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00:00 (Générique)
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00:06 -Bonjour et bienvenue à Marseille.
00:08 Nous sommes ici en direct du 39e congrès du PCF,
00:11 où quelques 700 délégués sont réunis jusqu'à lundi.
00:15 Au menu de leurs travaux,
00:16 quelle stratégie, quelle conséquence de la mobilisation sociale,
00:20 comment reconquérir les classes populaires,
00:22 mais aussi quelle suite pour la gauche et pour la nupe ?
00:27 Tous les jours, l'humanité reçoit un invité à 18h,
00:30 et aujourd'hui, nous recevons le secrétaire national
00:33 du Parti communiste français, Fabien Roussel.
00:36 Bienvenue.
00:37 -Merci. Bonjour, Julia.
00:39 -Bonjour.
00:40 1re question, puisque ce congrès se tient au lendemain,
00:45 il s'est ouvert, en tout cas, au lendemain
00:47 de la 11e journée de mobilisation contre la réforme des retraites.
00:50 Elisabeth Borne a estimé qu'il fallait respecter
00:53 une période de convalescence, bien sûr, je la cite,
00:56 et apaiser le pays, tandis qu'Emmanuel Macron a jugé, lui,
01:00 qu'on ne peut pas parler de crise démocratique,
01:02 tous deux refusant, évidemment, le moindre recul
01:05 sur le report de l'âge légal à 64 ans.
01:08 Quel message envoie votre congrès à la 1re ministre
01:12 et au président de la République ?
01:14 -En 2 mots, respectez-nous.
01:17 Respectez le peuple français, respectez les syndicats,
01:20 respectez le Parlement.
01:24 C'est ce gouvernement qui est en convalescence.
01:26 Moi, je dirais même qu'il est cuit.
01:28 Ce gouvernement, il est aujourd'hui discrédité.
01:31 On ne sait même pas sur quelle légitimité il repose.
01:36 Ils ont eu peur de perdre le vote à l'Assemblée nationale
01:40 contre cette réforme des retraites,
01:42 et pour ça, ils ont utilisé le 49-3.
01:44 Ils sont dans une situation intenable
01:47 et dans l'incapacité de pouvoir poursuivre
01:50 de grandes réformes pour notre pays.
01:52 Pourtant, il y en a des urgences,
01:54 telles que l'inflation, la hausse des prix,
01:56 de l'alimentation, de l'énergie, de l'essence.
01:59 Et donc le gouvernement doit entendre
02:03 que sa situation n'est pas tenable.
02:06 Ils doivent ou retirer la réforme, ou la suspendre,
02:09 ou ouvrir la possibilité d'un référendum,
02:12 car ils sont cuits. Voilà, c'est tout.
02:14 Et qu'ils respectent ce qui se dit dans le pays
02:16 depuis maintenant 3 mois.
02:18 Et nous sommes au lendemain d'une 11e journée de mobilisation,
02:21 mais il y en a une prochaine de journée de mobilisation,
02:23 la semaine prochaine, et donc ça ne s'arrête pas.
02:26 -Alors, justement, ça ne s'arrête pas.
02:28 Et pour donner encore plus de perspectives,
02:30 les congressistes ont adopté vendredi
02:33 une motion appelant à la création d'un nouveau front populaire.
02:37 De quoi est-ce qu'il s'agit ?
02:39 -Tout ce que nous souhaitons,
02:40 c'est faire en sorte de créer les conditions
02:44 de construire une majorité politique.
02:47 Il y a une contradiction dans le pays en ce moment.
02:50 Il y a d'un côté des sondages qui montrent
02:51 que l'extrême droite serait celle qui sortirait vainqueur
02:57 de ce bras de fer contre le gouvernement.
02:59 Et de l'autre côté, ce que nous ressentons,
03:01 ce que nous disons ici,
03:03 c'est que dans l'opinion, dans le monde du travail,
03:06 chez ceux qui manifestent,
03:08 c'est pas les idées libérales qui dominent.
03:11 C'est plutôt l'envie de progrès social,
03:14 de préserver la sécurité sociale,
03:17 d'avoir une réforme des retraites progressiste
03:19 financée par l'emploi, par les salaires.
03:21 Et ça, c'est pas l'extrême droite qui défend ces idées-là.
03:25 Il y a donc cette contradiction dans le pays
03:27 parce que la gauche n'offre pas une perspective crédible.
