2,45 milliards, c'est le nombre d'utilisateurs réguliers de Facebook dans le monde. X, le réseau social du très controversé Elon Musk, compte 400 millions d'utilisateurs dont 11,5 millions en France. Les réseaux sociaux influencent de plus en plus nos vies et le monde qui nous entoure. Ils connectent les individus au-delà des frontières, mobilisent les foules et orientent les opinions publiques.
Au nom de la lutte contre les fausses informations et les contenus haineux ou le cyberharcèlement, beaucoup entendent désormais réguler le "far west" numérique. Mais comment ne pas aller trop loin ? Ceux qui s'opposent à la régulation y voient une entrave à la liberté d'expression et à l'innovation. Pour eux, une régulation trop stricte risque de nous conduire tout droit à la censure.
Alors, sur les réseaux sociaux, tout est-il permis ? Un sujet débattu entre :
- Najat Vallaud-Belkacem, présidente de l'association France Terre d'asile, ancienne ministre, co-auteure du livre "Les écrans contre la parole". Inquiète de la surexposition aux écrans et des réseaux sociaux toxiques, elle propose de rationaliser Internet en limitant le nombre de gigas hebdomadaires, une mesure qu'elle juge progressiste pour lutter contre la pollution numérique, le cyberharcèlement et les violences en ligne,
- Olivier Babeau, professeur de sciences de gestion à l'université de Bordeaux, auteur de nombreux ouvrages dont "Le désordre numérique", "La tyrannie du divertissement" et "L'ère de la flemme", fondateur de l'institut Sapiens, un think-tank français dont la mission est de réfléchir aux bouleversements provoqués par les nouvelles technologies dans l'économie et la société. Il défend l'anonymat en ligne afin de garantir la sécurité de la vie privée. Pour lui, cet anonymat est la capacité de dire ce que l'on pense quand un ordre politique ou critique en empêche.
Au nom de la lutte contre les fausses informations et les contenus haineux ou le cyberharcèlement, beaucoup entendent désormais réguler le "far west" numérique. Mais comment ne pas aller trop loin ? Ceux qui s'opposent à la régulation y voient une entrave à la liberté d'expression et à l'innovation. Pour eux, une régulation trop stricte risque de nous conduire tout droit à la censure.
Alors, sur les réseaux sociaux, tout est-il permis ? Un sujet débattu entre :
- Najat Vallaud-Belkacem, présidente de l'association France Terre d'asile, ancienne ministre, co-auteure du livre "Les écrans contre la parole". Inquiète de la surexposition aux écrans et des réseaux sociaux toxiques, elle propose de rationaliser Internet en limitant le nombre de gigas hebdomadaires, une mesure qu'elle juge progressiste pour lutter contre la pollution numérique, le cyberharcèlement et les violences en ligne,
- Olivier Babeau, professeur de sciences de gestion à l'université de Bordeaux, auteur de nombreux ouvrages dont "Le désordre numérique", "La tyrannie du divertissement" et "L'ère de la flemme", fondateur de l'institut Sapiens, un think-tank français dont la mission est de réfléchir aux bouleversements provoqués par les nouvelles technologies dans l'économie et la société. Il défend l'anonymat en ligne afin de garantir la sécurité de la vie privée. Pour lui, cet anonymat est la capacité de dire ce que l'on pense quand un ordre politique ou critique en empêche.
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00:00Bienvenue dans Controverse, une jaute oratoire entre deux personnalités
00:05qui ont chacune 10 minutes pour défendre leurs convictions.
00:08En face d'eux, un public en plateau, mais aussi des étudiants en duplex à l'INSEC.
00:13Ils écouteront, poseront des questions et surtout voteront au début et en fin d'émission.
00:18Lequel de nos deux invités sera le plus convaincant ?
00:21Sauront-ils faire évoluer les convictions du public ?
00:25Pour le savoir, restez avec nous dans Controverse
00:27en partenariat avec le Figaro Télé et Opinion Square.
00:31Les réseaux sociaux, est-ce que tout est permis ?
00:33C'est la question que nous poserons ce soir à nos deux invités.
00:482,45 milliards, c'est le nombre d'utilisateurs de Facebook dans le monde.
00:53X, le réseau social du très controversé Elon Musk,
00:57compte 400 millions d'utilisateurs dans le monde, 11,5 millions rien qu'en France.
01:02Les réseaux sociaux ont donc de plus en plus d'influence sur nos vies et sur le monde.
01:07Ils ont le pouvoir de connecter les gens au-delà des frontières,
01:10mais aussi de mobiliser les masses et d'influer sur les opinions publiques.
01:15Au nom de la lutte contre les fausses informations et les contenus haineux,
01:18ou le cyberharcèlement, beaucoup entendent désormais réguler le Far West numérique.
01:23Mais comment ne pas aller trop loin ?
01:24Ceux qui s'opposent à la régulation y voient une entrave à la liberté d'expression et d'innovation.
01:29Alors, sur les réseaux sociaux, tout est permis.
01:32Tout de suite, les réponses de nos deux invités, Najat Vallaud-Belkacem et Olivier Babaut.
01:37Najat Vallaud-Belkacem est depuis 2022 présidente de France Terre d'asile.
01:42Elle a été ministre de l'Éducation nationale de François Hollande.
01:46Elle est co-auteure du livre Les écrans contre la parole avec Julie Neveu et David Le Breton.
01:51Elle s'inquiète de la surexposition aux écrans et dénonce les réseaux sociaux toxiques.
01:56Elle souhaite rationaliser Internet en limitant le nombre de gigas hebdomadaires.
02:01Une mesure d'après elle progressiste parce qu'elle permettrait de faire face à la pollution numérique,
02:06favorisant la lutte contre le cyberharcèlement, les violences et discriminations en ligne.
02:11Bonjour Najat Vallaud-Belkacem.
02:13Bonjour.
02:14Olivier Babaut est professeur à l'Université de Bordeaux, fondateur de l'Institut Sapiens,
02:19dont la mission est de réfléchir aux bouleversements provoqués par les nouvelles technologies
02:23dans l'économie et la société.
02:25Il est l'auteur de nombreux ouvrages, le nouveau désordre numérique, la tyrannie du divertissement
02:30et le dernier, l'ère de la flemme.
02:33Il s'est exprimé en faveur de la protection de l'anonymat en ligne
02:36afin de garantir la sécurité de la vie privée.
02:39Pour vous Olivier Babaut, l'anonymat sur les réseaux sociaux
02:42et la capacité de dire ce que l'on pense contre un ordre politique ou critique en empêchent.
02:47Merci d'être avec nous Olivier Babaut et Najat Vallaud-Belkacem.
02:53Vous allez avoir sept minutes pour défendre votre point de vue
02:56devant notre public et devant les étudiants de l'INSEC.
03:01Mais avant cela, on a quelques questions d'étudiants, enfin on a deux points de vue d'étudiants.
03:07Certains sont pour, effectivement, la liberté totale en ligne et d'autres pour plus de régulation.
03:15Saria, je crois que vous êtes plutôt pour la liberté.
03:19Oui, bonjour à tous.
03:21Je pense que les réseaux sociaux, c'est l'un des derniers espaces de liberté d'expression non filtrée
03:26où chacun a une voix.
03:28Ils permettent à des personnes anonymes ou censurées de prendre la parole
03:32et je pense qu'imposer trop de limites,
03:35c'est donner du pouvoir à ceux qui veulent faire taire les voix qui dérangent.
03:42Je pense que les plateformes, elles ont déjà leurs règles de modération.
03:45Donc, le tout est permis, c'est une illusion contrôlée
03:49et renforcer la censure pourrait appauvrir les débats.
03:52Donc, je ne pense pas que ce soit l'outil qui est dangereux, mais l'usage qu'on en fait.
03:57Le vrai danger, c'est que peu à peu,
04:00ce n'est pas que tout soit permis, mais que peu à peu, plus rien ne le soit.
04:05Kouma, vous êtes pour davantage de régulation.
04:09Oui, je vous remercie.
04:10Bonjour, selon moi, si on considère les réseaux sociaux
04:14comme un vrai moyen de communication et un vrai outil,
04:17il faut également le considérer comme une extension
04:21de ce qui pourrait être dit dans la vraie vie.
04:23Et on a des normes de vivre ensemble qui régissent tout ça.
04:27Et je pense qu'il faudrait également les faire valoir et ne pas les oublier.
04:31Donc, sur les réseaux sociaux, également sous couvert d'anonymat.
04:35Je pense au cyber harcèlement, il ne faut pas heurter autrui.
04:40Il ne faut pas dénigrer autrui.
04:42Et ça passe justement par cette régulation.
04:45Merci, Kouma.
04:47Najat Vallaud de Belkacem et Olivier Babou,
04:49vous allez bientôt pouvoir défendre votre point de vue.
04:53On va voir qui sera le plus convaincant.
04:55Mais d'abord, nous allons passer au vote du public et des étudiants de l'INSEC.
05:01Réseaux sociaux, tout est permis.
05:03C'est à vous.
05:06La réponse sera négative, car selon moi,
05:08la liberté d'expression avait limite.
05:11On ne peut pas tout faire sur les réseaux sociaux.
05:13Par exemple, par rapport à la nudité,
05:16je pense qu'on ne peut pas exposer certaines choses,
05:19son corps, sur les réseaux,
05:21parce qu'il y a des enfants qui nous regardent, il y a des familles.
05:24Je pense que ça peut être compliqué de dire oui ou non,
05:27parce que c'est vraiment propre à tout un chacun.
05:29Mais je pourrais quand même dire oui.
05:31En France, on a ce qu'on appelle la liberté d'expression.
05:34Donc oui, tout est permis.
05:36Tout peut se dire.
05:37Après, il faut être conscient des conséquences et des répercussions
05:40que ça peut avoir après au niveau légal.
05:42Voilà, nos étudiants ont voté à l'INSEC et sur le plateau.
05:46Et on a déjà le résultat.
05:50Sur les réseaux sociaux, tout est permis.
05:52Seulement oui à 14% et 86% pour davantage de régulation.
05:58Ah ben, ça va être facile.
06:00On va maintenant pouvoir passer à l'ajoute,
06:05avec nos deux invités qui vont devoir
06:08défendre leur point de vue en sept minutes.
06:11Olivier BABAUD, vous avez été le premier à être tiré au sort.
06:14Vous allez défendre, vous, le oui sur les réseaux sociaux.
06:17Tout est permis.
06:25Bonjour à tous.
06:27Merci de votre invitation.
06:28Bravo pour ce concept.
06:29Je suis ravi d'être là.
06:30Je suis heureux d'être là.
06:31Et en même temps, je suis très triste.
06:33Triste époque que celle qui a besoin d'un avocat pour la liberté.
06:39Et en étant l'avocat de la liberté,
06:41j'ai bien conscience que je suis l'avocat du diable.
06:43Eh oui, parce que dans le triptyque républicain,
06:46on lui préfère aujourd'hui la fraternité, bien sûr.
06:48On lui préfère l'égalité.
06:50Et au nom de la fraternité et de l'égalité,
06:51on veut bien mettre la liberté sous le boisseau.
