L'invitée de Cartman - Nora Tirane Fraisse nous parle de harcèlement scolaire

  • l’année dernière
Vous le savez, dans cette émission, on parle de tout. On rit beaucoup, mais cela ne nous empêche pas de parler de sujets sérieux. Ce soir, nous parlons avec Nora Tirane Fraisse, qui tient une association qui vient en aide et sensibilise les jeunes au sujet du harcèlement scolaire.

Retrouvez Cartman sur Fun Radio, avec Marion et Guéguette, sur l'application Fun Radio et FunRadio.fr !
Transcript
00:00 Fun Radio. Enjoy the music.
00:05 19h, 22h, c'est Gatman sur Fun Radio.
00:15 20h30 sur Fun Radio, j'espère que ça va pour vous, on vous accompagne tous les jours.
00:18 19h, 22h avec toute l'équipe et comme tous les soirs, on est là pour vous détendre, pour vous amuser,
00:22 mais pas que. Ce soir, on voulait vous présenter quelqu'un qui dirige l'association Marion la Main Tendue.
00:27 Elle lutte contre le harcèlement scolaire, elle se déplace dans les établissements pour sensibiliser les jeunes.
00:31 Elle s'appelle Nora Thiram-Fress. Sa fille Marion s'est malheureusement suicidée à l'âge de 13 ans
00:36 après avoir été harcelée au collège. Tout le monde parle évidemment de beaucoup de harcèlement en ce moment,
00:41 suite à l'affaire Lindsay. Nora est avec nous. Bonsoir Nora.
00:45 Bonsoir.
00:46 Bonsoir. On est content de vous avoir et pour une bonne raison, c'est qu'on sait qu'il y a beaucoup de nos auditeurs
00:51 qui sont encore au collège ou au lycée. On se doute que votre histoire a dû toucher beaucoup de gens.
01:01 J'imagine que c'est le but aussi de Marion la Main Tendue de faire parler.
01:05 Comment vous intervenez concrètement dans les collèges ?
01:09 En fait, on intervient dès la maternelle. On intervient avec des associations pédagogiques.
01:13 On intervient toute l'année, dans toute la France, dès la maternelle pour justement tenter d'éradiquer
01:20 le phénomène de harcèlement.
01:22 Ça commence dès la maternelle ?
01:24 Oui, on a identifié que dès la grande section, le phénomène de violences répétées, des mises à l'écart,
01:29 existe dès la grande section. Le but, c'est qu'ils rentrent au CP ou en école élémentaire sans ces violences.
01:36 Et au collège, on y va aussi, mais c'est pour d'autres sujets.
01:40 Donc on intervient de 5 ans à 23 ans dans tous les milieux. C'est très genré.
01:47 C'est vrai ? J'imagine que le moment le plus sensible, c'est le collège.
01:52 On parle tous un peu de notre expérience personnelle. On a l'impression que le collège, c'est là où on est
01:55 un peu le plus fragile parce qu'on n'est pas encore exactement un ado.
01:58 C'est dur le collège.
01:59 On arrive même, on est encore un enfant au collège, on est au milieu d'ados.
02:02 C'est là où les problèmes s'amplifient en général ?
02:05 Non.
02:06 Ah c'est vrai ? Non, mais justement, c'est bien de le savoir.
02:09 Non, en fait, on se rend compte que quand on arrive au collège et qu'on a déjà des interactions négatives
02:13 et qu'on n'a pas été arrêté dans les violences, les mises à l'écart, les rumeurs, les coups, etc.
02:18 Quand on arrive au collège, c'est déjà bien ancré.
02:21 C'est-à-dire qu'on a des habitudes et que la vie ne l'a pas arrêtée.
02:24 Après, ce qui se passe, c'est qu'on arrive au collège, c'est quelque chose de nouveau.
02:27 Son corps change, on est confronté à plein de nouveautés, notamment les transports scolaires.
02:34 On sait que les collégiens indiquent qu'ils ont surtout peur avant l'école.
02:38 50% des collégiens ont peur dans les transports scolaires, dans les bus scolaires.
02:43 C'est ce qui passe aux abords des écoles.
02:45 Et en primaire, les élèves de CM1, CM2 qui sont interrogés dans les enquêtes nationales,
02:50 par exemple, 8% des CM1, CM2 ont peur d'être embrassés de force.
