7 MINUTES POUR COMPRENDRE - Pourquoi les Teknival sont-ils incontrôlables?

  • l’année dernière
Les fêtards ont afflué par milliers jeudi à Villegongis, petit village de l'Indre, bravant l'interdiction de la préfecture pour fêter les 30 ans du Teknival, grand-messe de la musique techno dont la dernière édition remontait à 2019, avant la crise sanitaire. Jeudi soir, le nombre de "teufeurs" se pressant sur un terrain privé de 70 hectares, des champs non cultivés désormais jonchés de centaines de véhicules, de tentes et de murs d'enceintes, atteignait déjà 15.000 à 20.000 personnes. Et ce n'est qu'un début, relève Stéphane Bredin, préfet de l'Indre, qui a donné une conférence de presse en fin d'après-midi à Villegongis.  
Transcript
00:00 Le Tech Nival a 30 ans et depuis hier, des dizaines de milliers de personnes sont arrivées à Vilgonji.
00:06 C'est un petit village de 100 habitants dans l'Inde.
00:10 30e édition du Tech Nival qui s'était arrêté après le Covid.
00:13 La dernière édition c'était 2019.
00:15 Pour que vous sachiez un peu à quoi ressemble un Tech Nival,
00:17 on va vous montrer des images qui datent de 2018.
00:19 C'était sur la base aérienne de Marine-Île-Grand dans la Marne.
00:22 C'était donc en 2018, la 28e édition du Tech Nival.
00:26 Regardez.
00:26 [Musique]
00:32 Voilà, ça, ça dure 3 jours donc non-stop jusqu'à dimanche.
00:35 On va rejoindre Anaïs Kruz.
00:36 Première nuit blanche, Anaïs ?
00:38 [Bruit de moteur]
00:41 Oui, première nuit blanche.
00:42 Je peux vous dire que les festivaliers sont encore bien en forme
00:45 et que la musique a augmenté là depuis ce matin.
00:48 Elle ne s'est d'ailleurs jamais arrêtée depuis hier, depuis l'arrivée de ces véhicules,
00:53 ces milliers de véhicules que vous voyez sur ce terrain privé de 70 hectares
00:58 qui se sont donc installés hier.
01:00 Le lieu a été tenu secret jusqu'au dernier moment.
01:02 Et en fait, ce petit village de 100 habitants a vu débarquer des véhicules
01:07 venus de toute la France, même d'autres pays européens
01:10 qui se sont installés ici, qui ont installé leur tente, leur camping-car
01:14 et qui sont prêts à rester jusqu'à dimanche.
01:17 Alors actuellement, on est sur 15 à 20 000 personnes,
01:20 un chiffre qui va progressivement augmenter aujourd'hui
01:23 jusqu'à atteindre 30 000 personnes au plus fort de week-end.
01:26 Alors tout un dispositif, que ce soit de sécurité ou encore médical, a été installé
01:30 parce que désormais, il n'est plus question d'empêcher la tenue de ce Technival,
01:34 donc un festival techno qui est particulièrement réputé,
01:38 mais plutôt de l'accompagner et de le sécuriser
01:41 pour que tout, finalement, se passe bien ici à Villebonvis.
01:44 Mathieu, Mathias Tesson, tout ça a été annoncé à la toute dernière minute.
01:48 Comment 30 000 personnes peuvent s'installer en quelques minutes,
01:51 sans autorisation, sur un terrain privé ?
01:53 Parce que toutes ces personnes ne sont évidemment pas arrivées toutes ensemble en même temps.
01:58 Il faut imaginer que tous ces tuffers viennent des quatre coins de la France,
02:01 voire même parfois de l'Europe et donc ils ne forment pas un convoi.
02:05 C'est donc pour ça qu'ils réussissent un petit peu à passer sous les radars.
02:07 Et puis c'est dans l'ADN de ces festivaliers justement
02:10 de réussir à organiser les choses de manière clandestine.
