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Anne Lavaud, déléguée générale de l’association Prévention Routière, était jeudi 2 février l'invitée de la matinale de franceinfo. Elle répondait aux questions de Marc Fauvelle.

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Transcription
00:00 2022 aura été une année noire pour les cyclistes et les usagers des trottinettes.
00:03 Ce sont les derniers chiffres de la sécurité routière et ils sont mauvais. Bonjour Anne Laveau.
00:07 Bonjour.
00:08 Déléguée générale de l'association Prévention routière,
00:10 244 cyclistes tués l'an dernier. C'est 30% de plus qu'il y a trois ans, c'est-à-dire avant la crise du Covid,
00:18 puisque c'est la référence choisie par la sécurité routière.
00:20 Est-ce que c'est tout simplement parce qu'il y a de plus en plus de cyclistes sur les routes ?
00:23 C'est bien évidemment une des raisons. C'est-à-dire que automatiquement, à partir du moment où la part modale
00:29 d'un mode de déplacement augmente, le risque augmente.
00:33 Mais c'est sans doute pas uniquement cette raison-là.
00:37 Pour notre association, le point qu'il faut souligner,
00:40 c'est globalement qu'il y a eu moins d'accidents corporels, mais plus de tués.
00:46 Comment vous l'expliquez ?
00:47 Eh bien, il y a un facteur, c'est celui de la vitesse.
00:50 Comme la vitesse est le facteur aggravant de toutes les causes d'accidentalité...
00:54 La vitesse des voitures, vous voulez dire ?
00:55 La vitesse globale.
00:56 Globale.
00:56 La vitesse globale.
00:57 À partir du moment où vous avez moins d'accidents corporels et plus de tués,
01:01 c'est automatiquement ce facteur vitesse qui joue.
01:04 Et pourquoi je vous dis que c'est global ?
01:06 C'est parce qu'au niveau des cyclistes, contrairement à ce que nous, surtout en région parisienne, etc.,
01:12 on peut imaginer, l'augmentation de la mortalité des cyclistes ne s'est pas fait majoritairement en ville.
01:18 Non, effectivement, c'est ce qu'on disait tout à l'heure.
01:20 La grande majorité des accidents a lieu sur les routes de campagne, c'est là aussi qu'elle augmente le plus.
01:25 Absolument, et sur les routes de campagne, ça ne vous a pas échappé qu'un certain nombre de départements
01:30 ont rompu la règle du 80 km/h pour repasser à 90 km/h.
01:35 Pour vous, c'est ça qui explique ?
01:37 Écoutez, c'est un des facteurs d'explication.
01:40 C'est bien sûr de toute façon multifactoriel, ce sujet de la sécurité routière.
01:46 Mais quand vous avez une augmentation de la part modale
01:48 et ce ratio entre le nombre d'accidents et le nombre de tués,
01:53 vous avez automatiquement un facteur vitesse.
01:54 Et quand en même temps, vous voyez que cette mortalité des cyclistes
01:58 est majoritairement en augmentation hors agglomération,
02:02 et bien voilà, vous faites 1+1=2.
02:04 L'autre chiffre qui augmente, c'est celui des accidents de trottinettes électriques.
02:08 34 morts l'an dernier, 600 blessés graves, c'est trois fois plus en l'espace de trois ans.
02:12 On a sous-estimé le risque pris par les usagers des trottinettes ?
02:16 Alors, pour notre association, on a été la première même, on peut dire,
02:21 à faire une enquête vraiment très sérieuse par rapport à ce sujet.
02:25 Et puis on a mené pendant trois ans un programme de sensibilisation aux trottinettes électriques.
02:30 Il est évident qu'on a sous-estimé ce mode de déplacement,
02:34 en le considérant au mieux comme un sport de glisse urbain.
02:37 Comme une mobilité douce ?
02:39 Mais même pas. Je vais vous dire, vous vous dites mobilité,
02:42 moi j'ai l'impression que c'est seulement depuis quelque temps
02:45 qu'on considère que c'est un mode de déplacement.
02:47 Avant c'était soit un sport de glisse, soit un jouet,
02:50 soit un jouet avec un moteur, etc.
02:52 Et donc du coup, ça s'est installé, ce mode de déplacement s'est installé
02:55 hors de toute règle de mobilité.
02:57 Aujourd'hui on essaie.
02:59 Et on voit d'ailleurs que les villes hésitent, il y a des villes qui ont banni
03:02 ou tout simplement jamais autorisé les trottinettes électriques.
