Urgences vitales et tri des patients : Aurélie, médecin urgentiste, nous emmène dans son quotidien
Bienvenue aux urgences : on a passé 5 nuits auprès d’Aurélie, médecin urgentiste à l’hôpital de Saint-Denis. Elle nous emmène dans son quotidien, entre urgences vitales et tri des patients, et nous raconte un système au bord de la rupture
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00:00 Quand tu rentres ici, tu sais jamais comment va ta nuit.
00:02 Ah putain, tout ce que tu fais là, la merde de vie.
00:05 Moi j'aime beaucoup ce que tu fais, mais c'est fatiguant.
00:07 Ça fait que deux ans que tu es là et j'en peux plus.
00:10 Ça sent fort là.
00:12 Il y a des insectes là, monsieur.
00:13 Il faut qu'on s'accroche parce que sinon l'hôpital va s'éteindre.
00:17 Et donc c'est les plus pauvres qui subissent les conséquences de ça.
00:21 Oh, c'est pas marrant.
00:24 Je sais que c'est pas marrant.
00:25 [Les pompiers sont en train de sortir]
00:30 Ils sont déjà partis les pompiers ?
00:32 Vous avez des...
00:33 - Ils sont en train de sortir. - D'argenteuil.
00:35 Bonjour monsieur.
00:36 Je peux avoir une amie pour les 200 ?
00:38 - Le 200. - Hein ?
00:40 - Les 200, je mets les 11. - Il est content.
00:42 - Les 200, je mets les 11. - Monsieur !
00:44 Bonjour, vous êtes à l'hôpital.
00:46 Merci. Et où l'ont mis les 200 ?
00:48 - Ah, il est bien. - Les 200, il est...
00:50 Est-ce que vous avez mal quelque part ?
00:52 Dans la tête, ça fait mal ou pas ?
00:54 Dans la tête, ça fait mal ?
00:56 - Non. - Dans la poitrine, ça fait mal ?
00:58 - Non. - D'accord. Bougez les jambes.
01:00 - Bougez les deux jambes, s'il vous plaît. - Oui.
01:02 - Bougez les jambes. - Pourquoi vous ne me donnez pas
01:05 - 100 000 euros ? - Bonne avance.
01:07 Il est un peu dur. On arrive à avoir un contact quand même.
01:09 Mais t'as vu, il faut être un peu ferme avec lui, tu vois.
01:11 Donc tu vois, vu que là, Alicia, t'as un patient qui répond pas,
01:14 et bah, enfin, tu vois, qui va pas vraiment faire,
01:16 il faut que toi-même, tu fasses des examens pour voir.
01:18 Donc j'ai pas l'impression qu'il ait le déficit évident.
01:20 Là, je me pose la question, parce qu'il tient un peu moins bien, tu vois.
01:23 Tenez la jambe ! Tenez la jambe !
01:25 Tu vois, il la tient.
01:27 - Oui. - Ouais, c'est bon.
01:29 Je prescris le bilan, l'IRM, la totale.
01:34 Oui, bonjour madame, docteur Girard, aux urgences de Saint-Denis.
01:38 Vous êtes la femme de monsieur...
01:40 Oui ?
01:42 Donc, effectivement, là, il est aux urgences de Saint-Denis.
01:46 Il a été transféré d'Argenteuil
01:48 parce qu'une confusion qui vient brutalement comme ça,
01:52 ça peut être évocateur d'un AVC.
01:54 Vous imaginez bien qu'on est un peu dans une course contre la montre
01:57 pour faire en sorte d'avoir le moins de lésions possible
02:00 si c'est bel et bien un AVC.
02:02 Donc, je vais noter votre numéro tout de suite dans le dossier,
02:05 et dès que j'ai un peu plus de réponses, je vous rappelle, d'accord ?
02:08 À tout de suite.
02:10 Au revoir.
02:12 Donc, il est prof de gestion à 70 ans.
02:15 Franchement...
02:16 Mais normalement, c'est le neurologue...
02:19 Franchement, stylé. Il y a quand même des gens stylés dans ce monde.
02:22 Mais bon, là, tu te dis vraiment, le mec...
02:25 Allait très bien il y a 5 heures,
02:27 et là, ça se trouve, il va être handicapé à vie, quoi.
02:30 OK.
02:34 Je sais pas, on voit combien de malades dans une garde ?
