Ukraine : "L’avenir de la paix dépend du rapport de force militaire. Il faut aider les Ukrainiens à gagner, c’est-à-dire libérer leur territoire. La modification d’un rapport de force en faveur de l’Ukraine, c’est la condition d’une négociation" résume Jean-Louis Bourlanges, président de la commission des affaires étrangères à l’Assemblée nationale
Pour suivre toute l'actualité politique et parlementaire, abonnez-vous à notre chaîne YouTube : https://www.youtube.com/user/publicsenat?sub_confirmation=1
Retrouvez l'émission intégrale de Bonjour Chez vous ! ici : https://www.publicsenat.fr/emission/bonjour-chez-vous
Abonnez-vous à notre newsletter : https://urlz.fr/iinC
Suivez-nous sur les réseaux sociaux
Facebook : https://www.facebook.com/publicsenat
Twitter : https://twitter.com/publicsenat
Instagram : https://instagram.com/publicsenat
LinkedIn : https://www.linkedin.com/company/2996809/
Pour suivre toute l'actualité politique et parlementaire, abonnez-vous à notre chaîne YouTube : https://www.youtube.com/user/publicsenat?sub_confirmation=1
Retrouvez l'émission intégrale de Bonjour Chez vous ! ici : https://www.publicsenat.fr/emission/bonjour-chez-vous
Abonnez-vous à notre newsletter : https://urlz.fr/iinC
Suivez-nous sur les réseaux sociaux
Facebook : https://www.facebook.com/publicsenat
Twitter : https://twitter.com/publicsenat
Instagram : https://instagram.com/publicsenat
LinkedIn : https://www.linkedin.com/company/2996809/
Category
📺
TVTranscription
00:00 – Et installez-vous Jean-Louis Bourlange, bonjour.
00:03 Merci beaucoup d'être notre invité politique ce matin,
00:06 député modem des Hauts-de-Seine, président de la commission des affaires étrangères
00:09 de l'Assemblée nationale.
00:11 On est ensemble pendant 20 minutes pour une interview en partenariat
00:13 avec la presse régionale.
00:14 Bonjour Christelle Bertrand.
00:15 – Bonjour Orianne. – Merci beaucoup d'être avec nous.
00:18 Christelle du groupe La Dépêche.
00:20 On va évidemment parler longuement de la situation en Ukraine avec vous Jean-Louis Bourlange,
00:24 mais d'abord un mot sur cette dramatique actualité,
00:26 cette professeure qui a été tuée, assassinée hier par un élève en plein cours à Saint-Jean-de-Luz.
00:31 Comment avez-vous réagi à ce drame ?
00:33 – Ecoutez, je crois que j'ai réagi comme absolument tout le monde, de façon horrifiée.
00:38 Ce qui s'est passé est terrible, cette femme fait son métier,
00:42 tombe sur un élève dont on ne sait pas grand-chose,
00:45 sinon que, semble-t-il, il était assez, très perturbé sur le plan psychologique.
00:50 Ça montre quand même que la situation, au-delà du cas particulier,
00:55 que la situation des enseignants, progressivement, devient très, très difficile.
01:02 Pour de multiples raisons, d'ordre culturel, d'ordre politique, d'ordre psychologique.
01:07 Moi, j'étais originellement professeur de lettres,
01:12 et quand j'ai commencé le métier, c'était simple, on savait des choses,
01:18 on avait en face de nous des élèves qui voulaient apprendre,
01:20 et puis on avait le respect, la discipline, etc.
01:24 Toutes ces régulations, si je puis dire, ont disparu,
01:29 et le métier d'enseignant est devenu un métier terrible.
01:33 Et là, ce qu'on montre, ce qu'on voit, c'est qu'il est peut-être extrêmement risqué,
01:37 ce qui est quand même impressionnant.
01:40 Enfin, il est évident que ça pourrait exister,
01:42 ça aurait pu arriver à n'importe qui, dans n'importe quelles circonstances.
01:45 Manifestement, on avait affaire à un garçon qui était détraqué,
01:52 pour parler un petit peu sommairement.
01:55 – On va parler de la guerre en Ukraine, puisque demain, 24 février…
01:58 – Là aussi, on a affaire à un garçon qui était un peu détraqué,
02:00 qui s'appelle Vladimir Poutine.
02:02 – Et on va en parler.
