PORTRAITS D'AMERS INDIENS / Kali'na / Awala Yalimapo / Guyane

  • l’année dernière
A la rencontre de la communauté Kali'na Tilewuyu,
des villages de Awala et Yalimapo,
en Guyane Française.
Documentaire inédit de Lionel Baillemont.
© 2017.

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Transcript
00:00 C'est ce que j'ai fait.
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01:06 Alors derrière nous, nous avons donc
01:16 on va dire le drapeau de
01:20 Dawala Yali Mappo
01:22 qui a été officiellement présenté en décembre 2004
01:24 ici même à Dawala Yali Mappo
01:26 c'est le résultat
01:28 d'un long travail
01:30 entre les différents acteurs
01:32 à savoir les anciens de la commune
01:34 les jeunes également
01:36 et bien sûr d'autres
01:38 le reste des acteurs
01:40 politiques
01:42 selon les anciens
01:44 on peut lire
01:46 on peut avoir une lecture
01:48 à partir
01:50 de la phrase
01:52 "Dawala Yali Mappo
01:54 Kusali
01:56 Ekunalu Ukupomalo"
01:58 la lecture de l'emblème
02:00 Dawala Yali Mappo
02:02 avec en termes de traduction littérale
02:04 le genou de la biche
02:06 et on voit bien que
02:08 initialement
02:10 originellement on a
02:12 effectivement cette forme là
02:14 qui pour nous représente
02:16 l'os de la biche
02:18 et qui est un dessin
02:20 à part. Le cercle est
02:22 venu après. C'est la touche
02:24 de la modernité. C'est la touche du design
02:26 de la beauté, de l'esthétique
02:28 de l'esthétique qui est venue
02:30 mais originellement on a que le logo
02:32 donc vous pourrez retrouver
02:34 ce motif là, ce dessin là
02:36 cette représentation physique
02:38 sur différents supports. Ca peut être
02:40 sur une calbasse, ça peut être sur
02:42 sur de la poterie
02:44 ça peut même être
02:46 utilisé au niveau de la vannerie
02:48 etc.
02:50 Vous avez bien sûr "Awala"
02:52 qui est un nom kalinya
02:54 qui signifie, qui est le nom kalinya du
02:56 fruit "Awara"
02:58 qui sert en Guyane
03:00 effectivement, qui est l'élément
03:02 primordial pour la fabrication
03:04 de
03:06 du fameux bouillon d'Awara
03:08 Yali Mappo
03:10 également qui était le nom d'un chef
03:12 du village de
03:14 de Yali Mappo
03:16 Déjà dans le
03:18 ce qu'on appelle dans
03:20 l'auto-identification
03:22 l'auto-dénomination, nous nous appelons
03:24 Kalinya et dans Kalinya
03:26 il y a deux concepts, c'est le "K" donc
03:28 qui indique
03:30 le ciel, les cieux
03:32 et le "Nya" c'est la main quoi
03:34 donc c'est, nous sommes
03:36 façonnés par
03:38 la main du ciel pour être
03:40 homme quoi, ce que nous sommes aujourd'hui
03:42 D'accord
03:44 Tu voulais ajouter quelque chose?
