• l’année dernière
Depuis deux mois, 500 mineurs isolés survivent dans une école désaffectée du 16e arrondissement à Paris. A bout de force, les associations menacent de se retirer alors qu’une décision de justice pourrait déclencher leur expulsion avec une possible mise à l’abri.

Depuis le 4 avril, c'est dans cette école désaffectée de la rue Erlanger, dans le très chic 16e arrondissement de Paris que 4 associations citoyennes (Timmy, Tara, Les Midis du MIE et Utopia 56) ont décidé d’occuper, afin d’assurer un hébergement d'urgence à de jeunes migrants isolés.

«Ils étaient 160 jeunes au départ et on pense atteindre les 600 migrants très prochainement. Ce sont une dizaine de nouveaux jeunes qui arrivent chaque jour afin de trouver un refuge», souligne Agathe Nadimi, la présidente de l'association les Midis du Mie.

Afin de faire face à la saturation des espaces de l’école, les migrants dorment deux par deux sous des tentes dans l’une des cours de l’école. Sans eau courante, ni électricité, les conditions d’hébergement sont particulièrement précaires alors que la mairie de Paris a mis à disposition six sanitaires mobiles à l’entrée de l’école.
Un repas quotidien est servi tous les soirs à 20 heures grâce à une association partenaire, La Chorba.

«Une situation de «crise humanitaire et sécuritaire en plein Paris» dénoncent les associations qui menacent de se retirer car elles se sentent de plus en plus démunis face à cette demande qui ne cesse d’augmenter.

En plus de l’aide alimentaire, les requêtes des jeunes sont multiples nous explique Agathe : «Ils demandent tout, des portables avec un numéro français, essentiel pour avancer dans leurs démarches, des chaussures, des couvertures, des sacs à dos…».

Guinéens, maliens ou ivoiriens, ces jeunes viennent essentiellement d’Afrique avec plus de 25 nationalités présentes sur le site. Ils ont tous fait une démarche administrative auprès d’un dispositif d’évaluation de leur minorité et ont obtenu une réponse négative pour la grande majorité. «Ils ont tous engagé un recours qui prend en moyenne huit mois en île-de-France et en attendant les jeunes sont à la rue car la présomption de minorité n’existe pas dans le droit français. C’est le combat des associations, obtenir un véritable statut pour les mineurs en instance de recours», nous explique la présidente des Midis du Mie.

Une audience aura lieu lundi 12 juin, à 9 heures au tribunal judiciaire de Paris. Un juge devra statuer sur leur expulsion, qui pourrait déboucher sur une mise à l’abri de tous ces jeunes abandonnés.

«Ils sont sortis d'un monde atroce qui ne leur offrait aucune porte de sortie. Ils cherchent à atteindre leur rêve, comme n'importe quel enfant.» nous explique Pericles, bénévole de l’association Utopia56.

