L'édito de Paul Sugy : «Gérard Depardieu dans la tempête de #MeToo»

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Dans son édito du 02/10/2023, Paul Sugy revient sur Gérard Depardieu dans la tempête de #MeToo. 
Transcript
00:00 Oui, effectivement, il a été mis en examen dans une affaire,
00:02 même si 13 femmes avaient, dans Mediapart, porté des accusations contre lui,
00:05 mais des accusations qui sont restées médiatiques.
00:07 Et puis une autre ensuite sur France Inter
00:09 et qui concerne des agressions sexuelles ou des propos qu'il aurait tenus
00:13 dans notamment le contexte de tournage de ses films.
00:16 Mais là, il s'agit donc d'une femme qui serait venue à deux reprises
00:19 chez Gérard Depardieu et qui dit avoir été à chaque fois violée.
00:22 Gérard Depardieu s'exprime à ce sujet pour la première fois
00:25 et il écrit dans cette lettre que publie Le Figaro ce matin.
00:28 "Une femme est venue chez moi une première fois, le pas léger,
00:31 montant de son plein gré dans ma chambre et elle dit aujourd'hui avoir été violée.
00:34 Elle y est revenue une seconde fois.
00:36 Il n'y a jamais eu entre nous ni contrainte, ni violence, ni protestation."
00:39 Et là, il donne une explication qui serait le motif selon lui
00:42 des accusations que cette femme a portées contre lui.
00:44 Il écrit "Elle voulait chanter avec moi les chansons de Barbara au cirque d'hiver
00:48 et je lui ai dit non."
00:49 Sa version, c'est une femme dont les ambitions artistiques
00:51 auraient été contrariées par sa décision et donc qui aurait choisi de se venger.
00:56 Dans tous les cas, c'est la version de Gérard Depardieu.
00:58 Il a ensuite des propos qui sont plus une réflexion,
01:01 une méditation même sur le fond de l'affaire #MeToo.
01:03 C'est-à-dire qu'il écrit "Cette femme dit être sous emprise,
01:06 mais on est tous sous emprise.
01:07 Moi-même, je suis sous emprise.
01:08 Mon ADN, la famille, la société, l'argent, le spectacle, l'alcool, le cinéma
01:12 qui ont fait de moi une nature."
01:13 Ce qu'il dit en d'autres termes, c'est que les raisons profondes
01:16 qui ont poussé cette femme manifestement à avoir une relation avec lui,
01:19 lui appartiennent, mais que ce n'est pas nécessairement
01:22 parce qu'après coup, elle l'a regretté ou qu'elle a estimé être sous emprise,
01:25 que cette emprise était nécessairement le fait d'une attitude criminelle
01:28 de Gérard Depardieu.
01:29 Alors, il s'exprime un peu plus loin dans cette lettre, dans cette tribune,
01:32 sur le comportement général qui a pu lui être reproché,
01:35 notamment par ses accusatrices dans la presse.
01:38 Il dit donc "J'ai fait souvent ce que personne n'ose faire,
01:40 testé les limites, bousculé les certitudes, les habitudes
01:43 et sur un plateau entre deux prises, entre deux tensions,
01:46 rire et faire rire.
01:47 Tout le monde n'a pas ri."
01:49 C'est le moins qu'on puisse dire manifestement.
01:51 "Si pensant vivre intensément le présent, j'ai blessé, choqué qui que ce soit.
01:54 Je n'ai jamais pensé à faire de mal et je vous prie de m'excuser
01:57 de m'être comporté comme un enfant qui veut amuser la galerie."
01:59 Et surtout, ce qu'il explique dans cette tribune,
02:01 c'est que maintenant, le tribunal médiatique dressé contre lui,
02:05 lui empêche de produire un certain nombre de spectacles et de représentations
02:08 puisqu'il y a des militants de féministes qui viennent essayer
02:11 en quelque sorte d'empêcher le spectacle en faisant du bruit,
02:13 en essayant de recouvrir la voix de Gérard Depardieu
02:15 lorsqu'il veut chanter les chansons de Barbara.
02:17 C'est arrivé à plusieurs reprises dans des villes où il devait se produire.
02:20 Il dit "Voir concert après concert des extrémistes sans regard."
02:23 Je trouve l'expression magnifique.
02:25 "Des extrémistes sans regard brandir des pancartes calomnieuses,
02:28 souillées, vandalisées, interrompre en hurlant les chansons de Barbara.
02:31 Eh bien, c'est l'intérêt à nouveau au tribunal médiatique,
02:34 au lynchage qui m'a été réservé.
02:36 Je n'ai que ma parole à opposer."
02:38 - Bon, c'est vrai que ce n'est que sa parole
02:40 contre la parole d'une femme qu'il accuse de viol.
02:42 À présent, c'est à la justice de faire son travail, Paul.
02:44 - Oui, tout à fait. Je n'étais pas dans la chambre de Gérard Depardieu.
02:47 Vous n'y étiez pas non plus. Personne n'y était à part les deux protagonistes.
02:49 Et la justice en est saisie puisque Gérard Depardieu est mis en examen.
02:53 Simplement, ce que je constate, c'est qu'il a en quelque sorte déjà été jugé.
02:57 Lorsqu'on voit qu'il y a quelques semaines,
02:58 il était vincé d'un film d'animation avec Michel Anavisius
03:01 à cause de ses accusations.
03:03 Lorsqu'il est empêché de chanter Barbara,
03:05 eh bien, on a l'impression que la justice se fait déjà
03:07 alors que le tribunal lui-même n'a pas tranché.
03:10 On a du mal à ne pas penser aussi à la carrière de Kevin Spacey,
03:13 acteur deux fois oscarisé qui s'est interrompu brutalement
03:16 après des accusations portées contre lui,
03:17 alors même que celles-ci ont finalement été démenties
03:20 à deux reprises par les tribunaux américains.
03:22 Pour l'instant, en tout cas, Gérard Depardieu semble tenir bon
03:26 et il a l'air décidé à défendre son honneur.
03:27 Oui, c'est certainement aussi ce qui exaspère le plus
03:29 ces accusatrices ou les militantes du mouvement #MeToo.
03:32 On a l'impression qu'il y a bien plus que Gérard Depardieu dans cette affaire.
03:35 C'est un peu l'exception française du mouvement #MeToo.
03:39 Polanski a été césarisé malgré les accusations et procès contre lui.
03:43 Woody Allen tourne en France comme si c'était un peu le seul lieu d'exil
03:46 où il pouvait s'échapper après la tempête aux États-Unis.
03:50 Johnny Depp était à Cannes.
03:51 On a l'impression qu'effectivement le cinéma français
03:53 peut-être excuse un peu davantage les artistes.
03:57 C'est aujourd'hui ce que les féministes reprochent
04:00 essentiellement à ce milieu et à Gérard Depardieu en particulier.
04:03 [Générique]

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