03:46 Non, c'est que le mot Kalinya
03:48 est quand même utilisé sur
03:50 sur pratiquement 5 pays
03:52 différents, au Brésil
03:54 ici en Guyane
03:56 au Surinam
03:58 vers le Guyanais et vers la frontière
04:00 du Vénézuelain et notamment sur
04:02 l'île de la Dominique, le Kalinyangon
04:04 donc c'est un terme qui
04:06 nous unit le mot Kalinya
04:08 Il y a 6 communautés améritaines
04:10 en Guyane, d'autres
04:12 vont employer le terme 6
04:14 peuples autochtones, d'autres encore
04:16 vont utiliser le terme
04:18 6 nations autochtones, moi
04:20 le terme que j'emploie au jour d'aujourd'hui
04:22 c'est
04:24 6 communautés amérindiennes de Guyane
04:26 avec leur terme
04:28 d'auto-identification au jour d'aujourd'hui
04:30 pas les termes utilisés par les
04:32 voyageurs, explorateurs ou
04:34 autres missionnaires pour nous
04:36 identifier, mais les termes d'auto-identification
04:38 ça nous donne concrètement
04:40 Kalinya, Lokono,
04:42 Paikwene, Teko,
04:44 Wayana, Wayompi, on revient
04:46 Kalinya ou Galibi
04:48 certains auront plus ces Teko là
04:50 Galibi, Lokono ou
04:52 Arawak, Paikwene ou
04:54 Paliku, Teko
04:56 ou Emerio
04:58 Wayana est
05:00 toujours resté Wayana, Wayompi
05:02 est toujours resté Wayompi
05:04 La langue Kalinya, enfin
05:06 comment je pourrais la définir
05:08 c'est que par
05:10 exemple il n'y a pas de
05:12 il n'y a pas d'article, il n'y a pas de genre
05:14 il n'y a pas le, la, c'est pour ça
05:16 on peut rencontrer des enfants qui parlent
05:18 Kalinya et quand ils vont à l'école
05:20 tout est au masculin
05:22 vous voyez
05:24 le voiture
05:26 le fleur, voilà
05:28 il n'y a pas de genre
05:30 et puis un autre phénomène, par exemple
05:32 lorsqu'il y a une appartenance, quand vous êtes en français
05:34 vous avez le mot par exemple
05:36 panier, vous avez le
05:38 panier et vous dites mon
05:40 panier, quand il y a
05:42 ça appartient à quelqu'un, mon panier
05:44 le mot panier reste
05:46 dans notre langue par exemple le mot
05:48 panier, hot, la hot c'est Kulu Kulu
05:50 dès lors qu'on met
05:52 la possession
05:54 c'est Uemu, voyez le mot Kulu Kulu
05:56 disparaît, Uemu veut dire mon
05:58 mon panier
06:00 et Kulu Kulu veut dire panier
06:02 voyez, donc c'est ce phénomène
06:04 qui sent en communique un petit peu
06:06 dans la langue
06:08 donc dès qu'il y a une possession
06:10 d'un objet
06:12 domestique ou animal
06:14 le mot
06:16 initial disparaît
06:18 magique
06:20 c'est pas une langue si facile, c'est pour ça qu'il est important
06:22 de l'apprendre bien
06:24 plus tôt, même à l'école
06:26 parce que là aujourd'hui on a
06:28 le politicien
06:30 l'éducation nationale
06:32 il y en a qui se battent pour que les enfants rentrent à l'école
06:34 à l'âge de 2 ans
06:36 d'autres que, j'ai vu
06:38 les nouveaux programmes de
06:40 M. Hamon, il veut qu'ils rentrent
06:42 à l'âge de 3 ans obligatoire
06:44 pour certains ils sont d'accord mais pour nous c'est un danger
06:46 parce que l'enfant n'est pas encore structuré dans sa langue
06:48 jusqu'à l'âge de
06:50 2 ans, 3 ans
06:52 donc on va le baigner dans une école française
06:54 directement
06:56 et très peu de temps, il va passer très peu de temps
06:58 dans la famille à parler Kaliya
07:00 donc ce qui fait, voilà, l'enfant ne peut pas se structurer
07:02 en 2 ans dans sa propre langue
07:04 quand je parle
07:06 avec un jeune c'est un petit peu différent
07:08 mais il faut garder cet aspect de
07:10 respect, quand il est plus jeune que moi
07:12 des fois je dis "Koki"
07:14 c'est un terme de respect, ils me disent "Yaya"
07:16 ce qui veut dire grand frère, moi "Koki"
07:18 qui veut dire petit frère, même si c'est pas de la même
07:20 famille, mais voilà, il sait que je suis plus
07:22 grand et moi si je parle à un grand-père je veux dire
07:24 "Touchi" grand-père, ou bien
07:26 si c'est vraiment un ancien, je dirais
07:28 "Tamouchi" plus grand
07:30 enfin voilà, vous voyez
07:32 et puis
07:34 la manière de parler aussi, c'est à dire que
07:36 quand on parle à un adulte, à un chef
07:38 coutumier ou à un chaman, on
07:40 ne le tutoie pas, on le vouvoie
07:42 et lui, même si
07:44 vous êtes jeune
07:46 vous avez 20 ans, il vous vouvoie aussi
07:48 et la conjugaison est différente
07:50 Par exemple, mon prénom c'est
07:52 Olivier, et quand j'ai fait des recherches
07:54 même ma famille s'appelle Auguste
07:56 et je pense qu'on était avec
07:58 Panaki, on voulait changer de nom
08:00 on voulait vraiment porter notre
08:02 nom de famille
08:04 ancestrale
08:06 et changer de nom, tout simplement
