Karim Duval - Moi, ce que j'en dis... Le Book Top

  • l’année dernière
Pour sa première chronique Karim Duval découvre Tik Tok et le concept du Book Top
Retrouvez l'émission Zoom Zoom Zen sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/zoom-zoom-zen
Transcript
00:00 Vous êtes nombreux à nous signaler que c'est très bien d'évoquer le phénomène booktalk
00:03 avec des spécialistes mais qu'à un moment de l'émission il serait bon d'entendre
00:06 sur le sujet quelqu'un qui n'y connaît rien.
00:07 Je crois que ce moment est arrivé.
00:10 Bonjour Karim Duval.
00:11 Bonjour, bonjour tout le monde.
00:12 Ceci est ma première chronique dans Zoom Zoom Zen donc je ne me permettrai pas de faire
00:16 des blagues ciblées sur l'âge des personnes ici présentes et qui sont plus book que talk.
00:20 D'autant plus que je découvre le concept de booktalk grâce à vous Mathieu Noël.
00:26 C'est dire si je suis en retard sur mon époque.
00:29 Bonjour à tous, ceci est ma dernière chronique dans Zoom Zoom Zen donc je n'ai plus rien
00:34 à perdre et le 10 sans complexe, vous l'avez rappelé, je ne suis jamais allé sur TikTok,
00:38 moi je sévive sur LinkedIn, sur réseaux sociaux où en moyenne ça twerk moins que sur TikTok.
00:43 Je suis un peu la rockstar des responsables qualité, le punk à chien des chefs de projet,
00:49 l'égérie de la doudoune sans manche sur chemise claire.
00:51 Autant vous dire que moi j'ai eu vent de booktalk au travers d'articles renvoyant
00:57 à des vidéos YouTube, LinkedIn ou Instagram auxquelles je me connecte tous les jours depuis
01:02 mon PC qui parlent de booktalk.
01:06 Ça me rappelle l'allégorie de la caverne de Platon.
01:08 Je pars du principe que tout le monde a la ref, on est sur France Inter, on a lu des
01:11 livres et pas que de la dark romance.
01:14 A l'image de l'allégorie de la caverne, booktalk c'est le monde des idées, c'est
01:19 là que siège la vérité.
01:20 Et moi je suis dans la caverne de la bien-pensance enchaînée à l'idée qu'il y a une bonne
01:24 et une mauvaise littérature.
01:25 Je ne vois que la projection de la vérité de booktalk sur les murs de ma caverne, à
01:28 savoir des chiffres de ventes de bâtards.
01:31 Des livres qui végétaient dans leurs coins et qui soudain se vendent à 100 000 exemplaires.
01:35 T'imagines la responsable commerciale de la maison d'édition, 20 ans d'expérience,
01:39 master MBA payée à crédit.
01:41 Il y a 5 ans, elle avait déroulé un plan marketing béton, fait des réunions, employé
01:46 des mots tendance, product cycle, rétro-planning, omni-canal, growth hacking, agilité, de quoi
01:52 alimenter une saison entière de zoom zoom zen.
01:54 Des néologismes à en perdre le sens de son travail.
01:58 Elle a d'ailleurs tout plaqué pour élever des chèvres.
02:00 Puis elle est revenue, parce que dans le Larzac, ils ne servent pas de brunch.
02:03 Elle s'est battue pour au final vendre 500 exemplaires.
02:08 Et un beau matin, sa collègue l'appelle.
02:10 « Véro, tu vois ce que je vois ? »
02:12 « 100 000, c'est un signe du ciel, une manifestation des esprits.
02:17 Il avait raison Bernard, le chaman de Millau.
02:20 En fait, le signe vient du fin fond de TikTok.
02:24 Une gamine de 19 ans s'est filmée avec le bouquin en disant « franchement, ce livre
02:28 il est trop à fleur de peau ». Alors oui, elle a écrit peau, P-O-T, rapport à la fleur,
02:33 fleur avec S.
02:35 Mais ce qui fait que BookTok marche, c'est la sincérité précisément.
02:39 Il y a une booktoqueuse qui a juste filmé ses poils d'avant-bras qui se dressent à
02:42 la lecture d'un livre.
02:43 Les critiques littéraires avaient les boulets « moi j'ai fait hippo kagne kagne, moi
02:48 j'ai fait épiderme derme ».
02:49 Y'a quoi ? Ça a fait 100K. 100 000 exemplaires de pavés énormes.
02:54 C'est des parpaings les trucs, t'en trouves chez Casto.
02:56 Mais comment vous faites la Gen Z pour lire 8 tomes de 1000 pages ? Moi je suis sûr qu'en
03:02 bas des pages, ils dessinent des bons hommes bâtons, tu sais les ados ils lisent en faisant
03:05 défiler les pages en faisant brrrrrr. ça fait un petit dessin animé qui résume l'histoire, qui filme et ça fait des booktokes, encore plus de booktokes. A un moment donné, ça va augmenter notre tsundoku. Le tsundoku, c'est le mot japonais qui désigne notre manie d'accumuler des piles de livres, sans jamais les lire, comme ça, compulsivement. Et tout va bien. On dit « je suis atteint de tsundoku ». On aime bien les petits mots japonais, c'est joli, ça légitime nos comportements maladifs.
03:28 C'est comme si un pyromane disait « je ne brûle pas les forêts, je suis atteint de kainomori ». C'est comme si un CRS tapait sur un manifestant en disant
03:34 « hey, as-tu entendu parler du shigoïdo ? ». Faut se méfier des jolis mots. Ça se lit plus vite pour l'empaise de la portée et les jolis mots. Et moi je trouve joli ce mot, « booktok ».
03:44 Ah ben finalement, ça vous plaît !
03:46 Vous n'avez pas saisi l'ironie de ma chute ?
03:48 Si, si, si, j'ai saisi l'ironie, je vous en prie, Karim Duval, on vous retrouve bientôt ou pas, ou pas, Zoumzoumzen ? On sait pas, on sait pas, on verra, si Yann Marguet ne sabote pas vos freins, vous reviendrez peut-être.

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