L'Orchestre philharmonique de Radio France, dirigé par Mikko Frank, joue « La Mer » de Claude Debussy. Concert enregistré en direct le vendredi 14 septembre, de l'Auditorium de la Maison de la Radio, à Paris.
À bien des égards souvent considérée comme le chef-d’œuvre de Debussy, La Mer se présente comme une symphonie en trois mouvements dont les titres descriptifs cachent davantage des évocations de l’âme. Debussy ne déclarait-il pas : « Dans la mer il ne devrait y avoir que des sirènes... » Pour autant, après les houles de Pelléas, c’est en Bourgogne qu’il entreprend en 1903 son vaste poème. « Vous me direz, écrit-il à André Messager, que la mer ne baigne pas précisément les coteaux bourguignons...! Et cela pourrait bien ressembler aux paysages d’atelier (...) cela vaut mieux qu’une réalité dont le charme pèse trop lourd sur votre pensée. »
Au demeurant, il en fignolera l’orchestration en 1904 à Jersey et, par la suite, à Dieppe. Lors de la création, le 15 octobre 1905, l’accueil fut réticent, voire hostile. Il est vrai que le chemin parcouru depuis le Prélude à l’après-midi d’un faune n’avait cessé de s’élargir. Comme le note Jean Barraqué, « Debussy, avec La Mer, a réellement inventé un procédé de développement qui permet à l’œuvre de se propulser elle-même sans le secours d’un modèle préétabli. »
Dès l’introduction du premier mouvement, « De l’Aube à midi sur la mer », les cordes en sourdine donne le climat fluctuant de l’œuvre, sans que se dégage d’accord tonal. Entre un trait de harpe et la brillance douce des cymbales, qui éclairent quelque peu le mystère précédant le lever du soleil, une trompette en sourdine esquisse un thème, qui reviendra cycliquement à la manière de César Franck. Éclate une vibrante acclamation des vents, comme un salut à la lumière. L’orchestre tout entier s’empare de la première section (indiquée Modéré sans lenteur, dans un rythme très souple) où un thème exposé aux cors en sourdine verra chacune de ses apparitions commentée d’arabesques ou de dessins mélodiques. La deuxième section (Un peu plus mouvementé) évoque, sur un motif de violoncelles divisés, le miroitement des vagues.
Une sorte d’immobilité orchestrale induit la coda et c’est enfin l’éblouissement du plein midi aux cuivres. Entre les préliminaires et les multiples sections de « Jeux de vagues », prend place un développement (pour peu qu’ici le terme s’approprie) marqué par une succession de motifs langoureux ou capricieux mêlés aux rappels des thèmes précédents selon des reprises variées. Sur une coda, tous s’évanouissent dans un mi majeur transparent. Au dernier volet, « Dialogue du vent et de la mer », s’installe une ampleur dramatique que ne laissaient guère présager les deux premières parties. Dans une forme de rondo, qu’encadrent introduction et coda, c’est une image d’éléments déchaînés s’opposant avec force. Au thème en refrain (d’un profond lyrisme, caractère constant à l’œuvre que l’on a rarement souligné) d’abord chanté aux bois, succèdent deux couplets parcourus de thèmes cycliques, pour s’achever en apothéose des cuivres conclue sur un coup sec de timbale.
Texte par Pierre-René Serna.
À bien des égards souvent considérée comme le chef-d’œuvre de Debussy, La Mer se présente comme une symphonie en trois mouvements dont les titres descriptifs cachent davantage des évocations de l’âme. Debussy ne déclarait-il pas : « Dans la mer il ne devrait y avoir que des sirènes... » Pour autant, après les houles de Pelléas, c’est en Bourgogne qu’il entreprend en 1903 son vaste poème. « Vous me direz, écrit-il à André Messager, que la mer ne baigne pas précisément les coteaux bourguignons...! Et cela pourrait bien ressembler aux paysages d’atelier (...) cela vaut mieux qu’une réalité dont le charme pèse trop lourd sur votre pensée. »
Au demeurant, il en fignolera l’orchestration en 1904 à Jersey et, par la suite, à Dieppe. Lors de la création, le 15 octobre 1905, l’accueil fut réticent, voire hostile. Il est vrai que le chemin parcouru depuis le Prélude à l’après-midi d’un faune n’avait cessé de s’élargir. Comme le note Jean Barraqué, « Debussy, avec La Mer, a réellement inventé un procédé de développement qui permet à l’œuvre de se propulser elle-même sans le secours d’un modèle préétabli. »
Dès l’introduction du premier mouvement, « De l’Aube à midi sur la mer », les cordes en sourdine donne le climat fluctuant de l’œuvre, sans que se dégage d’accord tonal. Entre un trait de harpe et la brillance douce des cymbales, qui éclairent quelque peu le mystère précédant le lever du soleil, une trompette en sourdine esquisse un thème, qui reviendra cycliquement à la manière de César Franck. Éclate une vibrante acclamation des vents, comme un salut à la lumière. L’orchestre tout entier s’empare de la première section (indiquée Modéré sans lenteur, dans un rythme très souple) où un thème exposé aux cors en sourdine verra chacune de ses apparitions commentée d’arabesques ou de dessins mélodiques. La deuxième section (Un peu plus mouvementé) évoque, sur un motif de violoncelles divisés, le miroitement des vagues.
Une sorte d’immobilité orchestrale induit la coda et c’est enfin l’éblouissement du plein midi aux cuivres. Entre les préliminaires et les multiples sections de « Jeux de vagues », prend place un développement (pour peu qu’ici le terme s’approprie) marqué par une succession de motifs langoureux ou capricieux mêlés aux rappels des thèmes précédents selon des reprises variées. Sur une coda, tous s’évanouissent dans un mi majeur transparent. Au dernier volet, « Dialogue du vent et de la mer », s’installe une ampleur dramatique que ne laissaient guère présager les deux premières parties. Dans une forme de rondo, qu’encadrent introduction et coda, c’est une image d’éléments déchaînés s’opposant avec force. Au thème en refrain (d’un profond lyrisme, caractère constant à l’œuvre que l’on a rarement souligné) d’abord chanté aux bois, succèdent deux couplets parcourus de thèmes cycliques, pour s’achever en apothéose des cuivres conclue sur un coup sec de timbale.
Texte par Pierre-René Serna.
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