06:54Alors moi, je ne méconnais pas les dérives des réseaux sociaux.
06:58Évidemment, je vois avec terreur, depuis très peu de temps,
07:02l'antisémitisme refaire une présence décomplexée sur X.
07:07Je sais que les réseaux sociaux sont un cloac infini
07:10où on voit toute la bassesse humaine.
07:12Je connais l'hystérisation.
07:14Je sais le harcèlement.
07:15Je sais que l'erreur y est beaucoup plus présente que la vérité.
07:18Je sais le complotisme.
07:19Je sais les délires qui font qu'aujourd'hui,
07:21vous savez que 9 Français sur 100 pensent que la terre est plate.
07:25Oui, les réseaux sociaux n'ont pas créé l'assomption,
07:29l'épiphanie de la vérité que nous attendions.
07:33Et pourtant, en condamnant la liberté,
07:35on va condamner au contraire la solution.
07:38Non seulement, on ne va pas dans le bon sens,
07:39mais en fait, on rame contre son camp pour deux raisons.
07:42En fait, très, très simple.
07:43La première, je vais vous l'expliquer, une raison de principe.
07:46La deuxième raison, une raison de pragmatisme.
07:49Alors, commençons par la première.
07:50Le principe, c'est que la liberté d'expression,
07:52c'est la base désormais méconnue de la démocratie.
07:56Vous savez, Montesquieu disait,
07:57il ne faut toucher à la loi que d'une main tremblante.
07:59Eh bien, il ne faut toucher à la liberté
08:02que d'une main extrêmement tremblante.
08:04Quand on fixe des limites à ce qu'il faut dire,
08:07toujours ces limites finissent par être manipulées.
08:10Elles finissent toujours par être arbitraires.
08:12Ça part évidemment d'une bonne intention,
08:14mais c'est catastrophique.
08:16Alors, c'est formidable de lutter contre la haine.
08:17On est tous contre la haine,
08:19sauf que cette lutte contre la haine,
08:20elle va finir par être instrumentalisée
08:22pour faire taire le débat, pour faire taire tout désaccord,
08:25pour faire croire qu'un questionnement seul
08:27est une forme de haine.
08:30Regardez combien l'islamisme a utilisé le terme d'islamophobie
08:34pour faire croire que tout questionnement,
08:36toute interrogation pouvait être une forme d'opposition
08:40et une opposition qu'il fallait faire taire.
08:43Évidemment, c'est extrêmement inquiétant
08:46d'imaginer qu'on puisse, demain,
08:47au nom d'une notion qui, en fait,
08:49est une notion extrêmement poreuse,
08:51extrêmement vaste, extrêmement arbitraire,
08:54éminemment subjective,
08:56qu'on puisse imposer à tout le monde des limites
08:59à ce qui peut être dit.
09:02Regardez avec qui vous êtes
09:03et dites-vous, si vous êtes dans la bonne direction,
09:06que font toutes les dictatures ?
09:08Quelle est la caractéristique première de toutes les dictatures ?
09:11C'est qu'elles vont fixer des limites,
09:13des limites terribles,
09:15des limites évidemment algorithmiques,
09:17des limites légales,
09:19qui vont venir vous empêcher de tout dire,
09:21qui vont déterminer le vrai, le faux,
09:23le bon et le mauvais.
09:25Évidemment, c'est extrêmement inquiétant
09:28d'être dans ce camp-là.
09:29Et je crois que si aujourd'hui,
09:31pourtant, nous devons évidemment nous inquiéter,
09:33nous, les démocraties libérales, de devenir,
09:35nous pensions que nous étions l'Empire romain,
09:36voué à régner sur le monde en 1989.
09:38Vous savez, on pensait qu'on avait gagné,
09:40ça y est, tous les régimes alternatifs avaient perdu.
09:42Mais non, on n'était pas l'Empire romain,
09:43on était le village d'Astérix,
09:45car nous sommes menacés,
09:46car le nombre de gens qui vivent aujourd'hui
09:47dans les démocraties libérales diminue.
09:49Eh bien, si aujourd'hui,
09:49nous abdiquons la liberté d'expression,
09:53c'est parce que nous aussi, nous quitterons la scène.
09:55Alors, la deuxième raison, dans ma première partie,
09:58c'est que la manifestation,
09:59ça, c'est peut-être plus compliqué à comprendre,
10:00mais je veux vraiment l'expliquer.
10:02La manifestation de la vérité passe par l'erreur.
10:05Il est essentiel de laisser l'erreur se manifester,
10:07ne serait-ce que parce qu'elle permet d'y répondre,
10:09elle permet de la débunker, comme on dit.
10:11On va pouvoir argumenter contre elle,
10:14et ça doit être notre rôle,
10:15d'aller argumenter contre elle.
10:17Et puis, il y a cette idée incroyable,
10:18cette idée incroyablement naïve,
10:20que si on ne dit pas le faux, si on ne dit pas le mal,
10:22le mal et le faux vont disparaître.
10:24Mais est-ce que vous pensez vraiment
10:26que mettre un couvercle sur une cocotte minute,
10:29c'est le meilleur moyen de faire baisser la pression ?
10:32C'est exactement l'inverse.
10:34Plus vous empêchez les gens de dire quelque chose,
10:36plus ces gens-là, d'une façon ou d'une autre,
10:37ils vont créer des boucles,
10:38ils vont se faire leur délire dans leur coin,
10:40et ils vont encore plus s'hystériser,
10:42ils vont encore plus se fondamentaliser.
10:44Regardez, c'est exactement ce qui s'est passé aux États-Unis.
10:47Le wokisme a provoqué une réaction
10:50dont on voit l'incroyable puissance aujourd'hui,
10:52une réaction inverse, qui d'ailleurs débouchera aussi
10:55sur l'interdiction de la liberté d'expression.
10:57C'est toujours comme ça que ça finit.
10:59Il ne faut pas méconnaître la logique démocratique,
11:01c'est celle du balancement.
11:02Et regardez, c'est terrible à admettre,
11:04mais le crime d'hier est devenu le juste d'aujourd'hui.
11:08Regardez l'IVG.
11:09Si on avait pu empêcher des gens comme Simone Veil
11:12de prendre fait et cause pour l'IVG,
11:15aujourd'hui encore, elle serait un crime
11:16parce que ce ne serait pas admissible.
11:18Ce seraient des propos qui auraient été interdits.
11:20Si on avait pu empêcher les gens d'expliquer
11:23qu'être homosexuel, ce n'était pas une déviance,
11:26ce n'était pas un crime, là encore, on l'aurait interdit.
11:29Et dans beaucoup de régimes, ça l'est.
11:30Il est essentiel de comprendre que le crime d'aujourd'hui,
11:33c'est le juste de demain, que le juste d'aujourd'hui,
11:35ça peut être le crime de demain.
11:36C'est l'évolution des mœurs.
11:38C'est comme ça depuis toujours.
11:39Vous faites un petit peu d'ethnologie,
11:41vous comprenez que les choses évoluent,
11:43qu'il y a une roue et que si vous voulez
11:45laisser l'évolution naturelle de cette roue,
11:48vous devez laisser les gens parler.
11:49J'en viens à ma deuxième partie.
11:51Le pragmatisme, le combat contre la liberté d'expression,
11:54rate son but, ça ne rate rien, ça déplace le problème.
11:57Comme la voiture électrique, en réalité,
11:59déplace la pollution.
12:00Vous pensez que vous êtes plus propre ?
12:01Pas du tout.
12:02En fait, le charbon, il a été ailleurs.
12:04Encore une fois, cacher le mal, ça ne le supprime pas.
12:06Au contraire, ça l'excite.
12:09Cacher à croix ceux qu'on cache.
12:11Si vous mettez des mots aux barrières,
12:13les mots se vengeront.
12:14Alors, ça veut dire qu'il faut tout laisser.
12:16Faut-il, doit-on pouvoir, peut-on tout dire sur Internet ?
12:21Oui.
12:22Faut-il tout dire ? Non.
12:23Vous savez qu'aux Etats-Unis,
12:24ils ont une différence intéressante entre le can et le mais.
12:27Le can, c'est ce que je peux faire.
12:28Le mais, c'est ce que je devrais faire.
12:29Parce qu'il y a une différence.
12:31Il doit y avoir une différence entre la loi et la morale.
12:34La loi ne doit pas dire la morale parce que ça,
12:36à ce moment-là, ça nous met dans une théocratie,
12:38d'une façon ou d'une autre.
12:39Donc, que le droit reste dans le droit,
12:41que la morale, que les mœurs évoluent.
12:44Et effectivement, il ne faut pas tout dire,
12:46sans aucun doute.
12:47Évidemment, il est évident qu'il faut pouvoir
12:50former à l'esprit critique.
12:52C'est à l'éducation, c'est à nous tous
12:55de savoir répondre aux erreurs,
12:57de savoir éviter ces excès.
12:59Naturellement, les notes de communauté ont fait la preuve
13:02de leur grande efficacité sur X
13:04contre les fact-checkers qui, en réalité,
13:06vous savez la parole évidemment du grand auteur latin
13:10qui est « qui gardera les gardiens ? »
13:13Eh bien, les fact-checkers, qui factera ?
13:15Les fact-checkers.
13:16Et oui, il me reste 10 secondes, 10, 11...
13:19– Oui, je suis le gardien du temps ici.
13:21– Les chiens aboient et la caravane passe.
13:23– Il va falloir conclure.
13:24– Oui, je termine sur les chiens aboient et la caravane passe.
13:26Ça veut dire quoi ?
13:27Laissez les chiens aboyer sur les réseaux sociaux,
13:30la caravane passera.
13:32– Merci Olivier Babou pour ce grand oral dynamique.
13:36Il avait besoin de dynamique puisque
13:38les partisans de la liberté ne sont que 14% sur ce plateau
13:42parmi les étudiants.
13:44Est-ce que sur le plateau, il y aurait une question pour Olivier Babou ?
13:48Madame ?
13:49– Oui, bonjour.
13:50Moi, je voudrais savoir si vous pensez qu'on peut apprendre à débunker ?
13:55Par exemple, est-ce que la population est capable d'apprendre justement
13:59à faire la différence comme ça entre le bien, le mal, le vrai, le faux ?
14:03– D'accord.
14:04Timeo hominem unum librum.
14:07Il faut craindre l'homme d'un seul livre
14:09et encore plus craindre l'homme qui n'a jamais lu.
14:11De la culture générale vient l'étendue de la connaissance,
14:18des diversités de points de vue et sans doute des formes d'équilibre.
14:21C'est pour ça qu'il faut former à l'esprit critique.
14:23On forme à l'esprit critique par la culture générale,
14:25par la lecture des livres, par le dialogue,
14:27par ce qu'on fait là, c'est-à-dire le fait de prendre l'habitude
14:30qu'on est en train de perdre, et c'est terrible,
14:32de parler avec des gens qui ne sont pas d'accord avec vous.
14:34Et vous savez, moi, je suis comme Montaigne,
14:36j'aimerais être gibelin au guelph et guelph au gibelin.
