Pap Ndiaye, ministre de l'Éducation nationale et de la Jeunesse, était l'invité du Grand entretien du 8h20 pour évoquer le grand plan annoncé par Emmanuel Macron en matière d'éducation.
Retrouvez tous les entretiens de 8h20 sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-8h20-le-grand-entretien
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00:00 Bonjour Pape N'Diaye, ministre de l'Education nationale et de la Jeunesse, merci d'être
00:04 avec nous ce matin au lendemain des annonces du président de la République sur le salaire
00:09 des enseignants.
00:10 Avec Yael Ghosn, nous avons beaucoup de questions à vous poser sur ce sujet.
00:13 Nous parlerons également laïcité, mixité à l'école, recrutement des professeurs
00:18 et aussi du bac.
00:20 Et puis les auditeurs de France Inter vous interrogent sur les sujets qu'ils souhaitent.
00:23 01 45 24 7000 ou via l'application France Inter.
00:27 Vous étiez donc Pape N'Diaye aux côtés d'Emmanuel Macron hier dans l'Hérault
00:31 pour ses annonces.
00:32 Avant de parler des mesures, est-ce que ça vous a mis mal à l'aise hier de voir les
00:36 manifestants toujours opposés à la réforme des retraites tenus à l'écart du chef
00:40 de l'État, sans possibilité de l'approcher ? Les forces de l'ordre sont allées jusqu'à
00:44 confisquer leur casserole, rebaptisée par le très imaginatif préfet de l'Hérault
00:48 « dispositif sonore portatif ».
00:51 Ce que j'ai vu c'est le président de la République qui conversait avec des élèves,
00:57 avec des parents d'élèves, avec des professeurs, dont on peut supposer d'ailleurs qu'un
01:01 certain nombre d'entre eux n'étaient pas spécialement proches politiquement,
01:05 qui conversaient sur les sujets d'école bien sûr, sur la revalorisation des professeurs.
01:10 Et je n'ai absolument pas vu de gêne ou de difficulté dans cette rencontre.
01:20 Il y avait des manifestants plus loin, bien entendu en dehors de l'établissement,
01:25 mais la manifestation et le tintamarre de la manifestation, ce n'est par définition
01:30 pas le lieu de l'échange.
01:31 Vous êtes un historien, Pape Ndiaye, la casserole c'est une tradition française
01:34 depuis le Moyen-Âge, l'interdire comme ça, ce n'est pas exagérer ?
01:38 Ecoutez, ça relève du maintien de l'ordre.
01:42 Ce que j'ai vu moi au sein de ce collège, c'est un débat absolument passionnant sur
01:49 des questions à l'évidence importantes pour la réussite de nos élèves.
01:53 Un dernier mot sur cette réforme, vous êtes issu de la gauche, Pape Ndiaye, vous le revendiquez.
01:58 Toute la gauche a dénoncé cette réforme, vous vous la défendez ?
02:01 Réforme des retraites, bien sûr.
02:05 Oui d'accord, je pensais que vous parliez de l'augmentation des professeurs, qui est
02:09 un marqueur quand même historique de gauche.
02:11 Le dernier ministre de l'Éducation nationale à avoir augmenté les rémunérations de
02:16 manière significative, comparable à ce que nous faisons aujourd'hui, c'est Lionel Jospin.
02:21 On va y venir, mais sur la réforme des retraites, vous la soutenez ?
02:24 Oui, sur la réforme des retraites, je la soutiens parce que je suis historien, vous
02:30 l'avez dit, dans les années 50, il y avait 5 à 6 actifs pour un retraité.
02:35 Aujourd'hui, il y a 1,7 actifs pour un retraité.
02:37 On a quand même des données extrêmement lourdes à prendre en considération.
02:43 Et c'est vrai aussi d'ailleurs dans le monde de l'éducation nationale.
02:46 Réforme juste, réforme de progrès ?
02:48 Ça peut être une réforme de progrès, mais ce sur quoi il faut évidemment insister,
02:54 c'est que ça réclame des efforts.
02:55 Deux ans de plus, de manière incrémentale jusqu'en 2030, ce sont des efforts supplémentaires
03:01 qui sont réclamés aux Françaises et aux Français pour garantir le système par répartition,
03:06 pour financer aussi des efforts très importants, comme par exemple dans l'éducation nationale.