02:04 Est-ce que vous attendiez à une guerre aussi longue,
02:06 et est-ce que cette guerre est partie pour durer encore longtemps ?
02:08 – Non, moi, je suis un des hommes politiques en France
02:14 qui avaient prévu et annoncé cette guerre.
02:17 Je pense que c'était une erreur de croire que Poutine ne la ferait pas.
02:21 Deuxièmement, j'étais convaincu que c'était trop gros.
02:25 Je l'ai dit deux jours après le début de l'offensive,
02:28 dans une interview au journal du dimanche,
02:29 j'avais dit "Monsieur Poutine a les yeux plus gros que le ventre",
02:33 comme disent, car l'Ukraine n'était pas assimilable.
02:37 En revanche, il ne faut pas se donner des réputations qu'on n'a pas,
02:41 je n'avais absolument pas prévu, le 24 février de l'année dernière,
02:46 que la résistance de l'Ukraine prendrait ce tour.
02:50 J'étais convaincu que l'armée ukrainienne ne tiendrait pas le choc.
02:54 Et d'ailleurs, il s'en est fallu de peu.
02:55 Il s'en est fallu de peu que le coup de main initial de Poutine sur Kiev
03:00 ne fonctionne, qu'il s'empare de Kiev, qu'il installe un gouvernement fantoche
03:04 qui n'aurait pas changé les choses à long terme,
03:09 en tout cas ce qu'on appelle "chose",
03:11 l'intégration des Ukrainiens à l'ensemble russe.
03:14 Mais ça aurait quand même complètement bouleversé les…
03:17 Et là, ce qu'on a vu depuis un an, c'est une résistance absolument héroïque
03:23 et d'une remarquable intelligence de la part des Ukrainiens.
03:28 Je crois que les efforts qu'ils ont demandé depuis un an
03:31 commencent vraiment à trouver certaines limites.
03:35 Ils ont du mal actuellement à surmonter tous les chocs psychologiques et physiques
03:41 qu'ils subissent depuis un an.
03:43 Il faut vraiment, ce n'est pas le moment de relâcher notre effort de solidarité
03:49 sous toutes ses formes.
03:50 – Alors justement, Joe Biden était cette semaine en Europe
03:53 pour prononcer un discours très ferme envers Vladimir Poutine.
03:56 Celui-ci lui a répondu de manière tout aussi ferme.
03:59 Est-ce que selon vous, on est à la veille d'une nouvelle escalade ?
04:03 – Non, je crois que le discours de Poutine n'avait pas grand intérêt à vrai dire.
04:07 Il a répété tout un ensemble de thèmes qui sont les siens,
04:11 il les met chaque fois un peu plus fort,
04:13 il surenchérit un peu sur ses propres discours.
04:16 Même l'initiative qu'il a prise en matière de suspension du traité START
04:22 ne me paraît pas quelque chose de très fondamentalement nouveau.
04:26 – C'est-à-dire qu'il ne faut pas s'en inquiéter de ça ?
04:30 – Je ne sais pas, quand on parle de nucléaire, il faut toujours s'inquiéter.
04:33 Je crois d'ailleurs qu'il a gesticulé sur le plan nucléaire
04:36 parce qu'il sait que ça produit un effet dans les opinions publiques,
04:39 en particulier dans l'opinion publique allemande.
04:42 Mais quand on regarde les choses, c'est très prudent,
04:46 il n'a pas dénoncé le traité, il a suspendu les mesures d'inspection.
04:51 Les Américains nous font la guerre, ce qui n'est pas tout à fait exact,
04:55 et donc ils ne vont pas en plus inspecter nos armes nucléaires,
04:58 oubliant par la même que c'est réciproque,
05:01 et que lui a le pouvoir, les Russes ont le pouvoir
05:04 d'inspecter les systèmes nucléaires américains.
05:07 L'argument était de mauvaise foi, mais il a dû dire quelque chose.
05:12 Pour Joe Biden, c'est intéressant parce que le problème que posent,
05:17 depuis Obama, même avant Trump, les États-Unis,
05:20 c'est de savoir si l'Europe continue d'être quelque chose d'important pour eux.
05:24 Et ils ont donné le sentiment, surtout avec Trump,
05:26 mais déjà avec Obama, que non.
05:29 Et même Joe Biden lui-même ne se paraissait pas,
05:31 quand il était vice-président, tellement concerné par ça.