02:54 Donc, c'est les premières violences sexistes et sexuelles.
02:56 Et 15% de voyeurisme dans les toilettes.
03:00 Et pendant longtemps, on nous a parlé du collège.
03:02 C'est l'idée reçue.
03:04 Parce qu'on n'osait pas se dire que ça arrive depuis que j'étais jeune.
03:10 C'est comme une plante qui pousse mal.
03:12 C'est le zéro.
03:14 Je vais poser deux questions en même temps.
03:17 Qu'est-ce qu'on peut faire quand on est harcelé déjà ?
03:19 Et qu'est-ce qu'on peut faire quand on voit quelqu'un se faire harceler ?
03:23 Il faut faire la même chose déjà ?
03:25 Quand on est harcelé, il faut dire qu'on est la cible de violence et que ce n'est pas de notre faute.
03:30 Il ne faut pas culpabiliser. Et c'est difficile d'en parler, notamment à son entourage.
03:35 On sait qu'un enfant sur deux n'en parle jamais à ses parents.
03:37 Il faut se culpabiliser et qu'il a honte.
03:39 Quand on est témoin, on est co-victime de tout ça.
03:42 Et c'est vrai qu'il y a un effet de sidération.
03:44 On se dit « je ne vais pas intervenir parce que j'ai peur des représailles.
03:46 Si ça m'arrive, je suis une poucave, une balance. »
03:49 C'est pour ça qu'on a développé ce qu'on appelle les élèves ambassadeurs.
03:52 Ce sont des personnalités positives pour renverser la meute.
03:56 Il faut vraiment dire aussi aux jeunes, vous n'y êtes pour rien.
03:59 C'est un phénomène de meute et de groupe.
04:01 On l'a vu dernièrement, on dit qu'on a exclu une harceleuse ou un harceleur.
04:05 Mais pas du tout. C'est une dynamique de groupe.
04:07 Les témoins sont aussi victimes de ce phénomène.
04:10 Il faut leur dire de ne pas participer, de ne pas rire.
04:13 La peur, c'est l'émotion qui crée de l'anxiété.
04:16 Mais nous, les adultes, on doit aussi participer à éradiquer ce harcèlement.
04:22 Et dire aux harceleurs.
04:23 Malheureusement, il y a six fois plus de harceleurs que de harcelés.
04:26 50% des interactions ne doivent pas être positives.
04:31 Pour le reste, il faut être au travail.
04:33 J'imagine qu'il y a plein de parents qui nous écoutent.
04:35 Moi, je l'ai la solution.
04:36 Le harceleur, je lui mets une bonne paire de gilles dans sa gueule.
04:38 Et puis, ça va régler le problème.
04:40 On sait qu'il y a beaucoup de gens qui vont se dire ça.
04:43 Évidemment, ils disent ça parce qu'ils n'ont pas le problème personnellement.
04:47 Qu'est-ce qu'on peut faire quand on est parent et qu'on voit que son enfant est harcelé ?
04:50 Qu'est-ce qu'on peut faire quand on voit que son enfant est harceleur aussi ?
04:53 Il y a des parents qui doivent découvrir que leur enfant harcèle les autres enfants.
04:56 Est-ce qu'on doit en parler au proviseur du collège ?
04:58 Est-ce qu'on doit en parler avec les parents ?
05:00 Est-ce qu'il y a une solution déjà à ça ?
05:02 Il faut se dire qu'on a plus de risques d'avoir un enfant harceleur.
05:05 Et que 100% des élèves sont concernés par le harcèlement.
05:09 Donc, c'est dire à son enfant, si l'autre c'était toi,
05:12 à mon avis, tu n'aimerais pas être frappé ou bousculé.
05:15 C'est très genré.
05:16 Les garçons, on a identifié, c'est les bagarres, les coups, les balayettes.
05:19 Et quand on a des jeunes filles, c'est beaucoup les rumeurs, les mises à l'écart.
05:22 Et puis la violence verbale qui est banalisée.
05:24 Donc nous, en tant qu'adultes, on doit aussi être exemplaire.
05:27 Non, taper quelqu'un, ce n'est pas le sujet.
05:30 On va pas répondre à la violence par la violence.
