IRA: ces subventions américaines qui inquiètent l'Europe

  • l’année dernière
La politique industrielle des Etats-Unis tient désormais dans un acronyme : l’IRA (Inflation Reduction Act). Comme son nom ne l’indique pas, il s'agit d’un paquet de mesures protectionnistes visant à accélérer la transition énergétique.

Le plan prévoit 369 milliards de dollars de subventions aux technologies propres, à condition qu'elles soient fabriquées sur le sol américain. Ce qui heurte directement les intérêts des partenaires commerciaux des Etats-Unis. Notamment des Européens, qui ne cachent pas leur préoccupation à cet égard et discutent encore de la meilleure réponse à apporter.
Transcript
00:00 Avec cette loi, les Américains ont gagné et les intérêts spéciaux ont perdu.
00:04 L'IRA, c'est l'Inflation Reduction Act.
00:10 Un texte de lutte contre l'inflation qui a été voté aux États-Unis l'année dernière
00:20 et qui est entré en vigueur le 1er janvier aux États-Unis.
00:29 Pour prendre la décision la plus agressive jamais, jamais, jamais, jamais,
00:33 en confrontant la crise climatique.
00:35 Il n'est pas secret que certains éléments du design de l'Inflation Reduction Act
00:45 ont élevé le nombre de concerns.
00:46 Nous avons besoin d'en tirer les conséquences en Européens.
00:56 Concrètement, ils prévoient 370 milliards de dollars de subventions
01:01 aux industries vertes sur le sol américain.
01:04 Cela représente une bonne et une mauvaise nouvelle.
01:06 La bonne nouvelle, c'est que les États-Unis font enfin leur transition climatique.
01:10 Ils vont subventionner des investissements sur les technologies propres,
01:13 les technologies vertes, avec par exemple des énormes crédits d'impôt
01:17 pour les particuliers qui achètent une voiture électrique.
01:20 La mauvaise nouvelle, c'est qu'il y a une condition à toutes ces subventions
01:23 et ces crédits d'impôt, c'est que ce soit sur produits sur le sol américain
01:27 fabriqués aux États-Unis.
01:28 Et donc, ça risque de créer une distorsion de concurrence
01:32 avec les autres pays du monde qui s'inquiètent sur ce que ça veut dire
01:35 pour leurs propres entreprises.
01:37 Parce que leurs propres entreprises peuvent se dire
01:39 « Tiens, si je vais aux États-Unis pour fabriquer mes produits,
01:42 j'aurai des subventions plus intéressantes. »
01:44 Donc, il y a une crainte que les États-Unis attirent plein d'investissements
01:48 qui étaient censés se faire ailleurs et notamment en Europe.
01:51 [Musique]
01:58 Pour l'Europe, c'est un peu la goutte d'eau qui fait déborder le vase.
02:01 Parce qu'il y a déjà une énergie qui est devenue beaucoup plus chère en Europe
02:04 qu'aux États-Unis, par exemple, trois fois plus chère.
02:07 Et à ça, vous ajoutez le fait que pour les entreprises,
02:09 avoir une subvention aux États-Unis, c'est beaucoup plus rapide,
02:12 vous avez un crédit d'impôt immédiat.
02:14 Alors qu'en Europe, ça prend parfois deux ans
02:17 entre le moment où vous demandez une aide publique
02:19 et où vous la recevez pour une entreprise
02:21 et en plus, le montant est parfois cinq fois inférieur
02:24 à ce que les États-Unis vous proposent.
02:25 Donc, il y a cette conjonction de facteurs et depuis plusieurs mois,
02:29 les industriels européens alertent tous les dirigeants politiques du continent
02:33 pour leur dire « attention, l'Europe doit réagir très vite,
02:36 sinon les investissements vont aller aux États-Unis ».
02:39 À court terme, ça veut dire que vous avez des investissements innovants
02:41 et très importants qui risquent de ne pas se faire en Europe.
02:44 Et puis, à moyen-long terme, c'est un enjeu de souveraineté,
02:48 même si l'Europe fait aussi sa transition verte
02:50 avec notamment toute une politique de taxation du carbone.
02:54 Il faut que l'Europe garde sur son sol des innovations et des technologies propres
02:58 pour rester souverain dans la matière.
03:00 C'est compliqué pour deux raisons.
03:05 Primo, l'Europe ne veut pas créer de guerre commerciale avec les États-Unis,
03:09 qui sont un partenaire très important
03:11 et crucial en plus en ce moment avec la guerre en Ukraine.
03:14 Donc, on évite de les attaquer à l'Organisation mondiale du commerce
03:18 et on négocie, on leur demande d'autoriser des exemptions,
03:22 un peu comme pour le Canada et le Mexique,
03:24 pour que les entreprises européennes puissent, elles aussi,
03:27 bénéficier des subventions qui sont prévues dans le cadre de l'IRA.
03:31 Et puis, secondo, on muscle ce qu'on peut faire déjà en Europe
03:34 comme aide d'État aux entreprises.
03:36 Là aussi, c'est compliqué parce que l'Europe est contre le protectionnisme.
03:40 Si chaque État se met à subventionner ses entreprises nationales,
03:43 on risque d'avoir une course aux subventions entre les États
03:47 et les gagnants seront ceux qui ont le plus d'argent.
03:49 Ça va complètement désorganiser le marché intérieur avec une concurrence entre États.
03:54 Ce n'est pas ce que l'on souhaite.
03:55 Donc, ce que cherche à faire l'Europe, c'est assouplir le cadre des aides d'État européennes
04:00 pour qu'on puisse accorder des aides aux entreprises innovantes
04:03 et aux technologies propres plus rapidement et de manière plus simple.
04:07 La Commission propose aussi des mécanismes de crédit d'impôt très rapides et efficaces
04:12 comme aux États-Unis et un mécanisme d'alignement
04:15 qui permettra d'accorder une subvention à une entreprise en Europe
04:18 si cette entreprise dit qu'elle a une subvention plus importante ailleurs.
04:22 Tout cela sera fait avec des fonds européens existants.
04:26 C'est-à-dire que pour le moment, il n'y a pas eu d'accord entre les États membres
04:29 pour qu'il y ait de nouveaux fonds mis à disposition pour ce projet.
04:33 Mais ça reste en discussion.
04:35 Et cet été, les États européens vont discuter d'un fonds souverain
04:38 qui permettra d'investir de l'argent nouveau dans des secteurs clés
04:43 où on manque aujourd'hui d'argent public pour prendre le virage de la transition verte.
04:47 [Musique]

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