14:39Je suis toujours un petit peu, je ne suis jamais vraiment de mon avis,
14:41comme dit d'ailleurs, je crois, Oscar Wilde.
14:43C'est-à-dire que je crois toujours,
14:45et ça fait partie aussi de l'éthos démocratique,
14:47de croire toujours que quand on est persuadé de quelque chose,
14:49l'autre, il a un petit peu aussi une part de vérité.
14:52Mais ça aussi, ça s'enseigne.
14:54Et ça n'est pas facile.
14:56Je crois que c'est encore une fois le rôle de l'école.
14:58L'école a beaucoup de rôles, beaucoup de choses pèsent sur ses épaules.
15:01Nous avons besoin plus que jamais,
15:03la démocratie a toujours été depuis 2500 ans,
15:05elle a toujours reposé sur la nécessité d'avoir un peuple d'élite.
15:08– On pourra parler de l'école avec Najat Vallaud-Balkacem notamment.
15:12Mais d'abord, une nouvelle question de Sarah sur Tims, pour vous Olivier Bago.
15:17– Bonjour Monsieur Bago.
15:19J'aurais une question.
15:21Est-ce que cette liberté et la discrétion n'est pas justement la raison
15:25pour laquelle les personnes n'ont plus de limites ?
15:28Les personnes se font harceler ?
15:32– Sans aucun doute.
15:33S'ils ne le pouvaient pas, ils ne le feraient pas.
15:35Mais la liberté, c'est ce à quoi nous sommes tous appelés
15:38en tant qu'individus, citoyens,
15:40amenés à voter pour nommer nos responsables,
15:44amenés aussi à prendre en main notre propre liberté.
15:47Regardez l'éducation, c'est éveiller un être à sa propre liberté.
15:51C'est d'ailleurs difficile parce qu'on doit l'éveiller à travers des formes de contraintes.
15:54Mais pour, une fois, le rendre libre.
15:56Alors, être libre, ce n'est pas faire n'importe quoi,
15:59c'est être autonome, c'est-à-dire au sens propre,
16:02se fixer à soi-même, ses propres règles.
16:04Ce n'est pas l'anomie, c'est-à-dire l'absence de règles.
16:07Et donc c'est bien aux règles sociales, à la société,
16:11de nous fournir à tous la façon, le savoir-faire
16:15pour avoir des capacités à échanger, à ne pas faire n'importe quoi.
16:20Évidemment qu'on enseigne tous à nos enfants
16:22ce que c'est que le harcèlement,
16:24comment lutter contre lui, comment en voir les signes
16:27et pourquoi il est injuste, cruel, même criminel
16:31de se livrer à ce genre d'activité.
16:32Et c'est vrai pour toutes les autres activités.
16:34Ça s'appelle l'éducation, éduquerer, c'est conduire.
16:38Conduire à la liberté, c'est difficile,
16:40mais c'est la vocation que nous avons.
16:42– Merci Olivier Babou pour ce grand oral.
16:45Ça va être le tour de Najat Vallaud-Belkacem
16:48de prendre la parole.
16:49On rappelle, 86% du public désirent mieux encadrer les réseaux sociaux.
16:56C'est le point de vue que vous allez défendre, Najat Vallaud-Belkacem.
17:00C'est à vous.
17:02– Merci, bonjour à toutes et à tous.
17:04Je suis vraiment ravie d'être là.
17:06Je trouve que c'est un sujet absolument majeur
17:08et que cette façon de procéder, la disputation
17:10est la bonne façon de faire
17:12parce qu'il faut sortir des caricatures et de la polarisation.
17:14D'où je parle ?
17:16Je suis un peu plus âgée que vous, les étudiants,
17:19donc j'ai connu le début des années 2000
17:21quand il y avait une espèce d'effervescence
17:23autour justement de cette liberté
17:25qu'on pouvait trouver sur Internet, sur le numérique
17:27et à laquelle il ne fallait pas retoucher.
17:29Je faisais partie des gens qui se battaient à l'époque,
17:31les plus anciens s'en souviennent,
17:33contre une loi qui s'appelait Adopie
17:35et qui voulait s'en prendre justement à cette liberté-là.
17:38Parce qu'à l'époque, Internet était le synonyme de ça,
17:41la possibilité d'écrire, de lire,
17:43de rencontrer des gens très éloignés
17:46et finalement de s'ouvrir des horizons comme jamais,
17:49malgré les censures qui en effet prévalaient dans certains pays.
17:53Est-ce qu'aujourd'hui,
17:55Internet et les réseaux sociaux sont encore ceux-là ?
17:58Est-ce que c'est le règne de cette liberté,
18:00de la possibilité de parler sans censure, etc. ?
18:03Ou est-ce qu'à travers l'usage qu'en ont fait les plateformes,
18:07que j'appelle moi de véritables mafias,
18:10les GAFAM, je les appelle des mafias,
18:12quand on regarde le tournant qu'ont pris ces plateformes
18:16et les algorithmes qu'elles ont construits
18:18notamment depuis le milieu des années 2000
18:21et qu'on comprend que ces algorithmes font tout à la fois
18:24pour nous faire vivre dans des bulles,
18:26des univers fermés,
18:28des univers qui contribuent très fortement
18:31à la polarisation de nos sociétés
18:33et à l'impossibilité aujourd'hui de s'entendre en réalité
18:36ou de se rencontrer aux antipodes de la promesse d'origine,
18:39qu'on comprend que ces algorithmes aussi jouent
18:42sur le choc d'intensité,
18:45c'est-à-dire le taux d'engagement,
18:47pour prendre le terme technique,
18:49c'est-à-dire la viralité et en même temps
18:52le caractère toujours sulfureux,
18:54violent, brutal,
18:56des propos qui vont être le plus mis en avant.
18:59Quand on comprend ces règles des algorithmes
19:02qui ont été pensées par les plateformes en question
19:05et qui malgré toutes les alertes scientifiques
19:07ont été confortées, confirmées avec le temps,
19:10aggravées et qu'on retrouve aujourd'hui
19:12dans tous nos usages,
19:13pas simplement sur les réseaux sociaux,
19:15Facebook, Instagram et évidemment X ou d'autres,
19:18mais aussi finalement sur, par exemple,
19:21des plateformes comme Netflix, Amazon
19:23où on va regarder des vidéos,
19:24mais on va vous enfermer dans une sorte de bulle
19:26en vous proposant immédiatement à votre place
19:29les choix suivants ou en lançant immédiatement
19:32l'épisode suivant.
19:33Tout cela, et même chose pour les jeux vidéo,
19:35tout cela a quel intérêt derrière pour les plateformes ?
19:38C'est évidemment de conserver votre attention
19:41le plus longtemps possible.
19:43Pourquoi ?
19:44Parce que cette attention est monétisée par elle.
19:46Elle est monétisée auprès des marques
19:49et c'est ainsi que ces acteurs,
19:51que sont les GAFAM aujourd'hui,
19:52sont devenus les acteurs économiquement
19:54les plus puissants du monde
19:56et que surtout ils font, eux, pour le coup,
19:59de la politique, alors là, sans aucun problème.
20:02Derrière l'apparente neutralité,
20:04puisqu'ils se présentent toujours
20:06comme des hébergeurs de contenu,
20:08ils disent mais attendez,
20:09nous ne sommes pas des médias,
20:10vous n'avez pas à nous imposer
20:11les mêmes règles qu'on impose aux médias,
20:13nous ne sommes que des tuyaux
20:14dans lesquels se déverse un contenu
20:16qui vient des citoyens eux-mêmes.
20:17Mais pas du tout.
20:18Aujourd'hui, regardez Elon Musk,
20:20regardez Zuckerberg,
20:21ils font de la politique,
20:22ils ne s'en cachent pas.
20:23Et par ailleurs, la vérité,
20:25c'est que la place que ces réseaux sociaux
20:28ont pris dans nos vies
20:29fait des médias.
20:31La plupart des citoyens
20:32vont chercher l'information directement sur eux.
20:34Donc, oui, il est normal
20:36d'imposer une régulation à ces plateformes,
20:39d'imposer une régulation,
20:40d'abord pour en faire de vrais médias
20:42et pas simplement des hébergeurs,
20:44c'est-à-dire notamment une modération
20:46a priori des contenus,
20:48car l'histoire de la modération
20:50a posteriori, c'est une vaste fumisterie,
20:53surtout quand on voit chez X ou chez d'autres
20:56qu'ils ont récemment coupé en deux
20:58le nombre de salariés
21:00qui s'occupaient de modération.
21:01Vous voyez ces plateformes qui disent
21:02« Oui, ne vous inquiétez pas,
21:03on va s'autoréguler, on va modérer. »
21:05Ah oui, c'est dommage,
21:06pourquoi vous avez licencié
21:07la moitié de vos salariés en question ?
21:09Donc, un, en faire des médias
21:11avec des règles qui s'imposent à eux
21:13et deux, leur imposer
21:15que leurs algorithmes
21:17répondent à l'intérêt général.
21:19Ce n'est pas de l'intérêt général
21:21de nos sociétés, ni des adultes,
21:23ni évidemment des enfants,
21:24encore moins des enfants,
21:25que d'être à ce point-là
21:27aliénés par la machine
21:29pour une attention
21:31qui finalement nous fait passer
21:33à côté de la bande passante de nos vies
21:35puisque tout ce temps
21:37qu'on consacre aux réseaux sociaux,
21:38tout ce temps qu'on consacre à l'écran
21:40de manière générale
21:41et en particulier au smartphone,
21:43c'est du temps qu'on ne consacre pas au reste.
21:45En plus du mal que ça fait,
21:47ça a été évoqué tout à l'heure,
21:48évidemment, avec tous les dégâts
21:50en matière de cyberharcèlement notamment,
21:52mais pas seulement,
21:53c'est aussi le temps que ça nous vole,
21:55c'est du temps volé.
21:57Donc, imposer évidemment aux plateformes
22:00de revoir leurs algorithmes
22:02pour nous faire sortir
22:04de la dimension bulle
22:05qu'on a évoquée tout à l'heure
22:07et de la dimension intensité du choc
22:09et viralité,
22:11qui consiste à mettre toujours plus en avant
22:13les choses les plus brutales,
22:15ça, oui, ce sont des choses
22:17que les États devraient absolument faire.
22:20Et s'ils ont besoin d'arguments
22:22pour le faire ?
22:24D'abord, je suis désolée,
22:25mais la liberté, elle n'a jamais été totale
22:27en quelque matière que ce soit,
22:29contrairement à ce que disait
22:30Olivier Babaud tout à l'heure,
22:32où on a vu que, par exemple,
22:34on avait la liberté de polluer
22:36autant qu'on le voulait
22:37quand on était une entreprise.
22:38Eh bien non, à partir du moment
22:39où une société dit
22:40c'est un problème de polluer,
22:41on fixe des règles
22:43et les entreprises,
22:44comme les individus,
22:45doivent s'y conformer.
22:47Ou on a vu que,
22:49quand on constate carrément
22:51que les individus sont en danger,
22:53par exemple les individus
22:54à l'égard de la cigarette,
22:56qu'on se refusait à adopter
22:58une politique de santé publique
23:00qui soit faite à la fois, bien sûr,
23:02de prévention,
23:03mais aussi de règles claires
23:05pour les fabricants de cigarettes.
