À l’approche de la Journée internationale des droits des femmes, qui aura lieu mercredi 8 mars, on pose la question : et si partager l’ensemble des frais à hauteur de 50 % dans un couple, perpétuait les inégalités financières entre les femmes et les hommes ? Entretien.
Category
🗞
NewsTranscription
00:00 c'est assez ironique de se dire qu'au nom du féminisme,
00:02 on va faire un cadeau d'argent à ceux qui en ont le moins besoin
00:07 et à ceux qui sont déjà plus privilégiés.
00:09 [musique]
00:31 -Avoir une répartition du budget à 50/50 dans un esprit d'égalité parfaite,
00:36 en fait, c'est très inégalitaire
00:38 parce que c'est comme si on demandait aux femmes d'appliquer une égalité
00:40 qui n'existait nulle part ailleurs.
00:43 Donc, on a ce chiffre en tête
00:45 de 42 % de l'écart de revenu en moyenne au sein des couples.
00:48 On est à peu près autour de 25 %
00:50 de l'écart de salaire en moyenne entre hommes et femmes.
00:53 C'est-à-dire que quand on a un revenu moindre,
00:56 faire du 50/50, en fait, ça n'est pas juste.
00:59 On épargne beaucoup moins,
01:00 donc on peut moins acheter des biens structurants
01:03 qui vont permettre de capitaliser sur le long terme, par exemple.
01:06 Et puis aussi, moi, je dis faire 50/50, c'est très bien
01:10 quand on gagne à peu près la même chose
01:12 et quand on divise aussi à 50/50 les tâches domestiques et parentales,
01:16 ce qui est encore très rarement le cas
01:18 puisque plus de 70 % des tâches domestiques et parentales
01:21 sont assurées aujourd'hui par les femmes.
01:23 Parce que quand vous faites plus souvent la cuisine, plus souvent la vaisselle,
01:26 que c'est vous qui allez chercher les enfants,
01:28 du coup, vous dégagez du temps disponible pour votre conjoint
01:31 pour qu'il soit très investi dans sa carrière,
01:34 et ça, c'est un investissement qui va lui rapporter sur le long terme
01:38 en évolution de salaire, en droit au chômage et en droit à la retraite.
01:41 Ça invisibilise tous les coûts qu'elles ont eus avant même d'être en couple
01:56 pour être considérées comme des bonnes candidates,
01:58 ce que j'appelle la bonne candidate aux couples hétéros.
02:01 C'est-à-dire qu'il y a deux coûts de charge principale.
02:05 Il y a la charge esthétique,
02:07 qui est toute la prescription immense
02:10 auxquelles doivent répondre les femmes en termes de critères de beauté,
02:13 donc être si possible mince, bien épilée, coiffée, maquillée,
02:18 et ce, à tous les âges.
02:19 Ça commence dès l'adolescence.
02:21 Quand on a des enfants, il faut vite retrouver son corps d'avant.
02:24 Quand on vieillit, il faut tout faire pour ne pas vieillir,
02:27 et cette charge esthétique, elle est vraiment beaucoup plus légère pour les hommes.
02:31 Il y a aussi une charge que je trouve importante
02:33 et qui est souvent un impensé que les couples ne partagent pas,
02:37 c'est la charge contraceptive.
02:38 Ça ne consiste pas qu'en une pilule qui coûte 2 euros.
02:42 Il y a plein d'autres méthodes contraceptives qui ne sont pas remboursées.
02:45 Il y a aussi le suivi gynécologique, qui est très onéreux
02:48 parce que la plupart des gynécologues font des dépassements d'honneuraires.
02:51 Ça peut aller jusqu'à plusieurs milliers d'euros,
02:54 en fait, à l'échelle d'une vie,
02:55 et ça, très souvent, on ne pense pas le partager,
02:58 alors que les hommes bénéficient de la contraception aussi.
03:02 Pour prouver mon féminisme et pour prouver mon indépendance
03:15 et pour défendre mon honneur,
03:16 je sors ma carte bleue au restaurant et je refuse de me faire entretenir
03:20 et je veux faire 50-50,
03:23 sauf qu'en fait, les inégalités sont toujours là,
03:26 et penser qu'il suffit de faire 50-50,
03:30 c'est être dans une illusion d'égalité,
03:33 et en fait, c'est assez ironique de se dire qu'au nom du féminisme,
03:38 on va faire un cadeau d'argent à ceux qui en ont le moins besoin
03:42 et à ceux qui sont déjà plus privilégiés.
03:45 Est-ce que très souvent, la réponse magique, c'est on a un compte commun ?
04:04 Mais avoir un compte commun, ça ne règle pas tout.
04:07 Si vous, vous l'alimentez à hauteur de 30 ou 40 %,
04:10 vous allez peut-être culpabiliser vis-à-vis de cet argent
04:13 et moins vous autoriser à acheter des choses,
04:15 ou vous auto-censurer, vous freiner sur l'argent
04:19 parce que vous dites quand même que ce n'est pas moi qui rapporte la majorité.
04:21 On ne sait pas si c'est simple que ça.
04:23 Ensuite, il y a aussi ce que j'appelle l'effet d'entraînement.
04:26 C'est-à-dire que quand on vit en couple,
04:27 souvent, c'est celui qui gagne le plus qui va donner le là sur le niveau de vie.
04:33 Et typiquement, ça va être quelqu'un qui ne va pas forcément vouloir vivre
04:38 dans un plus petit appartement à la hauteur des revenus de sa conjointe
04:42 parce que lui, il veut vivre dans un appartement plus grand.
04:44 Et donc, c'est des coûts supplémentaires qui font que,
04:46 en fait, pour celle qui gagne le moins,
04:48 elle va peut-être se retrouver quand même à dépenser plus de loyers
04:51 et plus de budget vacances
04:52 que si elle avait fait des choix à la hauteur de ses revenus.
04:57 Il est toujours à avoir en tête
04:58 qu'il y a aussi des dons invisibles et immatériels qui sont faits.
05:02 Si je participe à 30 % du budget,
05:05 mais que je suis celle qui fait la majorité des tâches domestiques et parentales,
05:11 est-ce que je ne mérite pas autant que l'autre
05:14 50 % des parts de l'appartement qu'on a achetées ensemble, par exemple ?
05:18 On peut quand même penser à des systèmes d'équivalence,
05:22 de reconnaissance du travail invisible et gratuit qui est fourni
05:26 parce que c'est du travail qui bénéficie à l'autre.
05:30 Life.
05:31 Life.
05:33 Life.
05:34 Life.
05:35 Life.
05:37 Life.
05:38 [Musique]