02:36 On voit...
02:37 Minimum 20.
02:38 Tu vois, minimum 20.
02:40 Après, ça va de la consultation très facile
02:44 au cas qu'ils vont te prendre 8 heures ou tu vas pas t'en sortir, tu vois.
02:47 Donc, les chiffres, ça fait un peu de travail.
02:49 Mais ça, c'est pas un problème.
02:50 Et puis, il y a aussi des choses qui sont très difficiles.
02:52 Donc, c'est pas un problème.
02:53 Mais ça, c'est pas un problème.
02:54 Et puis, ça, c'est pas un problème.
02:55 Et puis, c'est pas un problème.
02:56 Et puis, c'est pas un problème.
02:57 Et puis, c'est pas un problème.
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03:16 Et puis, c'est pas un problème.
03:17 Et puis, c'est pas un problème.
03:18 Est-ce que je mets un jeune de 19 ans qui a hyper mal à cause de sa drépanocytose
03:22 dans un lit ?
03:23 Ou est-ce que je mets un monsieur de 81 ans qui a un AVC et pour lequel il n'y a pas
03:27 de place en euros ?
03:28 Et donc, voilà, on est obligé de choisir.
03:32 - Bonjour, monsieur.
03:47 - Bonjour.
03:51 - Racontez-moi ce qui vous amène.
03:53 - Eh bien, c'est...
03:54 Cette nuit, j'ai voulu...
03:55 De mon coffre, j'ai soulevé un pack d'eau.
03:56 - Ouais.
03:57 - Et j'ai voulu...
03:58 - C'est un truc qui est très...
03:59 - C'est un truc qui est très...
04:00 - C'est un truc qui est très...
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08:56 - C'est un truc qui est très...
08:58 - Parce que ça sent fort, là !
08:59 - Y a des insectes, là, monsieur.
09:03 - C'est la conséquence directe de gens qui...
09:05 - Trouvent pas de médecin généraliste.
09:07 - Savent plus quoi faire, ont mal.
09:09 - Et donc, consultent parce qu'ils viennent pas par plaisir aux urgences.
09:12 - Les gens, ils viennent jamais par plaisir ici.
09:14 - Vous avez quoi comme couverture sociale ?
09:16 - Même pas rien.
09:17 - Rien ?
09:18 - Je peux vous donner le contact d'une assistante sociale ?
09:20 - Oui, s'il vous plaît.
09:21 - C'est beaucoup plus important et beaucoup plus compliqué, aujourd'hui, finalement,
09:24 - C'est beaucoup plus compliqué, aujourd'hui, finalement,
09:25 - de trouver un médecin généraliste,
09:26 - quelqu'un qui va vous suivre de manière assez complète,
09:28 - que finalement, d'avoir accès à un médecin,
09:31 - aujourd'hui, avec la téléconsultation, docto-libre.
09:33 - On voit se multiplier cette offre-là,
09:36 - et tant mieux, on en a besoin.
09:37 - Mais en fait, quand on creuse le sujet,
09:39 - ça reste, comme notre chef le dit, de la médecine fast-food,
09:43 - et ça, c'est très compliqué,
09:45 - notamment pour la patientèle qu'on a ici.
09:47 - Non, on parle français !
09:51 - Ça, je pourrais pas comprendre.
09:53 - Parlez-moi en français.
09:54 - Je vois que vous parlez très bien français.
09:56 - Comme d'hab', on revient à la partie sociale,
10:06 - mais, en fait, le patient qui parle pas français,
10:08 - qui a pas de couverture sociale,
10:09 - et qui sait pas où aller,
10:10 - bah, en fait, à part les urgences en rouge,
10:12 - ouvertes dans les 4 heures sur 24,
10:14 - je vois pas comment d'autres,
10:16 - ils pourraient être insérés dans un circuit, en fait,
10:18 - si on est très honnêtes.
10:19 - Si l'hôpital le fait pas, il reste quoi, quoi ?
10:21 [Sonnerie de téléphone]
10:23 - Parce que, nous, pour l'instant,
10:28 - on a 3 patients qu'on doit garder.
10:30 - Alors, ce qu'il faut savoir,
10:32 - c'est que j'ai renforcé les urgences
10:34 - avec le renfort du renfort.
10:36 - Le renfort du renfort ?