23:07Ou on a vu que,
23:08quand la voiture apparaît
23:10être un possible élément de danger
23:13parce qu'on voit les accidents
23:15de la route de plus en plus nombreux,
23:17on n'invente pas une ceinture de sécurité
23:20qu'on impose aux gens
23:21de mettre là aussi.
23:22On pourrait me répondre
23:23mais c'était une atteinte
23:24à leur liberté.
23:25Eh bien non, en fait,
23:26en l'occurrence,
23:27c'était évidemment dans leur intérêt,
23:29dans l'intérêt de la société
23:30tout entière,
23:31car les accidents qu'ils provoquent,
23:32c'est aussi les autres
23:33qui en sont les victimes.
23:35Donc oui, c'est normal
23:36de créer de la régulation.
23:38Alors, la régulation, moi,
23:40je veux aussi dire une chose,
23:42c'est qu'elle ne peut pas avoir lieu
23:44à l'échelle nationale, malheureusement,
23:46parce que nos pays
23:47ne sont pas suffisamment puissants
23:49devant les femmes en question.
23:51Elle doit avoir lieu à une échelle
23:53à minima européenne,
23:55pour ce qui nous concerne,
23:56puisque nous sommes, nous, l'Europe,
23:58aujourd'hui, au milieu d'un monde...
24:00Il va falloir conclure.
24:02Ah oui, d'un monde
24:03tiraillé entre le modèle américain
24:05d'ultralibéralisme
24:06sans aucune régulation
24:07et le modèle chinois
24:08qui était évoqué tout à l'heure
24:10de tyrannie et de contrôle
24:12des individus.
24:13Nous pouvons trouver
24:14une voie européenne
24:15qui respecte la liberté
24:17et l'intérêt général.
24:18Merci, Najat Vallaud-Bemkacef.
24:20Vous avez dû dépasser,
24:21mais de très peu,
24:22donc vous êtes quand même
24:23une bonne élève.
24:25On passe aux questions,
24:28comme pour Olivier Babaud.
24:29Je ne sais pas si quelqu'un
24:30dans le public a envie de s'exprimer,
24:32de poser une question
24:33à Najat Vallaud-Bemkacef.
24:35Bonjour, madame.
24:36Merci pour votre avis.
24:39J'ai une question.
24:40Vous dites,
24:41on passe à côté de tout le reste.
24:43Il faut mettre des régulations.
24:45Mais je n'ai toujours pas compris,
24:47concrètement,
24:48ce que vous entendez par
24:50tout le reste,
24:51ce que vous entendez par régulation.
24:53Quel genre de régulation ?
24:54Qui viendra mettre les régulations ?
24:57Transformer les réseaux sociaux
24:58en un média classique
25:00reviendrait à...
25:02Comme, par exemple,
25:03la presse qui va être contrôlée.
25:05En fait, passer à côté de tout le reste,
25:07ça veut dire passer à côté
25:08de la lecture d'un journal.
25:09Mais finalement,
25:10on revient à un média contrôlé.
25:12On nous contrôle l'information.
25:13On peut nous censurer certaines choses.
25:15Donc, pardon.
25:16Voilà.
25:17Elle est là, ma question.
25:18Merci, Saria.
25:20Mais on rappelle que la presse
25:22n'est pas contrôlée,
25:23heureusement.
25:24C'est ce que j'allais dire.
25:25Par contre,
25:26on est tout simplement soumis au droit.
25:27Je crois que les GAFA aussi,
25:29mais vous allez répondre,
25:30Najat Vallaud-Belkacem.
25:31Absolument.
25:32D'abord,
25:33la presse est indépendante.
25:34Après,
25:35on peut penser
25:36un certain nombre de choses
25:37d'un certain nombre de groupes de presse
25:38qu'on ne trouve pas à notre goût.
25:39Mais, enfin,
25:40je veux dire,
25:41le grand intérêt aujourd'hui
25:42par rapport à la presse,
25:43c'est que vous choisissez votre titre.
25:45Vous n'êtes pas,
25:46j'allais dire,
25:47assaillie d'informations.
25:49Par exemple,
25:50si...
25:51Je ne sais pas ce que vous lisez habituellement,
25:52mais imaginons
25:53que vous ne vouliez pas lire
25:55Valeurs Actuelles,
25:56vous n'allez pas être assaillie
25:57au quotidien d'informations
25:58venant de ce journal-là
25:59puisque vous ne serez pas allé
26:00l'acheter exprès.
26:02Donc, ça,
26:03c'est quand même une grande différence.
26:04Le problème du numérique
26:05et des réseaux sociaux,
26:06c'est que,
26:07à un moment donné,
26:08on est le jouet
26:09de ceux qui vont
26:11les mieux manipuler.
26:13Car les réseaux sociaux,
26:14il faut vraiment comprendre,
26:15c'est ce que j'ai essayé de démontrer,
26:16ça n'est pas
26:17le résultat de la liberté
26:19de tout un chacun.
26:20Non,
26:21il y a un favoritisme,
26:23une poussée
26:24envers les contenus
26:25les plus choquants
26:26les plus brutaux
26:27les plus violents.
26:28C'est ça le sujet
26:29qui est, au-delà de la bulle,
26:30c'est ça le sujet
26:31qui est problématique.
26:32Et c'est là
26:33que les plateformes
26:34sont absolument coupables
26:35car elles l'ont fait exprès.
26:37Parce que, en fait,
26:38les contenus les plus choquants
26:39et violents
26:40sont ceux
26:41qui vont entraîner
26:42le taux d'engagement,
26:43c'est-à-dire la rétention
26:44de la personne
26:45sur le réseau
26:46le plus long.
26:47Et donc,
26:48l'attention
26:49qu'on va ensuite,
26:50que les plateformes
26:51vont ensuite pouvoir
26:52aller vendre aux marques
26:53en disant,
26:54si tu mets ta publicité
26:55pour ton objet,
26:56ton produit de beauté,
26:57je ne sais pas quoi,
26:58chez moi,
26:59sache que, moi,
27:00j'ai des internautes
27:01qui sont capables
27:02de rester trois heures d'affilée.
27:03Comme c'est magique !
27:04Vraiment,
27:05est-ce que c'est ça
27:06la vie dont on veut ?
27:07Et maintenant,
27:08j'en viens à votre
27:09deuxième question,
27:10c'est quoi le reste
27:11de notre vie ?
27:12Mais mon Dieu !
27:13Mais on peut le prendre
27:14déjà à l'échelle
27:15des enfants,
27:16c'est tellement évident.
27:17Mais après,
27:18je viendrai aussi aux adultes
27:19parce que moi,
27:20je fais partie des gens
27:21qui ne supportent pas
27:22qu'on dise que ceci
27:23est un problème
27:25Pour les enfants,
27:26qu'est-ce que ça leur permettrait
27:27de retrouver ?
27:28Ça leur permettrait
27:29de retrouver du temps de jeu,
27:30ça leur permettrait
27:31de retrouver du temps
27:32d'interaction avec les autres.
27:33Vous avez sans doute vu
27:34les études qui sont sorties
27:35et qui montrent comment,
27:36depuis le début des années 2010,
27:38on a des adolescents,
27:40on a mesuré ça,
27:42qui, malheureusement,
27:43souffrent de plus en plus
27:44de solitude,
27:45de dépression,
27:46d'anxiété.
27:47On a même,
27:48on parlait de cyberharcèlement
27:49tout à l'heure,
27:50des jeunes adolescentes
27:52de 10 à 14 ans,
27:53quand on compare les chiffres
27:54entre 2010 et aujourd'hui,
27:56leur taux de suicide
27:58a augmenté de 130 %.
28:01Mais franchement,
28:02comment ne pas faire le lien ?
28:03Alors, évidemment,
28:04qu'il y a tout un tas
28:05d'autres phénomènes, etc.,
28:06dans la société,
28:07qui peut-être conduisent
28:08à une plus grande solitude,
28:09mais les écrans,
28:10c'est quand même
28:11tellement évident.
28:12Merci, Najat.
28:13Donc, je pense que
28:14l'exemple des enfants...
28:15On a une autre question
28:16après pour vous.
28:17L'exemple des enfants,
28:18retrouver du temps de jeu,
28:19retrouver du temps
28:20de fréquentation des autres,
28:22retrouver aussi
28:23du temps de concentration
28:24sur les cours,
28:25parce que moi,
28:26en tant qu'ancienne ministre
28:27de l'Éducation,
28:28je suis quand même très sensible
28:29à ce que nous disent
28:30les enquêtes PISA,
28:31qui nous disent
28:32que les gamins sont
28:33de moins en moins capables
28:34de se concentrer
28:35sur un exercice
28:36de mathématiques.
28:37Voilà, donc ça aussi,
28:38ça, c'est évidemment
28:39le résultat
28:40de ce qui se passe
28:41sur l'écran.
28:42On a une question
28:43qui nous vient de Luc,
28:44de l'INSEC.
28:45Votre intervention
28:46a suscité en moi
28:47quelques interactions.
28:48Déjà, d'abord,
28:49je souhaiterais dire
28:50que les réseaux sociaux
28:51nous savons,
28:52c'est une plateforme,
28:53ce sont des plateformes
28:54qui sont mises sur pied
28:55pour permettre aux citoyens
28:56d'exprimer leur ras-le-bol
28:57et d'exprimer également,
28:58de donner également
28:59leur point de vue
29:00sur ce qu'ils vivent
29:01concrètement au quotidien.
29:02Mais après,
29:03j'ai une question.
29:04Comment peut-on trouver
29:05un équilibre
29:06entre la liberté d'expression
29:09et la protection
29:11contre les abus en ligne,
29:13mais de deux,
29:14on dit protéger,
29:15restreindre la liberté
29:16d'expression
29:17et la protection
29:18contre les abus en ligne,
29:19mais de deux,
29:20restreindre l'expression
29:21des personnes
29:22sur les réseaux sociaux,
29:23mais ça va être fait par qui ?
29:25Est-ce que c'est par l'État ?
29:26Est-ce que ça ne sera pas
29:27justement un instrument
29:28utilisé par l'État
29:29pour museler la population ?
29:31Je vous remercie.
29:34Merci de me poser cette question
29:36parce que cette précision
29:38a son importance.
29:39L'idée n'est pas d'empêcher
29:41les gens d'exprimer
29:42ce qu'ils ont à exprimer.
29:44Ça n'est pas de la censure.
29:46L'idée,
29:47c'est de mettre fin
29:48à la manipulation,
29:50à la tromperie
29:51qui consiste,
29:52pour les plateformes,
29:54avec les algorithmes
29:55que j'ai décrits,
29:56à survaloriser,
29:58à donner beaucoup plus
29:59d'importance
30:00et de viralité
30:01aux propos
30:02les plus brutaux,
30:03les plus violents,
30:04les plus racistes,
30:05les plus fascistes.
30:06C'est ça,
30:07le sujet les plus antisémites.
30:09C'est ça, le sujet.
