A la découverte de la dot en pays Wê (Escale 225)

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Transcript
00:00 Il est 22h45 au quartier Millionnaire à Divo, au sud-ouest du pays.
00:05 C'est au pas de danse que les femmes de la famille Magnan font leur entrée au domicile de Jean-Claude Beyo,
00:12 futur mari de leur sœur, Pascaline Magnan.
00:15 Elles sont venues se conformer à une tradition des Wénors, originaires de Fakobli et de Kouibli, à la veille de la dote.
00:23 La gente féminine de la famille de la Dulcine rend visite à celle du futur gendre pour des échanges fraternels.
00:30 On est venus saluer nos beaux-parents.
00:33 Chez nous, au pays ouest, c'est comme ça que ça se passe.
00:36 On vient, les belles-sœurs, les petits-enfants, tout le monde vient.
00:40 Et puis on s'assoit, on cause, on rit ensemble.
00:43 On fait la biense ensemble. On prépare. On s'en va dans la cuisine comme ça.
00:47 Après les civilités effectuées dans la gaieté, la délégation s'empare de la cuisine et se met à la tâche.
00:53 Une façon de démontrer le savoir-faire de la famille Magnan à la famille Hotte.
00:58 C'est pour dire à la belle-famille qu'on s'occupe bien de notre homme, de notre mari.
01:04 Et surtout pour leur prouver aussi que c'est elles qui vont prendre de main.
01:08 Elles cuisinent, elles connaissent, elles se préparent et elles ont tout fait.
01:12 De l'autre côté de la cour, les plus jeunes ne veulent pas rester en marge de ce moment inoubliable pour les deux tourtereaux.
01:19 Demain, c'est son mariage, sa daute. On a décidé, les jeunes du quartier, faire un ballet pour lui faire plaisir.
01:28 La nuit a été longue pour tous ces acteurs.
01:31 Le lendemain matin, ce sont deux hôtesses traditionnelles, ou porcs, en langue Wénor,
01:38 qui accueillent parents, amis et alliés chez le chef de la famille Magnan au quartier Dugaco, toujours à Divo.
01:45 C'est cette ambiance qui accueille l'hôte privilégié du jour et ses parents.
01:57 Ces derniers, aussitôt installés dans la maison, les présents font leur entrée.
02:03 Y compris un élément important, sans lequel la daute n'a pas sa raison d'être, le bangui, ou vin de palme.
02:11 Le pour-main, c'est du bangui. Ça crée l'union entre les deux familles,
02:14 parce que nous utilisons le bangui entre deux familles pour qu'on arrive à faire des bénédictions et à échanger, à se connaître mieux.
02:21 Une fois les visiteurs installés face aux futurs beaux-parents, les porte-paroles ou médiateurs des deux parties se lèvent et procèdent aux civilités.
02:30 Ce sont généralement des neveux. Ils portent la nouvelle à la partie adverse et font le point au sien à chaque réaction.
02:37 Cette étape-là marque le début de la cérémonie. Les deux familles sont en train de se donner les nouvelles.
02:43 Et la famille du prétendant donne les nouvelles, pourquoi est-ce que nous sommes là.
02:48 Cette volonté de doter ici intervient trois décennies après la rencontre de ces amoureux.
02:54 Ils vivaient en couple sans avoir franchi les étapes du mariage admises en pays ou en nord.
02:59 Et c'est ce temps de latence sur lequel le porte-parole du prétendant n'arrive pas à se prononcer qui amène toute l'assistance à rire aux éclats.
03:08 Pire encore, pour l'Egbeyo, la famille du prétendant. Un enfant a été engendré en cachette pendant ses 30 ans.
03:21 Chose qui nécessite une réparation envers la probable belle-famille.
03:26 Normalement en pays où est, quand vous cherchez une femme, il faut venir faire coco-coco.
03:31 Le coco c'est pourquoi on ouvre la porte pour rentrer. Là comme ça désormais on sait avec quel homme les filles passent le temps.
03:39 En plus du coco, il faut encore demander pardon parce qu'il est en commun du putor.
03:44 C'est pourquoi on envoie les deux boissons plus la somme de 40 000.
03:48 La somme qu'on envoie, ce n'est pas une somme exigée. C'est en fonction du respect qu'on a pour les beaux-parents.
03:55 Il a dit les beaux, le respect que nous avons pour les beaux. Non, il n'y a pas encore beau.
04:01 Parce que s'il y avait beau, c'est que les étapes anterieures avaient déjà été franchies.
04:06 Mais il vient et puis il dit les beaux. Non, il faut qu'on rectifie. C'est le futur beau. Donc les probables beaux.
04:13 Oui, on peut refuser.
04:16 Après la réparation des fautes, le neveu présente les présents, symbole de la matérialisation de la volonté de prendre pour épouse, Pascaline, fille de la famille Magnan, selon la coutume Wénor.
04:29 Le bangui qui symbolise la fraternité, le partage et le consensus.
04:34 10 boubous et des numéraires pour l'achat de 10 autres boubous.
04:38 Des liqueurs, de la bière, 150 000 francs CFA pour le flou. L'argent remis par la famille Dujambre, représentant la dote.
04:47 Le père, la mère ainsi que les sœurs reçoivent des pagnes et de l'argent pour la couture.
04:53 C'est la tradition. Avec ces pagnes, je sens qu'on m'aime et je sens qu'on aime ma petite sœur aussi.
