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Dans son émission média, Philippe Vandel et sa bande reçoivent chaque jour un invité. Aujourd'hui, Karine Dufour, réalisatrice pour le documentaire "Adeptes, de l'emprise à la déprise" sur Arte.
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NewsTranscription
00:00 sur "Pain avec Philippe Vandelle" et votre invité Philippe.
00:03 - Bonjour Karine Dufour. - Bonjour.
00:04 - Vous êtes journaliste, réalisatrice.
00:07 Votre actualité c'est un documentaire adepte.
00:09 Il y a un sous-titre "De l'emprise à la déprise".
00:12 C'est à voir sur Arte après-demain et c'est déjà sur arte.tv.
00:15 Alors c'est un documentaire qui concerne les sectes.
00:17 Il y a déjà eu beaucoup de documentaires, de reportages sur ce sujet.
00:21 Ce qui est neuf dans ce travail, dans votre travail,
00:23 c'est que vous racontez ce qui se passe après,
00:25 quand on parvient à s'en sortir et d'ailleurs, est-ce qu'on s'en sort ?
00:29 - Oui.
00:30 Après beaucoup de temps, je pense.
00:32 On peut s'en sortir.
00:33 Moi, je ne parle pas au nom de ceux que j'ai rencontrés.
00:37 Je pense qu'en tout cas, ceux que j'ai rencontrés,
00:40 c'est qu'on s'en sortit au bout de moins de 10 ans.
00:42 - Avez-vous l'impression qu'ils étaient indennes ?
00:44 Parce que nous, on ne les voit que dans un reportage.
00:46 Évidemment, c'est ramassé.
00:47 Il y a cinq personnages sur 52 minutes.
00:50 Mais vous-même, quel état d'esprit leur avez-vous trouvé au final ?
00:54 - Moi, je les admire.
00:55 Je les trouve combattifs et ils vont continuer à se battre.
00:58 Je déteste la phrase "ce qui ne tue pas te rend plus fort".
01:01 Ils sont plus faibles que...
01:02 - Ça me fait plaisir d'entendre ça.
01:03 Je déteste cette phrase.
01:04 "Ce qui ne te tue pas te rend plus fort".
01:06 - Non, ils sont atteints.
01:08 Ils ont des cicatrices à vie intérieure.
01:10 - Et quand ils le racontent, ils sont parfois en larmes.
01:12 - Oui, c'est normal.
01:14 Ce serait faux de faire croire qu'ils reprennent une vie normale.
01:17 - Cinq personnages, ils sont très divers.
01:20 Avant qu'on les détaille, qu'est-ce qu'ils ont en commun ?
01:23 - Je pense qu'ils avaient envie de changer le monde
01:25 ou en tout cas, ils avaient une belle pensée de vouloir aider les autres.
01:29 C'est pas forcément des...
01:30 Au contraire, c'est le contraire de ce que j'imaginais
01:32 des adeptes de secte, des illuminés, des neneux, des gens fragiles.
01:37 C'est des gens très attachants.
01:39 - Alors, il y en a un qui est un petit peu hors collection, si j'ose dire.
01:42 C'est Nicolas.
01:42 Il a été témoin de Jéhovah jusqu'à l'âge de 22 ans.
01:45 Pourquoi ?
01:45 Parce qu'il est devenu témoin de Jéhovah
01:47 car ses parents étaient déjà témoins de Jéhovah
01:50 et l'emprise a commencé très très tôt
01:51 puisque sa maman lui racontait des prières dans son ventre
01:55 alors qu'elle était enceinte.
01:56 Et puis une fois petit garçon,
01:58 il a été conditionné dès son plus jeune âge.
02:01 Il raconte.
02:02 - Pour la plupart des enfants qui ont peur du monstre sous le lit,
02:05 ils ont des parents qui leur disent que le monstre n'existe pas.
02:07 Mais les témoins de Jéhovah, ils disent à leurs enfants
02:09 que le monstre, il existe,
02:11 qu'il s'appelle Satan, qu'il n'est pas tout seul,
02:13 qu'il est entouré de démons, qu'ils sont invisibles,
02:15 qu'ils peuvent agir sur nous,
02:17 qu'ils sont partout autour à chercher à nous nuire.
02:20 Et moi, quand j'étais enfant, je les voyais tourner autour de mon lit.
02:22 J'étais persuadé en voyant la veilleuse qui tremblotait
02:25 qu'il y avait des démons qui étaient passés devant.
