MACRON ET SES ÉDITOCRATES : COMMENT ILS MANIPULENT L'OPINION

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Deux jours avant la grande journée de mobilisation du 19 janvier, la communication de l'Élysée a organisé une rencontre entre le président et dix éditorialistes : notamment Guillaume Tabard du Figaro, Dominique Seux de France inter et des Echos, Françoise Fressoz du Monde ou encore Nathalie Saint-Cricq de France Télévisions.

L’Élysée a fixé une condition de taille : les journalistes peuvent le citer, mais ne doivent pas dire qu'ils se sont entrenus avec Emmanuel Macron. En effaçant tout moyen de comprendre le contexte d’énonciation, ces journalistes participent à un dispositif de communication, et deviennent des porte-parole déguisés.

Habituellement un off peut servir à protéger une source, mais quel est l’intérêt ici de ne pas exposer le président au public, tout en répandant sur ce public la lecture que le président fait des évènements ?

L’intérêt d’Emmanuel Macron, dans cette opération, est de pouvoir chercher à influencer l’opinion avec ses arguments, sans avoir à se montrer. C'est cela que lui offre la complaisante discrétion de ces éditorialistes flattés de faire partie de ces happy-fews à qui parle le président.


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Transcript
00:00 Bon, vous êtes sans doute déjà au courant de l'affaire,
00:01 on y a consacré un super plateau jeudi dernier,
00:04 et c'est Eve Roger dans l'émission C médiatique
00:06 qui l'a fait connaître, après les premiers repérages de Politico.
00:09 Deux jours avant la journée d'action, c'était mardi,
00:11 la communication de l'Élysée organise une petite rencontre
00:14 dont elle a le secret, c'est-à-dire un déjeuner avec le président
00:17 et dix éditorialistes de la presse parisienne
00:20 convoqués à peine 24 heures avant.
00:21 Une rencontre en toute discrétion,
00:23 alors on y trouve Guillaume Tabard du Figaro,
00:26 Dominique Seux de France Inter et des Echos,
00:28 Françoise Fressoz du Monde ou encore Nathalie Saint-Cricq de France Télévisions.
00:32 Edwi Plenel s'est indigné de ce "journalisme de gouvernement".
00:35 En réaction à ce tweet, Yael Ghos, l'un des invités à l'Élysée
00:39 et chef du service politique de France Inter, a répliqué,
00:42 avant de tweeter "Possible d'aller à la source ?
00:44 Que savez-vous de l'usage qui a été fait de cet échange sur l'antenne ?
00:47 Vous pensez que je suis une machine à avaler les éléments de langage ?
00:51 Avez-vous écouté les journaux mercredi matin ?
00:53 Un échange avec le président de la République ne fait pas de vous un perroquet."
00:56 Eh bien très bonne idée, allons à la source.
00:58 C'est un peu aujourd'hui le service fact-checking du Média, là.
01:01 On est sérieux.
01:03 Mais il y a une condition de taille à ce déjeuner.
01:13 Les journalistes ne doivent pas dire qu'ils ont vu Emmanuel Macron
01:17 et donc ne peuvent pas le citer.
01:18 Moi, à ce moment-là, je faisais ma petite revue de presse
01:20 et je voyais un peu partout la formule
01:22 "Macron ne croit pas à la victoire de l'irresponsabilité".
01:26 Emmanuel Macron ne croit pas visiblement à une victoire,
01:29 comme on dit à l'Élysée, à une victoire de l'irresponsabilité.
01:31 Je mets des guillemets.
01:32 Emmanuel Macron dit souvent ces temps-ci
01:34 qu'il ne croit pas à la victoire de l'irresponsabilité.
01:37 Il y avait aussi tous ces articles, plutôt écrits sur le mode du récit,
01:41 avec peu d'éléments analytiques et encore moins critiques,
01:43 et décrivant la psychologie du président.
01:45 Ils attribuaient des propos à Macron
01:47 sans qu'on puisse comprendre qui les a recueillis et dans quel contexte.
01:51 Pauline Bock d'Arrêt sur image exprime parfaitement le sentiment du lecteur.
01:55 Cette prose se lit comme une tribune qu'aurait écrite le président lui-même
01:59 s'il parlait de lui à la troisième personne.
