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Aujourd'hui, dans "Bienfait pour vous", Mélanie Gomez et Julia Vignali ouvrent le dossier santé du jour avec Léa Didier.
Retrouvez "La question du jour" sur : http://www.europe1.fr/emissions/vite-fait-tres-bien-fait

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Transcription
00:00 *Musique*
00:06 Julia Vignali, Mélanie Gomez.
00:08 Nous sommes avec vous tous les matins sur Europe 1 jusqu'à midi.
00:11 Notre question du jour je la rappelle, avez vous de l'autorité avec vos enfants ?
00:15 Comment réagissez-vous d'ailleurs quand ils dépassent les limites ?
00:18 On en parle toujours avec Léa Didier, psychologue clinicienne, psychanalyste et autrice du livre
00:22 "Ça suffit mon amour" aux éditions Albert Michel.
00:25 Moi j'ai quelques variantes, "Ça suffit ma chérie", "Ça suffit mon petit coeur".
00:28 Effectivement c'est très autoritaire.
00:30 C'est donc très important, voire crucial pour un enfant quand on lui pose des limites.
00:34 En avoir l'aide d'autorité c'est pas le bon registre.
00:36 Et l'une des raisons Léa, pourquoi c'est important, c'est tout d'abord pour les protéger vous dites.
00:41 Mais les protéger de quoi par exemple ?
00:43 D'ailleurs quand vous imitiez "Ça suffit mon amour, ma chérie" c'est un geste d'amour de dire "Ça suffit".
00:49 Moi c'est pas très efficace, c'est ça le problème.
00:51 Alors, ça les protège, moi je crois que ça construit trois voies parallèlement.
00:55 Ça les protège des dangers physiques, du fait de ne pas être maltraitant,
00:59 donc on ne maltraite pas autrui, et aussi de fonder leurs propres limites
01:03 pour se protéger des débordements d'autrui.
01:05 C'est vraiment ces trois voies qui doivent être construites en parallèle.
01:08 Et vous dites également que ça leur apprend à vivre en société,
01:11 ça les prépare aux règles sociales, en fait à la réalité de la vie, c'est ça ?
01:15 Oui, en tant qu'enfant, mais aussi plus tard, en tant qu'adulte.
01:19 C'est-à-dire que ça donne des outils, parce que les limites c'est une question qui est fondamentale pour nous au quotidien.
01:24 Là par exemple vous avez des limites, là vous n'allez pas dire n'importe quoi, moi non plus.
01:28 Et ça c'est peut-être parce qu'on nous les a inculquées, non ?
01:30 Oui, bien sûr, parce qu'on nous les a transmises, mais c'est aussi en jeu avec nos partenaires, nos amis, au travail, les hiérarchies,
01:38 c'est-à-dire est-ce qu'on va se compromettre ?
01:40 Est-ce qu'on va tyranniser les autres ? Ou est-ce qu'on va trouver une justesse ?
01:43 Donc c'est très très fondamental.
01:45 Mais est-ce que leur mettre trop de limites, au contraire, ça ne peut pas être quelque part un peu contre-productif ?
01:50 Je ne sais pas, avoir des enfants qui manquent de confiance en eux, qui vont être hyper timides, très enfermés dans ces trop de limites ?
01:58 C'est pour ça qu'il faut vraiment faire attention à leur altérité.
02:02 On n'est pas propriétaire de nos enfants. Ils ne sont pas nos propriétaires non plus.
02:05 Mais réciproquement c'est vrai aussi. Donc pas trop de pression, ni sur nous, ni sur eux.
02:11 Mais comment on sait qu'on est dans le juste milieu alors ?
02:13 Pas trop de pression, mais pas non plus le côté "c'est la fête au slip" ?
02:19 Comme repère, je dirais qu'on ne transige pas avec les limites essentielles protectrices.
02:23 On est ferme, on peut être partenaire et ferme.
02:26 Je pourrais dire tout à l'heure des petites phrases à dire à des enfants.
02:29 Par exemple, on peut dire à un enfant "écoute, là il fait -4°C, on met nos manteaux là, tous les deux".
02:36 On est égaux devant ça, on n'a pas le choix.
02:39 Vous voulez dire on ne lui dit pas "mets ton manteau" ?
02:41 Si on lui dit "tu obéis, tu mets ton manteau, c'est moi qui décide", qu'est-ce qui va se passer ?
02:45 Dès qu'on est sur le registre de l'obéissance, soit comme ils sont en miroir, en imitation,
02:51 c'est lui qui va vouloir être le chef, on va se faire des quotidiens infernaux.
