• il y a 2 ans

Category

🗞
News
Transcription
00:00 - Et le maire de Caudreau qui s'est lancé hier dans un périple à pied depuis sa commune du Sud-Gironde jusqu'à l'Elysée à Paris
00:07 pour dénoncer les difficultés de la vie de maire et celles des petites communes.
00:10 Alors on en parle ce matin avec le maire de Saint-Aubin-de-Médoc et trésorier de l'association des maires de Gironde avec vous Marie-Roach.
00:16 - Bonjour Christophe Duprat. - Bonjour.
00:18 - 650 km à pied entre Caudreau et l'Elysée c'est une sacrée marche, c'est une sacrée démarche aussi.
00:23 Est-ce que vous comprenez l'action de votre collègue de Caudreau ?
00:26 - Non seulement je la comprends et je la soutiens parce qu'il faut beaucoup de courage pour faire ces 650 km avec un objectif assez simple.
00:34 Il nous le disait ce matin sur votre radio, il n'était pas là pour aller se plaindre, il était là pour aller défendre un certain nombre de dossiers de sa commune
00:42 pour lequel il n'a soit pas de réponse, soit des réponses contradictoires.
00:45 Alors il est un petit peu l'étendard si je puis dire des maires de Gironde parce que bien d'autres ne veulent pas ou ne peuvent pas faire cette marche
00:54 mais ils comptent beaucoup sur lui pour faire avancer un certain nombre de dossiers.
00:56 - Alors évidemment ça intervient dans un contexte assez particulier, la démission du maire de Saint-Brévin qui lui a été victime d'insultes, de menaces, de l'incendie de sa maison.
01:04 Il y a aussi eu la maire de Sénac pour parler d'une maire girondine dans l'entre-deux-mères qui a donc renvoyé son écharpe tricolore au président.
01:11 Il y a un mal-être on peut dire ça chez les maires girondins, chez les maires globalement mais chez les maires girondins spécifiquement ?
01:16 - Un mal-être oui, enfin disons des incompréhensions.
01:20 Là on a deux sujets totalement différents, il y a le sujet de la violence, verbale, psychologique, physique vis-à-vis de certains maires
01:26 et puis il y a le fait de ne plus être compris et surtout pour des communes plutôt petites ou moyennes
01:32 qui n'ont pas comme les grandes communes des services ou des relais ou des possibilités de se faire entendre.
01:37 Je peux vous prendre un exemple assez simple, il y a quelques années on nous enlève les cartes d'identité et les passeports
01:43 et maintenant finalement on fait quasiment du porte-à-porte aux mairies pour nous redonner les cartes d'identité et les passeports.
01:48 Donc les maires ne comprennent plus, en plus ce mandat est particulier, il a commencé dans des conditions extrêmement difficiles,
01:54 confinement, peu de raisons budgétaires de pouvoir faire des choses
02:00 et puis surtout d'une manière assez générale une grande crise de l'autorité.
02:05 - Comme la maire de Sénac dans son courrier à Emmanuel Macron vous déplorez aussi cette peut-être déconnexion
02:10 entre les élus de terrain, les élus locaux et le sommet de l'État ?
02:13 - Oui, je crois que c'est une vérité que l'on constate tous les jours.
02:18 Lorsqu'il y a un drame dans sa famille, lorsqu'il y a un drame dans la commune, vers qui on va se tourner en premier ?
02:24 C'est vers le maire et plus la commune est petite, plus le maire est démuni face à toutes ces difficultés qui lui sont remontées
02:30 et finalement comme on ne lui a pas donné de baguette magique lorsqu'il a été élu, il a une écharpe de maire
02:34 mais il n'a pas de baguette magique, il a du mal bien souvent à répondre
02:37 il faudrait justement que lorsque le maire appelle les services de l'État ou même plus haut, on puisse au moins avoir une réponse.
02:44 Combien de maires me disent "j'ai écrit au ministre, j'attends toujours sa réponse" ?
02:47 - Mais France Bleu Gironde, 7h48, Christophe Duprat, maire de Saint-Aubin-de-Médoc et trésorier de l'association des maires de Gironde est notre invité.
02:54 - Vous le disiez, il y a deux sujets, il y a ce sujet de cette déconnexion et il y a le sujet de la violence.
02:58 Est-ce que cette violence, qu'elle soit verbale, physique, morale, elle fait partie du quotidien des maires aujourd'hui ?
03:04 - Elle fait partie mais elle ne devrait pas faire partie.
03:07 Depuis la fin du confinement, on constate, même si c'était quelque chose qui s'était sans doute engagé avant
03:13 mais qui a pris plus d'ampleur, une véritable crise de l'autorité.
03:16 Et dans de grands nombres de territoires, le maire est le dernier défenseur de l'autorité.
03:20 Parce qu'il n'y a pas de brigade de gendarmerie, parce qu'il n'y a pas de police municipale, parce qu'il n'y a pas de garde-champêtre,
03:24 parce qu'il n'y a rien, c'est lui qui aujourd'hui est là pour faire respecter les règles