02:02 Car de qui tient-on tout ça ?
02:04 Dans un off classique, on cite une source
02:07 en donnant quelques éléments sur la position qu'il occupe.
02:10 Hors micro, un ministre se montre sceptique.
02:13 Un membre du cabinet nous glisse que…
02:15 Mais dans notre affaire, comme dit Daniel Shederman dans sa chronique,
02:18 on a un super off, où on dissimule même
02:21 que ces propos ont été recueillis par des journalistes.
02:24 Les journalistes deviennent l'entourage du président pour BFM.
02:28 Dans son entourage, on pronostique même que les Français
02:30 ne se déjugeront pas sept mois après l'élection présidentielle.
02:33 Le monde parle d'interlocuteurs,
02:35 on a des visiteurs sur France Inter.
02:38 Les échos choisissent la formule "en interne"
02:40 et Aïl Ghos privilégie la métonymie "l'Élysée".
02:43 Comprenez bien que toutes ces formules ont en réalité pour référence
02:47 Macron parlant à des journalistes.
02:49 Shederman explique et qu'en deux surcroît,
02:52 même les marqueurs de style indirects censés établir un minimum de distance
02:57 selon lui, assurent-ils, croient-ils,
03:00 sont eux-mêmes éliminés dans la transmission du message,
03:03 la réduction des journalistes au rôle de perroquet du pouvoir est complète.
03:07 C'est pas tant dans l'article de Guillaume Tabard du Figaro.
03:10 On a tout simplement l'impression que Macron débite des phrases dans le vide,
03:14 puisqu'aucun interlocuteur n'est identifié.
03:17 Dominique Seux, également présent au déjeuner, a trouvé la solution.
03:20 Plonger dans la tête de Macron.
03:22 Grâce à ses talents de télépathe,
03:24 il peut accéder à la pensée résonante de Jupiter à distance
03:28 et même en évaluer la pertinence.
03:31 Bref, il ne reculera pas.
03:33 Et son raisonnement global est-il fondé selon vous ?
03:36 Écoutez, globalement, oui.
03:37 Rendons justice à Seux, il est le seul parmi tous ces éditorialistes
03:41 à avoir émis une critique sur le fond dans son compte-rendu,
03:44 mais évidemment sans dévoiler le dispositif.
03:47 Mais bon, c'est pas parce qu'éventuellement vous entourez
03:50 un élément de langage de remarque critique
03:52 que vous ne contribuez pas à sa diffusion et sa circulation.
03:55 Ni un pays à feu et à sang, comprenez, il ne croit pas à un blocage du pays.
03:58 Donc là, on ne sait pas à quel objet journalistique on a affaire.
04:01 C'est censé être des éditoriaux,
04:03 c'est-à-dire que l'auteur est réputé y adopter un point de vue,
04:06 avancer une opinion et parler en son nom.
04:09 Or là, on nage en pleine confusion.
04:11 Qui parle ? Alba Ventura ou Emmanuel Macron ?
04:14 Endosse-t-elle ce qu'il dit ?
04:16 Écoutez, le président est droit dans ses bottes,
04:17 cette réforme il l'aveut, il continue d'affirmer
04:20 que les Français lui ont donné un mandat clair en mai dernier.
04:23 Benjamin Duhamel de BFM ment carrément en prétendant avoir enquêté.
04:28 Benjamin Duhamel, vous avez enquêté l'Élysée
04:30 pour savoir quel était aujourd'hui l'état d'esprit d'Emmanuel Macron
04:34 à deux jours de ses manifs.
04:35 Vous avez enquêté.
04:36 Ah ouais, en fait, il n'était pas invité,
04:38 il était là en scred dans la petite bouteille de Pamprilles,
04:41 ou peut-être faisait-il semblant d'accompagner sa maman,
04:44 Nathalie Saint-Cricq de France Télévisions,
04:46 qui était également conviée.
04:47 Vous les soutenez ou vous les provoquez, les initiatives des jeunes ?
04:49 Parce qu'on a pu avoir l'impression que c'était la France Insoumise
04:52 qui incitait les jeunes à aller dans la rue
04:54 et non pas les jeunes qui vous demandaient de l'aide.
04:56 En effaçant tout moyen de comprendre le contexte d'énonciation,
05:00 ces journalistes participent alors à un dispositif de communication
05:04 et deviennent des porte-parole déguisés.
05:07 Au téléphone avec les grandes gueules d'RMC,
05:10 Guillaume Tabard explique.
05:11 Lors de ce off, Emmanuel Macron, là aussi,