05:35 Et il y avait une inquiétude, notamment des Polonais, des Baltes,
05:39 sur le degré d'engagement, avant le début de la guerre,
05:44 sur le degré d'engagement prévisible des Américains.
05:48 Moi j'avais vu mes homologues Baltes, ils nous disaient,
05:55 mais on craint que M. Biden nous dise,
05:58 écoutez, mettez la pédale douce sur Poutine, le véritable adversaire c'est Xi.
06:02 Et ce discours est fait pour réaffirmer un engagement fondamental des Américains,
06:08 aux côtés des Européens, dès lors que la sécurité de l'Europe est menacée.
06:12 Il n'y a pas pivot, il y a acceptation par les États-Unis
06:16 d'un combat, d'une confrontation sur deux fronts,
06:19 le front euro-atlantique avec son prolongement ukrainien,
06:24 et le front pacifique avec toutes les incertitudes, notamment sur Taïwan.
06:28 – Est-ce qu'en s'affichant comme ça aux côtés de Zelensky,
06:30 il adresse aussi un message au peuple américain
06:32 qui pourrait ne pas être totalement soutien de ces initiatives ?
06:36 – Je crois que le…
06:39 Je ne sais pas quel est le message au peuple américain,
06:45 je crois que le grand message au peuple américain,
06:47 c'est que moi, Joe Biden, je suis capable de faire deux fois 10 heures de train,
06:52 et quand même je suis dans un état physique et un état moral suffisant
06:57 pour espérer briller dans de bonnes conditions un second mandat.
07:01 Je crois que c'est ça le principal message,
07:04 mais le vrai message, la vraie réponse à la question que vous posez,
07:07 elle a été apportée par Zelensky quand il est allé devant le congrès des États-Unis
07:11 et qu'il a vraiment emporté l'adhésion,
07:14 ça faisait penser à Churchill juste après Pearl Harbor,
07:19 quand Churchill est allé aux États-Unis
07:21 et a emporté l'adhésion du congrès pour une action solidaire.
07:25 Donc là, il y a eu quelque chose, Zelensky, très grand communicant,
07:29 et il a vraiment mis dans la poche notamment les républicains,
07:34 sauf les plus extrémistes évidemment,
07:37 qui sont toujours assez actifs au congrès,
07:40 mais je crois que dans l'ensemble, le congrès a compris,
07:43 et Biden l'a rappelé à Kiev,
07:45 a compris que l'Amérique devait être derrière l'Ukraine
07:50 parce que c'est l'ensemble des intérêts, des valeurs,
07:54 des positions du monde occidental, européen et américain,
07:58 qui est en jeu.
07:59 – Et justement, vous nous avez dit tout à l'heure,
08:01 il faut aider l'Ukraine,
08:02 est-ce que la France en fait suffisamment en matière d'aide militaire ?
08:05 – Oui, je crois qu'on fait beaucoup de choses,
08:11 on a un profil de forces armées qui est assez particulier,
08:16 nous sommes une armée qui s'est vraiment tournée vers la projection
08:20 parce qu'on avait des responsabilités extérieures,
08:22 on a des responsabilités dans le Pacifique,
08:24 on a des responsabilités qui sont très difficiles à assumer actuellement,
08:28 en Afrique, on a été très présents en Afghanistan il y a quelques années,
08:33 donc on a une armée de projection qui n'est pas forcément…
08:37 on n'a pas forcément beaucoup de réserve,
08:38 beaucoup de moyens à mettre au service des Ukrainiens,
08:43 mais ce que nous faisons est très apprécié des Ukrainiens,
08:46 à la fois parce qu'on donne des matériels de grande qualité,
08:49 comme les Césars, parce qu'on délivre à l'heure,
08:53 que tout ça est fait, qu'on assure le suivi,
08:55 donc je crois, enfin c'est ce que me dit en tout cas
08:57 l'ambassadeur d'Ukraine à Paris,
08:59 il me dit que c'est une coopération qui fonctionne très bien.
09:04 Ce qui ne m'a pas plu au cours des dernières semaines,
09:08 c'est cette espèce d'impression d'enchaire publique,
09:15 pour un "qui donne des chars à l'Ukraine, qui donne des avions à l'Ukraine, etc."
09:19 Je crois que les Occidentaux devraient faire leur,
09:23 trois mots d'ordre très simples,
09:24 être plus coordonnés, plus mobilisés,
09:31 il en faut plus, notamment les chars,
09:33 et plus discrets.