10:38 - Voilà.
10:39 - Parce qu'on a pas beaucoup de lits.
10:41 - Ouais, mais il vaut mieux mettre un AVC en gastro,
10:44 - ou l'héberger en chir pour que la neuro le refrègne ?
10:46 - On l'héberge, non ?
10:47 - Ouais, on l'héberge.
10:48 - Normalement, oui.
10:50 - D'accord.
10:51 - Bah, on va héberger en chir.
10:53 - Quand tu rentres ici,
10:58 - tu sais jamais comment va ta nuit,
11:00 - ou ta journée.
11:01 - J'ai commencé à 21h,
11:06 - j'ai dû partir tout à l'heure,
11:07 - j'ai eu une transpiration.
11:08 - Voilà, j'ai travaillé,
11:09 - j'ai couru dans tous les sens.
11:11 - C'est sûr qu'elle est partie ?
11:12 - Les pilules d'azolie,
11:13 - les patients qui vont à Galles,
11:15 - les changes, les...
11:16 - Voilà, le travail qu'il y a autour
11:18 - pour 1500€.
11:20 - Non, 1000.
11:21 - Non, pas que ça.
11:22 - Sans les primes,
11:23 - je te jure que c'est ça, le fixe.
11:24 - Le salaire, pour moi,
11:25 - il doit être proportionnel
11:26 - à la charge de travail.
11:27 - Et il n'est pas proportionnel.
11:29 - Parce que là,
11:30 - vous faites combien d'heures semaine ?
11:31 - Minimum à 40h par semaine.
11:32 - C'est vraiment le minimum.
11:33 - En moyenne, c'est ça.
11:35 - 40 à 60h.
11:36 - Ah, t'en épluches pas !
11:38 - Ah, vous me faites mal !
11:39 - Ah, putain,
11:41 - tout ce que tu fais là,
11:42 - la merde de vie !
11:43 - Il y a plus de violence aussi,
11:45 - il y a plus de violence conjugale.
11:46 - Il y a plus de violence.
11:47 - Ouais, on se sent pas du tout protégés,
11:49 - on a moins de sécurité.
11:50 - Les patients sont très agressifs,
11:51 - parce que du coup, forcément,
11:52 - vu qu'il y a moins de personnel,
11:54 - il y a beaucoup d'attentes.
11:55 - Donc, les gens s'impatientent,
11:57 - et du coup, ça va se faire rapidement
12:00 - en insultes, en violence,
12:02 - voilà, tout ce qui se passe.
12:04 - Le manque d'effectifs,
12:05 - ça fait une baisse d'empathie,
12:07 - je trouve déjà.
12:08 - On est moins patchy que avant.
12:09 - Une baisse d'empathie,
12:10 - et aussi, ça se ressemble à
12:11 - plus de patience,
12:12 - et on est moins...
12:13 - On prend moins les soins, en fait.
12:14 - Oui, voilà, ça se ressemble.
12:15 - On fait juste du travail à la chaîne,
12:16 - c'est même plus...
12:17 - Parce qu'on n'a pas le temps
12:18 - de prendre en charge
12:19 - le patient correctement.
12:20 - Après, on est consciencieux,
12:21 - quand même, dans notre travail,
12:22 - on va pas faire des choses...
12:23 - Mais on les fait tellement
12:24 - rapidement et tellement
12:25 - machinalement,
12:26 - qu'on ne prend plus le temps
12:27 - de discuter avec le patient,
12:28 - de voir s'il va mieux,
12:29 - pourquoi il est dans ces conditions,
12:30 - pourquoi il est comme ça,
12:31 - parce que des fois,
12:32 - c'est une détresse psychologique
12:33 - pour le patient,
12:34 - si on passe à des urgences,
12:35 - et on n'a pas le temps,
12:36 - forcément,
12:37 - de discuter avec lui.
12:38 - C'est juste faire les soins
12:39 - et partir.
12:40 - Vous pensez réussir
12:41 - à faire ça longtemps,
12:42 - dans ces conditions-là ?
12:43 - Moi, non.
12:44 - Je suis en train de gâcher
12:45 - ma jeunesse, ici.
12:46 - Non, mais c'est vrai,
12:47 - on est tout le temps là,
12:48 - je ne sors plus,
12:49 - je ne vois plus personne,
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14:43 - la même situation.