08:08 de prénom
08:10 et puis c'est vrai que c'est difficile
08:12 à ce moment là que ça devient difficile
08:14 parce que moi j'ai rencontré des gens qui
08:16 travaillaient au tribunal de Cayenne
08:18 et ils m'ont dit "il faut tout refaire"
08:20 et j'ai dit "ouh là là"
08:22 et quand j'ai eu
08:24 mes enfants, je leur ai donné
08:26 des prénoms amérindiens
08:28 comme ça, voilà
08:30 je sais que je suis un peu déçu parce que
08:32 c'est un homme blanc qui m'a donné ce prénom là
08:34 à ma mère, qui ne comprenait pas le français
08:36 et il a automatiquement dit "ok"
08:38 "il n'y a pas de problème"
08:40 et du coup il est resté Olivier
08:42 et maintenant je revendique devant tout le monde
08:44 je pense que Panaki le connait
08:46 et voilà
08:48 le prénom qu'on m'avait donné quand
08:50 j'étais môme, quand j'étais gamin
08:52 quand j'étais encore bébé
08:54 le processus d'assimilation
08:56 c'était l'école, l'instauration
08:58 l'imposition aux enfants
09:00 canadiens
09:02 du processus
09:04 d'apprentissage du français
09:06 tout simplement
09:08 mais en fréquentant
09:10 en allant sur les bancs
09:12 de l'école du système
09:14 éducatif français
09:16 forcément c'est
09:18 tout le patrimoine culturel
09:20 historique
09:22 du monde canadien
09:24 de l'art de vivre canadien
09:26 qui était occulté
09:28 c'est ça aussi
09:30 on vous donne ces éléments là
09:32 mais au détriment
09:34 des éléments fondamentaux
09:36 qui constituent votre système de pensée
09:38 votre art de vivre
09:40 et comme la France
09:42 a "imposé"
09:44 la citoyenneté
09:46 la nationalité française aux communautés amérindiennes
09:48 de ce fait, elle s'est peut-être
09:50 dit "je me dois
09:52 aussi
09:54 d'étendre ce dispositif
09:56 d'argent et de
09:58 social vers la Guyane, vers les
10:00 communautés amérindiennes" et effectivement
10:02 on peut parler, ça a bouleversé
10:04 beaucoup la vie dans
10:06 certains villages, notamment très reculés
10:08 nous, nous sommes sur le littoral
10:10 mais imaginez les communautés
10:12 amérindiennes qui vivaient dans l'intérieur
10:14 et qui continuent à vivre
10:16 dans l'intérieur de la Guyane, cela ne signifie
10:18 pas que ces communautés là n'avaient pas
10:20 de besoin
10:22 qui représentait très certainement
10:24 un coût, un montant
10:26 en termes d'argent
10:28 mais
10:30 peut-être qu'elles n'avaient pas besoin
10:32 à cette période là, de se
10:34 balader avec des
10:36 billets dans leur portefeuille peut-être
10:38 c'est pour ça
10:40 au niveau d'Awalayal-Imapo
10:42 nous essayons de sortir de ce
10:44 carcan
10:46 par lequel on nous qualifie de communes
10:48 amérindiennes, or dans le droit français il n'existe
10:50 pas de communes amérindiennes, alors s'il existe
10:52 des communes amérindiennes en Guyane, il faut qu'il
10:54 existe, qu'on dise aussi, qu'on ait le courage
10:56 de dire qu'il existe des communes
10:58 bouchénéguées ou des communes créoles
11:00 en Guyane, or non, nous
11:02 au niveau d'Awalayal-Imapo, je pense que
11:04 la très grande majorité des acteurs de premier
11:06 plan sont d'accord pour dire
11:08 que nous ne nous inscrivons pas
11:10 dans une logique de communes amérindiennes
11:12 pas du tout, par contre on dit que
11:14 effectivement Awalayal-Imapo est un territoire
11:16 18 740 hectares
11:18 environ 1500 personnes y vivent
11:20 et la très grande majorité
11:22 des habitants d'Awalayal-Imapo sont
11:24 Kaliniens et pour le moment sont encore Kaliniaphones
11:26 pendant combien de temps encore ? Parce qu'on peut se définir
11:28 on peut se définir
11:30 comme Kaliniens et ne pas
11:32 être Kaliniaphones, j'entends par Kaliniaphones
11:34 celui qui ne parle pas la langue Kaliniens
11:36 ou qui ne comprend pas, qui ne l'écrit pas
11:38 Le système
11:40 Le système, parce que c'est un système
11:42 Le système
11:44 vient vous
11:46 épuiser, vous épuise
11:48 dans le temps
11:50 et part avec les richesses
11:52 de votre territoire, par exemple
11:54 aux Etats-Unis d'Amérique c'était la politique
11:56 des réserves
11:58 en Amérique du Sud
12:00 en Amérique du Sud
12:02 c'était
12:04 s'accaparer des richesses
12:06 des richesses du territoire
12:08 là où vivaient les communautés
12:10 amérindiennes
12:12 donc on voit bien
12:14 les valeurs, les concepts, la démarche
12:16 qui anime
12:18 ces gens
12:20 qui font partie de ce système
12:22 Allo
12:28 Oui, oui
12:30 je suis en pleine interview là
12:32 oui, oui, j'ai dérangé
12:34 la caméra, tu vois, j'ai répondu
12:36 Ah, pardon
12:38 Putain
12:40 Putain
12:42 Putain
12:44 Putain
12:46 ...