02:26 - On se moquait de lui à l'école,
02:28 il était battu par les autres enfants.
02:29 Pourquoi ? Parce que comme il était témoin de Jéhovah
02:31 et que c'était le mal, qu'il ne fallait pas mettre des vêtements nouveaux,
02:34 il était totalement différent.
02:36 - C'est de la maltraitance intrafamiliale.
02:38 Moi, je voulais absolument qu'il y ait un adulte
02:41 qui ait grandi dans une secte.
02:42 Parce qu'en plus, en sortir,
02:43 ça veut dire qu'on doit se couper de ses propres gènes,
02:45 de son propre sang.
02:47 C'est dingue !
02:48 Et en France, je pense qu'on sous-estime
02:52 tous ces enfants qui grandissent dans des sectes
02:53 et que l'Aide Sociale à l'enfance devrait retirer de leur famille.
02:56 - Et j'ai découvert en voyant votre doc,
02:57 c'est qu'il avait une sorte de double peine.
02:59 Il était battu par les autres enfants,
03:01 il ne pouvait se plaindre à personne
03:03 puisqu'il ne pouvait pas raconter à ses parents
03:05 ce qu'il subissait à l'école,
03:06 il ne pouvait pas raconter au professeur
03:08 ce qu'il subissait à la maison.
03:09 - Et ses parents lui disaient "pris"
03:11 quand il se plaignait.
03:13 Non mais ces enfants vivent un enfer.
03:14 C'est le film de Sarah Suiko, "Les Éblouis",
03:16 c'est comme ça que j'ai découvert,
03:18 que ça m'a percuté sur...
03:20 puisque j'avais déjà travaillé sur les violences intrafamiliales.
03:22 Mais vraiment je pense qu'on sous-estime...
03:24 il y a à peu près entre 80 000 et 200 000 enfants,
03:26 on ne sait pas, qui grandissent dans des sectes.
03:28 Et c'est vraiment un problème public
03:30 qui nous concerne tous.
03:31 - Votre documentaire s'appelle "Adeptes",
03:33 c'est au pluriel parce qu'il y a cinq adeptes,
03:35 de l'emprise à la déprise.
03:37 On n'a pas vraiment parlé de la déprise.
03:39 Karine Dufour est avec nous.
03:40 Culture Média continue sur Europe 1.
03:42 - Et vous écoutez Culture Média avec Philippe Vendel
03:45 et votre invitée Karine Dufour,
03:46 réalisatrice pour le documentaire "Adeptes",
03:48 de l'emprise à la déprise.
03:49 C'est à voir mercredi sur Arte.
03:51 - Et déjà sur arte.tv,
03:53 beaucoup moins joyeux que la fille du motel,
03:55 je voudrais qu'on parle de Julie,
03:56 une femme qui n'avait pas confiance en elle.
03:58 Elle part faire un stage au Maroc
04:00 et elle se retrouve sous l'emprise d'un gourou
04:02 pendant cinq ans.
04:03 Racontez ce qui lui a arrivé.
04:05 - Julie, ça pourrait être vous et moi.
04:06 C'est ça qui m'a vraiment totalement percuté.
04:09 - Oui, on n'a pas l'impression que c'est une illuminée.
04:11 On a l'impression que c'est une jeune femme comme les autres.
04:13 - Elle avait fait les beaux-arts,
04:15 elle bossait, tout allait bien.
04:16 Elle venait de se séparer de son copain.
04:18 Elle plonge en trois semaines.
04:20 Et en fait, c'est le phénomène du love-bombing.
04:22 C'est-à-dire les gens vous adorent.
04:23 D'un coup, vous devenez le centre du monde.
04:25 Donc en fait, elle s'agrège à ce groupe.
04:28 Et ensuite, elle devient plus ailée que le gourou.
04:30 C'est-à-dire, elle devient le bras droit du gourou.
04:32 Sa compagne, lui, il se sépare de sa femme
04:35 et elle passe 24 heures sur 24 avec lui.
04:37 Et donc, elle est totalement lobotomisée.
04:39 Elle est son bras droit et elle devient...
04:41 Lui, il n'a plus besoin d'être là pour tenir la secte.
04:43 En fait, c'est Julie qui tient la secte à sa place.
04:46 - Elle a été utilisée comme esclave sexuelle.
04:48 Elle était la chef des esclaves sexuels
04:50 avec des séances de sexe collectif.