14:44 - On est toujours dans
14:45 - la même situation.
14:46 - On est toujours dans
14:47 - la même situation.
14:48 - On est toujours dans
14:49 - la même situation.
14:50 - On est toujours dans
14:51 - la même situation.
14:52 - On est toujours dans
14:53 - la même situation.
14:54 - On est toujours dans
14:55 - la même situation.
14:56 - On est toujours dans
14:57 - la même situation.
14:58 - On est toujours dans
14:59 - la même situation.
15:00 - On est toujours dans
15:01 - la même situation.
15:02 - On est toujours dans
15:03 - la même situation.
15:04 - On est toujours dans
15:05 - la même situation.
15:06 - On est toujours dans
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15:37 - la même situation.
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15:41 - la même situation.
15:42 - On est toujours dans
15:43 - la même situation.
15:44 - On est toujours dans
15:45 - la même situation.
15:46 - On est toujours dans
15:47 - la même situation.
15:48 - On est toujours dans
15:49 - la même situation.
15:50 - On est toujours dans
15:51 - la même situation.
15:52 - On est toujours dans
15:53 - la même situation.
15:54 - Il a de la fièvre, certes,
15:55 - mais c'est pas un motif
15:56 - de transférer les patients
15:57 - aux urgences
15:58 - itérativement tous les jours.
15:59 - Voyez ce que je veux dire ?
16:00 - Hier, vous vous rendez compte
16:01 - qu'on l'a déjà vu pendant 6 heures.
16:02 - On lui a fait sa prise de sang.
16:03 - On a dû le sédater
16:04 - pour lui faire un scanner.
16:05 - Franchement, c'est pas...
16:06 - Ne serait-ce que éthiquement
16:07 - pour lui, au bout d'un moment,
16:08 - j'en ai marre de lui faire
16:09 - des examens dans tous les sens,
16:10 - alors qu'en fait,
16:11 - on sait même pas
16:12 - ce qu'on cherche.
16:13 - Voyez ce que je veux dire ?
16:14 - C'est pas correct,
16:16 - Vous êtes déjà au maximum.
16:17 - D'accord ?
16:18 - C'est pas à vous
16:19 - d'organiser
16:20 - les explorations neurologiques
16:21 - de votre papa.
16:22 - C'est au médecin
16:23 - qui s'en occupe
16:24 - de faire tout ça.
16:25 - Lui, c'est un vrai exemple
16:28 - de problème structurel.
16:29 - C'est-à-dire que
16:30 - t'as une infirmière
16:31 - qui est en train
16:32 - de faire des tests
16:33 - et qui est en train
16:34 - de faire des tests
16:35 - pour voir si ça marche.
16:36 - C'est un vrai exemple
16:37 - de problème structurel.
16:38 - C'est-à-dire que
16:39 - t'as une infirmière
16:40 - qui est en train
16:41 - de faire des tests
16:42 - pour voir si ça marche.
16:43 - C'est un vrai exemple
16:44 - de problème structurel.
16:45 - C'est-à-dire que
16:46 - t'as une infirmière
16:47 - au téléphone
16:48 - qui te dit
16:49 - "en fait, j'avais
16:50 - une patiente grave
16:51 - que je devais gérer,
16:52 - je suis toute seule
16:53 - et lui, il déambule
16:54 - partout, je ne pouvais
16:55 - pas le gérer."
16:56 - Quand tu demandes
16:57 - si y a un médecin
16:58 - coordinateur,
16:59 - elle te dit "il est plus là
17:00 - depuis janvier,
17:01 - donc y a un remplaçant
17:02 - qui vient une demi-matinée
17:03 - par semaine."
17:04 - T'as là, en plus,
17:05 - en l'occurrence,
17:06 - une famille qui est présente,
17:07 - c'est un vrai problème structurel.
17:08 - Tu l'as tous derrière toi.
17:21 - Bon, y a dommage pour lui.
17:26 - Y a-t-il aucun symptôme ?
17:28 - Il est complètement confus.
17:31 - Mais genre chaud.
17:33 - C'est fréquent pour la localisation ?
17:36 - C'est temporo,
17:37 - temps de...
17:38 - C'est tout son air de verniquet,
17:40 - tout son air du langage.
