Barbara Hannigan dirige l'Orchestre philharmonique de Radio France et chante la Voix humaine, de Francis Poulenc et Jean Cocteau.
Il n’est pas certain que Poulenc ait assisté, en 1930 à la Comédie-Française, à la création de la pièce de Cocteau, La Voix humaine, avec Berthe Bovy dans le rôle de cette femme abandonnée la veille par son amant. Une femme qui, éperdue de désespoir, converse avec lui au téléphone, tentant peut-être de le retenir, tout juste reliée encore à lui par le fil du téléphone, conversation périodiquement interrompue par la mauvaise liaison (sans jeu de mot !) et les échanges exaspérés avec la téléphoniste. Car malgré l’amitié qui liait les deux artistes depuis leur jeunesse et la grande époque du Groupe des Six, Poulenc ne mit que peu en musique les œuvres de Cocteau : quelques poèmes épars, seulement, avant de livrer, à trois ans d’intervalles, deux de ses grands chefs-d’œuvre, les monodrames que sont La Voix Humaine en 1958 et La Dame de Monte-Carlo en 1961. Tous deux composés sur des textes de Cocteau, ils seront tous deux interprétés par l’interprète fétiche de Poulenc, créatrice également de nombre de ses mélodies : Denise Duval.
Lors d’un entretien radiophonique avec Bernard Gavoty en décembre 1958 (cité par Hervé Lacombe dans sa monographie de Poulenc), le compositeur évoqua ce qui fut peut-être l’impulsion première du choix de la pièce de Cocteau : « Nous étions à la Scala, avec mon éditeur Hervé Dugardin, et madame Callas venait de chanter. Et madame Callas repoussait ténors et barytons pour venir saluer d’ailleurs des applaudissements mérités ; Hervé Dugardin m’a dit à ce moment-là : “Mais ce qu’il faudrait écrire pour elle, c’est La Voix humaine, puisqu’il n’y a qu’une femme, elle aurait tous les applaudissements“. »
Et le coup de génie de Poulenc pour sa mise en musique de la pièce, hors même la composition pour la voix féminine, c’est d’avoir donné à ces silences tout leur poids de violence et de cruauté. Poulenc est ici un digne héritier de Puccini ; tous deux possèdent le pouvoir de mettre en musique tout l’éventail des sentiments, et surtout de peindre avec le plus grand réalisme la torture mentale infligée à celui qui aime par celui qui n’aime plus. À cela s’ajoute la figuration musicale de la sonnerie du téléphone, qui revient à de nombreuses reprises, puisque cette conversation que l’on devine être la dernière se voit empêchée par des télécommunications encore défaillantes, à l’époque où se déroule l’action (1930), contraignant une femme « au bord de la crise de nerfs » à dialoguer malgré elle avec une téléphoniste que l’on devine froidement professionnelle, ou à se voir interrompue dans son dialogue avec son amant par une autre voix féminine, interférant sur la même ligne.
Il n’est pas certain que Poulenc ait assisté, en 1930 à la Comédie-Française, à la création de la pièce de Cocteau, La Voix humaine, avec Berthe Bovy dans le rôle de cette femme abandonnée la veille par son amant. Une femme qui, éperdue de désespoir, converse avec lui au téléphone, tentant peut-être de le retenir, tout juste reliée encore à lui par le fil du téléphone, conversation périodiquement interrompue par la mauvaise liaison (sans jeu de mot !) et les échanges exaspérés avec la téléphoniste. Car malgré l’amitié qui liait les deux artistes depuis leur jeunesse et la grande époque du Groupe des Six, Poulenc ne mit que peu en musique les œuvres de Cocteau : quelques poèmes épars, seulement, avant de livrer, à trois ans d’intervalles, deux de ses grands chefs-d’œuvre, les monodrames que sont La Voix Humaine en 1958 et La Dame de Monte-Carlo en 1961. Tous deux composés sur des textes de Cocteau, ils seront tous deux interprétés par l’interprète fétiche de Poulenc, créatrice également de nombre de ses mélodies : Denise Duval.
Lors d’un entretien radiophonique avec Bernard Gavoty en décembre 1958 (cité par Hervé Lacombe dans sa monographie de Poulenc), le compositeur évoqua ce qui fut peut-être l’impulsion première du choix de la pièce de Cocteau : « Nous étions à la Scala, avec mon éditeur Hervé Dugardin, et madame Callas venait de chanter. Et madame Callas repoussait ténors et barytons pour venir saluer d’ailleurs des applaudissements mérités ; Hervé Dugardin m’a dit à ce moment-là : “Mais ce qu’il faudrait écrire pour elle, c’est La Voix humaine, puisqu’il n’y a qu’une femme, elle aurait tous les applaudissements“. »
Et le coup de génie de Poulenc pour sa mise en musique de la pièce, hors même la composition pour la voix féminine, c’est d’avoir donné à ces silences tout leur poids de violence et de cruauté. Poulenc est ici un digne héritier de Puccini ; tous deux possèdent le pouvoir de mettre en musique tout l’éventail des sentiments, et surtout de peindre avec le plus grand réalisme la torture mentale infligée à celui qui aime par celui qui n’aime plus. À cela s’ajoute la figuration musicale de la sonnerie du téléphone, qui revient à de nombreuses reprises, puisque cette conversation que l’on devine être la dernière se voit empêchée par des télécommunications encore défaillantes, à l’époque où se déroule l’action (1930), contraignant une femme « au bord de la crise de nerfs » à dialoguer malgré elle avec une téléphoniste que l’on devine froidement professionnelle, ou à se voir interrompue dans son dialogue avec son amant par une autre voix féminine, interférant sur la même ligne.
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