03:33 Il y a besoin d'offrir cette perspective crédible,
03:36 de montrer que la gauche est prête, prête à gouverner,
03:39 prête à battre la droite et à l'extrême droite.
03:42 Et c'est pour ça que quand l'extrême droite
03:44 tape à la porte de la République,
03:47 eh bien, il faut que nous ayons le rassemblement le plus large,
03:50 le front populaire le plus large,
03:52 et c'est ce que nous appelons à construire
03:54 pour faire en sorte d'offrir une alternative forte, crédible
03:59 à la crise que nous vivons.
04:01 -Alors, en quoi ce front populaire dont vous parlez
04:05 est-il différent de l'acte II, par exemple,
04:07 de la nuit par laquelle les écologistes
04:09 ou les insoumis ont repris le mot aussi, appellent,
04:13 ou encore du projet de coalition qui incarne l'alternative,
04:17 sur le cité que propose le socialiste Olivier Faure ?
04:20 -Moi, je joue pas sur les mots.
04:22 Peu importe les mots que chacun emploie,
04:24 tout le monde a envie que ça change.
04:25 Voilà. Donc il faut déjà partir de ça.
04:27 Tout le monde veut que ça change
04:29 et que tout le monde se rende compte que ça va pas
04:33 et qu'il y a besoin de progresser, d'élargir,
04:35 dépasser, augmenter, grandir, convaincre.
04:38 Tout le monde le dit.
04:39 Eh bien, donc, il faut s'y atteler.
04:42 Nous-mêmes, nous disons ici que ce rassemblement
04:45 que nous avons construit au lendemain
04:46 de l'élection présidentielle
04:48 nous a permis de gagner des députés,
04:50 doubler le nombre,
04:51 mais ça n'a pas permis de gagner, d'avoir une majorité,
04:54 ça n'a pas empêché l'élection de députés d'extrême-droite,
04:57 ça n'a pas convaincu les 25 millions d'abstentionnistes.
05:00 Il y en a plus d'un Français sur deux
05:01 qui ne sont pas allés voter.
05:03 Donc ça n'a pas suffi.
05:05 Donc il faut aller plus loin.
05:07 Et donc, je le dis, moi,
05:08 il faut pas jeter le bébé avec l'eau du bain.
05:11 Mais enfin, il faut quand même changer l'eau du bain.
05:13 Quand même.
05:14 Il faut qu'on s'y penche, là-dessus.
05:16 Et c'est ce que nous souhaitons faire.
05:18 Et surtout, ce que je n'accepte pas,
05:20 c'est qu'on vienne nous dire à nous, communistes,
05:22 avec qui il faudrait parler,
05:25 ce qu'il faudrait faire ou ce qu'il faut pas faire.
05:27 Nous restons un parti souverain, libre,
05:30 et nous souhaitons, nous, avoir la possibilité
05:33 de construire ce front populaire le plus large possible,
05:36 d'engager le dialogue avec toutes celles et ceux qui le souhaitent
05:39 et de montrer qu'il y a une gauche capable de gouverner,
05:42 de convaincre, et c'est ce à quoi j'appelle.
05:45 -D'accord. Donc, vous parlez de rassemblement.
05:47 On y reviendra peut-être aussi après,
05:50 mais d'abord, ce rassemblement-là,
05:53 sur sa conception, vos déclarations,
05:55 vous le savez, à propos de l'ex-premier ministre
05:58 Bernard Cazeneuve, on fait réagir,
06:01 y compris, notamment, à gauche.
06:03 Est-ce qu'il y a une limite au périmètre
06:05 de l'élargissement de ce rassemblement
06:07 auquel vous appelez ?
06:08 Quelle est-elle, si on existe une ?
06:09 -Alors, je vais vous retourner la question,
06:11 si je peux me permettre.
06:13 Est-ce qu'il faut mettre une limite à l'élargissement
06:15 et au rassemblement contre la réforme des retraites ?
06:19 -En l'occurrence, on sait que le projet de Bernard Cazeneuve
06:24 ou de ce que portait François Hollande
06:26 n'était pas dans le sens de ce que vous demandez.
06:28 -Mais aujourd'hui,
06:30 pour battre cette réforme des retraites
06:33 proposée par le président de la République
06:35 et le gouvernement,
06:36 est-ce qu'on y met des limites au rassemblement ?