17:41 - Le mec, il est prof de gestion
17:43 - à 70 ans,
17:44 - en école de commerce,
17:45 - il était en cours tout à l'heure.
17:46 - C'est chaud, c'est triste.
17:48 - Finalement, ça saigne
17:54 - à l'intérieur de sa tête.
17:55 - Donc là, faut croiser les doigts
17:57 - pour que le saignement
17:58 - se résorbe.
17:59 - Pendant cette phase aiguë
18:01 - de quelques jours,
18:02 - il va rester dans un centre spécialisé
18:03 - pour être sûr que les choses
18:05 - ne s'aggravent pas.
18:06 - Et à partir du moment
18:07 - où on sait que c'est stable,
18:08 - ils peuvent, je pense,
18:09 - avoir une idée
18:10 - de ce qu'il va garder, malheureusement,
18:12 - et le potentiel de récupération
18:14 - qu'il va avoir.
18:15 - Et puis voilà, mais bon...
18:16 - Un monsieur qui était encore
18:17 - en activité jusqu'à aujourd'hui,
18:19 - je pense quand même que...
18:21 - il n'y aura aucun retour
18:22 - à l'état antérieur possible.
18:24 - Quand on voit la taille
18:25 - de son saignement,
18:26 - je lui souhaite de récupérer
18:27 - au maximum,
18:28 - mais intégralement,
18:29 - j'ai du mal à y croire.
18:30 - Comment tu gères en toi
18:33 - les impacts des maladies,
18:35 - de l'émotion, éventuellement ?
18:37 - Comment on gère ?
18:40 - Il faut toujours avoir
18:41 - beaucoup d'humilité,
18:42 - parce que le principal concerné,
18:44 - c'est le malade,
18:45 - c'est pas moi.
18:46 - Ensuite, tu prends du recul,
18:48 - c'est-à-dire que moi,
18:49 - je me dis toujours,
18:50 - j'assiste à la proportion
18:52 - de choses comme ça qui arrivent.
18:54 - C'est sûr qu'on la voit
18:55 - de manière très condensée
18:56 - dans notre métier,
18:57 - mais c'est en fait,
18:58 - entre guillemets,
18:59 - juste la part statistique
19:00 - de gens malades.
19:01 - On voit de cette façon,
19:02 - on voit de très près
19:03 - dans notre boulot.
19:04 - Donc on gère comme ça,
19:06 - avec un peu d'équilibre,
19:07 - de recul,
19:08 - beaucoup de discussion
19:09 - entre nous.
19:10 - On se le vit,
19:11 - et puis voilà.
19:12 - Ça va, monsieur ?
19:19 - Ça fait mal dans la tête ?
19:22 - Ouais ?
19:23 - Vous avez mal, là, à la tête ?
19:25 - On va vous mettre
19:26 - quelque chose pour la douleur.
19:27 - D'accord ?
19:28 - Vous savez où vous êtes, ici ?
19:31 - Ou pas ?
19:32 - Vous savez où vous êtes ?
19:34 - Oui, ça revient.
19:36 - Ça revient ?
19:37 - Ça revient.
19:38 - Comment vous vous sentez ?
19:39 - J'ai coma.
19:41 - J'ai coma.
19:42 - Ouais ?
19:43 - Déjà.
19:44 - D'accord.
19:45 - Vous comprenez ce que je vous dis ?
19:47 - C'est ok.
19:48 - D'accord.
19:49 - Vous avez des questions, ou pas ?
19:50 - Ça va.
19:51 - Ça va ?
19:52 - Je peux recouper
19:53 - le téléphone.
19:54 - Le téléphone.
19:55 - Le téléphone.
19:56 - Le téléphone.
19:57 - Pour l'instant,
19:58 - on vous laisse vous reposer, ok ?
19:59 - Oui.
20:00 - Et,
20:01 - le prévoir,
20:02 - les mots en bas.
20:03 - Vous énervez pas, monsieur,
20:06 - c'est normal.
20:07 - C'est normal que la tête,
20:08 - elle aille pas.
20:09 - C'est normal que vous...
20:10 - que les mots qui sortent
20:11 - soient pas les bons.
20:12 - Mais vous inquiétez pas, ok ?
20:13 - D'accord.
20:14 [Musique]
20:37 - Ça va, Thomas ?
20:38 - T'as du feu, toi ?
20:39 - Pas grave.