03:10 Alors, les annonces d'hier, vous dites pour financer les efforts dans l'éducation nationale,
03:15 c'est ce qu'a dit le chef de l'État hier, il a dit, on peut faire cet investissement
03:18 pour les enseignants parce qu'on a fait la réforme des retraites.
03:21 C'est l'argent de la réforme des retraites qui permet d'augmenter le salaire des enseignants ?
03:26 Dans des enveloppes budgétaires globales, dans des grands équilibres budgétaires
03:30 qui sont ceux de notre pays, nous devons en effet prioriser un certain nombre de domaines,
03:36 l'écologie, la santé, l'éducation.
03:39 Et puis bien sûr, dans d'autres domaines, il y a des efforts à faire, y compris du côté des retraites.
03:44 Mais ce n'est pas la même caisse !
03:45 Ce n'est pas la même caisse en effet, mais c'est un élément tout à fait important.
03:49 On demande des efforts aux Français et en même temps, nous faisons des efforts importants
03:54 du côté de l'éducation nationale parce que le budget de l'éducation nationale
03:58 augmente de façon tout à fait importante, 6,5% cette année.
04:02 Donc la réforme des retraites n'est pas faite pour combler le trou des retraites ?
04:05 La réforme des retraites, elle est faite pour garantir le système par répartition.
04:10 Et dans cet effort global, bien entendu, le gouvernement fait des efforts spécifiques
04:18 du côté des professions qui ont besoin, notamment du côté des professeurs,
04:22 du côté de l'éducation nationale.
04:23 Alors les annonces d'hier, ces hausses de salaire, 100 euros minimum en plus pour tous les enseignants
04:28 à partir du 1er septembre, jusqu'à 230 euros en plus pour les profs en début de carrière.
04:33 Et puis pour ceux qui accepteront des missions complémentaires,
04:36 encore 100 à 300 euros supplémentaires par mois.
04:39 On a reçu beaucoup de messages de profs ces dernières heures.
04:42 Je vous en livre un, je suis professeur des écoles, la hausse de 100 euros pour moi,
04:46 c'est plus 4% de salaire depuis un an, juste un an.
04:49 L'inflation c'est plus 5,7%, donc ça ne compense pas.
04:52 Alors, tout dépend évidemment de l'ancienneté du professeur des écoles en question.
04:59 Pour 310 000 professeurs, c'est-à-dire pour les 15 premières années de carrière,
05:04 les hausses sont bien supérieures à cela.
05:07 Ce sont des hausses qui sont comprises entre 8% et 11% net.
05:12 Un professeur à 6 ou 7 ans de métier, par exemple,
05:16 va recevoir une hausse en septembre de 11,3%.
05:21 C'est tout à fait considérable.
05:22 Ce qui n'est pas vrai pour les milieux de carrière, par exemple.
05:24 Et ce n'est pas vrai pour les fins de carrière, pour les deuxièmes moitiés de carrière.
05:27 Je vous rappelle que, initialement, parce qu'en comparaison européenne,
05:31 la rémunération des enseignants français est spécialement basse
05:35 sur la première moitié de carrière.
05:37 Deux fois moins qu'en Allemagne, à peu près ?
05:39 Oui, et ça dépend des landers en Allemagne, mais globalement, c'est ça.
05:42 Et ensuite, il y a un rattrapage.
05:45 Et donc, initialement, on n'avait pas prévu d'augmenter les enseignants en seconde moitié de carrière.
05:51 On l'a fait après discussion avec les syndicats.
05:54 Mais pour ces enseignants, la hausse est moins grande.
05:57 Nous la compensons aussi par un passage facilité,
06:00 par donné l'entrée dans cette dimension un peu technique.
06:04 Un passage facilité à la hors-classe et à la classe exceptionnelle
06:08 pour les professeurs qui sont, disons, en fin de carrière.
06:12 Et ils peuvent ajouter à cela, bien entendu, des missions nouvelles liées au pacte.
06:14 En 1980, un prof de collège qui débutait était à un peu plus de deux fois le SMIC.
06:19 Aujourd'hui, c'est un peu plus d'un SMIC.
06:22 1,5.
06:23 Est-ce que l'effort, du coup, est suffisant ?
06:25 L'effort, il est considérable.
06:27 On ne l'a pas connu depuis 33 ans, depuis le début des années 1990.