30:10Le sujet,
30:11c'est qu'en fait,
30:12si on avait un système
30:14dans lequel on s'exprime tous,
30:16librement,
30:17personne n'est contrôlé
30:18ni censuré,
30:19et puis, voilà,
30:20nos paroles, on va dire,
30:21se valent,
30:22puisque c'est la grande promesse
30:23de l'Internet libre.
30:24Nos paroles se valent
30:25et on lit,
30:26voilà,
30:27tel a dit ça,
30:28tel a dit ça,
30:29d'ailleurs,
30:30anonymement,
30:31très bien,
30:32ça irait.
30:33Ce que je décris,
30:34depuis tout à l'heure,
30:35c'est pas ça.
30:36C'est une manipulation,
30:37encore une fois,
30:38qui date de 2005-2007,
30:39c'est le moment
30:40où ça a commencé
30:41avec les principales plateformes,
30:42où, progressivement,
30:44les propos
30:45les plus problématiques,
30:47ont été
30:48les plus mis en avant.
30:49Problématiques,
30:50ça peut être à la fois
30:51brutaux, violents,
30:52ou tout simplement
30:53bêtes,
30:54stupides,
30:55mais qui créent,
30:56comme ça,
30:57un choc émotionnel,
30:58rapide,
30:59ça peut être aussi
31:00juste sans intérêt,
31:01vous voyez,
31:02ça peut être des photos de chats,
31:03mais le problème,
31:04c'est pourquoi
31:05est-ce que ce sont
31:06ces contenus-là
31:07qui sont à ce point
31:08mis en avant ?
31:09Et en fait,
31:10c'est pour une dynamique,
31:11encore une fois,
31:12de rétention
31:13de l'usager
31:14dont on a
31:15l'impression
31:16que les plateformes
31:17ont intérêt
31:18à conserver l'attention
31:19le plus longtemps possible
31:20pour faire payer,
31:21finalement,
31:22les marques
31:23qu'elles invitent
31:24à placer des publicités
31:25le plus fort possible.
31:26Merci, Najat Vallaud-Belkacem.
31:27Maintenant,
31:28place au débat.
31:29Vous allez pouvoir
31:30échanger
31:31et vous
31:32confronter
31:33vos points de vue.
31:40Alors,
31:41Najat Vallaud-Belkacem,
31:42on l'a compris,
31:43vous êtes pour davantage
31:44de régulation.
31:45La question,
31:46c'est de savoir comment.
31:47Vous avez même dit
31:48que c'était très difficile
31:49de le faire
31:50à l'échelle nationale.
31:51Vous avez quand même
31:52émis dans le débat public,
31:53c'était dans une tribune
31:54au Figaro,
31:55une proposition
31:56de rationalisation
31:57d'Internet,
31:58voire
31:59de rationnement
32:00d'Internet
32:01parce que vous êtes
32:02pour limiter
32:03le nombre
32:04de gigas
32:05pour chaque utilisateur
32:06par jour.
32:07Vous continuez
32:08à défendre
32:09cette proposition
32:10qui avait fait
32:11beaucoup de bruit
32:12à l'époque.
32:14Alors,
32:15déjà à l'époque,
32:16lorsque je l'avais émise,
32:17c'était moins
32:18une suggestion
32:19qu'une réflexion.
32:20C'est-à-dire que,
32:21en gros,
32:22l'objet de ma tribune,
32:23c'était de tirer
32:24la sonnette d'alarme
32:25et de dire,
32:26au fond,
32:27on a un sujet
32:28qui dépasse même
32:29le contenu
32:30des réseaux sociaux,
32:31etc.
32:32C'est le temps
32:33qu'on passe devant l'écran.
32:34Et donc,
32:35je me posais la question,
32:36comment faudrait-il faire
32:37pour réduire
32:38le temps qu'on passe
32:39devant l'écran ?
32:40Et parmi les solutions
32:41imaginées
32:42vers le monde,
32:43etc.,
32:44il y a, pourquoi pas,
32:45cette histoire
32:46de limiter les gigas,
32:47qui a fait couler
32:48beaucoup d'encre.
32:49Mais j'allais dire,
32:50il y a d'autres solutions,
32:51on l'a vu en Australie
32:52récemment,
32:53on le voit en Chine,
32:54qui conduisent même
32:56à interdire
32:57carrément
32:58certains jours
32:59de la semaine
33:00ou alors,
33:01à partir d'un certain âge,
33:02empêcher les enfants
33:03pour le coup,
33:04d'accéder
33:05plus de tendeurs
33:06par jour,
33:07etc.
33:08Donc je pense qu'il faut
33:09ouvrir la discussion.
33:10Moi,
33:11une solution aussi
33:12qui est assez intéressante,
33:13c'est d'éclairer
33:14le consommateur
33:15tout simplement.
33:16Par exemple,
33:17imaginons qu'il ait
33:18un véritable
33:19tableau de bord
33:20sur l'application
33:21qu'il a ouverte
33:22et qu'il se rende compte
33:23qu'en fait,
33:24ce n'est pas seulement
33:25le temps qu'il vient
33:26d'y consacrer
33:27mais aussi le nombre
33:28d'interactions qu'il a eues.
33:29Ah oui,
33:30dis donc,
33:31ça fait 80 likes
33:32que j'ai mis
33:33depuis deux heures.
33:34Ça n'a pas de sens,
33:35cette histoire.
33:36Je pense qu'éclairer
33:37le consommateur est important.
33:38Mais je reviens
33:39à mon propos.
33:40La plus importante
33:41dérégulation,
33:42elle doit se faire
33:43à l'égard des plateformes.
33:44Merci Najat Vallaud-Belkacem.
33:45Olivier Babou,
33:46qu'est-ce que vous pensez
33:47de cette proposition
33:48de rationnement ?
33:49C'est le collectivisme
33:50à l'heure d'Internet
33:51ou ça vous paraît
33:52être une proposition
33:53déjà crédible
33:54et intéressante ?
33:55Une toute petite remarque
33:56en incise,
33:57ce serait formidable
33:58d'avoir un décompte
33:59des temps de parole
34:00comme pour les présidentielles.
34:01Je ferme la parenthèse.
34:02Je suis vraiment ravi
34:03qu'on ait ce débat
34:04parce que les gens
34:05qui nous écoutent,
34:06qui nous suivent,
34:07qui nous suivent,
34:08qui nous suivent,
34:09qui nous écoutent,
34:10qui nous écoutent
34:11avec beaucoup d'attention,
34:12je le vois,
34:13voient tout à fait
34:14que là on a deux camps,
34:15il y a deux choix là,
34:16vous allez devoir faire.
34:17En réalité,
34:18le diagnostic,
34:19on fait le même.
34:20Moi j'ai écrit
34:21deux livres au moins
34:22et des centaines de tribunes
34:23sur le problème des écrans.
34:24Je partage évidemment
34:25ce diagnostic,
34:26cette inquiétude
34:27et je le partage
34:28pour mes enfants.
34:29Oui,
34:30on fait un mauvais usage
34:31de notre liberté
34:32mais à partir de là
34:33vous avez deux camps
34:34et choisissez votre camp
34:35camarade.
34:36Vous avez un premier camp
34:37où si vous faites
34:38quelqu'un d'autre
34:39va décider pour vous,
34:40juvénal toujours,
34:41qui gardera les gardiens ?
34:42Qui va être
34:43cette personne bienveillante
34:44qui va déterminer
34:45ce qui est mieux pour moi ?
34:46Et puis il y a
34:47un deuxième camp.
34:48Ah oui,
34:49c'est plus dur.
34:50Oui,
34:51ça c'est sûr,
34:52on grelotte un peu plus.
34:53C'est faire un apprentissage
34:54de sa liberté.
34:55Le plus incroyable,
34:56c'est pas qu'il y ait
34:57autant d'influenceurs,
34:58c'est qu'il y ait
34:59autant d'influencés.
35:00Pourquoi il y a
35:01autant d'influencés ?
35:02Eh bien peut-être parce que
35:03justement,
35:04les tableaux de bord,
35:05ils existent.
35:06Vous pouvez aller
35:07chercher toutes les infos
35:08du temps d'écran.
35:09Vous avez tout,
35:10le nombre de temps que vous avez.
35:11Et d'ailleurs,
35:12aujourd'hui,
35:13dans certains fournisseurs,
35:14ils vous donnent
35:15tous les débuts de semaine,
35:16tiens, voilà votre temps d'écran,
35:17voilà votre évolution.
35:18Vous pouvez,
35:19mais la solution,
35:20elle est en vous.
35:21Arrêtez de demander aux autres
35:22une solution.
35:23Je veux dire,
35:24on a toujours été influencés.
35:25Il y a toujours eu
35:26des bulles cognitives.
35:27Autrefois,
35:28les gens cachés de Figaro,
35:29ils savaient très bien
35:30qu'ils n'achetaient pas
35:31Libération.
35:32On a toujours voulu
35:33discuter avec les gens
35:34avec qui on était tous d'accord.
35:35Et bien maintenant,
35:37on est obligé de s'inquiéter,
35:38se forcer à suivre des gens
35:39avec qui on n'est pas d'accord.
35:40– Oui, mais Najat Vallaud-Belkacem
35:41a quand même posé la question
35:42des algorithmes.
35:43Il y avait un moment
35:44où il y avait une forme
35:45de régulation,
35:46y compris par les GAFA eux-mêmes.
35:48On voit aujourd'hui
35:49que Mark Zuckerberg
35:50fait tomber
35:51le peu de régulation
35:52qu'il y avait.
35:53Est-ce qu'il n'y a pas
35:54une forme de dérive tout de même
35:55?
35:56– Alors, j'ai suivi
35:57de très très près
35:58quelqu'un qui gérait
35:59un très gros groupe
36:00de femmes à Los Angeles.
36:01Et ça vous faisait
36:02froid dans le dos
36:03avant le changement de méta.
36:04Chaque fois qu'une personne
36:05disait, posait une question,
36:06avait une expression
36:07qui n'était pas exactement
36:08dans le wokisme le plus droit,
36:09les gens écrivaient
36:10au gestionnaire du groupe
36:11pour dire
36:12excluez-la.
36:13Vous voyez,
36:14c'est de là qu'on part.
36:15Excusez-moi,
36:16je n'appelle pas ça
36:17le paradis.
36:18Alors oui, sans doute,
36:19Twitter, c'est vraiment
36:20pas le paradis non plus.
36:21Mais je crois vraiment
36:22qu'il faut
36:23qu'on continue
36:24à chercher.
36:25Oui, on cherche.
36:26Les technologies,
36:27elles ne sont pas livrées
36:28avec des modes d'emploi.
36:29Souvent, les sociétés
36:30changent
36:31à leur contenu.
36:32Souvent, les sociétés
36:33changent à leur contact.
36:34Là, on est en train
36:35de faire l'apprentissage
36:36difficile de contraintes
36:37évidemment que nos parents
36:38n'avaient pas.
36:39Il y avait des problèmes
36:40différents, il y avait
36:41des contraintes différentes.
36:42Il faut qu'on apprenne ça,
36:43qu'on apprenne aussi
36:44à nos enfants
36:45à vivre dans ce monde-là.