12:56 ...
13:06 ...
13:16 ...
13:30 ...
13:40 ...
13:48 - On dit que le battement du tambour pourrait correspondre au mouvement du cœur,
13:53 comme si c'était quelque chose de profond.
13:55 - Oui, oui.
13:57 Parce que moi, quand je le tape, je le sens dans mon cœur.
14:01 C'est pour ça qu'une fois qu'il rentre dans le cœur,
14:05 et une fois qu'on se lâche,
14:07 c'est comme si il y avait un esprit qui vient
14:12 pour qu'on puisse chanter plus fort,
14:14 et que les gens puissent danser,
14:16 et que les gens puissent danser vivants,
14:18 et que ça donne un très beau sonnerie.
14:21 - Par rapport à ce que j'ai vu chez mon beau-père,
14:24 c'est Walé Bach, qui est le leader focal.
14:26 Quand il chante une chanson,
14:28 même si ça peut être dans une coupée d'œil,
14:30 soit un truc traditionnel,
14:32 il pleure.
14:33 Parce que là, tu vois que les chansons qu'il chante,
14:36 ça vient pas seulement dans sa bouche,
14:39 mais ça vient carrément...
14:41 ça vient de loin.
14:42 Et là, quand il tape et il chante, et il pleure,
14:46 ça veut dire qu'il chante avec tout son cœur,
14:48 ça veut dire quelque chose.
14:50 Et j'ai remarqué ça beaucoup de fois quand on chantait de trois côtés,
14:53 on a chanté beaucoup de fois,
14:54 et là, je croyais mon beau-père.
14:56 Le truc des chamans, et quand on montre ça sur la télé,
14:59 pour moi, je suis pas tellement d'accord avec ça.
15:02 Parce que c'est même pas pour les jeunes, déjà.
15:05 Ils ne savent pas comment un chaman fait.
15:08 Imagine qu'il y a un caméraman qui vient,
15:10 et puis il filme un chaman,
15:12 et comme si le caméraman défonce la population,
15:15 alors que même la famille des chamans
15:18 ne connaît pas comment les chamans vivent.
15:21 Pour moi, c'est ça.
15:23 Par contre, ça, je suis pas d'accord.
15:25 Si le chaman va rester dans son truc,
15:27 et à ce moment-là, il est plus fort,
15:29 mais s'il commence à montrer,
15:31 il a une faiblesse sur les chamans.
15:33 Parce que les chamans d'avant n'étaient pas comme ça.
15:35 Ils ne savaient pas, il n'y avait pas de gens autour.
15:37 Déjà, les femmes n'approchaient pas les chamans,
15:39 et aujourd'hui, si tu vois, les chamans sont dans la mode aussi.
15:43 Donc, ils n'ont pas la même force
15:46 que les anciens chamans qui sont là-bas.
15:48 Tu peux nous faire écouter celui-là, ou l'autre ?
15:51 [son de tambour]
15:53 Ça, c'est le bruit.
15:55 [son de tambour]
15:57 [son de tambour]
16:25 Tu m'as parlé d'un clip, carrément, vous avez enregistré un clip.