20:40 - Je vais limiter ta cigarette.
20:43 - Je suis un peu étonné,
20:44 - parce que lui,
20:45 - il y a pas longtemps,
20:46 - il est sorti de l'hôpital,
20:47 - il y a pas très longtemps.
20:48 - Ça va ?
20:51 - Ça va.
20:52 - Ça va, monsieur ?
20:53 - Ça va bien ?
20:55 - Mais, je sais pas ce qu'ils ont fait pour lui, quoi,
20:58 - puisqu'il n'a pas l'air
20:59 - de tout à fait bien stabilisé.
21:01 - Tous ces tremblements,
21:03 - je pense qu'il a pris
21:04 - une bonne dose de nox.
21:05 - Il est déjà, tu vois.
21:06 - En fait, moi,
21:09 - j'ai vu le prévoir,
21:10 - et je me suis dit,
21:11 - en fait, moi,
21:12 - ça fait 10 ans que je suis là.
21:13 - Au début, t'avais,
21:15 - enfin, voir,
21:16 - des patients hospitalisés.
21:17 - On les voyait,
21:19 - on indiquait une hospite,
21:20 - on appelait l'hôpital.
21:21 - Ils avaient la chambre
21:23 - quasiment dans l'air, tu vois.
21:25 - Des fois, le truc qu'on attendait le plus,
21:27 - c'était le réstal de la prise de sang.
21:28 - Là, il y a un restaurant
21:31 - avec plein de jours aux urgences,
21:32 - on s'attendait à avoir une place.
21:33 - Donc, déjà,
21:35 - tu fais un peu de tri,
21:36 - de savoir
21:37 - qui tu vas vraiment hospitaliser.
21:38 - On a quasiment tous les gens
21:40 - qui viennent et qui demandent
21:41 - leur hospitalisation.
21:42 - Ils ne s'hospitalisent pas,
21:43 - parce que tu te dis,
21:44 - bon,
21:45 - s'ils sont capables de demander,
21:46 - c'est qu'ils ne sont pas
21:47 - si graves que ça, tu vois.
21:48 - Là, on se retrouve à hospitaliser
21:50 - que les gens qui sont,
21:51 - en fait,
21:52 - ramenés par la police
21:53 - ou les pompiers,
21:54 - enfin, les patients graves,
21:55 - quoi.
21:56 - Qui sont déjà dans un état
21:58 - de décompensation
21:59 - de leur maladie bien avancée.
22:00 - Et là, franchement,
22:01 - c'est ultra rare
22:02 - où un patient,
22:03 - tu vois, que je reçois,
22:04 - on lui trouve une place
22:05 - et il part dans la journée.
22:06 - Tu vois,
22:07 - c'est ça,
22:08 - un truc comme ça.
22:09 - Alors que ça devrait être
22:11 - normal.
22:12 - C'est un peu d'arrondir
22:14 - un peu les arrondissements
22:15 - pour pas que ça s'améliore,
22:16 - pardon,
22:17 - mais des fois, je me dis,
22:18 - on n'en est plus à sauver
22:19 - les patients,
22:20 - on en est à sauver l'hôpital.
22:21 - Moi, je ne suis pas là
22:24 - pour sauver l'hôpital.
22:25 - Ça te donne envie de partir,
22:31 - parfois ?
22:32 - Ouais,
22:33 - moi, je pars là le mois prochain.
22:34 - C'est vrai ?
22:35 - Enfin, le mois prochain,
22:36 - je crois,
22:37 - le mois prochain,
22:38 - avant septembre.
22:39 - Tu pars pour...
22:40 - Je vais aller à Saint-Nazaire
22:41 - m'occuper des...
22:42 - des marins.
22:44 - Ça va changer un peu.
22:48 - La pénurie des soignants
23:01 - et la suppression des lits
23:02 - sans investissement suffisant
23:03 - dans la médecine de ville
23:04 - participe à cet embouteillage.
23:05 - Le syndicat SAMU Urgences de France
23:07 - estime qu'il y aurait eu
23:08 - plus de 150 morts inattendues
23:09 - entre décembre 2022
23:10 - et janvier 2023.
23:11 - En deux mois, donc.
23:12 - Des patients qui seraient décédés
23:13 - sans avoir pu être
23:14 - pris en charge correctement.