36:46C'est-à-dire qu'il y a
36:47des nouvelles règles
36:48pour se respecter,
36:49que ce n'est pas parce
36:50qu'il y a un écran
36:51entre quelqu'un et l'autre
36:52qu'on va dire des choses
36:53qu'on ne dirait pas en face
36:54parce qu'on se rend compte
36:55qu'on dit beaucoup plus
36:56facilement des choses
36:57sur un écran
36:59Ça, c'est tout un étoce
37:00qu'il faut qu'on apprenne
37:01quand on est adulte
37:02ou quand on est enfant.
37:03Oui, c'est vrai,
37:04l'algorithme peut être
37:05extrêmement pernicieux
37:06mais c'est toujours notre choix
37:07à la fin.
37:08C'est nous qui pouvons
37:09décider d'être sédentaires
37:10ou d'aller à la salle.
37:11C'est nous qui pouvons
37:12décider de continuer
37:13à scroller l'équivalent
37:14de 93 mètres par jour
37:15c'est-à-dire la hauteur
37:16de la statue de la liberté
37:17en moyenne par français.
37:18On peut décider
37:19de continuer à faire ça
37:20ou on peut continuer
37:21de sortir.
37:22Et oui, c'est dur
37:23parce que le monde
37:24d'aujourd'hui dans lequel on vit
37:25la difficulté, c'est la facilité.
37:27Il faut résister
37:28à la facilité du monde.
37:29C'est l'ère de la flemme,
37:30votre dernier livre.
37:31Exactement,
37:32pas pour rien que j'ai écrit
37:33le bouquin,
37:34mais chers jeunes
37:35qui nous écoutez,
37:36vous êtes dans un monde
37:37où vous n'avez pas
37:38les problèmes de mes parents
37:39ou de mes grands-parents
37:40et moi, je suis entre les deux.
37:41Vous avez un problème terrible,
37:42votre monde est trop facile.
37:43Il faut que vous appreniez
37:44une autodiscipline
37:45et vous avez besoin
37:46d'une autodiscipline de fer
37:47qui n'a jamais existé
37:48dans l'histoire de l'humanité
37:49parce qu'avant,
37:50les gens devaient résister
37:51à la contrainte.
37:53Najat Vallaud-Belkacem,
37:54la régulation,
37:55c'est bien,
37:56mais toute la question
37:57est jusqu'où
37:58on met le curseur.
37:59Olivier Babou
38:00rappelait que
38:01la régulation
38:02qui avait été mise en place,
38:03finalement,
38:04c'était la régulation
38:05qui permettait
38:06au lobby le plus fort
38:08qui est de censurer
38:10finalement
38:11des opinions
38:13et pas forcément
38:14quelque chose
38:15qui contreviendrait
38:16à la loi.
38:17On a même vu
38:18récemment
38:19en Roumanie
38:20qu'Alain Giorgescu,
38:21un candidat pro-russe,
38:22finalement,
38:23est éliminé
38:24de l'élection présidentielle
38:26suite à une campagne massive
38:28sur TikTok.
38:29Là,
38:30est-ce qu'on est
38:31dans la régulation ?
38:32Est-ce qu'on est dans
38:33la défense de l'État de droit
38:34ou est-ce qu'on est au contraire
38:35dans la défaite
38:36de la démocratie ?
38:37Waouh !
38:38Non, non,
38:39mais je trouve
38:40à la fois intéressant
38:41de votre question,
38:42je vais y revenir,
38:43et ce que vient de dire
38:44Olivier Babou.
38:45Pardon,
38:46mais la solution
38:47est en vous.
38:48Mais quelle plaisanterie !
38:49Non, mais pardon,
38:50monsieur,
38:51j'ai beaucoup d'estime
38:52pour Olivier,
38:53mais là,
38:54je crois que tu passes
38:55complètement à côté
38:56des enjeux.
38:57La solution est en vous.
38:58Arrêtez donc
38:59de scroller
39:00comme on dirait
39:01à quelqu'un.
39:02Arrête donc de fumer
39:03alors que
39:04le fabricant de tabac
39:05ne t'a pas prévenu
39:06qu'il avait mis
39:07des produits chimiques
39:08pour nourrir
39:09ton addiction
39:10dans la cigarette
39:11que tu es en train
39:12de fumer.
39:13Et j'ai l'impression
39:14même que
39:15ce dont on parle
39:16avec les algorithmes
39:17et le numérique
39:18et les GAFAM,
39:19c'est plus grave
39:20que la cigarette
39:21quelque part
39:22parce que, au fond,
39:23quand on regarde
39:24les dégâts causés,
39:25ce n'est pas simplement
39:26sur la santé,
39:27notamment la santé mentale
39:28des individus,
39:29on en a parlé,
39:30mais c'est aussi
39:31sur la société,
39:32la démocratie,
39:33vous l'avez dit,
39:34et j'en viens donc
39:35à votre deuxième question.
39:36Donc, en tout cas,
39:37pour répondre à Olivier,
39:38non,
39:39ce n'est pas possible
39:40de renvoyer la responsabilité
39:41vers les individus
39:42parce que là,
39:43en l'occurrence,
39:44on a une manipulation claire
39:45de la part de gens
39:46qui s'en mettent plein les poches.
39:47Donc, il faut quand même
39:49que je trouve surprenant aussi,
39:50pardon,
39:51qu'est-ce qui s'est passé
39:52en Roumanie ?
39:53Donc, un candidat
39:54sorti de nulle part,
39:55soutenu notamment
39:56par des trolls
39:57payés par la Russie,
39:58a, du jour au lendemain,
39:59émergé
40:00et devenu
40:01le favori
40:02des sondages.
40:03Enfin,
40:04les manipulations démocratiques,
40:05on va aussi dire
40:06que ce n'est pas très grave.
40:07Voyons,
40:08les citoyens,
40:09les électeurs,
40:10la solution est en vous.
40:11Lisez bien
40:12tous les programmes.
40:13Non,
40:14ça suffit.
40:15Il faut lutter
40:16contre les manipulations.
40:17C'est quand même
40:18extraordinairement grave.
40:19Et ça,
40:20c'était déjà
40:21passé
40:22dans le cadre
40:23du Brexit
40:24avec Cambridge Analytica,
40:25tout le monde s'en souvient,
40:26où on avait bien vu
40:27les manœuvres
40:28qui avaient conduit
40:29à, encore une fois,
40:30survaloriser
40:31une parole,
40:32en l'occurrence
40:33xénophobe,
40:34anti-immigrés,
40:35etc.,
40:36et qui avait conduit
40:37notamment
40:38à la victoire
40:39du Brexit,
40:40victoire du Brexit
40:41que quelques mois
40:42à peine
40:43après
40:44tout ce qui s'est passé
40:46tant de citoyens anglais
40:47ont regretté
40:48parce qu'ils ont bien vu
40:49que, en fait,
40:50ça avait appauvri
40:51leur propre situation.
40:52Donc,
40:53c'est dramatique.
40:54Les instrumentalisations,
40:55les manipulations,
40:56et on le voit
40:57notamment avec le rôle
40:58joué aujourd'hui
40:59par la Russie.
41:00Tiens,
41:01tu parlais d'antisémitisme
41:02tout à l'heure.
41:03Enfin, quand même,
41:04j'espère que tout le monde
41:05a gardé à l'esprit
41:06l'histoire des étoiles
41:07d'Abraham
41:08dessinées sur un mur
41:09dont il est apparu
41:10qu'en fait,
41:11ça avait été
41:12commandité
41:13par la Russie
41:14pour faire naître
41:15et grossir
41:16le sentiment
41:17de polarisation.
41:18On sort un peu
41:19des réseaux sociaux.
41:20On va juste laisser
41:21Olivier Babour
41:22qui, en termes
41:23de temps de parole,
41:24il nous l'a rappelé
41:25et en retard.
41:26Juste un mot
41:27sur cette histoire
41:28de grande manipulation
41:29des étoiles juives.
41:30C'était quand même
41:31les réseaux sociaux.
41:32C'est-à-dire
41:33que la Russie
41:34ne s'est pas contentée
41:35et ça, c'est le monde
41:36dans lequel nous sommes plongés,
41:37ne s'est pas contentée
41:38de payer
41:39des Moldaves
41:40ou je ne sais plus quoi
41:41pour venir
41:42sur les murs de Paris
41:43dessiner ces étoiles.
41:44Elle a aussi,
41:45avec ses trolls innombrables,
41:46lancé dans la foulée
41:47un mouvement
41:48sur les réseaux sociaux
41:49d'émotions,
41:50etc.
41:51Donc,
41:52tout est manipulation.
41:53Et face à cela,
41:54je suis désolée,
41:55c'est criminel
41:56de laisser les individus
41:57se débrouiller tout seuls
41:58en disant
41:59« Allez,
42:00une petite éducation
42:01aux médias
42:02et à l'information
42:03et je sais de quoi je parle
42:04parce que moi,
42:05je l'avais installée.
42:06Ça suffira
42:07pour vous prémunir.
42:08»
42:09Ce n'est pas vrai.
42:10Comment vous répondez
42:11à ça, Olivier Babour ?
42:12La cigarette
42:13est une très bonne comparaison.
42:14Oui,
42:15pendant longtemps,
42:16les gens ne savaient pas.
42:17Oui,
42:18on leur a caché.
42:19Oui,
42:20il y a eu des fausses études.
42:21Oui,
42:22d'ailleurs,
42:23ils sont,
42:24avec raison,
42:25condamnés pour ça.
42:26Alors oui,
42:27pendant un moment,
42:28on ne savait pas
42:29ce que faisaient
42:30les réseaux sociaux.
42:31Quand les réseaux sociaux
42:32sont arrivés,
42:33on pensait qu'on s'échangerait
42:34effectivement
42:35des photos de chats
42:36et puis ce serait sympa.
42:37Moi,
42:38la première chose
42:39que j'ai faite,
42:40c'est d'essayer
42:41d'inventer,
42:42techniquement,
42:43un thrombinoscope inventé
42:44dans une université américaine.
42:45Il y a eu,
42:46comme conséquence,
42:47l'occupation du Capitol
42:48par un type torse nu
42:49avec une toque en bison.
42:50On ne pouvait pas penser
42:51que ça ferait ça à la démocratie.
42:52Les réseaux sociaux
42:53sont en train de tuer la démocratie.
42:54Je le reconnais.
42:55Ah bon ?
42:56Oui.
42:57On cherche tous la solution,
42:58mais on ne la cherche pas
42:59de la même façon
43:00sans aucun doute,
43:01encore une fois.
43:02Il y a deux camps
43:03dans la solution.
43:04Ils tuent la démocratie,
43:05il faut qu'on trouve un moyen.
43:06Alors,
43:07il faut réhérarchiser,
43:08par exemple,
43:09l'information.
43:11Il faut qu'on continue
43:12à comprendre
43:13que la source d'un journal,
43:14ce n'est pas la même chose
43:15que monsieur ou madame
43:16tout le monde
43:17qui raconte qu'il a vu quelque chose.
43:18Et puis,
43:19vous parliez de transparence.