16:27 Oui, bien sûr, et là, tout le monde peut voir ça,
16:29 même au Métropole, c'est YouTube.
16:31 Voilà, le clip est là.
16:33 Ah bon, je dois me montrer, alors.
16:35 Oui, c'est sur mon portable.
16:37 J'ai vraiment envie de regarder.
16:39 Merci.
16:41 [musique]
16:43 [musique]
16:45 [musique]
16:47 On est mois d'hier non, Jama Kondo
16:49 On est mois d'hier non, Jama Kondo
16:54 On est mois d'hier non, Jama Kondo
16:59 On est mois d'hier non, Jama Kondo
17:06 On est mois d'hier non, Jama Kondo
17:09 On est mois d'hier non, Jama Kondo
17:15 On est mois d'hier non, Jama Kondo
17:19 On est mois d'hier non, Jama Kondo
17:24 On est mois d'hier non, Jama Kondo
17:28 Aujourd'hui ça se fait, il y a des enregistrements, il y a pas mal de choses avec les outils modernes, le numérique tout ça
17:36 Mais je me rappelle qu'il y a quelques temps, effectivement moi j'avais un grand-père qui était chaman
17:42 Et je me disais comment justement enregistrer, me rappeler de ces chants
17:50 Et en fait il y a le côté spirituel qui m'a bloqué, puisque je ne pouvais pas enregistrer, je ne devais pas et je m'interdisais d'enregistrer
18:00 Aussi il y avait cet aspect là
18:02 Parce que c'est arrivé que des gens de l'extérieur, notamment des Européens, des Occitano qui sont venus
18:08 Enregistrer dans les années 60 dans des villages des chamanes qui étaient en train d'officier
18:14 Sans leur demander leur permission, et ces chants sont quand même des chants sacrés
18:19 Et je me disais aussi comment ça se fait que les grands chanteurs peuvent mémoriser plus de 80 chansons pendant les fêtes traditionnelles
18:27 Si ils y arrivent, moi je me suis dit que je pourrais y arriver sans enregistrer
18:31 Et voilà c'est ce que je m'étais dit, et la transmission, il y a des chants qui existent depuis plus de 200 ans pratiquement peut-être
18:36 Même plus de 100 ans, plus de 200 ans
18:39 Aujourd'hui on les chante encore dans les villes traditionnelles, dans les leveux de deuil
18:43 Donc voilà il y a cet aspect, pour moi c'est assez délicat, c'était délicat quand j'étais plus jeune, j'avais vraiment peur d'enregistrer
18:51 Et je ne l'ai jamais fait, et je me rappelle de quelques chants, peut-être pas de tout, mais de mon grand-père
18:59 J'ai deux grands-pères qui sont décédés, dont l'autre grand-père paternel qui était un grand chanteur de Samboula
19:03 Il m'a transmis les chants comme ça, et je me suis dit comment ils font pour mémoriser tout ça
19:09 Mais voilà, c'est en nous quoi
19:11 Vous avez le droit de nous en donner un petit aspect ?
19:14 Là je suis ensuite ?
19:15 Oui
19:16 Oui, oui c'est...