04:52 Et ce qui va mettre fin à cette histoire,
04:54 je passe vite volontairement, c'est la justice.
04:57 - Ils sont arrêtés grâce au grand-père
04:59 d'une jeune fille violée qui porte plainte.
05:01 Et donc, le gourou et Julie sont arrêtés.
05:04 Et pendant six mois, elle va le défendre.
05:05 Elle préfère mourir.
05:07 Enfin, elle le défend.
05:08 - Elle préfère être accusée elle-même,
05:10 faire de la prison elle-même plutôt que lui.
05:11 - Et petit à petit, c'est son avocat
05:13 qui commence à mettre des brèches.
05:15 Je ne sais pas si on parlera de la déprise.
05:16 - On va justement y venir, à cette déprise.
05:19 J'ai appris un mot grâce à vous.
05:22 La déprise.
05:23 Qu'est-ce que la déprise et en quoi est-ce un problème ?
05:26 Parce que, intuitivement,
05:27 on sent que si on a une difficulté, un malheur,
05:30 une fois qu'on en est débarrassé, on va mieux.
05:32 Mais non.
05:32 - C'est pour ça que j'ai voulu faire ce doc.
05:34 C'est que j'avais traité l'emprise.
05:36 L'emprise, c'est un mot qu'on utilise de plus en plus
05:38 et qui est rentré dans le langage courant.
05:40 Et dans l'emprise conjugale,
05:42 on souvent me disait "mais pourquoi elle ne part pas ?"
05:44 Et en fait, c'est ça.
05:46 Si on pose cette question,
05:47 c'est qu'on ne comprend pas ce qu'est l'emprise.
05:49 Et donc je me suis dit, je vais raconter
05:50 comment c'est difficile d'en sortir
05:51 pour faire comprendre comment on peut être sous emprise.
05:55 - C'est plus fort que ça, votre documentaire.
05:57 Je vais vous dire ce que j'ai appris.
05:58 Quand on voit des femmes sous emprise avec un mari toxique,
06:01 on dit "pourquoi elle ne part pas ?"
06:02 Mais une fois qu'elle part, on imagine qu'elle va mieux.
06:04 Or là, ils partent et ils souffrent.
06:06 On va entendre le témoignage de David.
06:07 David, il était dans un groupe qui s'appelle...
06:10 Je ne retrouve plus le mot que je l'ai noté.
06:12 - Les Guerres et Lumières.
06:12 - Les Guerres et Lumières.
06:13 En gros, en quoi ça consistait ?
06:14 D'abord, il a vu des gens qui étaient à la Villette,
06:16 qui faisaient du Kung-Fu.
06:17 Il allait leur parler et il s'est retrouvé embrigadé.
06:19 - Évidemment, le groupe au début, il ne dit pas "viens dans ma secte".
06:22 Ça se passe sur des mois et des années d'embrigadement,
06:25 mais subtil.
06:26 C'est des petits trucs.
06:27 C'est "viens, je te fais une psychothérapie".
06:29 "On va faire des cercles d'éveil".
06:30 Il parle de philo.
06:31 Et puis, petit à petit, il parle de théorie complotiste.
06:35 Ce que vous disiez sur la déprise, c'est qu'en fait,
06:37 une fois qu'on est coupé, parce qu'on est isolé,
06:40 coupé de sa famille, qu'on n'a plus de boulot, de ses amis,
06:43 en fait, le prix à payer pour sortir est plus fort que si on reste.
06:46 Et donc, ce n'est pas de la lâcheté, ce n'est pas de la faiblesse.
06:49 C'est qu'en fait, ils font des calculs parce qu'eux-mêmes,
06:51 des fois, ils se disent "il y a un truc qui ne va pas".
06:53 Et en fait, c'est trop dur de sortir si personne ne les attend.
06:56 C'est pour ça que c'est aussi important d'avoir ces mains tendues.
06:59 Toutes les associations disent "ne coupez jamais la porte",
07:02 enfin "ne fermez jamais la porte".
07:03 On va entendre justement ce que disent les assos.
07:05 D'abord, on va entendre le témoignage de David.
07:07 Il raconte ce qui s'est passé pour lui une fois qu'il était exclu de la secte,
07:10 car il était exclu, car il n'y croyait plus tout simplement.
07:13 Et plutôt que d'avoir au sein même de la secte, quelqu'un qui doute,
07:16 il préférait qu'il soit dehors pour ne pas contaminer,
07:19 si j'ose dire, le reste du troupeau.