09:37 Je veux dire que ça devrait vraiment être quelque chose qui est réglé entre nous.
09:42 – Il ne faut pas rendre ça public ?
09:43 – Ce n'est pas rendre ça public,
09:45 mais il ne faut pas que ce soit une sorte de foire à tout, si vous voulez.
09:50 On dit "ah ben il y a 20 chars anglais, 200 chars allemands ou polonais",
09:55 non ce n'est pas comme ça qu'il faut, évidemment,
09:57 mais c'est ce qu'on fait en Allemagne,
10:00 mais ça doit être fait plus rigoureusement,
10:03 voir exactement ce dont les Ukrainiens ont un besoin,
10:09 il faut être rapide, coordonné et massif.
10:11 – On l'est suffisamment.
10:12 – Vous parlez de clarté justement,
10:15 Emmanuel Macron reste flou sur les livraisons d'avions,
10:17 est-ce qu'il faut qu'il soit plus clair dans ce domaine-là ?
10:20 – Je ne suis pas un spécialiste des questions militaires,
10:24 et je m'interroge sur les avions.
10:26 Ce qu'on me dit, ce que me disent les spécialistes,
10:28 c'est que le ciel ukrainien est contrôlé par les Ukrainiens,
10:32 que les Russes n'arrivent pas à y pénétrer,
10:34 que le ciel russe est contrôlé par les Russes,
10:36 que si vous y arrivez avec des avions, vous avez un taux d'attrition énorme,
10:40 que le problème numéro un c'est les missiles,
10:43 et qu'à terme si on a des avions,
10:45 le premier problème c'est d'avoir des pilotes pour savoir les piloter.
10:49 Donc je crois que la première urgence en matière d'aviation,
10:53 c'est de former des pilotes ukrainiens
10:56 au matériel qu'on serait amené à leur donner,
10:58 c'est-à-dire essentiellement des Mirage,
11:00 parce qu'il faut des avions qui soient suffisamment modernes
11:03 pour être meilleurs que les MiG-29 dont ils disposent,
11:06 et pas fantastiquement modernes comme les…
11:09 – Sans rentrer dans le détail militaire,
11:11 est-ce que vous comprenez le flou sur la position d'Emmanuel Macron ?
11:14 – Moi je ne crois pas qu'il est flou.
11:16 – Parce que la guerre c'est aussi l'importance des mots,
11:17 est-ce que de dire "rien n'est exclu" c'est une position qui est très claire ?
11:21 – Il n'y a rien, je crois que la position de la France est très claire,
11:26 telle qu'elle a été exprimée à Munich par exemple par le président,
11:29 ce qu'on fait est très clair.
11:31 Alors ensuite il a rencontré des confrères et des consoeurs à vous,
11:35 et il s'est exprimé, peut-être ce que dit Emmanuel Macron est vrai,
11:40 mais peut-être comme je l'ai lu quelque part,
11:42 n'est-il pas toujours nécessaire de dire tout ce qui est vrai ?
11:45 Et je pense que l'interrogation sur le degré de violence
11:51 qu'on doit accepter dans cette guerre n'est pas très nécessaire.
11:57 Il ne faut pas, c'est le président de Tchèque qui a été à mon avis
12:00 assez maladroit à Munich et qui a donné l'impression d'avoir peur de la victoire.
12:05 Non, il faut bien voir qu'aujourd'hui, tout dépend,
12:09 l'avenir de la paix en Ukraine dépend du rapport de force militaire.
12:14 Il y aura la paix soit si nous perdons, si les Ukrainiens perdent,
12:19 parce qu'on sera obligés de capituler, ce sera abominable,
12:23 ou il y aura la paix si les Ukrainiens gagnent,
12:26 parce que là ils auront libéré leur territoire
12:29 et les Russes seront bien obligés d'en convenir.
12:31 Mais dans l'état présent des choses, je ne vois pas du tout
12:34 comment on peut avoir la paix parce qu'il y a un état d'équilibre,
12:37 ni les Ukrainiens ni les Russes ne peuvent trouver un terrain d'entente.
12:42 Donc il faut en déduire une chose très simple, très élémentaire,
12:46 il faut aider massivement les Ukrainiens à gagner leur guerre.
12:50 Gagner leur guerre, ça ne veut pas dire envahir la Russie, loin de là,
12:54 mais ça veut dire libérer leur territoire.