06:33 Que cet effort, à lui seul, puisse compenser des décennies de glissement relatif
06:39 des rémunérations des enseignants, c'est difficile.
06:43 Mais il faut y ajouter, bien entendu, le pacte, les missions nouvelles
06:47 qui peuvent, avec la rémunération socle,
06:51 représenter une hausse qui peut aller jusqu'à 500 euros par mois.
06:54 Et là, ça devient extrêmement significatif.
06:56 On parle là de hausses de 25 à 30% du salaire.
07:01 Clarification, c'est 10% pour tous ?
07:03 Ou 10% en moyenne ?
07:04 10% pour tous, c'est la promesse d'Emmanuel Macron en 2022.
07:06 C'est 10% en moyenne.
07:08 Donc pas pour tous.
07:09 Alors, ça peut dépasser 10% dans certains cas.
07:12 On est même à plus de 11% dans les premières moitiés de carrières.
07:17 Ensuite, c'est moins.
07:18 Je rappelle qu'initialement, je l'avais moi-même dit, je crois, sur votre antenne
07:23 au mois de juin dernier, les secondes moitiés de carrières
07:26 ne devaient pas connaître d'augmentation.
07:28 Nous avons écouté les syndicats, mais pour ces secondes moitiés de carrières,
07:32 on parle là d'augmentation qui vont de 3 à 4%.
07:36 Vous avez parlé du pacte que vous proposez aux enseignants papendia.
07:40 Une partie de ces hausses de salaire seront accordées à ceux qui acceptent de travailler plus.
07:44 Est-ce que vous pensez que les enseignants français ne travaillent pas assez aujourd'hui ?
07:46 Les enseignants français travaillent beaucoup.
07:49 Il n'y a aucun doute.
07:50 Ils travaillent assez donc ?
07:51 Ils travaillent beaucoup, bien entendu, et ils travaillent suffisamment.
07:54 Ils travaillent suffisamment ?
07:55 Mais bien entendu, ce n'est pas moi qui vais dire que les enseignants ne travaillent pas.
07:59 Les professeurs travaillent.
08:00 Là, vous voulez les inciter à travailler plus ?
08:02 Ce n'est pas tout à fait cela.
08:03 En effet, nous allons rémunérer des tâches que pour beaucoup, ces professeurs assument déjà.
08:10 Par exemple, dans le collège où j'étais avec le président de la République hier,
08:14 les professeurs assument déjà des tâches de remplacement de courte durée.
08:18 Ils assument des tâches de soutien, de devoirs faits, bref, tout ce que nous mettons dans le pacte.
08:23 Or, désormais, à partir de la rentrée, nous allons rémunérer ces tâches à des hauteurs bien supérieures
08:31 à ce qui est actuellement le cas, puisque actuellement, ils sont payés en heures supplémentaires.
08:35 C'est à peu près 45 euros de l'heure.
08:37 Là, le pacte leur proposera une rémunération de 69 euros par heure.
08:41 Mais est-ce que vous rétorque les syndicats ?
08:43 Je cite Sophie Vénétité du SNES-FSU, c'est que la limite, c'est le temps de travail dans la semaine.
08:48 Un enseignant sur deux travaille plus de 43 heures par semaine et le SNES-FSU ne voit pas où caser les missions supplémentaires pour gagner plus.
08:56 Donc, un, les enseignants font déjà un certain nombre de missions.
09:01 Deux, si dans le cas, par exemple, d'un remplacement de courte durée, c'est une mission qui équivaut à 18 heures par an,
09:09 ça représente une demi-heure par semaine.
09:12 C'est quelque chose qui peut intéresser un certain nombre d'enseignants.
09:15 C'est tout à fait compatible.
09:16 Pourquoi nous faisons ça ?
09:18 Eh bien, c'est parce que d'une part, on a un problème, vous savez, d'attractivité du métier.
09:23 Nous avons moins de candidats pour être professeur, donc nous avons besoin d'augmenter les rémunérations pour rendre ce métier plus attractif,
09:31 pour faire face à nos besoins très importants dans les années à venir compte tenu des départs à la retraite.
09:36 4000 postes non pourvus l'an dernier.