05:33 Et puis, qu'est-ce qu'il faut faire ?
05:35 Il faut d'abord aller voir le professeur des écoles si on est en école primaire.
05:39 Le principal du collège ou le proviseur dans les lycées.
05:42 Normalement, il y a ce qu'on appelle le programme phare.
05:44 J'invite toutes les familles à se rapprocher de leur établissement.
05:47 C'est un programme de prévention du harcèlement.
05:49 Dans tous les établissements de France, et normalement à la rentrée au lycée,
05:52 on doit avoir au moins 10 élèves ambassadeurs qui sont formés,
05:55 des professionnels de l'éducation nationale qui sont formés,
05:58 et puis surtout être dans l'écoute active de son enfant.
06:01 Et nous, je tiens à le dire, à Marion, on l'a bien entendu,
06:03 on a des structures d'accueil.
06:05 C'est qu'on prend en charge des harceleurs.
06:07 Un harceleur est aussi parfois un enfant en souffrance.
06:09 Et souvent, un harceleur est un ancien enfant harcelé
06:12 qui n'a pas réussi à se défendre et qui dit,
06:14 "Cette fois-ci, moi, je ne vais pas prendre cher."
06:16 C'est pour ça qu'on intervient des lames maternelles,
06:18 pour que les enfants comprennent que la violence,
06:20 ce n'est pas une solution.
06:22 Donc, dire aux parents d'adapter, par exemple, le numéro,
06:25 de nous contacter, et puis de ne pas hésiter à se faire aider,
06:29 parce que nous, on a des parents de harceleurs
06:31 qui viennent nous voir et qui nous disent,
06:33 "Mon enfant a été exclu, ce n'est pas comme ça que je vois les choses."
06:36 Et voilà, c'est très, très, très complexe, mais il y a des solutions.
06:39 De manière générale, c'est d'en parler,
06:41 que ce soit avec le proviseur, avec peut-être d'autres parents.
06:44 Mais il ne faut pas rester enfermé avec ça,
06:46 en se disant que ça va passer.
06:48 Ça, c'est la pire des solutions.
06:50 - Parce que les enfants culpabilisent, mais les adultes aussi,
06:52 victimes de violence, en se disant, "C'est sans doute de ma faute."
06:54 Et puis dire surtout que n'importe qui peut être harcelé.
06:57 Ce n'est pas parce que tu es gros, tu es petit, tu es...
07:00 Non, c'est qu'on a pris un stigmate, une différence,
07:03 on fait de toi une cible, une proie,
07:05 et forcément, quand on est 5 ou 6 contre une personne,
07:08 on se sent fort, en fait. C'est plutôt une bande de lâches.
07:11 Donc, la lâcheté, ça ne fait pas grandir.
07:13 Marion a une question.
07:14 - Oui, alors le harcèlement, ça existe depuis très longtemps.
07:16 Moi-même, j'en étais victime, c'était il y a 20 ans.
07:18 Mais là, on a l'impression que les choses, elles bougent enfin,
07:21 notamment grâce à votre assaut et à ce genre d'initiatives.
07:24 Mais est-ce qu'il y a assez de choses de faites
07:26 au niveau de l'éducation nationale, des autorités ?
07:28 On a l'impression, moi, j'ai l'impression que vous,
07:30 les gens comme vous, vous faites des choses incroyables,
07:32 mais que là-haut, il n'y a rien qui se passe, en fait.
07:34 Est-ce que je me trompe ? Est-ce qu'il y a des choses concrètes ou pas ?
07:36 - Pour ma part, c'est 10 ans.
07:39 C'est des ouvrages, une BD, on se bat, on crée, etc.
07:42 Mais c'est vrai, les moyens ne sont pas à la hauteur des enjeux.
07:45 Les subventions sont quasi nulles.
07:47 On voudrait recruter, on voudrait créer des maisons de Marion
07:50 dans toute la France.
07:52 En face, on décorte la responsabilité sur des plateformes,
07:55 on nous donne des numéros.
07:57 Mais vous savez, personne n'a envie d'appeler les pompiers
07:59 parce qu'il y a le feu.
08:00 Le but, c'est d'éviter ce feu.
08:02 C'est une pandémie aujourd'hui.
08:03 Donc oui, on mérite mieux, nos enfants méritent mieux.