12:56 C'est la condition d'un retour à la paix.
12:58 – Donc la sortie de guerre, pour vous, elle se fera sur le plan militaire
13:01 plus que sur le plan diplomatique ?
13:02 – Non, chaque chose, les soldats combattront et Dieu donnera la victoire,
13:07 dit Jeanne d'Arc, mais la modification d'un rapport de force en faveur de l'Ukraine,
13:15 c'est-à-dire exactement ce qu'a dit le président de la République
13:18 à vos consoeurs et confrères, c'est la condition d'une négociation
13:24 qui se fera dans des conditions qu'on ne peut pas définir aujourd'hui
13:28 et dont nous avons raison de dire qu'elles seront d'abord définies
13:32 par nos partenaires ukrainiens.
13:34 – Alors hier, on a vu la Chine intervenir dans ce conflit,
13:37 est-ce que vous craignez un soutien de la Chine,
13:39 à Vladimir Poutine aujourd'hui ? Est-ce que ça pourrait être un tournant ?
13:42 – Je pense que jusqu'à présent, les Chinois ont été extrêmement prudents,
13:48 ils ont à la fois affiché une solidarité très réelle aux Russes,
13:52 notamment dans le contournement des sanctions, etc.
13:56 Ça n'a pas été inutile pour les Russes,
13:58 mais ils ont en même temps été extrêmement prudents,
14:01 ils ont amené les Russes à ne rien dire ou à ne rien faire d'excessif
14:07 en matière nucléaire et je pense qu'ils ont un intérêt profond
14:11 à ce qu'on revienne à la paix.
14:13 – Vous ne les voyez pas livrer des armes ?
14:14 – Ils veulent annoncer, paraît-il, un plan.
14:18 On jugera, comme on dit dans mon corps d'origine, la cour des comptes,
14:21 on jugera sur pièce et sur place.
14:23 – Un dernier mot là-dessus, pour revenir sur ce que vous disiez
14:26 sur Emmanuel Macron et son rapport par rapport à la Russie,
14:29 parce qu'à Munich, il a dit que la Russie ne pouvait ni ne devait gagner
14:33 et effectivement dans l'avion avec certains journalistes,
14:36 il a dit qu'il ne fallait pas écraser la Russie.
14:38 Est-ce que vous comprenez sa position ?
14:40 – Non, moi j'ai toujours été un peu dubitatif sur cette rhétorique
14:45 parce qu'il ne faut pas humilier la Russie,
14:48 je crois que ce qui est humiliant pour la Russie, c'est ce qu'elle a fait,
14:51 c'est-à-dire s'être engagé dans une aventure de façon totalement étourdie,
14:55 sans avoir les moyens de l'amener à bien
14:57 et avec une déconfiture de l'armée russe,
14:59 quels que soient les événements ultérieurs,
15:01 parce que je crois qu'ils n'ont pas fini,
15:02 les Russes ils en ont sous le pied comme disent les enfants,
15:05 mais ce qu'ils ont fait depuis un an a été quand même véritablement une humiliation,
15:12 mais l'humiliation elle est venue d'eux-mêmes si je puis dire,
15:15 le problème qu'on a c'est les Russes à un moment,
15:21 s'ils voient que leur manœuvre a totalement échoué en Ukraine,
15:27 qu'ils consentiront à la négociation.
15:29 – Mais c'est un problème qu'Emmanuel Macron dit
15:31 qu'il ne faut pas écraser la Russie, ce n'est pas votre ligne ?
15:33 – Non, ce que je crois que signifie la phrase du président de la République,
15:37 et ça c'est très juste, c'est qu'à partir du moment
15:39 où on n'envahit pas la Russie et on ne veut pas porter la guerre en Russie,
15:44 on n'a pas le choix de l'interlocuteur qu'on aura demain,
15:47 ce sera Poutine ou ce sera un autre,
15:50 mais cet autre ce n'est pas nous qui le déterminons, ce sont les Russes.
15:53 Donc il dit simplement, de toute manière on a en face de nous quelqu'un
15:57 qui nous plaise ou qui ne nous plaise pas,
15:59 avec lequel il faudra causer, et ça c'est juste.
16:02 – Et donc il faut maintenir le lien avec Vladimir Poutine, c'est important ?
16:04 – Le lien, maintenir le lien, je ne sais pas, il n'y a rien à lui dire pour l'instant.