09:39 Tout à fait. Et deuxièmement, nous avons besoin d'assurer un certain nombre de missions, par exemple, les emplois du temps à trous,
09:46 qui pourrissent la vie des élèves et des familles, si je puis me permettre.
09:51 Et donc, nous devons résoudre ces difficultés.
09:53 Nous devons généraliser de voir fait en sixième.
09:55 Nous devons faire de telle sorte que les missions de soutien en français et en mathématiques soient assurées en sixième.
10:02 Bref, un ensemble de choses que nous pactons avec des hausses de rémunération particulièrement attractives et tout à fait inédites.
10:10 Emmanuel Macron a dit lundi soir lors de son allocution, je le cite,
10:14 "les parents verront le remplacement systématique des enseignants absents en septembre".
10:19 Vous confirmez ?
10:20 Il y aura une période d'ajustement en septembre.
10:22 C'est quelque chose de nouveau dans la plupart des établissements.
10:26 Donc, ce ne sera pas systématique en septembre.
10:28 "Ajustement", ça veut dire quoi ?
10:30 Le temps que les choses se mettent en place, que les enseignants signent leurs lettres de mission, qu'ils signalent leur volonté.
10:38 Nous mettons en place également un certain nombre de moyens techniques et informatiques pour que cela se passe de la manière la plus harmonieuse possible.
10:47 Laissons quand même le temps aux établissements, laissons quelques semaines pour que les remplacements de courte durée se mettent en place.
10:55 Donc, ce n'est pas septembre, ce sera quand ? C'est quoi votre objectif ?
10:57 A quel moment ça revient "systématique", je reprends le mot du chef de l'État ?
11:00 Ça se met en place à partir de septembre pour être systématique à partir, je dirais, de la fin septembre et dans le courant de l'automne.
11:08 Comment ça fonctionne ? Qui va remplacer qui, Papendiaï ?
11:12 Un prof de maths est absent au mois de septembre dans une classe de sixième, par exemple, qu'est-ce qui se passe ?
11:17 C'est par exemple le professeur d'anglais qui va remplacer le professeur de mathématiques, non pas pour faire des mathématiques, bien entendu, mais pour faire de l'anglais.
11:26 L'idée, c'est d'ailleurs ce qu'on a vu...
11:28 Donc, ce n'est pas un remplacement sur la matière concernée, c'est juste le poste ?
11:31 C'est le trou dans l'emploi du temps qui est remplacé, non pas pour faire la discipline, sauf si un professeur de mathématiques...
11:39 Et donc, les maths ne seront pas rattrapées dans votre logique ?
11:41 Les mathématiques seront rattrapées une autre fois lorsque le professeur d'anglais sera absent et que le professeur de mathématiques pourra le remplacer.
11:50 C'est une pesée annuelle, en quelque sorte, des programmes et puis des horaires.
11:55 À condition que le prof en question soit disponible au moment où il y a aussi toute une organisation de l'emploi du temps à mettre en place.
12:02 Nous développons d'ailleurs un logiciel qui permettra au chef d'établissement de savoir instantanément qui est disponible pour remplacer un professeur.
12:09 Nous perdons des millions d'heures chaque année non remplacés et donc nous devons absolument avancer sur cette question.
12:16 De combien de professeurs volontaires avez-vous besoin pour que ça fonctionne ?
12:19 En matière de remplacement de courte durée, nous avons besoin d'un tiers, d'un petit tiers de professeurs volontaires.
12:25 C'est moins crucial dans le premier degré.
12:28 D'autres questions importantes se posent.
12:30 Et ça, ça marche qu'au collège et au lycée, ce système-là ?
12:33 Oui, parce que la question des remplacements se pose et est résolue différemment dans les écoles.
12:39 Nous avons d'autres besoins dans les écoles, mais nous tablons sur un tiers de professeurs pactés.
12:45 Parmi les chantiers que vous avez ouverts à peine d'y aller à l'école, il y a la mixité.
12:48 Vous estimez que dans le privé, on n'accueille pas assez d'élèves boursiers, 9 à 10 %, contrairement à 28 % dans le public.
12:55 Et vous avez expliqué récemment dans le Figaro que dans les grandes villes, il y avait un évitement scolaire maximal.
13:00 Qu'est-ce que c'est l'évitement scolaire ?
13:02 L'évitement scolaire, ça consiste à éviter le public pour aller dans le privé.