05:15 m'a expliqué sa vie dans des choses,
05:18 appelé ça des éléments de langage si vous voulez,
05:20 il m'a donné sa vie dans des choses.
05:22 Dans l'article que j'ai fait dans un foulé,
05:23 on ne peut pas vraiment dire que je me suis fait le porte-parole servile
05:28 de ce que Emmanuel Macron voulait.
05:30 Alors j'ai lu l'article attentivement,
05:32 et voici le seul élément où Tabard prend un peu une distance critique.
05:36 Attention à éloigner les enfants, c'est violent.
05:39 À la rentrée, le chef de l'État avait dit,
05:41 trop hâtivement ou trop maladroitement,
05:44 que cette réforme servait à financer des priorités nouvelles
05:46 comme la refondation de l'école et de l'hôpital,
05:49 ou la transition écologique.
05:50 Le problème, c'est que recueillir des off sans dire qu'ils étaient présents
05:54 finit par rendre leurs textes grotesques, voire contradictoires.
05:58 L'édito de Cécile Cornudet est emblématique.
06:01 Ne cherchez pas les retraites dans l'agenda d'Emmanuel Macron.
06:04 Elle n'y figure pas.
06:05 Le président ne s'est pas exprimé sur le sujet depuis ses voeux du 31 décembre
06:11 et n'a pas prévu de rompre ce silence.
06:14 Il ne s'exprime pas, mais la presse parisienne
06:16 va consacrer des éditos entiers à rapporter sa parole.
06:20 Habituellement, un off peut servir à protéger une source.
06:23 Mais quel est l'intérêt ici de ne pas exposer le président au public,
06:28 tout en répandant sur ce public la lecture que le président fait des événements ?
06:32 Le Monde, qui a envoyé l'éditorialiste Françoise Fressoz à cette rencontre confidentielle,
06:37 expliquait justement en décembre dernier, dans un long article,
06:41 les dérives du off qui permettent aux responsables politiques
06:44 d'instrumentaliser les journalistes en faisant circuler des éléments de langage
06:49 ou de lancer des attaques sans avoir à les assumer publiquement.
06:53 Alors une question qui agite le commentariat politique en ce moment,
06:56 c'est de savoir si Macron va s'afficher comme porteur principal de cette réforme.
07:01 C'est-à-dire, est-ce qu'il va prendre le risque de faire augmenter le niveau de colère
07:05 parce que les gens le détestent ?
07:06 Donc voilà comment on pourrait énoncer l'intérêt de cette opération pour Macron.
07:11 Essayer d'influencer l'opinion avec ses arguments, sans avoir à montrer sa tête.
07:17 C'est ça que lui offre la complaisante discrétion de ces petits télégraphistes,
07:22 tout flattés de faire partie de ces happy few à qui parle le président.
07:26 Et là le message à faire passer à l'opinion, c'est "restez chez vous".
07:30 Très naïvement, Cécile Cornudet donne l'énoncé du problème dans son dernier paragraphe.
07:35 Emmanuel Macron ne reculera pas, ainsi n'utile.
07:38 Le distiller à la veille d'une mobilisation n'est bien sûr pas anodin.
07:42 À quoi bon gâcher des jours de grève dans un combat inutile, peuvent se dire certains Français.
07:46 En 2010, Nicolas Sarkozy avait joué du même ressort.
07:49 Et cela avait marché.
07:51 Alors comment ne pas voir dans ces éditorialistes de simples courroies de transmission
07:55 chargées de déverser sur l'opinion publique la parole présidentielle ?
07:59 Mais pour qui les écoute régulièrement,
08:02 la question n'est pas tant de savoir s'il y a instrumentalisation.
08:06 Car déjeuner secret ou pas, ce qu'ont dit le lendemain tous ces gens,
08:10 c'est déjà ce qu'ils répètent à longueur d'année.
08:12 La doxa libérale.
08:13 Emmanuel Macron considère qu'après des mois, des années de Covid,
08:17 il y a une lassitude, il y a une inquiétude,
08:20 mais il y a au fond une compréhension chez les Français
08:22 que cette réforme des retraites, elle est nécessaire.
08:25 Car ces perroquets-là sont d'une espèce bien particulière.
08:29 Ils disent déjà ce que les puissants vont chercher à leur faire répéter.
08:35 À la semaine prochaine.
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