08:06 Mais surtout, ça a des vraies conséquences sur la santé mentale,
08:10 sur le décrochage scolaire.
08:11 Juste pour vous dire que 23% de l'absentéisme dans nos établissements
08:14 est expliqué par les violences en milieu scolaire.
08:16 Donc ce n'est pas rien.
08:17 On a 12 millions d'élèves scolarisés,
08:19 on a un million d'enfants harcelés.
08:21 On a des harceleurs qui ont des conduites délectuelles,
08:23 c'est-à-dire qu'ils peuvent aussi décrocher,
08:25 aller vers des conduites qui vont les amener malheureusement
08:27 vers la casse-prison.
08:29 C'est un sujet de santé mentale.
08:31 On a beaucoup d'enfants qui font des dépressions,
08:33 qui malheureusement font des tentatives de suicide.
08:35 Donc oui, il nous faut beaucoup plus de moyens,
08:37 il nous faut être très pragmatiques,
08:39 de l'argent pour refléter et de la médecine scolaire.
08:43 Mais vraiment, nous en tout cas, Marion l'a m'intendue,
08:47 on a un vrai problème, c'est qu'aujourd'hui,
08:48 on n'a pas assez d'argent pour pouvoir continuer.
08:50 On reçoit 8 à 10 000 appels téléphoniques,
08:53 alors qu'on n'est pas une plateforme de personnes.
08:56 On a 300 personnes en suivi thérapeutique.
08:58 C'est quand même une société privée
09:00 qui nous finance le pôle thérapeutique.
09:02 Donc il nous faut beaucoup d'argent,
09:05 parce qu'avec ce qu'il peut,
09:07 je pense qu'on n'y arrivera pas.
09:09 On peut tout vous dire,
09:11 on peut vous raconter des carabistouilles,
09:13 mais malheureusement, c'est le nerf de la guerre.
09:16 Sans argent, il n'y a pas de recrutement,
09:18 et il faut être face à l'élève.
09:19 On a vu 15 000 enfants cette année,
09:21 alors qu'on aurait peut-être pu en voir 150 000.
09:23 Faute de personnel et faute d'argent.
09:25 Il faut que les parents sachent,
09:27 ce n'est pas qu'on ne veut pas,
09:28 mais c'est qu'on ne peut pas.
09:29 C'est un vrai problème général,
09:32 mais qui concerne encore plus le harcèlement
09:34 quand on parle d'enfants en maternelle.
09:37 C'est de dire que si le problème,
09:38 il faut le prendre tôt.
09:39 Et c'est de dire que si jamais on a besoin
09:41 de ce genre d'association,
09:42 d'ailleurs Marion Lamain-Tendu n'est pas la seule,
09:44 mais vraiment ce que vous faites,
09:45 c'est extraordinaire.
09:46 On tenait à vous le dire.
09:47 Merci beaucoup.
09:48 Merci aux bénévoles et aux équipes.
09:50 Il y a des parents dans l'équipe en plus
09:52 qui sont encore plus touchés que nous,
09:53 je pense, par tout ça.
09:54 Donc Nora Thiranfrès était avec nous,
09:55 on voulait vraiment vous saluer.
09:57 Merci beaucoup.
09:58 Et nous vous envoyer toute notre amitié
09:59 si vous avez besoin de nous.
10:00 Sachez qu'on est là à n'importe quel moment.
10:02 Si vous avez besoin d'un coup de main,
10:03 sachez qu'on est là.
10:05 Merci d'avoir été avec nous Nora.
10:06 Merci à vous.
10:07 A bientôt.
10:08 Au revoir.
10:09 On fait une pause,
10:10 on revient juste après ça sur Feune Radio.
10:11 On va se détendre un peu après.
10:13 C'était bien de parler de tout ça.
10:15 Mais vous savez, tous les jours,
10:16 c'est un peu le...
10:17 Est-ce que ça ne serait pas un peu la vie cette émission ?
10:19 Un coup on pleure, un coup on rit.
10:21 On rit plus qu'on pleure quand même,
10:22 j'ai l'impression.
10:23 Globalement oui.
10:24 On va se détendre un peu.
10:25 On va se détendre.
10:26 Je me lance.
10:27 Vous écoutez Fun Radio.

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