"Si les gens savaient qu'il y a cette alternative à l'Ehpad…"
Laura a créé une maison de retraite… chez elle. En plus de s'occuper de ses enfants, elle prend soin de Betty, de François et d'Yvette. Et pour eux, vivre dans cette grande famille, ça change tout.
Laura a créé une maison de retraite… chez elle. En plus de s'occuper de ses enfants, elle prend soin de Betty, de François et d'Yvette. Et pour eux, vivre dans cette grande famille, ça change tout.
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00:00 Ici, on est dans la chambre de François.
00:02 Je suis famille d'accueil.
00:03 J'accueille trois personnes.
00:05 François a fait un AVC juste avant d'être à la retraite.
00:07 Il y a quoi, il y a trois ans ?
00:09 Trois ans, pas la douche.
00:12 Sa sœur a cherché un accompagnement personnalisé
00:15 parce que François a que 64 ans
00:18 et elle n'avait pas envie qu'il finisse dans un EHPAD.
00:23 C'est bon, tu as tout ce qu'il te faut ?
00:24 J'ai été animatrice en EHPAD pendant trois ans
00:27 et j'avais envie de créer un lieu de vie pour personnes âgées,
00:31 de trouver un intermédiaire à ces EHPAD qui sont beaucoup trop gros
00:34 et où on n'a pas vraiment le temps de prendre soin des personnes qui sont là,
00:38 qui ont passé toute leur vie à travailler.
00:40 Et quand elles sont deux pour coucher 80 personnes,
00:42 ce n'est pas possible.
00:43 Impeccable, super.
00:46 Et là, on a Betty.
00:49 On est dans le petit salon qui est pour eux.
00:52 Il est où Hugo ?
00:53 En haut.
00:54 En haut ? Tu vas le chercher ?
00:55 Ici, on vit tous ensemble.
00:56 C'est le but de la famille d'accueil.
00:58 C'est-à-dire que là, c'est la pièce commune, cuisine, salle à manger.
01:02 On prend les repas en commun.
01:04 C'est vraiment la vie de famille. Ils vivent avec nous.
01:06 Après, j'ai mon espace privé.
01:08 J'ai un autre salon de l'autre côté pour être avec mes enfants
01:10 parce que la famille d'accueil, oui, c'est du H24.
01:13 On est tous ensemble.
01:14 On partage notre vie avec eux parce que c'est le but.
01:18 Ce n'est pas pour qu'ils soient en chambre tout seuls.
01:20 Mais c'est important aussi de garder de l'intimité,
01:24 que ce soit pour eux et pour nous.
01:25 Ils savent qu'à partir de 19h30,
01:28 à part si c'est un cas d'extrême urgence,
01:31 forcément, oui, je vais y aller.
01:32 Mais sinon, à 19h30, tout le monde sait que c'est pour mes enfants,
01:36 ma famille, pour moi, et que moi aussi, j'ai le droit de faire stop,
01:40 même si je suis chez moi et que c'est du H24.
01:44 Tu joues avec eux, Hugo ?
01:45 Oui.
01:46 Vas-y.
01:46 Pour moi, c'est mon plus gros avantage.
01:48 C'est de pouvoir voir grandir mes enfants,
01:49 tout en travaillant et en prenant soin des personnes que j'accueille.
01:53 J'ai du temps pour vous ou pas ?
01:54 Oui, tu as du temps pour nous.
01:55 Ça t'a pas fait bizarre au début ?
01:57 Non.
01:59 Il fait le timide, mais il fait les 400 coups avec François.
02:02 J'ai une vidéo où François a accroché derrière son fauteuil électrique
02:07 le tracteur des enfants avec la remorque,
02:10 et il faisait tout le tour dehors, avec les enfants, comme ça.
02:12 Faut bien les occuper.
02:13 Faut bien les occuper, bah oui.
02:15 T'as raison.
02:16 Je vais me le laisser.
02:17 T'es foutu ?
02:19 Ici, là-bas.
02:20 Impeccable.