19:17 Avec plaisir, on vous écoute
19:19 [Chant en Samboula]
19:36 Ça c'est le chant de mon grand-père paternel par exemple
19:39 Mais si je devais présenter les chants traditionnels, je les présenterais à la population, à mes frères ailleurs
19:46 Mais je les chanterais pour eux, je ne les enregistrerais pas, je ne les ferais pas dans un studio
19:50 D'ailleurs ça ne s'enregistre pas dans un studio, c'est à l'extérieur, c'est l'ambiance du vent
19:56 Aujourd'hui on est en train de confiner tout ça au système un peu moderne, studio, le tambour à part, le maraca à part, mixer tout ça
20:04 Non, c'est pas ça le chant kalinian, c'est le chant de l'oiseau qui est juste derrière le tambour, le vent qui passe, c'est ça
20:10 C'est comme ça que c'est enregistré, les gens qui parlent autour, les gens qui rigolent, c'est ça le chant kalinian
20:15 Ça c'est un chant kalinian
20:17 Je pense que si nous parlons encore notre langue et que nous avons toujours notre propre synoblision
20:33 C'est que nous n'avons pas été évangélisés jusqu'à l'os
20:37 Heureusement, il n'y a pas de prêtre, d'évêque amérindien en Guyane
20:45 Même si, on a essayé de comprendre le langage violent du dissement de la Bible
20:57 En tout cas, la Bible telle qu'il faut la voir exactement, on ne regarde pas la parole du prêtre de dimanche
21:07 Il faut aller étudier la Bible, qu'est-ce qu'elle dit et combien de violence elle comporte
21:15 Et notamment, cette notion de développement qu'il y a dans la Bible, qui dit qu'il faut dominer tout le monde
21:26 Il faut dominer la nature et la soumettre
21:31 C'est ce mode de développement-là qui a fait les 500 ans de malheur à nos peuples
21:37 [Musique]
21:51 En fait, ce qui m'a marqué dans des époques passées, lorsque j'étais jeune encore
22:00 Dans le domaine de la culture, de l'entente, de la solidarité
22:07 C'est lorsque nos anciens allaient à la pêche
22:12 Et qu'ils disaient, lorsqu'ils revenaient de la pêche ou encore de la chasse
22:19 "Approchez, approchez"
22:23 On se servait, en fait, des poissons qui ont pêché
22:29 Et puis tous les habitants se rassemblaient au bord de la mer
22:34 Et ça, c'était inimaginable et c'était magnifique
22:41 Et de nos jours, on ne voit plus ce genre de gestes
22:45 Et ça, pour moi, c'était la solidarité
22:49 Lorsqu'on entendait un son du cangue du buffle
22:54 C'est que les pêcheurs revenaient du large
22:57 Lorsqu'ils soufflaient dans cette cangue de buffle
23:02 On pouvait dire qu'on les a attrapés beaucoup de poissons
23:05 Et tout le monde venait déjà avec leurs bassines et tout
23:08 Sur la plage, ils les attendaient
23:10 Et le partage se faisait d'une manière très conviviale
23:16 Et le mode de repas aussi, c'est ce qu'on appelle maintenant le "alep"
23:22 "Alep" était un repas familial
23:27 C'est-à-dire que tous les clans venaient manger au même endroit
23:30 Et tout le monde apportait son repas, sa cassave, pour pouvoir manger ensemble
23:36 Et cela ne existe plus
23:38 C'était vraiment le communautarisme
23:40 Maintenant, ce communautarisme ne existe plus
23:45 C'est très simple, sauf pour la pêche, oui
23:47 Pour le manioc aussi
23:49 Quand ma grand-mère et ma mère, mes tantes
23:54 Faisaient la galette ou le jus de manioc
23:58 On partageait, mais pas comme famille
24:01 Mais la voisine d'à côté, la grand-mère qui est veuve
24:05 Aujourd'hui, on ne vend pas ça
24:08 Tout est vendu
24:10 Quand il y a une pêche, on ne donne plus rien, gratuitement
24:16 J'ai oublié de demander à votre fils
24:26 Pourquoi vous vous appelez Apollinaire ?
24:29 Est-ce que vous savez pourquoi ? Qui vous a donné ce nom ?
24:32 Apollinaire, c'était le nom de votre mari ?
24:36 Oui
24:37 Et il savait qui lui avait donné ce nom ?
24:40 Parce que en calignan, ça n'existe pas
24:43 Apollinaire, c'est un nom qui vient de la métropole
24:47 Oui
24:48 C'était quoi le vrai nom de votre mari ?
24:51 Le vrai nom calignan ?
24:53 Oui
24:54 Il connaît
24:57 Et vous, le vôtre, c'est quoi alors ?
24:59 Moi ?
25:01 Le nom calignan ?
25:04 Oui
25:05 Vous cherchez ?
25:06 Vous n'en rappelez plus ?
25:07 Non
25:08 Votre fils m'a dit que vous n'aimiez pas les chiens
25:15 Non, non, non
25:17 J'aime pas les chiens
25:19 Et que vous les chassez à coups de bâton
25:21 Oui
25:23 Je suis...
25:25 Je suis...
25:27 Je suis...
25:29 Je suis...
25:31 Je suis...
25:32 [Musique]
25:37 [Musique]
25:45 [Musique]
25:53 [Musique]
26:04 [Musique]
26:24 Donc vous me disiez que vous aviez été en voyage en France métropolitaine.
26:30 Oui, oui.
26:31 C'était il y a combien de temps ?
26:32 Ça faisait déjà longtemps, jusqu'à ce que ma fille meurte.
26:36 20 ans, vous diriez ?