02:13 Alors en utilisant par exemple des messageries privées, cryptées,
02:16 puis l'élément déterminant, c'est que le lieu est tenu secret jusqu'à la dernière minute.
02:22 La preuve, quelques jours avant l'organisation de ce Technival,
02:25 différents départements en France avaient pris des arrêtés d'interdiction.
02:29 Les Vosges, l'Heure, c'est finalement tombé sur l'Inde.
02:32 Ça paraît hallucinant que les services de renseignement n'aient pas compris
02:36 avant les festivaliers que ça se passerait dans l'Inde.
02:38 Oui, effectivement. Alors les autorités savaient que ça allait se produire.
02:41 Il y avait des alertes. C'est la raison pour laquelle différents départements
02:44 avaient essayé d'anticiper les choses en prenant des arrêtés d'interdiction.
02:49 Mais la difficulté, c'est de savoir où ça va se dérouler.
02:51 Et puis une fois que ça a commencé, une fois que vous avez plusieurs milliers de personnes
02:54 comme ça sur un terrain, c'est beaucoup trop compliqué de les évacuer.
02:58 Fabrice, vous êtes membre de l'association Techno Plus,
03:00 qui organise en partie, je crois, ces Technival,
03:03 et vous êtes en contact avec vos représentants sur place.
03:05 Ça fait partie de la culture, comment dirais-je, secrète, cette dernière minute.
03:10 Est-ce qu'il ne vaudrait pas mieux pour des raisons de sécurité et des raisons sanitaires
03:15 que tout se fasse de façon dans les règles et que l'on déclare
03:18 ou que l'on demande une autorisation pour organiser ce genre de festival ?
03:22 Oui, bonjour. Merci de me donner la parole.
03:25 Je voudrais juste préciser qu'en fait, moi, je fais partie d'une association de santé.
03:28 Il y a 11 associations sur place. On n'est pas du tout organisateurs,
03:31 mais on fait partie du dispositif d'accompagnement.
03:33 Ce sont des associations qui sont pour la plupart conventionnées avec l'État
03:36 pour accompagner ce type d'événement. On est spécialisés pour intervenir.
03:41 Par rapport à votre question sur est-ce qu'il vaudrait mieux que,
03:44 ça relève, on va dire, du dialogue qu'il y a depuis maintenant 30 ans
03:48 entre les organisateurs de ce type d'événement et l'État,
03:52 où on sait que le point crucial qui achève depuis des années,
03:55 c'est celle de fournir des terrains, de trouver des terrains.
03:58 Au tout début des Rave Party, elles étaient annoncées longtemps à l'avance,
04:02 mais bon, comme elles ont commencé à être pourchassées,
04:04 ça a plongé le mouvement dans la clandestinité.
04:07 - Mais comment vous choisissez un site ?
04:09 Comment est-ce que les organisateurs ont décidé
04:11 "Tiens, on va aller sur ce terrain de 70 hectares à Villegongie" ?
04:15 - Aucune idée. Encore une fois, moi, je ne fais pas partie de l'organisation.
04:18 Le choix des terrains, ce n'est pas mon domaine.
04:22 Moi, je fais partie des associations de santé, nous on accompagne.
04:25 Nous, ce qu'on essaye plutôt de faire passer comme message en amont
04:28 au sein de cette communauté, c'est que le choix des terrains
04:31 soit des lieux qui soient sans danger, avec le moins de risques possibles,
04:35 qu'il y ait de la signalisation qui puisse être faite,
04:38 qu'il y ait des voies d'accès pour les secours.
04:39 Le site qui visiblement a été choisi pour ce Techni-Vala respecte ces critères.
04:44 Il n'y a pas de danger majeur autour, il est facilement sécurisable.
04:48 Donc, le seul problème, c'est qu'il y a un peu de boue,
04:50 les véhicules s'embourbent, mais vous voyez, c'est plutôt en boucle.