02:21 Voilà.
02:22 Je leur ai expliqué que j'allais faire famille d'accueil,
02:24 que j'allais accueillir des personnes,
02:26 mais que si ça se passait mal,
02:28 ou que si ça allait pas avec telle ou telle personne,
02:31 que rien n'était figé,
02:34 qu'on pouvait discuter,
02:36 qu'il fallait un temps d'adaptation,
02:37 que ce soit pour la personne qui arrive,
02:38 parce que la personne qui arrive est aussi en perte de repère,
02:41 parce qu'elle quitte son domicile, ou l'hôpital, ou l'EHPAD.
02:44 Comme François qui, du jour au lendemain, a fait un AVC,
02:46 et on lui a dit "tu peux plus rentrer chez toi".
02:48 Julia ?
02:49 Tu vas chercher Yvette ?
02:52 Tu vas lui demander si elle veut peler les légumes pour la soupe ?
02:56 Dans une journée, je passe de la casquette de maman
03:00 à cuisinière, travailleuse,
03:02 femme de ménage, aide-soignante.
03:04 Il faut savoir accepter les années.
03:07 Avec le sourire, c'est tellement mieux.
03:10 Elle sourit tout le temps.
03:12 Yvette a amené sa commode, a amené ses cadres,
03:15 elle a recréé son petit chez-soi,
03:18 ici, pour se sentir bien.
03:22 C'est bon ?
03:25 On est passé, merci chef !
03:27 Viens, vas-y.
03:28 Vas-y, mets-toi.
03:30 C'est bon, c'est bien ?
03:31 C'est bon.
03:32 Impeccable.
03:34 Tiens, regarde.
03:37 Je t'ai mis ton économe.
03:39 La famille d'accueil, c'est aussi le maintien de l'autonomie.
03:45 Quand on voit François, quand il est arrivé,
03:48 quand on voit François maintenant,
03:49 tout le monde me dit qu'il est méconnaissable.
03:51 Yvette aussi.
03:52 Yvette a pris en agilité et en plein de choses.
03:56 Je reconnais que l'ambiance, c'est une ambiance.
04:00 Et vous vouliez éviter du coup de vous retrouver
04:02 dans une maison de retraite classique ?
04:04 Oui, je préfère un accueil familial,
04:07 c'est beaucoup plus agréable et enrichissant.
04:10 Parce qu'il y a le sourire des enfants.
04:14 Et puis on plaisante, vous savez.
04:16 Voilà.
04:18 C'est bon, t'es bien comme ça ?
04:20 Betty, elle vivait avec son papa et sa maman.
04:25 Et il y a trois ans, son papa est décédé,
04:27 sa maman est allée en EHPAD.
04:29 Et à 61 ans, être dans un EHPAD,
04:32 sa cousine qui est sa tutrice, c'était inconcevable.
04:35 Je t'aime toi aussi.
04:37 Oui, moi aussi.
04:38 Et toi.
04:39 L'accueil familial, quand même c'est limite.
04:46 Je vais accueillir jusqu'à la fin de vie.
04:47 Si j'ai les capacités et les ressources pour arriver à le faire.
04:50 Après, il y a une différence entre accompagner jusqu'à la fin de vie
04:53 et avoir une personne qui,
04:56 de par ses troubles du comportement et de sa maladie,
05:00 va se mettre en danger le jour, la nuit.
05:02 Là, ça nécessite un accompagnement dans des structures protégées,
05:06 des structures fermées.
05:07 Je connais aussi mes limites.
05:09 Et j'adore le métier que je fais,
05:11 mais il faut savoir dire stop.
05:12 Et là, les EHPAD prennent le relais.
05:14 Mais si le métier de famille d'accueil était plus connu,
05:17 plus valorisé et que les gens savaient qu'il y avait cette alternative,
05:21 en fait, on pourrait être un tremplin pour,
05:23 ben, pour soit l'EHPAD, soit pas du tout l'EHPAD.
05:26 [Bruit de la bouche]
05:28 Ok.