26:38 Peut-être, je n'ai pas compté.
26:40 D'accord.
26:41 Et alors c'est la première fois de votre vie que vous preniez l'avion ?
26:44 Oui, oui, c'est la première fois.
26:46 Qu'est-ce que ça vous a fait, ça, l'avion ?
26:47 Ça ne m'a fait rien. Je n'avais pas peur de l'avion.
26:50 Mes papiers avaient peur de l'avion.
26:52 On était assis comme ça.
26:55 C'est étonnant quand même, l'avion, quand même.
26:58 Cette masse qui s'élève dans le ciel, c'est incroyable.
27:00 Et comme l'avion s'envole jusque là-bas,
27:04 et comme on va voir là-haut,
27:07 je dis non, on passe par les nids.
27:10 Je pense que ça vous a enrichi comme expérience.
27:14 Oui, oui.
27:15 C'était très intéressant quand on a été.
27:19 J'ai vu tout ça.
27:21 Quand on s'est rencontrés la première fois, vous faisiez de la gravure.
27:25 Oui, oui, oui.
27:27 Je ne vous ai pas trop demandé,
27:28 mais cet art, c'est quelque chose que vous avez appris de vos parents ?
27:31 Non, non, non.
27:33 C'était ma belle-mère qui faisait ça.
27:36 Et puis j'étais assise à côté de ma belle-mère pour voir comment elle faisait.
27:39 C'est comme ça que j'ai appris.
27:41 Et autrement, est-ce qu'il y a des dessins organisés,
27:45 ou est-ce qu'on peut improviser ?
27:46 Non, non, non.
27:48 Je ne sais pas quel dessin elle faisait, la vieille.
27:52 Méfiez-vous, si vous dites la vieille,
27:55 peut-être qu'elle avait votre âge à l'époque.
27:57 Attention !
27:58 C'est risqué, ça.
28:02 Oui.
28:05 Après, vous avez eu combien d'enfants ?
28:08 Douze.
28:10 Deux enfants, j'ai.
28:15 Et combien de garçons ?
28:18 Sept garçons.
28:19 Sept garçons et cinq filles, je crois.
28:24 Vous n'êtes pas sûre ?
28:25 Non.
28:26 Enfin, ça s'est déjà passé.
28:29 Je ne me souviens pas plus.
28:31 Est-ce que tout le monde avait des grandes familles comme la vôtre,
28:34 ou c'était exceptionnel ?
28:35 Oui, il y a des gens qui ont eu plus que ça.
28:38 Le hamac, qu'est-ce que vous pouvez nous dire sur le hamac ?
28:43 Ça fait partie de votre tradition, ça aussi.
28:45 Oui, on fait ça avec le coton.
28:47 Ça, ce n'est pas du coton, c'est du nylon.
28:50 Vous dormez dedans ?
28:53 Oui, je dors derrière, avec le coton.
28:56 J'ai fait des hamacs en coton pour mes enfants, pour mes fils.
29:00 Ils ont gardé tout ça chez eux.
29:03 Alors, quand vous étiez en France, une bonne question,
29:06 vous étiez obligé de dormir dans un lit ?
29:08 Oui, on nous a donné un lit.
29:10 Qu'est-ce que ça vous a fait comme expérience ?
29:12 Eh bien, j'avais mal pour dormir, parce que j'ai eu mal au dos.
29:17 Je me suis dit que je devais dormir.
29:19 Je sais qu'il y a quelque chose dans mon âme.
29:37 Je suis venu voir la chanson de Diabla,
29:41 qui est une chanson qui parle de la vie normale,
29:46 de la vie de tous les humains.
29:49 C'est une chanson qui parle de la vie normale,
29:53 de la vie de tous les humains,
29:56 de la vie de tous les humains.
29:58 C'est ce que j'ai pensé.
30:01 Je disais, vous qui me voyez,
30:04 vous savez que mes paroles iront très loin avec ce film.
30:08 Et vous qui me voyez très loin, nous sommes les Kalinyas.
30:11 Beaucoup ont dit qu'un jour on disparaîtrait,
30:15 mais moi j'y crois, parce que je me suis engagé,
30:19 pas moi tout seul, mais avec d'autres militants, d'autres personnes,
30:22 à ce que notre culture persiste.
30:26 Ah !
30:28 Eh ! Eh ! Valébaba !
30:32 [SILENCE]

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