13:07 C'est quelque chose que l'on observe dans un certain nombre de grandes villes.
13:12 Mais la question de la mixité...
13:13 C'est pas bien ?
13:14 La question, ça peut être bien, mais moi, je suis en charge des écoles publiques et c'est vers elles que je me tourne prioritairement.
13:25 Ce que je note, c'est que la question de la mixité, elle ne se résume pas à une opposition entre le public et le privé.
13:33 Nous avons du côté de l'enseignement public des écarts très importants en matière d'école ou d'établissement favorisé ou défavorisé.
13:44 Et c'est donc de ce côté-là que nous allons agir prioritairement, tout en établissant un protocole avec l'enseignement privé.
13:52 Parce qu'il ne s'agit pas, comme j'ai pu l'entendre d'ailleurs, de rallumer la guerre scolaire.
13:57 Ça n'est évidemment pas ça.
13:58 Ça se fait en bonne intelligence avec l'enseignement privé sous contrat.
14:03 Soyons concrets, vous voulez arriver à combien de boursiers dans le privé ?
14:06 S'il y en a 10% aujourd'hui, vous voulez arriver à combien ?
14:07 Le protocole que nous allons signer dans quelques semaines fixe une progression pour qu'on aille au-delà des 9 à 10% actuels.
14:20 Une progression bien entendu raisonnable et annuelle sur laquelle l'enseignement privé sous contrat va s'engager.
14:27 C'est bien de scolariser ses enfants dans le privé ?
14:29 Ça n'est ni bien ni mal.
14:30 C'est un choix et ce choix de l'école, nous le préservons.
14:34 Bien entendu, il ne s'agit absolument pas de remettre en cause cela.
14:38 Vous-même, vos enfants ont fait une partie de leur scolarité dans le privé.
14:40 En effet, et il ne s'agit pas de remettre cela en cause.
14:45 Ce que nous souhaitons, c'est que l'enseignement privé sous contrat, de même que l'enseignement public, qui est principalement concerné,
14:54 participe d'une politique dont nous savons qu'elle est favorable pour les résultats des élèves, en particulier les résultats des élèves défavorisés.
15:01 Donc concrètement, quand les directeurs d'établissements privés reçoivent deux demandes d'inscription,
15:06 ils doivent privilégier la demande qui vient d'une famille avec un élève boursier.
15:10 C'est comme ça que ça va se passer ?
15:12 Ça va se passer un peu différemment.
15:15 Vous verrez la manière dont le protocole se fait.
15:18 Nous avons, nous, des moyens de pression, si je puis dire, puisque nous finançons au trois quarts l'enseignement privé sous contrat.
15:25 Mais vous pourriez priver l'enseignement privé de postes ?
15:30 Alors, nous avons un volume de postes global pour l'enseignement privé sous contrat qui est garanti par la loi.
15:36 Mais la répartition des postes peut se faire selon des critères qui peuvent inclure, bien entendu, la bonne disposition des établissements en faveur de la mixité.
15:44 Donc ça peut être coercitif ?
15:46 Ce sont des pressions que nous pouvons exercer.
15:50 Mais je répète encore une fois que nous allons vers un protocole, vers un accord sur une partie de la question.
15:58 L'essentiel de la question, c'est dans l'enseignement public que ça se pose.
16:02 Et nous devons avancer là-dessus parce que la ségrégation scolaire est la plus importante d'Europe.
16:06 Des questions, beaucoup de questions ce matin des auditeurs, des auditrices de France Inter.
16:10 Pour vous, Papendier, nous accueillons Guillaume qui nous a appelé du département de l'Ariège.
16:15 Bonjour Guillaume.
16:17 Bonjour.
16:17 Nous vous écoutons. Le ministre vous écoute.
16:20 Oui, bonjour messieurs.
16:21 Donc vous parliez tout à l'heure d'attractivité du métier et du manque de candidats au poste.
16:26 Donc le grand mot, c'est augmenter la rémunération pour rendre plus attractif ce métier.
16:32 Alors je ne pense pas qu'une augmentation de 100 ou 200 euros puisse apporter plus de candidats.
16:37 Par contre, une amélioration des conditions de travail pourrait, je pense, influer sur ce nombre de candidats.
16:44 Et en particulier, je pense au taux d'encadrement, c'est-à-dire au nombre d'élèves par professeur.