43:20Évidemment qu'il faut
43:21de la transparence
43:22plus que jamais.
43:23Souvenons-nous,
43:24le printemps arabe,
43:25les révolutions
43:26contre toutes les dictatures,
43:27elles ont lieu
43:28parce qu'il y a la transparence,
43:29parce que l'information circule.
43:31Il faut faire ça
43:32plus que jamais
43:33parce que,
43:34encore une fois,
43:35il faut aller vers la liberté,
43:36vers une liberté éduquée.
43:37Et c'est difficile,
43:38en effet.
43:39Mais la solution,
43:40ça ne peut pas être
43:41de nous enlever la liberté
43:42parce que c'est comme
43:43Gribouille qui saute dans l'eau
43:44de peur d'être mouillé,
43:45de peur de ne plus avoir liberté.
43:46On n'a plus de liberté.
43:47C'est raté.
43:48Pardon, Olivier,
43:49mais on est en train
43:50de dire la même chose, en fait.
43:51Je suis toujours ravi
43:52quand on se rapproche.
43:53On est d'accord.
43:54On va se rapprocher,
43:55à la fin on va être d'accord.
43:56Attends,
43:57j'ai noté deux mots
43:58pour réhérarchiser l'information
43:59et transparence.
44:00C'est intéressant
44:01puisque vous avez répondu
44:02sur la première partie,
44:03pas sur les élections.
44:04Vous avez rappelé
44:05le rôle joué par Google
44:06dans l'élection de Barack Obama.
44:07À l'époque,
44:08les réseaux sociaux
44:09trouvaient ça formidable.
44:10Quand c'est Donald Trump,
44:11on voit que c'est
44:12beaucoup plus critiqué.
44:13Est-ce qu'il n'y a pas
44:14deux poids, deux mesures ?
44:15Et est-ce que la solution,
44:16c'est vraiment d'interdire
44:17les voix dissidentes ?
44:18Quand Thierry Breton,
44:19répondant à Elon Musk,
44:20dit qu'on pourrait interdire
44:21les élections,
44:22enfin annuler les élections
44:23en Allemagne
44:24si jamais l'AFD l'emporte,
44:25est-ce que c'est
44:26la bonne réponse ?
44:27C'est la bonne réponse.
44:28C'est la bonne réponse.
44:29C'est la bonne réponse.
44:30Je crains,
44:31je suis désolé,
44:32je suis comme ça,
44:33je crains beaucoup plus
44:34un monde,
44:35une société où on ne peut pas
44:36tout dire,
44:37pardon,
44:38un monde où on ne peut pas
44:39tout dire
44:40qu'un monde où on peut tout dire.
44:41Vraiment,
44:42beaucoup,
44:43beaucoup,
44:44beaucoup plus.
44:45Et je ne dis pas
44:46qu'une société
44:47où on peut tout dire,
44:48c'est une société formidable.
44:49Alors,
44:50vous savez,
44:51je fais des cours
44:52de communication
44:53aux étudiants
44:54à l'université.
44:55La première chose
44:56que je leur explique,
44:57c'est que toute communication
44:58est manipulatoire.
44:59La communication,
45:00c'est manipuler
45:01les conditions des autres.
45:02Alors,
45:03on peut manipuler
45:04pour le bien,
45:05de bonne foi,
45:06et puis pour le mal.
45:07La politique,
45:08ça a toujours été
45:09l'art d'essayer
45:10de convaincre
45:11comme on le fait ici
45:12en utilisant
45:13d'ailleurs,
45:14des vieilles méthodes
45:15connues depuis très longtemps
45:16évidemment pour essayer
45:17de convaincre.
45:18Mais ce n'est pas pour ça
45:19qu'on est de mauvaise foi
45:20ou que ce n'est pas vrai.
45:21Et c'est à celui qui écoute
45:22d'essayer,
45:23justement,
45:24parce qu'il a de la culture générale
45:25de dénouer le bon grain
45:26de l'ivraie,
45:27de voir si un argument
45:28n'est pas bien
45:29et puis d'essayer
45:30à la fin
45:31d'être celui
45:32qui va voter
45:33parce qu'on vit
45:34jusqu'à nouvel ordre
45:35dans un endroit
45:36ou à partir de 18 ans
45:37on va vous demander
45:38de choisir
45:39ceux qui vous dirigent.
45:40Alors,
45:41si on pense
45:42que vous n'êtes pas libres,
45:43que vous êtes influencés,
45:44que la communication
45:45fait que tout ça
45:46est manipulé,
45:47à la fin,
45:48quelqu'un d'autre
45:49va choisir nos maîtres.
45:50Ce n'est pas
45:51ma conception de la démocratie.
45:52On va redonner
45:53la parole
45:54à notre public
45:55qui a été éclairé
45:56par ce débat.
45:57On a une nouvelle question
45:58pour l'un de nos invités.
46:00Bonjour,
46:01Madame Belkacem.
46:02J'avais une question pour vous.
46:03Vous disiez tout à l'heure
46:04que le téléphone,
46:05c'est la continuité
46:06de notre bras.
46:07De plus en plus,
46:08on a des métiers
46:09qui se tournent
46:10vers la communication
46:11et le marketing.
46:12Est-ce que vous pensez
46:13que malgré
46:14ce que vous
46:15vouliez mettre en place,
46:16ça pourrait suffire
46:17par rapport à la puissance
46:18des GAFAM ?
46:21C'est une très bonne question.
46:22C'est-à-dire qu'en fait,
46:23oui,
46:24vous décrivez
46:25d'une certaine façon
46:26une dynamique
46:27qui va s'entrechoquer
46:28avec le besoin
46:29de réguler.
46:30C'est celle
46:31qu'on va embaucher
46:32de plus en plus
46:33de marketeurs.
46:38C'est une très bonne question.
46:39Ça veut dire
46:40qu'en fait,
46:41il faudra encore aller
46:42contre des intérêts économiques
46:43de façon plus brutale
46:44parce que,
46:45quelque part,
46:46ça veut dire aussi
46:47revoir quels sont
46:48les métiers
46:49qu'on fabrique
46:50dans notre société.
46:52Honnêtement,
46:53votre propos
46:54pourrait quand même
46:55aussi être un petit peu modéré
46:56par l'apparition
46:57de l'intelligence artificielle
46:58générative
46:59parce que la vérité,
47:00c'est que,
47:01de plus en plus,
47:02les outils d'IA
47:03remplacent un peu
47:04le travail des marketeurs.
47:05Je pense que c'est aussi
47:06une autre dynamique
47:07qu'on va voir
47:08qui n'est pas
47:09beaucoup plus rassurante
47:10comme vous le savez.
47:11Je préférais
47:12quand c'était
47:13des marketeurs humains
47:14parce que là,
47:15tout ce qu'on est en train
47:16de se décrire
47:17avec des algorithmes
47:18qui abusent de vous,
47:19etc.,
47:20va être évidemment
47:21renforcée avec l'IA.
47:22Ça va de soi.
47:23J'espère que vous en avez
47:24conscience
47:25puisque finalement,
47:26aujourd'hui,
47:27on ne passe même plus
47:28par des moteurs de recherche
47:29qui, à la limite,
47:30pouvaient encore
47:31un petit peu
47:32ouvrir nos horizons
47:33au moment de nous donner
47:34des réponses multiples
47:35aux questions qu'on pose.
47:36On va directement,
47:37une fois qu'on a chopé
47:38son IA,
47:39lui poser la question à elle.
47:40Et alors là,
47:41pour le coup,
47:42toutes les manipulations
47:43sont permises
47:44et sont d'ores et déjà
47:45opérées.
47:46La Russie,
47:47que j'évoquais tout à l'heure,
47:48est déjà dans
47:49une offensive
47:50pour installer
47:51des discours
47:52dans les réponses des IA
47:53qui sont
47:54très problématiques.
47:55Donc, oui,
47:56en fait,
47:57votre question,
47:58elle m'amène à vous dire
47:59que ce sujet
48:00du numérique,
48:01des écrans,
48:02des réseaux sociaux,
48:03en fait,
48:04il brasse très large.
48:05Il brasse,
48:06pas simplement
48:07notre rapport aux écrans,
48:08mais la question,
48:09en effet,
48:10de nos stratégies économiques.
48:11À quoi forme-t-on
48:12les gens ?
48:13Quels métiers seront
48:14pertinents pour l'avenir ?
48:15Il brasse,
48:16y compris,
48:17la question
48:18de notre organisation sociétale,
48:19et j'en terminerai par là,
48:20parce qu'il y a une chose
48:21que je n'ai pas dite
48:22quand j'évoquais tout à l'heure
48:23les enfants
48:24et qui me frappe, moi,
48:25beaucoup,
48:26c'est que l'une des raisons
48:27pour lesquelles
48:28on va retrouver
48:29de plus en plus d'enfants
48:30devant un écran,
48:31comme ça,
48:32c'est aussi parce que
48:33nos sociétés
48:34ne laissent plus
48:35la place aux enfants.
48:36Elles ne les laissent plus
48:37vraiment,
48:38j'allais dire,
48:39vivre,
48:40parler fort,
48:41crier, etc.
48:42La preuve,
48:43on est dans les trains.
48:44Est-ce que vous avez remarqué
48:45que c'est devenu insupportable
48:46à bon nombre de gens,
48:47je ne jette la pierre à personne,
48:48j'imagine que j'en fais partie,
48:49mais d'entendre
48:50des enfants crier.
48:51Autrefois,
48:52ce n'était pas le cas.
48:53Ça faisait partie de la vie.
48:54Les enfants,
48:55en bas âge,
48:56avaient leur place.
48:57Est-ce qu'il y a encore
48:58autant de skate parks
48:59dans les villes,
49:00dans l'aménagement urbain,
49:01qu'il y en avait autrefois
49:02ou de lieux, disons,
49:03où les adolescents
49:04pouvaient se retrouver ?
49:05Donc, en fait,
49:06il ne faut pas s'étonner
49:07de ce que l'écran,
49:08les jeux vidéo en ligne,
49:09etc.,
49:10soient devenus
49:11les nouveaux skate parks
49:12des adolescents,
49:13l'endroit où se retrouver,
49:14mais du coup,
49:15c'est toujours devant un écran.
49:16Donc, nos villes,
49:17nos aménagements de territoire,
49:18nos organisations sociétales
49:19ont repoussé toujours plus
49:20la place des enfants,
49:21quasiment,
49:22jusqu'à en faire
49:23des indésirables.
49:24Et la vérité,
49:25c'est que vous avez remarqué
49:26qu'on ne les voit plus trop
49:27dans les rues de nos villes.
49:28Ce n'était pas le cas autrefois.
49:29Ils allaient jouer dehors.
49:30Olivier Babou,
49:31vous voulez réagir ?
49:32Notamment,
49:33j'aurais aimé vous entendre
49:34sur l'innovation.
49:35Est-ce qu'on peut arrêter
49:36l'innovation,
49:37en particulier dans les villes
49:38où il y a
49:44où on sait que,
49:45de toute manière,
49:46la Chine
49:47et même des régimes totalitaires
49:49risquent de s'emparer
49:50de ces technologies ?