16:08 Mais effectivement il faut savoir que, comme disait,
16:11 alors là je cite Napoléon Bonaparte à propos de la Vendée,
16:15 il va falloir causer, il va falloir causer à un moment,
16:18 mais ce que je vous dis c'est que ce moment viendra
16:21 si nous obtenons un rapport de force favorable,
16:23 et hélas il viendrait si nous étions acculés à un rapport de force défavorable,
16:30 mais je crois qu'on n'en prend pas quand même le chemin,
16:31 l'armée russe a énormément de mal à mener à bien sa grande offensive,
16:36 et je pense que les Ukrainiens sont très solides,
16:38 même s'ils commencent à en avoir un peu plein les bottes,
16:42 d'un an d'épreuve de cette sorte.
16:45 – Il nous reste 5 minutes pour parler de la réforme des retraites,
16:48 les députés ont terminé l'examen du texte vendredi minuit,
16:51 quel goût vous laissent ces discussions à l'Assemblée nationale ?
16:53 – Écoutez, moi je me suis cassé la cheville,
16:55 donc j'ai été absent pendant les 15 premiers jours du débat,
16:58 et j'ai écouté, je suivais sur vos antennes etc,
17:03 donc je comprenais à peu près ce qui se passait,
17:05 je suis arrivé la semaine dernière dans l'hémicycle,
17:08 c'était une maison de fous,
17:10 pas alors, ne mettons pas en cause l'Assemblée nationale,
17:13 je suis ici à Public Sénat,
17:14 mais ne mettons pas en cause l'Assemblée nationale en tant que telle,
17:17 il y a un groupe politique précis qui est LFI,
17:20 qui a véritablement décidé de pourrir totalement le débat,
17:25 et d'ailleurs Mélenchon a signé le forfait,
17:28 puisqu'il a dit "notre but", pratiquement le tweet qu'il a envoyé,
17:31 "notre but c'est d'empêcher la représentation nationale de voter",
17:35 c'est quand même très grave de point à partie,
17:38 représenter un groupe parlementaire,
17:40 représenter à l'Assemblée nationale,
17:42 de dire "mon but c'est d'empêcher la représentation nationale,
17:45 élue par le peuple, d'aboutir".
17:49 Nous comptons beaucoup sur la sagesse immémoriale du Sénat,
17:53 et on va voir, mais il ne faudrait pas quand même
17:54 que le Sénat mette trop la barre à droite,
17:57 parce qu'à ce moment-là, encore plus d'inéquations
18:00 sera rendues encore plus difficile.
18:02 Il y a différentes allusions au fait qu'on pourrait
18:07 charger le vaisseau sur les régimes spéciaux, etc.
18:11 On verra, moi je fais confiance à la sagesse du Sénat.
18:15 – Pour vous les Républicains du Sénat,
18:17 pourraient avoir la tentation de détricoter le texte ?
18:19 – Non, pas de détricoter, mais de…
18:21 – De le durcir ?
18:21 – De faire quelques torsades en plus.
18:24 – Qu'est-ce qui vous gênerait ? Le durcir ? Qu'il soit durci ?
18:28 – Oui, enfin je pense…
18:29 – Que vous aillez chercher des recettes supplémentaires ?
18:31 Bruno Le Maire, pardon, lui-même alerte en disant aux parlementaires
18:34 qu'il va falloir…
18:35 – Moi, personnellement, je suis sûr, si on me demandait mon avis,
18:40 j'aurais fait un texte plus rigoureux,
18:44 j'étais pas hostile à ce qu'on tienne sur 65 ans, par exemple.
18:49 Les Français disaient au début de l'affaire,
18:51 80% des Français étaient contre les 65 ans.
18:54 Bon, on dit c'est grave, mais 78% des Français étaient contre les 64 ans,
18:59 alors on ne gagnait pas grand-chose.
19:01 Donc moi, je crois qu'on aurait dû y aller clairement
19:05 et faire valoir les grands arguments économiques,
19:08 c'est-à-dire que le problème fondamental,
19:10 c'est que la France doit produire plus, elle doit produire plus.
19:14 – Et donc travailler plus.
19:15 – Nous consommons plus que nous ne produisons,
19:17 nous dépensons publiquement plus d'argent que nous n'en avons
19:20 et la seule solution, c'est d'augmenter la quantité de travail produite en France.
