Hyper concentration, hyper-valorisation, les géants de la Tech semblent aujourd'hui invulnérables. Ils façonnent la sphère productive et la société selon leur vue, édictant les normes, les standards, configurant les usages, générant de nouveaux besoins, créant de nouvelles dépendances, de nouvelles addictions et font main basse sur toutes les innovations qui comptent. A l'instar des grandes manœuvres de Microsoft, déversant des milliards sur OpenAI, pour accélérer l'intégration des solutions de cette firme dans sa suite Microsoft. Les GAFAM occupent maintenant tous les points névralgiques de ce qui fait système dans le cyberespace : les systèmes d'exploitation, les services cloud presque intégralement contrôlés en occident par Amazon, Microsoft ou Google, les solutions d'intelligence artificielle, le développement des ordinateurs quantique etc [...]
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00:09 Hyperconcentration, hypervalorisation, les géants de la tech semblent aujourd'hui invulnérables.
00:15 Ils façonnent la sphère productive et la société selon leurs vues,
00:19 édictant les normes, les standards, configurant les usages,
00:22 générant de nouveaux besoins, créant de nouvelles dépendances,
00:26 de nouvelles addictions et faisant main basse sur toutes les innovations qui comptent.
00:31 À l'instar des grandes manœuvres de Microsoft déversant des milliards sur OpenAI
00:36 pour accélérer l'intégration des solutions de cette firme dans sa suite Microsoft.
00:42 Les GAFAM occupent maintenant tous les points névralgiques de ce qui fait système dans le cyberspace.
00:48 Les systèmes d'exploitation, les services cloud,
00:51 presque intégralement contrôlés en Occident par Amazon, Microsoft ou Google,
00:56 les solutions d'intelligence artificielle et le développement des ordinateurs quantiques.
01:02 Et chaque avancée génère de nouveaux besoins cumulatifs,
01:06 de mise à niveau des systèmes existants, de sécurité ou de maintenance.
01:11 Un certain nombre de ces entreprises se retrouvent maintenant en situation de quasi-monopole naturel,
01:18 compte tenu des coûts fixes déjà engagés et de la transversalité des services qu'elles rendent à l'économie monde.
01:25 En avril 2023, la capitalisation boursière de la tech et d'Amazon réunie
01:30 représente à elle seule près de 29% du total du SP500, l'indice phare américain.
01:38 Un poids considérable à relier à la trajectoire de valorisation des entreprises de cet écosystème.
01:45 Le krach des valeurs technologiques de 2022 qui sanctionne l'euphorie du Covid ne change rien à la tendance de fond.
01:52 Face à l'engouement, le secteur doit sans cesse entretenir l'idée que l'eldorado est devant lui.
01:59 Que l'intégration des solutions ne cesse de démultiplier les potentialités de marché,
02:05 lui permettant de franchir de nouveaux sauts qualitatifs,
02:08 d'investir toujours plus profondément les process des entreprises, pour sa face B2B,
02:14 et les usages des particuliers pour sa face B2C.
02:18 Depuis trois décennies, nous ne serions qu'au début de la grande vague.
02:22 Et les rockstars du secteur, d'Elon Musk à Bill Gates, en passant par Mark Zuckerberg,
02:28 à coup de buzz médiatique relancent régulièrement le mythe de la nouvelle grande déferlante
02:33 qui va refaçonner le monde, reléguant le smartphone au rang d'antiquité.
02:38 Un discours en étrange décalage avec ce que l'on observe aujourd'hui.
02:43 L'actualité est ponctuée de nouvelles qui incitent à penser au contraire
02:47 que le secteur est proche de sa maturité.
02:50 Avec la chute violente des ventes de micro-ordinateurs en début d'année,
02:54 mais aussi de smartphones et de tablettes, un mouvement entamé en 2022.
03:00 Ce retournement lui-même ne permet en rien de préjuger de la suite.
03:04 On en connaît les causes, surequipement des années Covid, dégradation du climat de la consommation.
03:09 Mais il confirme que le segment des terminaux est sorti de sa zone de croissance extensive,
03:15 imperméable au cycle de l'économie.
03:18 Comme d'autres secteurs matures, il alterne maintenant les phases de renouvellement de gamme et de repli,
03:23 renforçant l'âpreté de la concurrence,
03:26 puisque la lutte se déplace, depuis une décennie maintenant, sur la part de marché.
03:31 Cette inflexion n'est certes pas nouvelle et ne livre qu'une vision très parcellaire des choses.
03:37 L'enjeu de la croissance se situe ailleurs.
03:39 En amont, du côté des data centers et des serveurs,
03:43 et en aval, du côté de la puissance embarquée et de l'intelligence artificielle qui permet de démultiplier les usages.
03:51 Or c'est bien de ce côté-là aussi que le bas blesse.
03:55 L'écosystème digital est confronté à deux grandes limites.
03:59 1. Le gigantisme des infrastructures matérielles qui le sous-tendent
04:03 l'expose, comme toutes les autres industries, aux contraintes de ressources et aux coûts induits par la lutte contre le réchauffement climatique.
04:10 Et 2. Le temps de cerveau disponible n'est pas, lui non plus, extensible à l'infini.
04:17 Et c'est sans doute cette seconde dimension qui est la plus pénalisante.
04:21 Les usages numériques sont chronophages, des réseaux sociaux aux jeux, en passant par la consommation de contenu en ligne.
04:28 Ce temps est la ressource rare qui permet aux modèles bifaces de traquer nos données personnelles et de les monétiser sur leur face payante.
04:37 Et les plateformes se livrent maintenant à une lutte de plus en plus âpre pour capter ce temps
04:43 qui entre en rivalité avec d'autres temps sociaux difficilement compressibles.
04:48 Les récents déboires de méta, concernant notamment le potentiel de développement rapide du métaverse ou de Twitter,
04:54 nous rappellent que ces plateformes, elles aussi, occupent un espace qui arrive à maturité,
05:00 exacerbant la concurrence sur un marché où il n'y a pas de place pour tout le monde et où il y aura des morts.
05:07 Dernière limite enfin, ce qui constitue la ressource vitale de nombreux modèles d'affaires du web, la publicité.
05:15 La croissance de cette dernière est indexée sur la croissance de l'économie, limitant là encore le déploiement des plateformes.
05:23 "Manias, panics and crashes", c'est le titre d'un célèbre ouvrage de Charles Kindlberger.
05:29 Nous rappelons que chaque grande vague d'innovation, à l'instar de celle des chemins de fer,
05:34 s'est accompagnée d'une euphorie entrepreneuriale et financière,
05:38 conduisant inexorablement à des surcapacités et à une correction sévère,
05:44 où l'État intervient et reprend la main sur des infrastructures essentielles qui relèvent de monopoles naturels.
05:51 Le numérique offre aujourd'hui le visage de la toute-puissance, comme les patrons turbulents qui le pilotent.
05:58 L'histoire nous rappelle de son côté que l'euphorie n'est jamais très éloignée de la chute.
06:04 [Musique]