Enlèvements d’enfants en Ukraine : «Un véritable Crime contre l’Humanité»
Chaque lundi dans la matinale de Dimitri Pavlenko, Philippe Val livre son regard sur l'actualité.
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00:00 Mais d'abord, comme chaque lundi, bonjour Philippe Valle.
00:03 Bonjour Dimitri.
00:04 Philippe, vous voulez nous parler ce matin des enfants.
00:06 C'était un des membres fondateurs du premier Charlie Hebdo, une autorité morale dans la rédaction.
00:12 Il s'était taillé un personnage de pacifiste radical, farouchement imperméable à tout sentimentalisme.
00:19 Lors d'une conférence de rédaction, il s'était emporté contre l'émotion qui saisissait les médias
00:25 lorsque les victimes d'un événement étaient des enfants.
00:28 « Un enfant ne vaut pas plus cher qu'un adulte.
00:31 Pourquoi ce surcroît d'émotion dès qu'il s'agit d'un enfant ? Un adulte maltraité souffre autant. »
00:35 Alors, autour de la table, Cabu, Wolinski, Géné, farfouillaient le nez dans leur tas de dessins
00:40 et les autres se taisaient pour éviter un débat pourri d'avance.
00:44 Mais peut-être s'agissait-il, Philippe, davantage d'une posture que d'une conviction chez lui, non ?
00:49 Vous avez sans doute raison.
00:51 C'est une de ces opinions paradoxales et illégalement minoritaires dont raffolent certains intellectuels.
00:58 Mais il arrive que les majorités aient raison.
01:01 Et la majorité a raison quand elle juge que les crimes contre les enfants sont au sommet de l'infamie humaine.
01:07 Alors là, j'imagine, Philippe, que vous faites allusion aux enlèvements d'enfants ukrainiens par l'armée russe.
01:12 Précisément.
01:13 J'ai visionné une demi-douzaine de fois la séquence du meeting de Poutine le 22 février
01:18 parce que je n'en croyais ni mes yeux ni mes oreilles.
01:22 Encadrée par un soudard médaillé nommé Iuri et une misérable ténardier présentatrice de la Télérusse,
01:29 une petite adolescente, enlevée à sa famille ukrainienne,
01:33 est contrainte, devant la foule moscovite, de faire cette déclaration censée être spontanée.
01:39 « Merci Iuri de nous avoir sauvés comme des centaines d'autres enfants à Mariupol. »
01:45 Puis, sa gorge se noue, son regard se trouble et, désespérée, elle avoue
01:51 « J'ai oublié mon texte. Tout est dit. On est au fond de l'horreur. »
01:56 La ténardier de la télé, pour rattraper la gaffe, s'exclame avec un grand sourire forcé
02:02 « C'est pas grave ! » et elle pousse la gamine dans les bras du gros Iuri,
02:06 sous les bravos de la foule payée pour applaudir.
02:08 Alors il semble, Philippe, qu'il y ait débat sur le nombre d'enlèvements d'enfants ukrainiens en Russie.
02:14 C'est exact. Les Ukrainiens comptent 16 000 enfants enlevés.
02:18 Les ONG, qui font un vaste travail de vérification, en dénombre entre 13 et 16 000.
02:23 Et le gouvernement russe, fidèle au système de comptage dont a hérité la CGT,
02:28 se vante d'en avoir déporté 733 000, comme s'il cherchait à banaliser l'horreur en la multipliant.
02:35 Quoi qu'il en soit, un seul enfant aurait-il été arraché à sa famille
02:40 que le crime n'en serait pas moins abominable.
02:43 Poutine prétend agir au nom de la lutte contre la pédocriminalité de l'Occident.
02:49 D'ailleurs, c'est la spécialité de Poutine d'accuser les autres des crimes qu'il est en train de commettre.
02:55 Il se trouve en France des gens qui se croient supérieurs au commun des mortels.
03:00 Ils prétendent qu'on ne fait pas de bonne politique avec des bons sentiments, ce qui est faux.
03:07 Ils affirment que Poutine, par ailleurs, a attaqué l'Ukraine parce qu'il était menacé par l'OTAN,
03:11 pour croire à cette fable, il faut la trouver désirable, car elle n'a aucun fondement.
03:16 Mais Philippe, si cette menace est une fable, alors quelle est sa motivation ?
03:20 C'est cette table d'une longueur ridicule à laquelle il reçoit ses interlocuteurs pour les tenir à plusieurs mètres de distance.
03:28 C'est la fameuse table rase à quoi ses prédécesseurs voulaient réduire notre passé humain.
03:33 C'est la métaphore de sa criminelle psychose de la contamination.
03:37 L'Ukraine était en train de se donner les moyens de rompre avec l'arbitraire et la corruption,
03:43 alors Poutine craignait que la contamination ne menace sa tyrannie.
03:47 Et non seulement il bombarde l'Ukraine, mais il arrache les enfants à leur famille pour priver le pays de son avenir.
03:53 Car on ne saurait faire du passé table rase sans faire de l'avenir table rase.
03:58 Devant cette horreur génocidaire, l'opinion se divise en deux.
04:02 Entre ceux qui se mettent dans la peau d'une enfant qui, en dépit de sa terreur, ne parvient pas à remercier ses tortionnaires,
04:09 et ceux qui, comme la ténardier de la télé russe, disent que ce n'est pas grave.
04:14 Signature comme tous les lundis sur Europe 1.
04:17 Philippe Vall, merci beaucoup.