02:55 Soit ça va être des enfants modèles, ils vont se fondre complètement dans notre désir,
02:59 mais on les perd, c'est-à-dire que ce n'est plus eux.
03:01 Je reviens sur le manteau, parce que sur les petits, je dis "ça va, ils mettent le manteau, j'ai pas eu de soucis de ce côté-là".
03:07 Ça ne veut pas dire qu'ils n'auront pas un chagrin.
03:08 Oui, mais là j'ai celui de 13 ans qui ne veut plus le mettre, pour le coup.
03:10 Il me dit "ça va, je suis assez grand pour savoir si j'ai froid ou pas".
03:12 J'ai lâché l'affaire, il ne met plus de manteau, tant pis pour lui.
03:14 Les adolescents ont très chaud, ils sont toujours beaucoup moins couverts que nous.
03:18 Donc c'est bon, je le laisse ne pas mettre de manteau ?
03:20 Mais vous ne le laissez pas faire n'importe quoi pour autant.
03:22 Vous n'allez pas être derrière lui toute la journée avec le manteau.
03:26 On sait très bien qu'on a été adolescent, mais ça ne veut pas dire qu'il peut vous insulter.
03:30 Non, heureusement.
03:31 Et puis on peut dire "moi ça m'inquiète, donc tu mets ton manteau".
03:36 Et s'il veut l'enlever sur le chemin, il ne le fera pas derrière lui.
03:39 Il ne prend pas la fenêtre quand je le force, et de toute façon il l'a déjà enlevé.
03:42 On a reçu un témoignage au 3921, le répondeur d'Europe 1, c'est Audrey.
03:45 Elle a 38 ans, on l'écoute tout de suite.
03:47 Bonjour, je suis Audrey, je suis une maman de trois petits garçons.
03:51 Et je pense être une maman dans l'échange, dans la communication.
03:57 Alors quand, par exemple, il y a des caprices, quand nous faisons les courses,
04:01 c'est important que je m'arrête, que je regarde mon petit garçon
04:06 et que je lui demande pourquoi cette colère.
04:08 Ça, c'est vraiment, je pense que ça désamorce pas mal ce caprice.
04:13 Et c'est important de savoir ce qu'il y a derrière, surtout.
04:16 Je pense que c'est ça.
04:17 Alors, s'énerver, je pense que ça ne sert à rien,
04:20 parce que l'énervement entraîne l'énervement.
04:23 Et que de toute façon, il est important aussi de comprendre son enfant,
04:29 de comprendre ses caprices, de comprendre ce qu'il y a.
04:32 Et puis c'est aussi une forme d'apprentissage pour eux.
04:36 C'est important aussi de s'affirmer face à des parents,
04:39 à d'autres personnes, à des adultes, à des enfants.
04:42 C'est aussi ça, l'apprentissage.
04:45 - Eh bien voilà, le point de vue d'Audrey.
04:47 Alors on dit souvent que nos enfants testent nos limites,
04:50 mais est-ce que c'est vraiment ça ?
04:51 Ils le font consciemment, ces petits voyous ?
04:53 - C'est la grande phrase de la petite enfance.
04:55 On teste toujours les limites.
04:56 Moi, quand je l'ai demandé un peu à mes équipes ou à des parents,
05:00 "Mais vous, pourquoi vous dépassiez les limites,
05:02 enfants, ados ou adultes ?"
05:04 On disait toujours ça.
05:05 "C'est pour tester mes parents ou tester les limites."
05:07 Et en fait, dès qu'on creuse,
05:08 "Ah bon, vous mangez tous les chocolats pour tester vos parents ?
05:11 Vous sortiez avec votre amoureux le soir pour tester vos parents ?
05:14 Vous avez fumé votre..."
05:15 Ben non, c'est jamais pour ça.
05:17 - C'est pour enquête de liberté, non ?
05:19 - Entre autres, il y a plein plein plein d'enjeux.
05:21 C'est-à-dire, il y a des malentendus,
05:23 il y a des besoins qu'on ne repère pas chez les petits.
05:25 Ils ont besoin de vider, de grimper.
05:26 On croit que c'est pour nous tester.
05:28 C'est pas ça.
05:29 Ça ne veut pas dire qu'on les laisse jeter nos objets précieux.
05:32 Mais ils ont besoin d'un ballon d'hélium,
05:34 de pouvoir grimper quelque part.
05:36 Vous voyez, il faut répondre aux besoins.