49:51Encore une fois,
49:52je me rapproche de Najat
49:53et je suis content.
49:54On va finir,
49:55on va être d'accord.
49:56Mais moi, je reviens
49:57à la question du débat
49:58réseau sociaux,
49:59tout est permis.
50:00On parle bien des réseaux sociaux.
50:01Et en effet,
50:02il y a un enjeu
50:03qui est absolument énorme,
50:04qui est incroyable aujourd'hui
50:05avec l'IA.
50:06C'est que,
50:07parmi tous les enjeux
50:08que pose l'IA,
50:09c'est que demain,
50:10vous savez que le fameux test
50:11de Turing,
50:12il est déjà passé,
50:13ce test.
50:14C'est-à-dire que
50:15vous pouvez parler avec des IA
50:16et être persuadé
50:17que c'est des êtres humains.
50:18Donc,
50:19toutes les manipulations,
50:20y compris par des États,
50:21on en a parlé,
50:22sont ouvertes.
50:23Et donc,
50:24il y a une première régulation
50:25à mettre en place.
50:26Il faudrait qu'on ait
50:27une authentification d'êtres humains.
50:28Il faudrait qu'on soit sûr
50:29sur les réseaux sociaux
50:30qu'il n'y a pas de bots,
50:31qu'il n'y a que des êtres humains.
50:32Et alors,
50:33ça nous revient à l'anonymat.
50:34Vous savez, l'anonymat,
50:35on a dit tout à l'heure
50:37Je suis pour le pseudonymat.
50:38L'anonymat, vous savez,
50:39il n'existe déjà pas.
50:40Allez dire un truc illégal
50:42sur les réseaux sociaux,
50:43vous allez voir que les gendarmes
50:44vont venir toquer à votre porte
50:45et c'est une bonne chose.
50:46En réalité,
50:47l'anonymat n'existe pas.
50:48Le pseudonymat,
50:49c'est la possibilité,
50:50quand vous avez des fonctions
50:51qui ne vous permettent pas
50:52d'être libre de parole,
50:53de quand même
50:54aller sur les réseaux sociaux
50:55et vous exprimer
50:56dans les limites de la loi.
50:57Mais l'anonymat,
50:58il est toujours impossible.
50:59Donc, effectivement,
51:00pseudonymat
51:01pour vous donner cette liberté
51:02et la capacité à être sûr
51:04que vous parlez uniquement
51:05entre humains,
51:06ça, c'est évident.
51:07J'abonde sur le fait
51:08que, paradoxe de cette société,
51:10on est tous reliés
51:11au monde entier en permanence
51:12et pourtant,
51:13on est de plus en plus seul.
51:14Et que cette solitude,
51:15cette solitude non voulue,
51:16elle est de plus en plus forte,
51:17que les jeunes voient
51:18de moins en moins
51:19leurs amis en vrai,
51:20que statistiquement,
51:21il y a plus de sédentarité,
51:22qu'ils s'engagent moins
51:23dans les associations.
51:24On peut retrousser ses manches
51:25et essayer de créer
51:26un éthos différent.
51:27Encore une fois,
51:28l'IA, c'est des outils.
51:30Ces outils ne sont pas livrés
51:31avec le mode d'emploi,
51:32ce mode d'emploi,
51:33il est compliqué
51:34à mettre en place.
51:35Et on peut arriver,
51:36il y a des formes de régulation,
51:38il y a des formes d'incitation,
51:40il y a des choses
51:41qui peuvent être trouvées
51:42tout en conservant
51:43l'essentiel,
51:44c'est-à-dire la liberté
51:45qu'on a tous
51:46en tant qu'individus.
51:47– Donc on voit que vos positions
51:48finissent par converger.
51:50On verra,
51:51c'est bientôt l'heure
51:52des votes justement,
51:53pour voir si le point de vue
51:55du public a évolué également.
51:59Suspense sur le vote,
52:01on rappelle le résultat
52:03du premier vote,
52:05vous êtes seulement,
52:06dans le public et à l'INSEC,
52:0814% à dire
52:10qu'on peut tout se permettre
52:12sur les réseaux sociaux,
52:13contre 86%
52:14qui veulent plus de régulation.
52:16Mais les positions ont peut-être
52:17changé pendant le débat,
52:18en tout cas la position
52:19de Farid à l'INSEC
52:21a changé,
52:22c'est-à-dire qu'il n'y a plus
52:23d'individus,
52:24il n'y a plus d'individus
52:25dans le public,
52:26donc Farid à l'INSEC
52:27a changé,
52:28Farid qui voulait réagir.
52:30– Au tout début,
52:31j'étais d'accord
52:32avec Mme Belkacem,
52:33donc pour moi c'était non,
52:35parce que je me disais
52:36tout simplement que
52:37les grandes milliards
52:38des réseaux sociaux
52:39n'ont pas forcément
52:40les intentions,
52:41les plus pures étant donné
52:42qu'ils monnaient,
52:43donc notre attention,
52:44donc notre temps,
52:45donc c'était pour ça
52:46que je n'étais pas d'accord,
52:47mais après du coup,
52:48avoir écouté l'argumentaire
52:51de M.Babot
52:52et tout ce qui s'est dit
52:53entre temps,
52:54je pense qu'une vraie démarche
52:55c'est une vraie démocratie,
52:56du coup,
52:57c'est le pouvoir au peuple
52:58et c'est totalement
52:59antidémocratique
53:00que de supprimer ce pouvoir
53:03et donc cette liberté d'expression.
53:05Et donc voilà,
53:06c'est tout simplement
53:07la raison pour laquelle
53:08je suis d'accord
53:09avec M.Babot
53:10et j'ai changé mon vote.
53:11– Est-ce que d'autres personnes
53:13dans le public
53:14ont leurs positions
53:15qui ont évolué
53:16après ce débat ?
53:18Saria ?
53:19– Moi je veux juste dire,
53:20on ne bannit pas les couteaux
53:22parce que certains
53:23commettent des crimes avec
53:24et en fait je pense que
53:25pour les réseaux sociaux
53:26c'est plus ou moins pareil.
53:27Je pense que,
53:28comme M.Babot l'a dit,
53:29éduquer les utilisateurs
53:31parce que c'est un outil au final
53:34et non bannir le réseau social,
53:37ça m'a juste confortée.
53:39– Vous n'avez pas changé d'avis.
53:42On va donc pouvoir passer au vote.
53:45Peut-être malgré tout
53:47que les opinions ont bougé.
53:50Suspense.
53:52– Concernant le vote,
53:53la première fois j'ai mis oui
53:54et la deuxième fois j'ai mis oui.
53:55– Deuxième vote,
53:56j'ai voté non
53:57et ça n'a pas changé d'avis en fait.
54:00– Moi j'étais contre au début
54:02et je suis toujours contre.
54:03– Au fur et à mesure du débat,
54:04c'est M.Babot
54:05qui m'a davantage convaincue
54:06parce qu'effectivement
54:07il ne faut pas non plus
54:08trop censurer les gens
54:09parce qu'à force de trop les censurer,
54:10ils vont se sentir opprimés
54:12et ce qu'ils font sur les réseaux sociaux
54:14ils peuvent le faire ailleurs au final.
54:16– Alors au second tour,
54:17j'ai voté étonnamment oui
54:19mais pas parce que j'étais forcément d'accord
54:21avec le fait que tout est permis
54:22mais j'étais plus convaincue
54:24par les arguments de M.Babot.
54:26– Elle parlait du fait que
54:27quand on était petit,
54:28on passait beaucoup de temps dehors
54:31et moins sur les écrans,
54:32que les gens faisaient
54:33beaucoup plus de bruit dans les trains
54:35et qu'aujourd'hui pas du tout
54:36parce que tout le monde
54:37est plongé en fait sur les téléphones
54:39et surtout les jeunes aujourd'hui.
54:42Du coup voilà.
54:46– Le vote est maintenant terminé.
54:48On rappelle le précédent vote,
54:5014% de oui, 86% de non.
54:53Et la bonne nouvelle,
54:54c'est que le débat a bien fonctionné
54:56puisque les opinions ont évolué.
54:58On est passé à 32% de oui,
55:01tout est permis sur les réseaux sociaux
55:03contre 68% de non.
55:05Donc bravo Olivier Babot,
55:06vous avez été convaincant.
55:08Qu'est-ce que vous avez pensé
55:09de cette émission et de cette expérience ?
55:12– Moi c'est bien rigolo.
55:13Évidemment la question nécessairement
55:15est nécessairement un petit peu binaire
55:17et donc il faut se forcer
55:18un peu comme un avocat
55:19à être d'un seul côté.
55:21Or l'éthos universitaire,
55:22l'éthos qu'on a
55:23c'est plutôt celui de la nuance toujours
55:25et du balancement circonspect.
55:27Mais bon je suis quand même
55:28merci à ceux qui ont changé d'avis.
55:30On reste quand même minoritaire
55:31et quelque part c'est rassurant
55:32parce qu'encore une fois
55:33je crois que c'est Wild
55:34qui a dit
55:35quand tout le monde est de mon avis
55:36je pense toujours que je dois me tromper.
55:38– Alors Magède Vallée,
55:40alors Magède Vallée-Voileau de Balkacène
55:42vous avez tout de même convaincu
55:43puisque vous êtes en tête
55:45mais tout de même,
55:46voilà, Olivier Babaud
55:47vous a bien challengé.
55:49Qu'est-ce que vous avez pensé
55:50de cet exercice ?
55:52– Eh bien en fait
55:53je crois que c'est pas seulement
55:54que la question est binaire.
55:56Binaire ça veut dire
55:57il faut forcément répondre
55:58soit oui soit non.
55:59Non c'est pas ça,
56:00c'est que la question
56:01à bien réfléchir n'était pas adaptée.
56:03– Merci.
56:04– Je vais vous expliquer pourquoi
56:05parce qu'en réalité
56:06le sujet c'était pas tant
56:08est-ce que tout est permis
56:09pour les individus
56:10et je crois que c'est
56:11ce qui s'est vu à travers ma réponse
56:13c'est est-ce qu'il faut
56:15une régulation ou pas
56:16s'agissant notamment
56:17de ceux qui créent
56:18les réseaux sociaux
56:19et donc le cadre,
56:20l'infrastructure
56:21dans laquelle nous nous inscrivons.
56:22Nous nous y inscrivons
56:23en pensant être libres
56:24de ce que nous racontons
56:25et de ce que nous y lisons
56:26mais en fait nous ne le sommes pas.
56:28Nous sommes les jouets
56:29de cette infrastructure-là.
56:30La question,
56:31si on veut la poser honnêtement
56:32c'est les réseaux sociaux
56:35appellent-ils une régulation ?
56:37– Et ça appelle
56:38même une autre question
56:39c'est-à-dire laquelle
56:40c'est très difficile
56:42de résumer un débat
56:43aussi vaste
56:44et aussi passionnant
56:45en une seule question.
56:46On a quand même essayé
56:47je crois qu'on a pu attendre
56:48deux points de vue passionnants.
56:50C'était Controverses.
56:51On se retrouve le mois prochain
56:52pour une nouvelle émission.