Dans son édito du 03/07/2023, Paul Sugy revient sur le retour de la sociologie de l'excuse.
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00:00 Oui Romain, c'est la double peine, comme si ce n'était pas assez de voir le pays se consumer un peu plus chaque nuit,
00:04 il faut en même temps supporter cette tentative désespérée de la part des intellectuels,
00:08 certains intellectuels, de prétendre avoir le dernier mot sur la nature des faits, sur leur explication causale,
00:13 eux pourtant, dont parfois la complaisance à l'égard de la colère de la rue,
00:17 et même le refus d'appeler au calme, finalement les remcomplissent du déchaînement de violences en cours.
00:21 C'est le grand retour Romain, de la sociologie de l'excuse,
00:24 celle qui écrase l'individu sous le joux du fait social,
00:27 celle qui néglige la liberté de conscience individuelle pour ne plus lire le monde,
00:31 callone de déterminisme mécanique contre lesquels on ne peut rien.
00:35 Je vous en donne quelques exemples, pour le sociologue Geoffroy de Laganerie,
00:38 tirer des feux d'artifice sur les forces de l'ordre,
00:41 c'est envoyer un message de détresse contre les violences policières, rien que ça.
00:45 On voit son tweet qui s'affiche à l'écran.
00:47 Pour Sandrine Rousseau, économiste et députée écologiste,
00:50 les pillages de magasins de marques, c'est l'expression d'un sentiment de pauvreté ou de relégation.
00:55 Ou encore pour le politiste du CNRS Sébastien de Rocher,
00:58 si les émeutiers brûlent des écoles, c'est pour mieux lutter contre les expériences d'exclusion scolaire
01:03 et même la ségrégation ethnique à l'école.
01:06 En fait, en raisonnant ainsi, on en vient à tout justifier.
01:09 Oui, et une fois que vous avez compris comment ça marche,
01:11 au fond, c'est pas très difficile d'être un bon sociologue de gauche.
01:14 Je vous en donne quelques exemples farfelus.
01:16 On pourrait dire que s'ils brûlent des voitures, par exemple,
01:19 les émeutiers c'est pour exprimer leur éco-anxiété légitime
01:21 face à l'inaction climatique du gouvernement et des constructeurs automobiles,
01:24 ou quand ils s'en prennent à l'épouse et aux enfants d'un maire,
01:27 c'est pour renverser le modèle bourgeois de la famille traditionnelle
01:30 et s'émanciper du carcan hétéropatriarcal.
01:32 Ne dites surtout pas, en revanche, aux sociologues qu'ils ont aussi menacé un bar LGBT à Brest
01:37 en appelant à "brûler les pédés", parce que là vous risquez de susciter un infarctus.
01:42 Mais enfin, quoi qu'il en soit, cette sociologie de l'excuse
01:44 qui explique la violence physique par une prétendue violence sociale,
01:48 eh bien, néglige d'abord dans son raisonnement le montant considérable, évidemment,
01:51 des aides qui ont été versées aux quartiers au nom de la politique de la ville,
01:54 et surtout, elle fait de la mort de Naël un crime raciste,
01:58 ce qu'aucun élément de l'enquête ne permet aujourd'hui de formuler,
02:01 ne serait-ce qu'à titre d'hypothèse.
02:03 Selon vous, Paul, la pauvreté n'a rien à voir avec ça.
02:06 Je ne crois pas. Je ne suis même pas certain, Romain, qu'on puisse politiser ces violences
02:10 qui me semblent, pour l'essentiel, foncièrement aveugles, instinctives et donc infrapolitiques,
02:14 mues surtout ou d'abord par une détestation féroce de la société française
02:17 et de l'autorité légitime qui la représente.
02:20 Mais si l'on reprend l'idée de la pauvreté et donc de la relégation sociale,
02:24 si l'argument était valable, on assisterait aux mêmes scènes de pillage et d'émeute dans la Creuse
02:28 qu'en Seine-Saint-Denis ou à Nanterre, où les taux de pauvreté sont quasiment équivalents à la Creuse en métropole,
02:33 si le deuxième département français est le plus pauvre.
02:35 Ça, c'est une première chose.
02:36 Et ensuite, Romain, le problème, surtout, du raisonnement sociologique,
02:39 c'est qu'il est aveugle face au sens moral et à la décence des individus.
02:43 Par exemple, dans la cité Pablo Picasso de Nanterre,
02:45 vous avez certes une petite minorité d'individus violents qui caillassent les forces de l'ordre
02:49 depuis quelques nuits, mais vous avez l'extrême majorité de cette cité qui vit chez elle, recluse,
02:54 inquiète même par la violence qui s'exprime.
02:56 Et pourtant, les conditions sociales de ces familles sont les mêmes.
02:58 Pourquoi est-ce que certains individus sont dehors et se livrent aux violences face aux forces de l'ordre
03:03 pendant que les autres se tiennent tranquillement à l'écart de tout cela ?
03:06 La sociologie n'a rien à dire à cette question.
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