03:04 Toulouse, Villeurbanne, Nice, il y a d'autres villes aujourd'hui qui s'interrogent.
03:06 C'est le cas à Marseille, c'est le cas aussi à Paris.
03:09 Est-ce que vous pensez que dans les années qui viennent, il y en aura de moins en moins ?
03:12 Alors, il y a deux choses différentes par rapport aux trottinettes électriques.
03:15 Il y a la trottinette électrique que vous, vous pouvez acheter, que moi je peux acheter.
03:18 Là je parle des trottinettes en libre service, vous avez raison.
03:21 Donc il faut vraiment bien faire le distinguo entre les deux.
03:24 Mais globalement, ce que nous on dit, c'est qu'il faut refaire rentrer la trottinette électrique
03:31 dans un mode de déplacement et non plus comme un sport de glisse.
03:34 C'est-à-dire ?
03:35 Vous les avez tous vus, vous nous avez tous vus, utilisateurs de trottinettes électriques.
03:39 On fait n'importe quoi ?
03:40 Non, c'est pas qu'on fait... alors, je ne dirais pas ça.
03:43 Quand on est sur une trottinette électrique, le but du jeu, c'est de faire un déplacement d'un point A à un point B sans s'arrêter.
03:50 Vous les avez vus ? On les voit dans la rue.
03:52 On passe de la rue, la piste s'y clame, hop, on passe sur le trottoir, on se l'allome entre les gens, etc.
03:58 Parce que ça s'est installé comme un sport de glisse.
04:01 C'est du surf urbain, on a l'impression d'être sur une piste rouge, et hop, on y va.
04:06 Remettons un peu de code de la route dans tout ça, c'est ce que vous nous dites.
04:09 C'est une bonne idée.
04:10 Les chiffres, à la fois sur les vélos et les trottinettes électriques, doivent relancer pour vous le débat sur le port du casque,
04:14 qui est obligatoire aujourd'hui, uniquement pour les enfants jusqu'à 12 ans.
04:18 Alors, pour notre association, de toute façon, la trottinette électrique sans casque, c'était une aberration.
04:25 Ne serait-ce que par la configuration même de la trottinette électrique, avec ses deux petits trous et son centre de gravité très bas,
04:31 on fait des soleils et on s'écrase la tête.
04:33 Bon, c'est un peu cru ce que je dis, mais c'est la réalité, notre conseil médical nous le dit à chaque fois.
04:38 Et pour les vélos ?
04:39 Eh bien, pour les vélos, là aussi, pour nous, ça n'a pas été une très bonne idée de dire,
04:45 les enfants, vous mettez votre casque jusqu'à 12 ans.
04:47 Quand on est enfant, on n'aspire qu'à une chose, c'est à être grand.
04:50 Et donc, on se dit, être grand, c'est ne pas porter le casque.
04:53 Donc là, c'était une aberration psychologique.
04:55 Anne Laveau, quand on se compare aujourd'hui avec nos voisins européens,
04:58 les Français sont les bonnets d'âne en termes d'agressivité au volant.
05:02 Deux chiffres, simplement.
05:03 Les deux tiers des Français reconnaissent qu'ils insultent régulièrement les autres.
05:06 Et un tiers colle volontairement la voiture dont le conducteur les agace.
05:10 Pourquoi sommes-nous, nous, Français, si énervés ?
05:13 Alors, il y a effectivement un facteur stress, qui est un facteur...
05:17 Les Espagnols et les Italiens ont toutes les mêmes raisons d'être stressés que nous, non ?
05:21 Typiquement, Français, ça je ne sais pas.
05:24 Je ne sais pas si c'est les Espagnols ou les Italiens le sont plus.
05:29 Je pense qu'on a un rapport à la règle et un rapport surtout à la vitesse,
05:33 qui est quelque chose d'assez étonnant.
05:35 Et l'association Prévention routière, avec grand plaisir, reviendra vous voir,
05:39 parce qu'on est en train de conduire une étude sur...
05:42 Est-ce que les Français préfèrent la fluidité à la vitesse ?
05:46 Et comment ils réagissent par rapport à ce qu'ils considèrent être des obstacles à la vitesse ?
05:51 On en reparlera avec vous si vous voulez bien.
05:52 Merci beaucoup Adelavo, de l'association Prévention routière,
05:55 invité d'Actu de France Info.

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