05:38 - Mais ils ne sont pas aussi vicieux qu'on l'imagine.
05:40 - Exactement.
05:41 Une swap d'exploration hyper forte, à plein d'âge.
05:44 Donc, ben oui, ils vont éteindre et allumer la lumière 8 fois.
05:48 Nous, on va pouvoir l'arrêter avant,
05:50 parce qu'on n'est pas dans une discothèque.
05:51 Mais en même temps, ils découvrent la lumière, quand même.
05:54 - Comment on fait pour fixer, par exemple, les limites de temps ?
05:56 Moi, je trouve que c'est quelque chose de fou,
05:58 surtout au parc, par exemple.
06:00 Je n'arrête pas de lui dire "Bon, dans 15 minutes, on s'en va, le parc."
06:03 Parce que c'est bien le parc, mais c'est long, parfois.
06:05 Et donc, je lui montre même la montre.
06:07 Je lui dis "Regarde, quand l'aiguille sera là,
06:08 j'essaie de le faire de manière concrète, apaisée."
06:10 Sauf que quand l'aiguille est là, elle n'en a rien à faire.
06:12 Elle court dans tous les sens, je n'arrive pas à l'attraper.
06:14 Vous n'avez pas une astuce sur la sortie du parc apaisé ?
06:17 - Le temps, c'est une vraie question, chez les petits notamment.
06:19 - Mais elle a que 5 ans, donc c'est vrai que...
06:20 - Parce qu'il est illimité.
06:21 Ils n'ont jamais envie d'arrêter une activité qu'ils aiment.
06:23 Et en plus, avec les plus petits, ils sont dépendants de nous,
06:26 il ne faut pas l'oublier, donc eux, ils ont peur de ne pas revenir.
06:28 Même si on leur dit "Tu vas revenir ?"
06:30 - Oui, mais il ne faut pas qu'ils vous croient.
06:32 - Ils ne sont pas pour ça qu'ils nous croient.
06:33 Ils savent bien qu'ils sont collés à nous,
06:34 et que c'est nous qui allons décider.
06:36 Bon, parfois, on prévient 5 minutes avant, comme vous faites,
06:39 et puis on dit que 5 minutes, c'est 3 tours d'autobogans, etc.
06:42 Ça peut être abstrait.
06:43 Ça ne veut pas dire qu'ils ne vont pas avoir un chagrin en partant.
06:45 Mais ce n'est pas contre nous.
06:47 Et puis parfois, on les console, on les charrie un peu,
06:50 et puis parfois, on les laisse se consoler.
06:52 - Oui, et puis moi, je la frappe par le ventre, et puis on y va.
06:54 Et puis au bout d'un moment, tant pis, elles pleurent sur le chemin.
06:56 - Mais ce n'est pas un problème. Ce n'est pas contre nous.
06:57 Des fois, ils ont une rencontre, ils sont tristes.
06:59 Nous, le dimanche soir, on a le blues, parfois.
07:01 - Il y a Marie-Laure, également, sur Insta, qui nous pose une question.
07:03 Elle dit "Pendant les fêtes, ma mère est venue quelques jours chez nous,
07:06 et elle me fait toujours des remarques du genre
07:08 "Mais moi, je ne laissais pas faire ça,
07:10 même pas la moitié de ce que tu laisses faire à tes gamins.
07:12 Avec moi, ça ne se passerait pas comme ça.
07:14 Ça m'énerve tellement.
07:15 Comment lui dire que nous n'avons pas la même vision de l'éducation,
07:17 même si parfois, elle a peut-être raison, je me fais bouffer par mon fils ?"
07:20 - Elle le reconnaît, quand même.
07:22 - Qu'est-ce qu'on peut lui répondre, alors, Léa ?
07:24 - C'est normal que les générations avancent sur ces sujets.
07:27 Donc ça, c'est vraiment la base.
07:29 C'est comme ça.
07:30 De génération en génération, on fait de plus attention aux enfants.
07:34 Après, on peut aussi lui dire qu'on n'a pas besoin d'être jugé, en fait.
07:41 Que ce sont des questions complexes,
07:43 que personne n'a réussi à trancher vraiment sur ces questions dans aucune génération.
07:47 Et que si elle avait tant aimé son enfance,
07:50 elle l'aurait peut-être transmise clé en main à ses propres enfants.
07:53 - Comment on leur apprend la frustration aussi ?
07:56 Parce que quand ils veulent, je ne sais pas, deux jouets,
07:59 alors qu'on en avait discuté un avant,
08:01 là, honnêtement, c'est une anecdote très, très vécue.