03:28 dont on lui a expliqué qu'il était le représentant de l'État et qu'il c'était à lui de les faire respecter.
03:32 Et aujourd'hui, pour un simple stationnement, dire à quelqu'un "vous êtes mal garé", ça part de suite dans les proportions.
03:38 Donc il faut vivre avec, mais surtout se former.
03:41 Et c'est ce que nous avons fait avec l'Association des maires de la Gironde et la gendarmerie,
03:45 en faisant des séances de formation, comment justement lâcher prise pour ne pas aller jusqu'au conflit violent,
03:52 si je puis dire qu'il soit verbal ou qu'il soit physique.
03:55 Donc il faut aussi apprendre à prendre sur soi tout en faisant respecter la loi, parce que la loi, c'est la loi.
04:00 Mais aujourd'hui, cette crise d'autorité ne se retrouve pas qu'avec les maires,
04:03 elle se retrouve dans les associations, elle se retrouve d'une manière générale dans des manifestations,
04:08 elle se retrouve dans beaucoup de domaines, et c'est peut-être là que l'aide devrait venir au niveau de l'État.
04:13 Il faut que l'autorité soit restaurée en France.
04:15 - Et vous-même, vous êtes élu, vous êtes maire de Saint-Aubin-de-Médoc,
04:18 vous avez été victime de ce genre de violences, d'attaques ?
04:21 - En verbal et physique, oui, bien sûr, physique, avec un couteau devant le ventre,
04:24 c'est jamais très agréable avec mon premier adjoint, parce qu'on disait simplement que certains jeunes faisaient trop de bruit.
04:29 Bon, l'affaire a été jugée, ils ont été condamnés, mais l'exemple le plus fable, en quelques semaines,
04:34 c'est que quelqu'un garait devant l'école, sur un passage protégé, pour descendre son enfant,
04:39 j'ai le malheur de lui dire qu'est-ce qu'il fait n'était pas bien,
04:41 et à un moment donné, il a fallu que j'arrête de discuter, parce que non seulement il ne comprenait pas,
04:45 en fait, il ne voulait pas comprendre, mais parce que de quoi je me mêlais d'aller lui changer sa vie d'aujourd'hui,
04:51 alors que le lendemain, ça aurait peut-être été lui qui me serait demandé pourquoi cette voiture est garée là.
04:56 - Il y a quelques jours, le gouvernement a lancé un centre d'analyse et de lutte contre les violences faites aux élus,
05:02 un nouvel observatoire, donc est-ce que c'est une bonne initiative, selon vous ?
05:06 - Toutes les initiatives sont bonnes, mais je pense que celui, à mon sens, qui est le plus à même aujourd'hui
05:11 de tâter le terrain et de savoir ce qui se passe, c'est le préfet, ou la préfète, peu importe, les sous-préfets,
05:18 c'est eux qui sont au contact le plus, donc c'est par eux que devraient remonter toutes ces informations,
05:24 et c'est à eux, plusieurs présidents de la République ont souvent parlé du couple maire-préfet.
05:29 Il faut le restaurer ce couple, il faut qu'ils travaillent davantage ensemble.
05:32 Nous ici en Gironde, l'association des maires et le nouveau préfet, comme c'était avec l'ancienne préfète,
05:38 d'ailleurs, nous avons des rendez-vous réguliers pour justement faire le point.
05:41 Eux, ils ont l'instantanée des réactions des maires.
05:46 Alors, un observatoire, pourquoi pas, mais je crois qu'il faut que les maires apprennent une chose,
05:51 c'est que maintenant, on ne peut pas être maire par hasard, qu'il faut se former,
05:55 qu'il faut accepter, à un moment donné, de ne pas être capable de tout faire.
05:59 Et ça, c'est difficile parce que les gens nous en demandent beaucoup.
06:01 - Et c'est le seul moyen d'endiguer ces démissions d'élus ? On en entend beaucoup parler,
06:05 je ne sais pas s'il y en a beaucoup en Gironde, des maires qui jettent l'éponge ?
06:08 - Alors, des maires qui jettent l'éponge, oui, enfin, il y a eu 23 élections partielles en Gironde
06:13 depuis le début du mandat, ce qui est inédit.
06:16 Plus de 1000 maires en France qui ont démissionné, c'est inédit aussi.
06:20 Et alors, je ne parle pas de tous les conseillers municipaux qui arrêtent.
06:23 Encore une fois, ce mandat est très particulier, il demande sans doute beaucoup plus.
06:28 Les maires plus anciens comme moi ont connu des périodes plus agréables,
06:31 ce qui nous permet de repenser à ce qui était bien pour accepter ce qui est moins bien aujourd'hui.
06:36 Mais encore une fois, se former et bien comprendre, et faire comprendre au service de l'État,
06:40 faire comprendre aux ministres, faire comprendre au Président de la République
06:44 qu'être maire, c'est devenu un métier.
06:46 - Merci beaucoup, Christophe Duprat, maire de Saint-Aubin-de-Médoc,
06:49 et donc trésorier de l'Association des maires de Gironde d'avoir été avec nous aujourd'hui.
06:52 - Bonne journée, merci.
06:53 - Et vous retrouvez cette interview également sur francebleu.fr

Recommandations