7 MINUTES POUR COMPRENDRE - Inflation: après mars rouge, septembre vert?

  • l’année dernière
Les industriels se sont montrés ouverts à se rassoir à la table des négociations avec les distributeurs, mais pas sur tous les produits. Au mois d'avril, les prix de l'alimentation ont augmenté de 14,9%. 

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Transcription
00:00 Après mars rouge, est-on sûr que ce sera septembre vert ?
00:04 On va évidemment parler des prix, on va parler de l'inflation.
00:06 C'est la question que l'on pose ce matin dans le 7 minutes pour comprendre.
00:09 On en parle avec Yves Puget.
00:15 Bonjour, vous êtes directeur de la rédaction de LSA et Gaëtan Mélin, la chef du service économie de BFM TV.
00:22 Si on vous parle de ça ce matin, c'est parce que l'ILEC qui regroupe 99 industriels de la grande consommation
00:28 vient de redresser un courrier à Bruno Le Maire et Olivier Grégoire.
00:32 Ils sont pour rouvrir les négociations avec les distributeurs.
00:36 Gaëtan, est-ce qu'on parle des mêmes négociations qui ont abouti fin février début mars aux hausses que l'on connaît ?
00:42 Ce qu'il faut bien comprendre, c'est que la spécificité française, c'est d'avoir une seule négociation annuelle.
00:48 Et effectivement, elle s'est terminée le 1er mars dernier et elle a abouti en moyenne à des hausses de 10%.
00:55 En fait, ce que demandent aujourd'hui Bercy, Bruno Le Maire et Olivier Grégoire,
00:59 c'est de rouvrir des négociations avec les distributeurs pour prendre en compte la baisse du prix des matières premières,
01:04 la baisse du prix des transports et surtout la baisse du prix de l'énergie.
01:08 Parce que ces 10% de hausses auxquelles aujourd'hui sont confrontés les consommateurs,
01:13 c'est tout simplement dû notamment à la guerre en Ukraine où on a vu une flambée du prix des matières premières, des transports et de l'énergie.
01:21 Donc aujourd'hui, ces industriels les répercutent et les distributeurs de facto les répercutent également sur les prix des produits que les consommateurs...
01:28 Donc ils sont ok pour ouvrir des négociations, mais ils ne disent pas sur tous les produits. Pourquoi ?
01:34 Tout simplement parce que d'abord, il faut avoir bien en tête que les industriels n'ont pas tous les mêmes contraintes en termes énergétiques.
01:42 Et puis, ils ne sont pas non plus tous confrontés aux mêmes difficultés du prix des matières premières.
01:47 Ils expliquent tout simplement qu'effectivement, ils ont eu de fortes hausses, qu'aujourd'hui, ils sont en train de refaire leur marge
01:53 et qu'ils ne peuvent pas tout simplement impacter la baisse du prix des matières premières tout de suite sur leurs produits.
02:01 Et pourquoi ? Et pourquoi ils ont été si vite pour répercuter les hausses ? Pourquoi n'irait-il pas aussi vite pour répercuter les baisses ?
02:08 Parce qu'ils disent tout simplement qu'aujourd'hui, ils sont encore confrontés à des prix très élevés, beaucoup plus élevés qu'auparavant.
02:15 Et puis, il y a aussi d'autres contraintes, comme par exemple la hausse du SMIC, qu'ils ont aussi été obligés d'intégrer dans leur prix.
02:23 Donc, effectivement, cette frilosité, et puis encore une fois, les industriels, ils disent que cette spécificité française les empêche de voir à long terme,
02:32 de voir si les prix de l'énergie vont continuer à diminuer et ils veulent tout simplement se garder une poire pour la soirée.
02:39 Nicolas, il y a toujours un effet retard dans les hausses et les baisses de prix. En fait, la répercussion à la hausse, elle n'est pas si immédiate que ça.
02:45 Si on avait répercuté vraiment le choc énergétique immédiatement, la hausse qu'on a observée là au mois de mars notamment, vous l'auriez vécue pratiquement un an auparavant.
02:56 On l'a vécue puisqu'il y a eu quatre renégociations l'année dernière justement à la demande des industriels.
03:01 Et Bruno Le Maire et Olivia Grégoire ont accepté ces renégociations l'année dernière pour faire face justement à ces augmentations de coûts.
03:08 Yves, Olivia Grégoire, la ministre des PME, parle de baisse des prix visibles. Enfin, c'est à Paris qu'elle fait.
03:14 Est-ce que c'est un pari risqué ou est-ce que ça va le faire ?
03:17 Ça me paraît un pari risqué comme il n'y a pas eu de mars rouge finalement parce qu'au mois de mars, on a vu tout simplement les augmentations habituelles monter de façon assez linéaire.
03:28 Je crains qu'au mois de septembre, il n'y aura pas de septembre vert. Je crois que la première bonne nouvelle, c'est si l'inflation arrête.
03:35 C'est surtout ça qu'il faut guetter. Des baisses de prix, je pense que ça va être compliqué.