19:25 Et c'est ça le grand argument économique, la retraite plus tard,
19:30 c'est plus de croissance, plus de pouvoir d'achat,
19:33 de meilleure rentrée fiscale pour l'État, et ça c'est très important.
19:37 C'est ça le message que les sénateurs ont le souci de faire passer.
19:43 – Est-ce que l'équilibre du texte repose aujourd'hui
19:44 sur le groupe centriste au Sénat ?
19:46 Est-ce que ça va être lui un peu la vigie de l'équilibre de ce texte ?
19:49 – Je ne sais pas, c'est vous les spécialistes du Sénat.
19:53 Moi je me contente d'être un partenaire respectueux de mes amis sénateurs.
19:58 Mais ça va être intéressant parce que le Sénat va avoir une attitude
20:00 quand même beaucoup plus réfléchie,
20:02 parce qu'on va être purgé des extrémistes au Sénat.
20:06 Et ce qui va être intéressant c'est la commission mixte paritaire,
20:10 parce qu'il y aura un vote au Sénat,
20:12 ensuite on va réunir la commission mixte paritaire.
20:15 Alors vous savez, la parité c'est l'Assemblée nationale d'un côté,
20:18 le Sénat de l'autre, mais le vote c'est un vote individuel.
20:22 Donc les sénateurs et les députés font des majorités ensemble,
20:28 et pas séparément.
20:29 Donc ça va être très très intéressant de voir ce qui sortira
20:33 de cette commission mixte paritaire.
20:35 Moi je voudrais un texte qui soit vigoureux,
20:37 qui fasse de réelles économies, ce qui est très important,
20:40 mais qui soit en même temps, qui ne rompe pas l'équilibre.
20:44 On a une très grande difficulté de compréhension avec l'opinion,
20:47 pour dire les choses très clairement,
20:48 l'opinion ne comprend pas ce que nous disons,
20:50 même si nous avons le sentiment d'avoir raison de le faire.
20:53 – À propos de l'opinion, on entend beaucoup dire aujourd'hui,
20:55 dans la majorité, le texte va passer,
20:57 mais il va laisser des stigmates, des traces dans l'opinion publique.
20:59 Est-ce que vous le craignez aussi ?
21:01 – Bien sûr, comment ne pas le craindre ?
21:02 Mais il faut savoir ce qu'on attend des élus,
21:05 que ce soit les sénateurs ou les députés.
21:07 On nous reproche tous les jours de ne pas être courageux.
21:10 Là vous savez, pour les députés qui vont dans leur circonscription,
21:13 ce n'est pas rigolo d'être confronté à des électeurs qui disent
21:18 "pourquoi faites-vous ça, on ne veut pas aller au-delà de 62 ans, etc."
21:23 Donc nous, nous considérons,
21:26 ceux qui sont favorables à cette réforme,
21:28 nous considérons que c'est l'intérêt supérieur du pays,
21:30 que certes c'est une réforme impopulaire,
21:32 mais qu'il faut la faire.
21:33 Mais oui, ça va être difficile pour la suite,
21:36 ça va être difficile pour le projet de loi sur l'immigration,
21:39 ça va être difficile sur quantité de choses.
21:41 Je crois que nous ne sommes pas sortis d'affaires.
21:44 Moi j'ai été effrayé par l'atmosphère à l'Assemblée nationale la semaine dernière,
21:51 et je suis effrayé, je voudrais ici faire le lien entre les deux éléments de notre discussion,
21:57 je suis effrayé par le décalage entre ce que ressent l'opinion française
22:01 et les exigences internationales.
22:03 Nous sommes dans une confrontation avec la Russie, avec la Chine,
22:06 avec le monde islamique, dans une tension même avec les États-Unis
22:10 sur le plan économique, etc.
22:12 Nous sommes dans... qui exigent de notre part
22:15 une intense mobilisation intellectuelle, politique, économique.
22:19 Il faut vraiment ramasser nos forces, nous mobiliser,
22:23 et je trouve que le débat sur les retraites est très en décalage
22:27 par rapport à cette exigence, et ça c'est très inquiétant.
22:31 – Merci Jean-Louis Bourlange.
22:32 Merci beaucoup d'avoir été notre invité ce matin,
22:34 la une de La Dépêche, c'est cet assassinat hier de cet professeur tué,
22:38 en plein cours le choc, c'est à la une de votre journal Christelle.
22:41 Merci beaucoup d'avoir été avec nous, merci Jean-Louis Bourlange.