04:54 - Bernard Fouquet, vous êtes un ancien haut responsable des CRS.
04:57 Lorsqu'on est confronté à l'arrivée de façon un peu improvisée
05:00 de quelques 30 000 personnes, en termes de maintien de l'ordre,
05:03 c'est compliqué, non ?
05:07 - Non, ce n'est pas particulièrement compliqué.
05:08 De toute façon, que cette affaire soit autorisée ou pas,
05:12 il y aura un service d'ordre, parce que dès qu'il y a un rassemblement de personnes,
05:15 eh bien, il faut prévoir les déviations de circulation,
05:18 il faut prévoir une surveillance des dispositifs
05:21 et il faut avoir une réserve sous la main au cas où.
05:24 - Vous parlez de service d'ordre de la police nationale ou de la gendarmerie
05:27 ou un service d'ordre de la part des organisateurs ?
05:30 - C'est la même chose, police nationale, gendarmerie.
05:32 Dans ce type de réunion, on a affaire en général soit à des escadrons de gendarmerie mobile,
05:37 soit à des compagnies républicaines de sécurité.
05:39 Et c'est ce qu'on appelle la force publique.
05:41 Et elle est là sur le terrain, attendant des instructions du préfet,
05:45 car le grand patron de tout le dispositif, c'est le préfet,
05:48 qui lui décide ce que l'on fait ou ce que l'on ne fait pas en fonction de la situation.
05:53 Et là, ce sont spécialisées, là, les grandes manifestations, de quelque nature qu'elles soient.
05:58 - Mathias, d'emblée, il y a un renoncement des forces de l'ordre.
06:01 Les festivaliers sont là, on les laisse s'installer ?
06:04 - C'est effectivement le préfet qui a pris cette décision,
06:07 parce que vous avez plusieurs milliers de personnes comme ça sur un terrain
06:10 et si vous décidez de les évacuer immédiatement et tous d'un coup,
06:15 c'est particulièrement dangereux.
06:17 Donc l'objectif, c'est vraiment d'éviter le suraccident, les malaises,
06:20 les mouvements de foules, les éventuels affrontements avec les forces de l'ordre
06:24 et de jouer la carte de la calmie, en gros, jusqu'à la fin des festivités.
06:27 - Annalise, est-ce que la communauté de communes a pris des décisions ?
06:30 Parce qu'elle a sûrement été surprise par l'arrivée de tous ces festivaliers.
06:34 - Oui, c'est ce qu'il nous expliquait hier le président de la communauté d'agglomération,
06:40 c'est que quand ils ont entendu finalement ces rumeurs
06:43 qui couraient sur l'installation de ce Technival dans l'Indre,
06:46 en tout cas ici sur ce terrain,
06:48 eh bien, il y a eu un débroussaillage de ce terrain privé.
06:51 D'abord parce qu'il y a beaucoup de véhicules qui sont installés,
06:53 donc ça a permis de sécuriser l'arrivée de ces véhicules.
06:56 Et puis aussi, ce qu'on nous disait, c'est qu'il y a un risque d'incendie,
06:58 qui est présent, un risque d'incendie involontaire.
07:00 Donc, il a fallu préparer finalement ce terrain.
07:03 Et je l'entendais sur le plateau,
07:05 effectivement, l'idée, ce n'est plus désormais d'empêcher ce festival.
07:08 C'est que ce festival, ce Technival, puisse se tenir dans des bonnes conditions,
07:12 à la fois des conditions de sécurité, avec en amont des contrôles de véhicules,
07:16 des contrôles de stupéfiants, d'alcoolémie,
07:18 pour que tout se passe en sécurité et sur place, avec des dispositifs médicaux
07:22 qui permettent de secourir si besoin ces personnes en cas de nécessité.
07:27 Et j'ai l'impression que ce sera sous le soleil.
07:29 On n'a pas de nuages à priori à l'horizon, en tous les cas derrière Anaïs.

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