08:03 On était à Disney sur Glace, j'avais dit "tu auras un cadeau".
08:05 Au bout de deux minutes, elle en veut un deuxième.
08:07 Et j'ai fini, au bout de deux secondes, par accepter de lui acheter le deuxième.
08:10 Qu'est-ce qu'on peut faire ?
08:12 Pour que ce soit clair et qu'on ne craque pas.
08:15 - Ne pas faire ça, Mélanie !
08:16 - Bah oui, je sais, mais moi j'arrive pas !
08:17 - En fait, ça dépend.
08:18 - Pourquoi j'y arrive pas ?
08:19 - Bon, la frustration, ils connaissent, on n'a pas besoin de leur apprendre.
08:21 On a tous affaire à ça dans la réalité, il n'y a pas besoin que ce soit artificiel.
08:24 Mais, c'est-à-dire qu'on peut changer d'avis.
08:27 S'il argumente et que finalement, on est d'accord avec lui,
08:30 qu'on se dit "quand même, ce serait super",
08:32 et bien, vive le dialogue !
08:33 La question, c'est comment ne pas céder
08:36 quand on n'est pas d'accord et qu'on a juste peur d'une colère.
08:39 Ça, il faut travailler la question en profondeur.
08:42 - Mais si vous avez cédé Mélanie, c'est que vous étiez d'accord.
08:44 - Mais j'avais pas acheté de jouets !
08:45 - Non, j'avais juste pas envie qu'elle se mette à hurler en plein milieu.
08:47 - Oui, alors ça, depuis le début, en fait, on peut le travailler selon les âges,
08:50 pas de la même manière, c'est vraiment ce que je déploie aussi dans le livre.
08:53 Mais, pour sortir du rapport de Forstead, avec des tout-petits,
08:57 on leur dit "écoute, moi quand je peux, je te dis oui, ça me fait plus plaisir,
09:01 je suis ravie d'entendre tes pensées, de ton avis,
09:04 mais une fois, je n'ai pas le choix, je te dis non".
09:06 Donc, ça, ça désamorce beaucoup les choses,
09:09 quand ils savent qu'on est partenaire.
09:10 Après, ils doivent aussi faire attention à nous,
09:12 c'est-à-dire qu'on n'est pas des pouching-balls.
09:13 Ça, c'est la question de l'empathie.
09:14 - Sinon, j'ai un autre truc.
09:15 - On peut se fâcher et on peut acter.
09:16 - Je dis "attention, je vais appeler papa".
09:18 - Nul !
09:19 - Parce que c'est bien de donner le mauvais rôle à l'autre.
09:20 - Nul !
09:21 - Je le dis, vous le savez, c'est nul.
09:22 - Non, mais qu'est-ce que vous en pensez de donner le back-up, le boot-cup ?
09:24 - Il y a rien de dramatique, mais peut-être que c'est mieux que chacun soit au clair avec les limites.
09:28 C'est-à-dire qu'il y en a un qui n'a pas besoin d'être tout le temps dans un rapport très, très, très autoritaire,
09:33 et l'autre qui ne l'assume jamais.
09:34 C'est beau les limites, on peut les assumer en étant de leur côté.
09:38 - C'est quoi votre phrase magique ? Redites-la, s'il vous plaît, pour nos auditeurs.
09:40 C'est "moi, je préfère être d'accord avec toi, mais parfois, je ne peux pas", c'est ça ?
09:43 - Parfois, je ne peux pas.
09:45 - Moi, je préférerais te dire oui, mais je ne peux pas.
09:48 - En fait, il faut leur expliquer dès le début que les limites,
09:50 c'est pour les protéger, qu'on est égaux devant eux.
09:53 C'est-à-dire que même, oui, nous, on peut utiliser le couteau qui coupe très fort,
09:56 mais ce n'est pas parce qu'on le décide, c'est parce qu'on a appris à le faire,
09:59 qu'ils vont apprendre à le faire, et qu'ils savent déjà faire plein de choses.
10:02 Ça désamorce tout.
10:04 - Merci à vous, Léa. On va vous retrouver dans quelques minutes sur Europe 1.
10:08 Que nous disent nos enfants quand ils dépassent les limites ?
10:10 Comment les aider justement à se construire à la fois en évitant le laxisme,
10:13 mais aussi l'autoritarisme ?
10:15 On retrouve justement ensemble le juste milieu sur Europe 1.
10:18 sur Europe 1 alors restez avec nous à tout de suite.