07:21 On aurait pu penser qu'il en était débarrassé de cette secte, oui,
07:24 mais c'est plus compliqué et c'est plus douloureux que ça.
07:28 Je sors de là et je me rends compte que la famille que je croyais être une famille n'est pas une famille.
07:32 Du jour au lendemain, je n'ai plus une nouvelle de personne.
07:34 Personne et j'ai aidé tout le monde.
07:35 J'ai fait de mal à personne et du jour au lendemain, ostracisé.
07:39 C'est comme dans "Législation Ancienne".
07:41 On réit le nom, on ne prononce plus, il n'existe plus, c'est fini.
07:44 Il est effacé.
07:46 La déprise, c'est un moment où on est face à soi.
07:49 Mais genre c'est le silence.
07:50 Tu te mets dans une pièce, dans un château, elle n'est même pas éclairée.
07:54 Le château, il est vide.
07:55 Le terrain de milliers d'hectares, il est vide autour.
07:57 Et tu es seul comme ça.
07:58 Et tu restes comme ça, dans le noir.
08:00 Tu te dis "Qu'est-ce que je fais maintenant ?"
08:02 Et David lance un appel, il dit "J'en profite pour dire aux familles, soyez proches".
08:05 Ce qui est intéressant dans votre documentaire, c'est qu'il y a des solutions.
08:08 En tout cas, moi je pense que l'adepte, il n'y a que lui qui peut s'en sortir,
08:13 puisqu'il s'est lui-même mis des verrous dans la tête.
08:15 Donc les familles, on ne peut pas les culpabiliser en leur disant
08:19 "Ce n'est pas eux qui vont les sortir".
08:20 Mais par contre, les mains tendues permettent qu'on puisse se re-socialiser.
08:24 C'est ce que raconte Nicolas Jaquette.
08:26 C'est-à-dire qu'il faut prévoir plein d'activités,
08:28 il faut être là bienveillant, ne pas juger, ne pas dire,
08:31 ne pas juger les pensées qu'ils ont crues, qui sont totalement délirantes.
08:34 Et donc c'est tout un maillage affectif et social
08:38 qui est très important pour récupérer...
08:40 Parce qu'en fait, ils sautent dans le vide quand ils sortent.
08:42 C'est comme des nouveaux-nés, en fait.
08:43 Ils doivent tout réapprendre.
08:45 - Il y a aussi, on le voit dans votre documentaire, la quémade.
08:48 Qu'est-ce que la quémade ?
08:49 - C'est une cellule d'enquêteurs.
08:51 Ils ne sont que 8 en France.
08:52 Ils sont ultra spécialisés.
08:53 Ils sont un enterre à l'OCRVP.
08:55 Et ils enquêtent à peu près 25 dossiers par an.
08:58 C'est eux qui permettent qu'on arrête les gourous
09:00 et qu'on combatte les sectes.
09:02 - Dans votre doc, il y a 5 personnages, 4 hommes, 1 seule femme.
09:06 C'est parce que Julia était la seule femme qui acceptait de parler ?
09:09 Ou alors c'est représentatif de l'emprise des sectes
09:11 qui touche davantage les hommes que les femmes ?
09:13 - Non, c'est des choix qui ont été faits comme ça de façon humaine.
09:16 Je pense qu'il y a énormément actuellement de femmes
09:18 qui tombent dans des sectes ou qui sont happées par des gourous,
09:21 notamment dans le développement personnel, le reiki,
09:23 le sacré féminin, le New Age.
09:26 Ça fait des ravages via Internet.
09:28 - Le New Age ?
09:30 - Oui, le New Age en fait.
09:31 Et le développement personnel, et la santé.
09:33 - Pas la musique, Philippe.
09:34 - Oui, non, c'est pas ça.
09:35 Mais c'est que le New Age,
09:36 moi je viens d'un journal qui s'appelait Actuel,
09:37 et le New Age, c'était considéré comme
09:39 une espèce d'immense espace d'émancipation
09:41 et justement de douceur.
09:42 Le contraire de quelque chose de sectaire.
09:44 - Mais comme le reiki.
09:45 - Comme quoi il faut se méfier de tout.
09:47 Merci beaucoup, Karine Dufour.
09:49 Je rappelle ce documentaire,
09:50 votre doc, Adeptes de l'emprise à la déprise.
09:53 C'est sur Arte après-demain, mercredi 21.
09:55 Il est déjà à voir sur arte.tv.