06:39 Est-ce qu'on conteste le fait
06:42 que des syndicats très divers
06:45 aient réussi à s'unir dans une intersyndicale
06:48 pour dire non à la réforme de retraite ?
06:50 Eh bien, moi, ce que je constate,
06:52 c'est que cette intersyndicale réunit des syndicats
06:54 qui ne se sont pas toujours unis,
06:56 qui se sont même affrontés, opposés durement,
07:00 y compris sur la question des retraites.
07:03 Et pourtant, aujourd'hui, ils sont unis
07:05 contre cette réforme.
07:07 Et ils ont réussi à emmener
07:10 un puissant mouvement social dans le pays
07:13 et dans la durée.
07:15 Eh bien, on doit s'en inspirer.
07:17 C'est pour ça que la question que je pose,
07:20 c'est d'abord le contenu,
07:22 l'ambition que nous devons porter pour la France.
07:25 Et je ne vois pas pourquoi ce contenu et ce projet,
07:29 nous ne pourrions pas le proposer
07:31 à toutes les forces de gauche et même au-delà,
07:34 à des personnalités, à des économistes,
07:36 à des sociologues, à des intellectuels,
07:39 aux Français.
07:41 Est-ce qu'on va demander aux Français
07:44 de s'y intéresser seulement ceux qui votent à gauche ?
07:46 On ne va pas y arriver.
07:47 Il va bien falloir qu'on aille s'adresser
07:49 à des Français qui ne votent plus,
07:51 qui n'ont même plus voté à droite.
07:52 Est-ce qu'on ne s'adresserait pas
07:53 à ceux qui votent à l'extrême droite ?
07:55 Je pense à ces ouvriers que je connais
07:57 qui aspirent à vivre au mieux,
07:58 qui aspirent à avoir leur salaire augmenté,
08:00 qui aspirent à retrouver des services publics
08:01 et qui votent Front National.
08:04 Ne doit-on pas nous adresser à eux ?
08:06 Je souhaite pouvoir le faire.
08:08 Donc d'abord, parlons contenu, parlons projet.
08:13 Ne nous interdisons aucune discussion.
08:16 Allons convaincre.
08:17 Et c'est le projet qui doit déterminer.
08:19 C'est l'ambition qu'on porte pour la France
08:21 qui doit déterminer le rassemblement.
08:23 -Justement, j'allais y venir,
08:24 parce que vous portez l'ambition d'un projet de rupture.
08:29 Vous dites également que le rassemblement
08:33 ne doit pas se faire sur le plus petit dénominateur commun.
08:37 Donc comment les 2 sont compatibles, finalement ?
08:41 -Parlons-en avec les Français.
08:42 Ouvrons ce débat en grand dans le pays,
08:44 avec l'ensemble de nos concitoyens.
08:46 Est-ce que le rassemblement, l'union de la gauche
08:50 doit se faire entre des partis qui se réunissent
08:52 dans une salle et qui se mettent d'accord sur un coin de table ?
08:56 Je ne pense pas.
08:57 Je pense qu'aujourd'hui, justement,
08:58 si on veut convaincre le plus de nos concitoyens,
09:01 on doit aller à leur rencontre.
09:03 Les écouter, discuter avec eux, convaincre.
09:05 Et avoir le projet le plus ambitieux.
09:08 Et c'est ce que nous, nous souhaitons faire.
09:09 C'est pour ça qu'en même temps que nous appelons
09:11 à la construction d'un nouveau front populaire,
09:13 nous portons un projet pour la France
09:14 avec des propositions que nous mettons en débat
09:17 et que nous voulons voir mises en oeuvre, même.
09:20 Parce que nous sommes convaincus que ces réponses que nous avons,
09:23 elles permettront de sortir la France
09:24 de l'ornière dans laquelle elle est.
09:26 Et c'est ça que nous souhaitons faire en même temps.
09:29 D'un côté, défendre notre projet pour la France
09:32 auprès des Français, auprès des syndicats, des associations.
09:36 Et en même temps, appeler à construire ce front populaire,
09:40 c'est-à-dire avec les gens et avec les forces progressistes
09:43 qui se retrouveraient dans une ambition
09:45 à porter pour notre pays,
09:47 comme ça a pu être fait dans le passé.
09:50 -Alors, je reviens un tout petit peu en arrière.
09:53 Vous l'évoquiez à l'instant.
09:54 Hier, vous avez dit "mêlez-vous de vos affaires".
09:58 C'était à l'adresse de la France insoumise
10:01 après une lettre envoyée aux communistes.