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Transcription
00:00 En Guinée, je disais que je vivais pauvre, mais pas comme ça.
00:04 On était pauvre, mais pas comme ça.
00:06 Notre pauvreté, ça ne nous faisait pas pitié.
00:09 On est misérables ici.
00:11 On est pauvres au milieu des riches.
00:27 Venir jusqu'ici, voir la situation, ce que les jeunes vivent ici,
00:33 pour moi, je ne l'imaginais pas.
00:36 Sincèrement, je ne l'imaginais pas.
00:39 C'est-à-dire ?
00:40 C'est-à-dire de voir les gens, en tout cas en plein Paris,
00:44 dormir dehors, faire la mince, demander de l'argent.
00:49 Je n'ai jamais imaginé ça, là aussi, j'étais en Guinée.
00:52 Sincèrement, jamais imaginé ça.
00:55 Le jour où tu as lancé le recours, tu as donné des papiers, c'est ça ?
00:58 Oui.
00:59 Je t'explique ce qui risque de se passer.
01:01 Il risque de se passer que...
01:03 Des nouveaux arrivent ici tous les jours,
01:06 puisqu'il y a toujours cet ordre qui est donné de zéro tente dans Paris,
01:09 que dès qu'un campement essaie de se remonter, la police l'empêche.
01:14 Et donc là, moi, j'arrive, et il y a ce jeune de 15 ans
01:18 qui s'est présenté au dispositif d'évaluation pour la minorité
01:21 gérée par la Croix-Rouge, partenaire prestataire de Bobigny,
01:26 du département du 93, pour une évaluation de minorité
01:30 qui est censée le mettre à l'abri jusqu'à notification,
01:34 poste à l'évaluation qui sera faite.
01:37 Là, on est en train de l'accueillir à la place de l'État,
01:40 puisque c'est une obligation de mettre à l'abri le temps d'une évaluation
01:44 jusqu'à notification et rendu de la décision.
01:47 Et donc là, c'est complètement hallucinant.
01:50 Et les dispositifs d'Île-de-France, depuis que nous sommes ici,
01:53 orientent allègrement les jeunes vers nous.
01:57 Donc nous, on se demande vraiment quel est notre rôle là-dedans.
02:00 On pallie évidemment un problème d'un manquement de l'État.
02:04 Mais là, c'est bien pire que ça.
02:06 C'est qu'on assure le job à la place de l'État réellement,
02:09 même quand la loi oblige à ce que l'État le fasse.
02:16 On a eu des vidéos de jeunes qui nous ont été envoyés de Porte de la Villette
02:20 en pleine journée, que la police mettait en pratique l'ordre du préfet
02:24 sur le fait qu'il n'y aurait pas de nouvelles tentes dans Paris.
02:26 Et donc, on a décidé de soutenir les jeunes
02:30 pour qu'ils trouvent du coup refuge ici et que cette opération,
02:34 qui devait être une opération un peu coup point,
02:36 fasse une mise à l'abri, déclenche une mise à l'abri le plus vite possible.
02:40 On a imaginé que ça allait durer 48 heures ou quelques jours.
02:43 Et ça fait deux mois.
02:45 La mairie de Paris s'est vue demander, a priori par la préfecture,
02:48 de déposer une plainte, une assignation au tribunal judiciaire
02:52 pour occupation illégale.
02:54 Et donc, une date d'audience nous a été communiquée
02:57 pour une audience au tribunal judiciaire
02:59 pour une évacuation du lieu, une expulsion du lieu, le 12 juin.
03:04 Cette audience devrait donc donner normalement le ton
03:08 et déclencher, on l'espère, une opération de mise à l'abri
03:12 contrainte et forcée de la préfecture.
03:14 Parce que de toute façon, où vont aller maintenant ces plus de 500 jeunes ?
03:17 Je pense que d'ici au 10 juin, on va finir vraiment à plus de 650 jeunes
03:21 parce qu'il en arrive tous les jours.
03:23 Il y a une menace ambiante de l'extrême droite également
03:27 qui est venue à plusieurs reprises.
03:28 Je rappelle qu'il y a une enquête qui a été ouverte pour incitation à la haine.
03:31 Que fait l'État ?
03:32 L'État laisse les gentilles associations se débrouiller
03:35 avec plus de 500 jeunes dans Paris condamnées,
03:40 puisque du coup on est condamnables.
03:42 On nous emmène au tribunal judiciaire,
03:44 c'est la seule réponse qu'on trouve à nous faire.
03:46 Il faut tenir la ligne, quand ils sont 500, c'est un boulot.
03:52 Ça tient bien.
03:54 Il n'y a pas de délinquance chez ces jeunes-là.
03:56 Ces jeunes-là sont des personnes perdues
03:58 qui essayent de s'en sortir tant bien que mal.
04:02 Au final, on parle de délinquance.
04:04 Moi, ça m'hallucine parce que quand on les connaît,
04:06 ces jeunes, ils sont 500 à vivre les uns sur les autres
04:09 dans des conditions catastrophiques.
04:11 Et franchement, ils font de mal à personne.
04:13 Ils sont tous souriants, ils font tout comme ils peuvent.
04:15 Et bien entendu, une école n'est pas faite de base
04:18 pour accueillir des migrants qui ont du mal à survivre ici.
04:23 C'est moi qui ai demandé le papier.
04:25 C'est toi qui a demandé le papier.
04:27 Là, je regarde parce qu'il veut faire venir
04:29 son certificat de naissance en France.
04:31 Et en fait, je regardais s'il n'y a pas d'erreur dessus,
04:33 parce que c'est vrai que parfois,
04:35 il y a des erreurs de formalité.
04:37 Il va manquer un E, il va manquer un S.
04:39 Là-bas, c'est rien, ça passe.
04:41 Ils remarquent qu'on n'aime pas.
04:42 Mais ici, en France, ça ne marche pas.
04:44 Quand les documents vont être analysés,
04:46 ils peuvent dire que c'est un faux document
04:48 ou en tout cas que ce n'est pas un document officiel
04:50 à cause d'une faute d'orthographe
04:52 qui pour eux n'est pas importante.
04:54 Ici, ça l'est.
04:55 Donc avant de faire venir leurs documents,
04:57 on vérifie qu'ils soient bien.
04:58 Ça coûte cher, donc on ne fait pas venir
04:59 des mauvais documents.
05:01 Des documents qui viennent d'Afrique ?
05:02 Qui viennent d'Afrique, oui.
05:04 Métro 9 jusqu'à République.
05:10 Et après, métro 5 jusqu'à Saint-Marcel.

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