03:38 L'inflation, elle ne va pas s'arrêter du jour au lendemain. Nicolas Dose nous le dit souvent. Ça va être un ralentissement de la hausse de l'inflation probablement, mais pas un arrêt de l'inflation.
03:48 Un ralentissement de la hausse des prix ?
03:49 Oui, des prix. Pardon, pardon, des prix.
03:52 Oui, parce que ça prend du temps. Et effectivement, Bruno Le Maire, je pense, est dans l'erreur lorsqu'il dit que les hausses ont été immédiates.
03:57 Vous l'avez bien expliqué il y a deux secondes. Il y a eu plusieurs rounds de négociations. Ça a pris plusieurs mois.
04:03 La baisse, ça va être la même chose. Après, il faut regarder effectivement pour chaque produit, quel est le coût matière première, à quel prix ça a été acheté.
04:11 Il ne faut pas confondre les prix spot, c'est-à-dire l'achat immédiat des marchés à terme, là où on négocie dans le temps.
04:18 Et puis, il y a des coûts qui sont incompréhensibles. Vous avez mentionné les salaires. C'est vrai, il y en a d'autres.
04:23 Donc la négociation, c'est un jeu compliqué où chacun va sortir sa calculatrice.
04:28 On va dire l'huile de tournesol, le prix baisse, c'est vrai, mais l'huile d'olive, le prix monte, c'est vrai.
04:33 Donc là, ça va être beaucoup de négociations dans les box.
04:37 On a toujours un peu le sentiment, Yves, que lorsqu'il y a augmentation, le consommateur prend ça en pleine figure tout de suite.
04:42 En revanche, lorsqu'il y a baisse, il faut être patient. On les attend toujours, les baisses des prix trop.
04:49 Alors sur le fond, vous avez raison. Il y a toujours cette même expression. Les hausses de prix prennent l'ascenseur et les baisses de prix prennent l'escalier.
04:55 Mais soyons raisonnables et acceptons de remarquer quand même que les hausses de prix n'ont pas été immédiates l'année dernière.
05:01 Ça a pris plusieurs mois. Tous les mois, si on regarde Circana ou Nielsen, les prix prennent 0,5 ou 0,8 %, donc ça a été sur la durée.
05:10 Je pense que ce sera la même chose pour la baisse. Ça prend du temps parce qu'il y a des stocks, parce qu'il y a des process.
05:15 Il faut le temps d'acheter la matière première, il faut le temps de fabriquer les produits, il faut le temps d'écouler les stocks.
05:20 Donc ça prend du temps. Les hausses de prix, elles n'ont pas été du jour au lendemain non plus.
05:25 Yves, est-ce qu'on peut faire un petit état des lieux du marché ? Qu'est-ce qui baisse en ce moment ?
05:30 Ce qui baisse, par exemple, le blé, le blé tendre est à la baisse. Ce qui monte, on peut citer l'huile d'olive.
05:36 Le sucre, je crois, est encore à la hausse. Le porc est encore à la hausse. Le saumon, je crois, est à la hausse. Le café doit être à la baisse.
05:43 Donc oui, il y a des cours qui baissent, mais encore une fois, chacun va sortir ses arguments. Ça baisse par rapport à quoi ?
05:50 Est-ce qu'on atteint les mêmes prix que 2019, par exemple ? Donc là, je ne veux pas dire que c'est un jeu de dupe,
05:55 mais c'est un jeu de négociateur où chacun va prendre le périmètre qui l'intéresse.
06:00 Ce qui est certain, Nicolas Daud, c'est qu'on va rester, en tous les cas, au moins jusqu'au mois de septembre, à des niveaux de prix élevés,
06:08 prix de consommation courante, à Jean-Pierre.
06:09 Oui, il y a un phénomène d'inertie, comme ça m'a d'être appelé. Les hausses arrivent à la matière première.
06:14 Les coûts de production précèdent les prix à la consommation et la baisse des coûts de production précédera la baisse des prix à la consommation.
06:22 C'est quand même très audacieux, sur le plan politique, d'annoncer des baisses visibles de prix alimentaires au contenu du mois de septembre,
06:28 parce que c'est vraiment quelque chose que le politique ne maîtrise pas.
06:31 Je vous rappelle que le souverain fait la monnaie, mais le souverain ne fait pas les prix.
06:34 Bon, en tous les cas, pas de septembre vert pour vous, contrairement à ce que dit Olivia Grégoire.
06:38 Il y aura quelques baisses de prix, mais elles seront effectivement limitées.
06:41 Dominique Schellcher me disait tout à l'heure que dans ses magasins, dans les marques distributeurs,
06:46 il voyait déjà une baisse du prix des œufs, à cause tout simplement du ralentissement du prix des matières premières,
06:52 une baisse des huiles, excepté l'huile d'olive comme Yves Muget l'a rappelé, notamment l'huile de colza.
06:58 Donc, on peut estimer qu'au regard du prix des céréales, que les pâtes ou bien encore les céréales que l'on mange pourraient baisser en septembre.
07:07 Mais encore une fois, il faut avoir bien en tête que même si certains prix baisseront en septembre, on ne retrouvera jamais les prix d'un bon crise.
07:17 Et ça, il faut vraiment l'avoir bien en tête. Cette période, elle est révolue, en tout cas à court terme.

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