10:05 Aujourd'hui, des représentants des forces de gauche,
10:08 dont Manuel Bompard, mais aussi le socialiste Pierre Jouvet,
10:12 sont venus assister aux travaux du 39e congrès du PCF.
10:18 Qu'est-ce que vous, vous avez dit ?
10:20 -C'est simple. J'ai dit "Salut, Manu, ça va ?"
10:23 "Alors, tu t'adresses aux communistes
10:26 "pour leur demander de renverser leur secrétaire national
10:28 "à la veille de leur congrès ?
10:29 "C'est la 1re fois que tu charries un petit peu ?"
10:32 Il m'a dit "Bon, il fallait bien que je dise quelque chose."
10:35 "Bon, bah oui, alors."
10:37 Je lui ai dit que ça se faisait pas, quand même,
10:40 et que si on a des choses à se dire, il faut se les dire.
10:43 Et j'ai appelé à ce qu'il y ait une rencontre,
10:46 une réunion des chefs de parti.
10:49 Pas en visio, pas... Non, non.
10:51 Une rencontre formelle entre nous,
10:55 à 4, et qu'on se dise tout.
10:58 Et qu'on se fixe l'objectif,
11:00 parce qu'on a tous cette volonté-là,
11:02 de progresser, de grandir,
11:05 de convaincre plus, de gagner.
11:09 On sait ce sur quoi on est d'accord,
11:10 et on a beaucoup de points d'accord programmatiques
11:13 sur les salaires, sur l'industrie, sur les services publics.
11:17 Et donc...
11:18 Voilà, ça, c'est déjà une base solide.
11:23 Mais on veut aller plus loin.
11:25 Et je suis pas le seul à le dire.
11:28 Et donc on doit pouvoir se le dire tous ensemble
11:31 et en sortir plus fort.
11:34 -C'est un appel que vous lancez, là, aujourd'hui,
11:37 aux autres responsables des différentes formations.
11:41 De la NUP ou éventuellement plus largement ?
11:43 -D'abord, nous,
11:45 ceux qui sont signataires de cet accord,
11:47 on doit se dire ce qui va et ce qui va pas,
11:50 ce qui gêne et ce qui gratouille.
11:52 Il faut qu'on puisse en parler, quand même,
11:54 sans pour autant que ce soit vécu
11:56 comme des agressions, des pics.
11:59 On peut quand même se dire franchement.
12:01 Et puis on a vécu une séquence pendant la réforme des retraites
12:05 où on a des choses sur lesquelles on a envie de revenir, quand même.
12:10 Et donc, ayons cette rencontre.
12:13 Et nous, nous appelons à élargir ce rassemblement.
12:17 A l'élargir. Alors est-ce qu'on l'élargit ?
12:19 Est-ce que la NUP est dépassée ?
12:22 Et on construit autre chose ?
12:23 Est-ce qu'on construit quelque chose d'autre à côté ?
12:26 Est-ce qu'on construit au-dessus, dedans ?
12:28 Parlons-en. Mais parlons-en.
12:31 -Une toute dernière question.
12:34 Si vous deviez résumer en quelques mots
12:37 l'état d'esprit du PCF avec ce 39e congrès,
12:40 quel serait-il ?
12:41 -Combatif.
12:44 Plus combatif que jamais.
12:46 Libre.
12:48 Et...
12:50 Fort.
12:51 Et on se sent plus fort.
12:53 D'abord parce qu'on a beaucoup débattu
12:54 avec beaucoup de propositions, d'idées
12:58 pour notre pays, pour l'Europe, pour la paix.
13:02 Et c'était important.
13:03 Et on se retrouve beaucoup.
13:05 Il y a une belle communion de pensée.
13:08 Et fort parce que notre parti se renforce.
13:11 Voilà, 2 000 adhésions en l'espace de 3 mois.
13:15 C'est beaucoup plus que les années précédentes.
13:17 Et ça, c'est un bon signe de vitalité.
13:20 -Eh bien, merci beaucoup, Fabien Roussel,
13:22 de nous avoir accordé cet entretien.
13:24 Et merci à vous de nous avoir suivis.
13:27 On se retrouve, bien sûr, demain pour un autre direct
13:30 avec les invités de la rédaction de "L'Humanité" à 18h.
13:34 Bonne soirée à tous.
13:35 (Applaudissements)
13:40 Merci.