Régis Le Sommier : «L’écho de la Seconde Guerre mondiale est permanent»

  • l’année dernière
Invité de l'Heure des Pros sur CNews, Régis Le Sommier s'est exprimé sur le conflit en Ukraine. Parti sur le terrain, le directeur de la rédaction d'Omerta a trouvé que «l’écho de la Seconde Guerre mondiale est permanent» sur le champ de bataille.
Transcript
00:00 Après dix jours, alors j'étais en avril, j'avais été côté ukrainien, là j'étais avec les troupes russes.
00:05 Deux enseignements, ils sont absolument déterminés, ils ont énormément d'armes, énormément.
00:14 Il y a des chars, vous pouvez me laisser terminer s'il vous plaît ?
00:18 – Je posais juste question, les russes ou les ukrainiens ?
00:21 – Les deux, mais en tout cas les russes, on avait dit, j'ai entendu sur des plateaux plusieurs fois
00:26 qu'il manquait de munitions, que les troupes étaient démoralisées.
00:28 Non, le discours de Poutine, il marche à fond avec ses troupes en tout cas.
00:32 Moi j'ai passé du temps avec ses soldats, l'écho, on en parlait hier soir,
00:36 de la seconde guerre mondiale est permanent, c'est-à-dire c'est une sorte de forme structurante,
00:40 c'est-à-dire qu'ils vivent la guerre de leur grand-père finalement.
00:44 Et c'est peut-être quelque chose que pendant des années on a un peu ignoré,
00:47 en tout cas chez eux c'est extrêmement fort, ils sont absolument déterminés et c'est un enfer.
00:53 Ce que je veux dire c'est quand j'entends des propos comme celui de monsieur Ménard,
00:56 nous dire "on va y aller, on va continuer, continuer, continuer",
00:59 moi je n'ai pas envie qu'on vive en France ce que j'ai vécu pendant dix jours.
01:03 C'est-à-dire, vous êtes sur une ligne de front, c'est Verdun.
01:06 Quand vous dormez, vous êtes réveillés par des obus parce que votre fenêtre a été soufflée.
01:11 Donc du coup vous êtes en train de calfotrer la fenêtre parce qu'il fait -15° dehors.
01:14 Donc c'est des gens, ça c'est ce que j'ai vécu à mon petit niveau,
01:17 pendant quelques jours avec eux.
01:20 Si vous voulez, ces gens-là vivent ça en permanence.
01:22 On est arrivé la dernière journée, dimanche, dimanche,
01:26 on était sur un poste avancé, vraiment sur la ligne de front.
01:30 Le soldat, le sergent qui nous recueille à ce moment-là,
01:33 parce qu'on est obligé de courir pour aller dans cette position,
01:36 nous explique que ce matin...
01:38 - Là vous étiez avec les Russes.
01:39 - J'étais avec les Russes.
01:40 Il nous explique que ce matin ils ont perdu trois hommes.
01:41 Les trois hommes ils sont là, dans le truc,
01:43 et il nous dit "on ne peut pas aller les récupérer parce que ça tire trop".
01:47 Vous comprenez ?
01:48 En effet, on est dans la ligne de mire d'un char ukrainien
01:50 qui est à 500 mètres en face.
01:52 Donc on est en train de se calfeutrer dans une grange,
01:55 ce sergent me dit ça, et je lui dis "mais j'imagine qu'à un moment
01:58 vous faites des trêves pour récupérer vos hommes".
02:01 Moi j'ai déjà vu ça en Syrie, même avec des djihadistes,
02:03 l'armée d'Assad qui fait, dit "bon ben voilà,
02:06 on va mettre les hommes qui sont morts et vous allez les récupérer".
02:09 Là il me dit "non, il n'y a pas de trêve,
02:11 il n'y a jamais de trêve, il n'y a jamais d'accord,
02:14 il y a juste un petit soupçon d'humanité qui arrive sur le coup de midi et demi,
02:20 tout à coup les bombardements se calment un petit peu".
02:22 Et je lui dis "mais c'est parce que c'est la pause-déj,
02:27 vous me dites oui effectivement, mais en gros,
02:30 il ne faut pas le dire à nos responsables,
02:33 en gros c'est un truc qu'on a décidé sans se parler".
02:35 [Musique]
02:39 [SILENCE]

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