16:48 Si j'en crois les informations, en particulier les informations de France Inter,
16:52 nous sommes en France le deuxième pays d'Europe pour ce qui est le nombre d'élèves par professeur.
16:59 Vous enseignez vous-même, Guillaume ?
17:01 Oui, je suis enseignant depuis 30 ans, moi.
17:03 Et le taux d'encadrement, c'est quelque chose que vous constatez ? Vous avez trop d'élèves ?
17:07 Ben disons que moi, oui. Alors maintenant, je suis enseignant spécialisé, donc j'ai un nombre d'élèves limité.
17:12 Tu réduis.
17:13 Voilà, c'est ça. Donc je constate la différence.
17:15 Je l'ai toujours, oui, depuis le début de ma carrière.
17:19 Que ce soit, moi j'ai surtout enseigné en collège. 30 élèves en collège, c'est beaucoup trop.
17:23 À l'école primaire aussi, 35 au lycée. Voilà, c'est énorme.
17:27 Quand M. le ministre parlait de dispositifs de soutien et autres,
17:31 le premier dispositif de soutien à apporter,
17:33 c'est de mettre un nombre réduit d'élèves dans une classe pour apporter le plus possible à chacun d'entre eux.
17:38 Merci, Guillaume, pour cette question. Le ministre vous répond.
17:41 Bonjour, Guillaume. En effet, la question de la hausse des rémunérations
17:46 ne dit pas tout de l'attractivité du métier,
17:48 les conditions de travail, mais aussi les déroulements de carrière,
17:52 les mutations, ce sont des questions sur lesquelles nous travaillons.
17:55 À propos du taux d'encadrement, celui-ci va baisser l'année prochaine,
17:59 c'est-à-dire que le nombre d'élèves par classe va baisser légèrement
18:04 de manière à améliorer ce taux d'encadrement.
18:07 Ce taux d'encadrement, nous devons en effet travailler dessus.
18:10 Mais ça a un lien avec l'attractivité du métier,
18:13 parce que beaucoup de postes dans l'éducation nationale ne sont pas pourvus.
18:17 Le rendement des concours, comme on dit, n'est pas favorable.
18:20 Et donc, à la fin de l'année, nous rendons à l'État plusieurs milliers de postes qui n'ont pas été pourvus.
18:26 Donc, avant de créer des postes nouveaux, je dis qu'il faut d'abord faire de telle sorte
18:30 que les postes que nous créons soient pourvus.
18:34 Or, ce n'est pas le cas dans de très nombreuses académies pour les professeurs des écoles,
18:37 ce n'est pas le cas non plus pour de nombreuses disciplines dans le secondaire.
18:42 C'est pour cela que nous devons mieux payer les professeurs,
18:45 de manière à ce qu'il y ait des professeurs dans chaque classe.
18:48 Et par ailleurs, nous devons en effet faire de telle sorte que, progressivement,
18:52 le taux d'encadrement s'améliore avec moins d'élèves par classe.
18:55 - Sur le manque de profs, le témoignage de Laurence,
18:57 ma fille est en première dans un lycée rural,
18:59 les cours de français n'ont été assurés qu'à 50% tout au long de l'année, dit-elle.
19:04 Le programme n'a pas été réalisé correctement, en particulier à l'écrit.
19:07 - Eh oui, voilà, c'est précisément le problème que je posais tout à l'heure.
19:11 Nous arrivons à assurer les remplacements de longue durée,
19:14 lorsqu'un professeur est en congé de maladie de longue durée,
19:18 mais ces problèmes qui, au fond, ont des effets très importants,
19:24 y compris pour les classes à examen,
19:26 nous devons avancer sur cette question très importante.
19:28 - Jean-Marc, sur franceinter.fr et sur l'Organisation globale de l'éducation nationale,
19:32 dans le cadre du statut des enseignants, on ne mentionne jamais que c'est la seule profession
19:35 qui a plus de 10 semaines de congé par an, nous écrit-il.
19:38 Ne faut-il pas envisager une meilleure gestion de ce temps de travail ?
19:41 - Alors, je pense que la question des rythmes scolaires,
19:44 puisque nous avons 36 semaines de cours et puis 16 semaines de vacances,
19:49 c'est une question qu'il faut poser.
