Guillaume Bigot : «Ce ne sont pas les candidats qui manquent pour déstabiliser la Tunisie»

  • l’année dernière
Guillaume Bigot sur l'attaque de Djerba: «Ce ne sont pas les candidats qui manquent pour déstabiliser la Tunisie (...) Il y a des puissances qui manipulent des groupes djihadistes»

Category

🗞
News
Transcription
00:00 C'est un peu l'histoire de Frankenstein, c'est-à-dire qu'il y a souvent des puissances et des services
00:03 qui essayent d'utiliser, de manipuler en quelque sorte, les islamistes.
00:07 Et là, ce n'est pas les candidats qui manquent pour déstabiliser la Tunisie.
00:10 Dans la Libye, qui est l'État voisin, avec 500 km de frontières en commun,
00:14 qui est un État effondré, il y a des puissances qui manipulent des factions
00:18 et qui manipulent aussi des groupes djihadistes.
00:20 Il y a l'Iran, il y a la Turquie, il y a la Russie qui a des intérêts sur place et d'autres.
00:26 Mais en général, ça finit comme Frankenstein,
00:28 c'est-à-dire qu'on manipule des islamistes qui finissent par se retourner contre vous.
00:31 La Turquie a joué à ça avec Daesh et Daesh a fini par se retourner contre la Turquie.
00:36 Mais enfin, dans cette histoire de terrorisme islamique,
00:39 et l'affaire de Djerba n'y fait pas exception,
00:44 il y a toujours un terrorisme qui est local et qui a des racines locales et qui est enraciné.
00:48 En fait, il peut aussi être question de vouloir frapper le président de la Tunisie lui-même,
00:55 qui s'appelle Caïs Saïed, qui est arrivé au pouvoir en 2019.
00:58 Il est sorti de la révolution des printemps arabes de 2011,
01:02 dont il ne faut pas oublier qu'elle a démarré en Tunisie.
01:05 C'est ce qu'on appelle aussi la révolution du jasmin.
01:07 C'est un vendeur de rue qui s'est immolé par le feu pour protester contre la corruption.
01:13 Ça a donné le point de départ de toute cette révolution arabe,
01:16 qui a amené au pouvoir des gens qui étaient à la fois en Tunisie
01:19 des partisans de la démocratie à l'occidentale et des islamistes.
01:22 Les uns comme les autres ont échoué.
01:24 Et ce Caïs Saïed qu'on décrit, on l'appelle le Robocop là-bas,
01:27 parce qu'il a un côté un peu ascétique.
01:29 Et c'est un homme très rigide, c'est un prof de droit constitutionnel.
01:32 Il n'empêche, il a rétabli une sorte d'État autoritaire.
01:38 En fait, il a quasiment dissous le Parlement
01:40 et il a surtout dissous le parti islamiste, emprisonné son chef
01:44 et donc les islamistes politiques pourront être tentés de se venger de lui
01:48 et ce qui pourrait expliquer cet attentat.
01:51 Quels sont les effets possibles de cet attentat, les conséquences ?
01:55 La fragilisation de la Tunisie, d'abord à travers la fragilisation économique,
02:01 puisqu'on a vu que le tourisme risque d'en souffrir
02:05 et que le tourisme est absolument stratégique pour l'économie de ce pays.
02:07 L'économie de ce pays n'en avait vraiment pas besoin.
02:10 La Tunisie est au bord de la faillite.
02:12 Ils attendent un prêt de 2 milliards d'euros du FMI,
02:14 mais le FMI conditionne ce prêt à la libéralisation d'un certain nombre de
02:20 pans de l'économie et notamment le pain, la farine,
02:24 ce que refuse de faire le président au nom de la souveraineté nationale.
02:29 Le pays est donc fragilisé politiquement, économiquement et géographiquement.
02:33 La Libye est un état totalement effondré à ses frontières
02:36 et donc la menace est permanente que le désordre en Libye
02:39 contamine le désordre en Tunisie.
02:41 Et si cet état s'écroule, c'est une très mauvaise nouvelle pour nous.
02:44 C'est une très mauvaise nouvelle pour nous d'abord parce que ce sera
02:47 une nouvelle route pour la France, pour l'Europe en général.
02:50 C'est le pays géographiquement qui est le plus proche de l'Europe,
02:53 dans le bassin méditerranéen, au Maghreb,
02:55 puisque vous avez au nord des côtes de la Tunisie, vous avez la Sicile.
02:59 Et puis vous avez une nouvelle route migratoire
03:02 qui serait ouverte en Méditerranée orientale.
03:05 [Musique]
03:08 [Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org]

Recommandations