“Une pension minimale à 1200 euros pour tous, la promesse du gouvernement est un mensonge”, selon Jérôme Guedj

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00:00 Votre travail minutieux sur la réforme des retraites a été salué.
00:04 Alors pas forcément sur les bancs du gouvernement.
00:06 D'ailleurs, vos oreilles ont dû siffler hier tant Elisabeth Borne vous a cité.
00:11 Je vais rappeler en quelques mots ce qui s'est passé.
00:13 Monsieur Guedj, en tant que co-président de la mission d'évaluation des comptes de la Sécurité sociale,
00:18 vous avez procédé à des contrôles sur place et sur pièce,
00:22 notamment à la direction de la Sécurité sociale, pour exiger du gouvernement des précisions
00:27 sur les bénéficiaires de la revalorisation des petites pensions.
00:30 C'est le fameux débat sur les 1200 euros hier.
00:33 La première ministre s'est étonnée que vous découvriez, vous Jérôme Guedj,
00:37 la complexité du système, c'est-à-dire que certaines personnes ne seront pas exactement à 85% du SMIC
00:42 et donc le chiffre de bénéficiaires a-t-elle dit n'est pas tout à fait le même ?
00:46 Que lui répondez-vous ?
00:47 Moi j'ai été un peu abasourdi par la réaction de la première ministre.
00:50 Je la rassure, je ne découvre pas le système.
00:52 J'ai plutôt eu l'impression que c'est elle qui découvrait certains des effets de sa réforme.
00:57 Pour la simple raison, c'est que pendant toute la période, ils les ont cachés.
01:00 Vous savez ces fameux 1200 euros, c'était un engagement du président de la République.
01:04 Ça figure sur sa profession de foi du deuxième tour de l'élection présidentielle.
01:09 Et quand la réforme a été présentée par Elisabeth Borne le 10 janvier,
01:13 c'était annoncé comme la grande mesure sociale qui était destinée d'une certaine manière
01:18 à faire avaler la pilule, à compenser la brutalité, la dureté de la mesure centrale de cette réforme,
01:24 que sont les deux années de travail supplémentaires pour l'ensemble des salariés.
01:28 Et donc quand le gouvernement nous dit "regardez c'est formidable,
01:31 il va y avoir 1200 euros de pension minimale pour tous"
01:34 et ça a été martelé, remartelé, on peut faire la liste, je l'ai,
01:38 de tous les ministres, de tous les députés Renaissance qui, de plateau en plateau,
01:42 tout au long du mois de janvier, essayaient de marteler cette information.
01:48 Et moi ça m'a mis la puce à l'oreille parce que le problème,
01:52 c'est qu'on n'avait nulle part le chiffre réel du nombre de personnes
01:56 qui étaient impactées par cette mesure. Donc il y a un loup.
01:59 Quand c'est aussi flou c'est qu'il y a un gros loup comme on dit.
02:01 Et en l'espèce, il a fallu en effet pousser le gouvernement à, pardonnez-moi l'expression,
02:08 à cracher le morceau.
02:08 - Mais à cracher, à préciser ou à dire la vérité ?
02:11 Parce que si c'est un manque de précision c'est une chose, si c'est un mensonge c'est autre chose.
02:15 - Moi je mesure toujours mes paroles et à la fin je considère que c'était un mensonge.
02:21 Par omission d'une certaine manière.
02:23 Parce qu'on nous a dit, dans la communication gouvernementale,
02:28 on a mis sur la table ce chiffre de 2 millions de retraités
02:31 qui allaient franchir le seuil des 1200 euros de pension minimale
02:36 grâce à la revalorisation de ce qu'on appelle le minimum contributif.
02:40 Le terme est barbare mais c'est l'outil existant.
02:44 Et donc les gens ont entendu ça et les gens ne supportent pas
02:47 qu'on les prenne pour des jambons, pardonnez-moi l'expression.
02:50 Et il fallait donc obliger le gouvernement à dire quelle est la réalité du chiffre.
02:56 Et donc moi j'ai dû en effet, quand j'ai entendu Olivier Dussopt
02:59 qui pendant des jours et des jours dans l'hémicycle,
03:02 on lui posait la question, c'est quand même le lieu de la représentation nationale,
03:04 c'est notre rôle que de contrôler l'action du gouvernement
03:07 et de mesurer les effets d'une réforme aussi importante.
03:10 Il nous disait "non ce n'est pas possible, c'est compliqué, les chiffres on les a pas".
03:14 Et brutalement le 15 février il dit sur une autre radio
03:19 "c'est 40 000, on vient de me donner les prévisions hier".
03:22 Et donc à ce moment-là, ça a percuté,
03:25 je dis si on lui a donné des prévisions on sait qu'elles existent.
03:27 Et donc j'ai utilisé mes prorogatives de parlementaires
03:29 et j'ai fait cette visite surprise à la direction de la Sécurité sociale.
03:33 Et là qu'elle ne fut pas ma surprise d'avoir ces hauts fonctionnaires respectables
03:38 me dire "nous n'avons rien transmis au ministre dans les derniers jours
03:42 et nous-mêmes nous nous posons la question de savoir d'où vient ce chiffre de 40 000".
03:47 Et donc il y a eu une partie de ping-pong dans l'hémicycle,
03:49 il a cherché à être droit dans ses bottes,
03:52 il m'a dit d'ailleurs au passage que je perdais les pédales.
03:54 Et la fébrilité dont il a fait preuve
03:57 me confirmait dans la justesse de l'analyse que nous étions en train de faire.
04:00 Et quelques jours après, il a été obligé,
04:03 document à l'appui, il m'a écrit pour dire
04:05 "au final ce ne seront que 10 à 20 000 nouveaux retraités
04:09 qui à partir de l'année prochaine bénéficieront de ces mesures".

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