19:51 En effet, nous sommes le pays d'Europe,
19:54 ou parmi les pays d'Europe, qui a les semaines de vacances les plus importantes,
20:00 et donc des rythmes hebdomadaires importants également en France.
20:04 - Donc il faut moins de vacances pour les élèves et pour les profs,
20:07 ou il faut qu'ils soient répartis différemment ?
20:08 - Je vais vous donner un exemple.
20:09 Du côté des grandes vacances, lorsque les élèves,
20:12 notamment les élèves défavorisés, reprennent les cours début septembre,
20:16 ils reprennent non pas avec leur niveau du 30 juin,
20:19 mais ils reprennent avec leur niveau du 31 mai.
20:22 Ils ont perdu un mois de scolarité.
20:24 C'est pour ça qu'on développe des dispositifs,
20:26 vacances apprenantes, stages de réussite, etc.
20:29 Mais on a clairement une difficulté de ce côté-là, mais ce n'est pas une question...
20:32 - Donc raccourcir les vacances d'été, ça peut être long, puisque...
20:34 - Non, ce n'est pas une question que je souhaite...
20:35 Je note simplement, et nous y répondons par les vacances apprenantes,
20:38 mais nous avons une difficulté particulière avec cette perte,
20:42 littéralement, de savoir scolaire.
20:45 C'est vrai notamment en français et en mathématiques,
20:47 lorsque nous retrouvons nos élèves début septembre.
20:49 - Autre difficulté en ce moment, elle est soulignée notamment
20:52 par les professeurs de terminale, qui ont beaucoup de mal à mettre la main
20:55 sur leurs élèves, nous disent-ils,
20:57 depuis que les épreuves de spécialité du bac ont lieu au mois de mars.
21:00 C'est la chasse aux élèves dont beaucoup pensent qu'ils sont peut-être déjà en vacances.
21:05 Je n'ai pas dit tous, j'ai dit certains.
21:07 Ce calendrier était-ce une erreur, Papendier?
21:09 - Alors, ce calendrier, il n'a pas été fait au hasard.
21:11 C'est pour que les épreuves de spécialité soient prises en compte dans Parcoursup.
21:15 Et ce sera la première fois cette année.
21:17 C'est très attendu par les établissements du supérieur,
21:19 qui veulent avoir une note en quelque sorte standard
21:22 et bien étalonnée à l'échelle nationale.
21:25 Mais nous avons en effet une difficulté sur le troisième trimestre.
21:28 On va y réfléchir.
21:29 En tout cas, ce que je dis pour l'instant aux élèves,
21:32 c'est qu'ils ont obligation d'assister au cours.
21:35 C'est une obligation du 1er septembre jusqu'au 30 juin.
21:39 Et donc, j'attends des élèves qu'ils participent au cours,
21:42 y compris au cours de spécialité.
21:43 Et puis, dans la phase complémentaire de Parcoursup,
21:46 les notes qu'ils vont avoir d'ici à la fin de l'année scolaire, elles comptent.
21:50 Ils ont aussi à préparer le grand oral de la mi-juin.
21:53 - Donc pas de relâchement.
21:54 - Donc pas de relâchement, surtout.
21:55 - Il y avait certains lycéens qui étaient dans la rue ces dernières semaines
21:58 contre la réforme des retraites.
22:00 Un mouvement qui a suscité beaucoup de critiques
22:02 de l'action des forces de l'ordre.
22:03 La défenseur des droits, clairs et dons, a été saisie à 115 reprises.
22:08 Gérald Darmanin, le ministre de l'Intérieur,
22:10 réfute le terme de "violence policière".
22:12 Vous, en 2020, ici, à ce micro,
22:15 en commentant les violences de la police américaine
22:17 après la mort de George Floyd,
22:18 vous expliquiez qu'il fallait assumer aussi en France
22:21 cette notion de violence policière.
22:23 - Chacun son vocabulaire et moi, j'en parlais dans d'autres fonctions.
22:26 Mais cette question des relations entre la police et la jeunesse,
22:30 c'est une question qui se pose en France et dans bien d'autres pays.
22:33 D'ailleurs, ça n'entre pas dans mes fonctions.
22:36 Je suis ministre de la jeunesse et donc j'ai intérêt,
22:39 en tant que ministre de l'Éducation nationale et de la jeunesse,
22:42 à ce que ces relations soient des relations qui se passent au mieux.
