répondu à nos questions ce matin.