04:58 Pendant ce temps, Pascaline Magnan est terrée dans une chambre. Il est interdit au prétendant Jean-Claude Beyo de la voir.
05:06 Elle est optimiste malgré la longueur des tractations.
05:09 J'ai été nourrie de promesses, de patience, de persévérance. Je sais que Dieu fait tout en son temps.
05:14 Savez-vous que les parents peuvent vous refuser ?
05:16 Les parents ? Les miens ? Oui, mais c'est tout à fait normal.
05:22 Voir sa fille passer près de 30 ans auprès d'un homme sans être dotée, c'est tout à fait normal.
05:30 Mais c'est à la fois pour rassurer ses parents pour dire que je sais en qui j'ai cru, je sais en qui j'ai mis ma confiance, je sais qu'il ne va pas vous décevoir.
05:39 C'est en ce moment que débarquent des troubles faites sur le lieu de la cérémonie, des cénuffaux, le jeu des porcs.
05:46 Les hôtesses n'arrivent pas à freiner leur ardeur. L'un d'entre eux dépose une pièce de 5 francs pour mettre fin à la cérémonie.
05:57 La pièce de 5 francs représente un acte symbolique chez nous. Il n'y a pas fait le palme pour envoyer, sinon il y aurait complété.
06:04 Depuis la cérémonie du, ça me coupait la cérémonie que je suis venu pour dire vous avez trop duré, si vous voulez pas de l'enfant, n'en reprends pour aller chez nous.
06:11 Nous sommes venus leur montrer la suprématie du cénuffaux.
06:15 Nous sommes venus leur montrer que sans le cénuffaux, ce mariage-là n'aura pas de valeur.
06:19 Passée cette tempête, les magnans demandent à connaître leur futur gendre et ses géniteurs.
06:25 Les hôtes demandent à leur tour de voir la mère de leur petit enfant, celle pour qui tous ces cadeaux sont offerts.
06:32 Une occasion pour Pascaline de retrouver les siens et le père de son enfant.
06:37 Mais à ce stade encore, rien n'est évident pour le prétendant qui doit d'abord reconnaître sa dulcinée.
06:43 Trois filles sont successivement refoulées par Jean-Claude.
06:48 - Vas-y, vas-y, vas-y.
06:51 - Vas-y, va, chérie.
06:53 - C'est pas elle, c'est pas elle, c'est pas elle.
06:56 - Vas-y, vas-y, vas-y.
06:59 - Je dis que ce n'est pas ma femme parce que quand tu vis avec quelqu'un, tu connais sa morphologie, tu sais comment la personne est déjà.
07:08 Donc, premier coup d'œil, automatiquement, il y a un pressentiment du fait que c'est pas elle.
07:14 - Je paye son transport, parce que j'ai payé son transport pour venir. Donc, même si je refuse, je dois payer son transport et tout.
07:21 C'est la joie totale quand la désirée est enfin découverte.
07:27 Elle rejoint aussitôt ses parents.
07:29 Tout ce que son conjoint Jean-Claude a apporté afin de la prendre pour épouse, lui est présenté.
07:35 C'est son accord qui met fin à toute spéculation.
07:39 - Chez nous, les parents du marié peuvent envoyer même des millions.
07:45 Mais tant que celle qui est concernée n'a pas donné son accord, vous, les parents de la mariée, vous ne pouvez pas accepter.
07:53 C'est cette question-là que je lui ai posée.
07:55 Je lui ai dit, bon, voilà ce que tes futurs beaux-parents nous ont présenté. Faut-il les accepter ou pas ?
08:02 Donc, elle a donné son accord.
08:04 Pascaline est consentante. C'est la joie dans tous les camps. On peut à présent procéder à l'alibation, au partage du bangui, puis à la bénédiction.
08:13 Par la suite, l'oncle Magnan va remettre sa fille à celui qui est désormais reconnu comme un gendre de la famille.
08:20 - Une fois que quelqu'un vient demander la main de ta fille et que symboliquement, il donne tout, c'est donc que vous venez de voir.
08:29 C'est le père maintenant qui est chargé d'aller remettre la fille au papa du prétendant. Et c'est ce que j'ai fait.
08:40 Cette union est scellée sous le regard vigilant des autorités coutumières.
08:46 - Sans la dot, en pays où est, il ne peut pas avoir de mariage civil. L'Eglise reconnaît ça d'abord.
08:53 Si c'est non, ça devient dol. S'il n'a pas fait la dot, avant l'enterrement, il doit la doter.
08:59 Tant qu'elle n'a pas été dotée, elle ne peut pas être mise en thèse. Ce n'est pas possible.
09:02 Après le domicile d'Emmanuel, Cap-Aimé sur le centre culturel d'Ougakko, où les jeunes gens qui se préparaient pour faire plaisir aux mariés, ont confirmé leur présence.
09:16 Aujourd'hui, la dot n'est plus interdite en Côte d'Ivoire. Elle a été conservée par les populations malgré son interdiction par une loi en vigueur jusqu'à l'an dernier.
09:27 Elle est actuellement plus embellie, plus rehaussée que le mariage civil.
09:32 A l'image de ce couple, la tendance est au retour aux valeurs culturelles qui permettent de mieux percevoir l'identité d'un peuple composant la Côte d'Ivoire.
09:41 La dot valorise la femme auprès des siens et de sa communauté.
09:46 Certains plaident même pour des documents y afférents. Des documents qui lui accorderont une reconnaissance légale.
09:54 (Cris de joie)

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