22:45 - Mais comme historien, vous parlez de violences policières.
22:47 - Comme historien, je parlais de violences policières.
22:49 - Vous en parliez ou vous parlez au présent ?
22:50 - Je n'ai d'autres fonctions actuellement.
22:54 Il y a l'IGPN. J'ai entendu la chef de l'IGPN.
22:57 J'ai entendu aussi le ministre de l'Intérieur.
23:01 Bien entendu que dans chaque administration,
23:04 dans l'administration de l'Éducation nationale aussi,
23:06 nous avons une inspection générale qui s'occupe des cas problématiques.
23:10 Et il y en a aussi...
23:11 - Il y a-t-il des violences policières aujourd'hui en France ?
23:13 - Il y a des phénomènes sur lesquels l'inspection générale se penche.
23:18 - D'accord, mais le vocable vous gêne aujourd'hui.
23:21 - On peut les qualifier comme on veut.
23:24 Il n'empêche que ces phénomènes existent.
23:26 - Vous prononciez le mot pour qualifier la situation en France il y a trois ans.
23:29 Aujourd'hui, vous ne pouvez plus le prononcer.
23:31 - Il y a trois ans, je parlais des États-Unis,
23:33 puisqu'on était dans le mouvement Black Lives Matter, bien entendu.
23:37 - Vous disiez qu'il y a un déni en France sur cette question ?
23:39 - Je disais que cette question se posait dans tous les pays du monde, y compris en France.
23:43 - Ce n'est pas vous qui êtes dans le déni ce matin sur cette question, Papalegaï ?
23:46 - Je suis un homme de conviction et je ne vais certainement pas changer mes convictions sur quelque sujet que ce soit.
23:51 - Votre prédécesseur Jean-Michel Blanquer avait créé en 2018 un Conseil des Sages de la laïcité
23:56 pour la défendre et la faire vivre à l'école.
23:58 Vous avez décidé d'élargir son périmètre et de nommer de nouveaux membres.
24:02 Ça a beaucoup fait réagir, notamment la sœur de Samuel Paty, la sœur du professeur assassiné.
24:08 Elle s'appelle Mikael Paty.
24:09 Dans une tribune la semaine dernière dans Le Point, elle dénonçait, je la cite,
24:12 « le choix idéologique assumé d'assassiner la laïcité ».
24:15 Ce sont des mots très forts. Pourquoi cette réforme ?
24:18 - Ce Conseil n'avait pas d'existence juridique.
24:20 Je lui en donne une, c'est le Conseil des Sages de la laïcité et des valeurs de la République.
24:24 C'est son nom originel.
24:26 Et donc mon objectif, c'est à la fois évidemment d'assurer une laïcité ferme,
24:31 et je ne vais pas bouger de cette ligne,
24:33 mais c'est aussi de faire de telle sorte que la laïcité soit aimée.
24:35 Vous savez, les vieux républicains disaient « la République ne doit pas seulement se craindre,
24:39 elle doit aussi être aimée ».
24:41 Il en va de même pour la laïcité.
24:42 Nous devons donc aussi réfléchir aux valeurs de la République
24:45 qui sont liées à cette question de la laïcité.
24:46 Lutter contre les discriminations, lutter contre le racisme ou l'antisémitisme,
24:50 c'est renforcer en réalité la laïcité, c'est renforcer l'adhésion à la laïcité.
24:55 Donc je ne dilue rien du tout, je renforce, j'assure et je solidifie juridiquement un Conseil.
25:01 - Et vous étoffez la liste des membres ?
25:02 - Et j'étoffe la liste des membres.
25:03 - Comment ?
25:04 - Avec des nouvelles nominations, y compris d'ailleurs celle d'un historien.
25:08 C'est une annonce que je peux vous faire puisqu'il va nous rejoindre dans quelques semaines.
25:13 Il s'agit de Christophe Capuano, un de mes collègues historiens, universitaire,
25:17 qui préside le prix Samuel Paty.
25:19 Il était d'ailleurs proche ami de Samuel Paty.
25:22 - Et donc il va rejoindre ce Conseil des sages de la laïcité.
25:25 Merci à vous, Pape Ndiaye, ministre de l'Éducation nationale et de la Jeunesse.
25:29 Excellente journée à vous.
25:30 - Merci, très bonne journée.