23:15 - Face à la crise,
23:17 - le gouvernement a mis en place
23:18 - plusieurs mesures
23:19 - pour consolider la transition ambulatoire.
23:20 - La dernière en date,
23:21 - embaucher plus de personnel
23:22 - pour répondre aux 15
23:23 - et vous réorienter
23:24 - vers des médecins de ville.
23:25 - En parallèle,
23:27 - des alternatives privées
23:28 - aux urgences se multiplient aussi.
23:29 - Les centres de soins non programmés,
23:30 - ils participent
23:31 - au désengorgement des urgences
23:32 - en captant les cas les moins graves.
23:33 - Mais certains soignants
23:34 - leur reprochent
23:35 - de contribuer à la fuite
23:36 - du personnel vers le privé
23:37 - et de ne pas être adaptés
23:38 - aux besoins des patients
23:39 - les plus précaires.
23:40 - En attendant,
23:41 - 75% des praticiens hospitaliers
23:42 - disent vouloir quitter
23:43 - le service public
23:44 - dans les 5 ans.
23:45 - En sortie "d'études"
23:56 - comme moi je le suis,
23:57 - j'essaye de ménager
23:58 - "dans le milieu"
23:59 - de la société.
24:00 - Je me suis ménagée
24:01 - "dans l'idée"
24:02 - de pouvoir tenir.
24:03 - Mais si je suis honnête,
24:04 - ma capacité de projection
24:05 - ne dépasse pas 6 mois.
24:06 - Dans l'exercice en lui-même,
24:12 - on a une activité qui nous plaît,
24:13 - qui est de la médecine,
24:14 - mais il y a toute une charge
24:15 - de travail
24:16 - qui est de l'administration,
24:17 - qui est de trouver des places,
24:18 - qui est de négocier en permanence
24:19 - avec des institutions
24:20 - que ce soit
24:21 - les cabinets de médecine libérales,
24:22 - les EHPAD,
24:23 - et ça c'est très ingrat.
24:24 - Et ça c'est épuisant.
24:25 - Franchement c'est épuisant.
24:26 - Je suis très content
24:27 - de pouvoir travailler avec vous.
24:28 - Je suis très content
24:29 - de pouvoir travailler avec vous.
24:30 - Je suis très content
24:31 - de pouvoir travailler avec vous.
24:32 - Je suis très content
24:33 - de pouvoir travailler avec vous.
24:34 - Je suis très content
24:35 - de pouvoir travailler avec vous.
24:36 - Je suis très content
24:37 - de pouvoir travailler avec vous.
24:38 - Je suis très content
24:39 - de pouvoir travailler avec vous.
24:40 - Je suis très content
24:41 - de pouvoir travailler avec vous.
24:42 - Je suis très content
24:43 - de pouvoir travailler avec vous.
24:44 - Je suis très content
24:45 - de pouvoir travailler avec vous.
24:46 - Je suis très content
24:47 - de pouvoir travailler avec vous.
24:48 - Je suis très content
24:49 - de pouvoir travailler avec vous.
24:50 - Je suis très content
24:51 - de pouvoir travailler avec vous.
24:52 - Je suis très content
24:53 - de pouvoir travailler avec vous.
24:54 - Je suis très content
24:55 - de pouvoir travailler avec vous.
24:56 - Je suis très content
24:57 - de pouvoir travailler avec vous.
24:58 - Je suis très content
24:59 - de pouvoir travailler avec vous.
25:00 - Je suis très content
25:01 - de pouvoir travailler avec vous.
25:02 - Je suis très content
25:03 - de pouvoir travailler avec vous.
25:04 - Je suis très content
25:05 - de pouvoir travailler avec vous.
25:06 - Je suis très content
25:07 - de pouvoir travailler avec vous.
25:08 - Je suis très content
25:09 - de pouvoir travailler avec vous.
25:10 - Je suis très content
25:11 - de pouvoir travailler avec vous.
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25:14 - Je suis très content
25:15 - de pouvoir travailler avec vous.
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25:17 - de pouvoir travailler avec vous.
25:18 - Je suis très content
25:19 - de pouvoir travailler avec vous.
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25:21 - de pouvoir travailler avec vous.
25:22 - Je suis très content
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25:26 - Je suis très content
25:27 - de pouvoir travailler avec vous.
25:28 - Je suis très content
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25:30 - Je suis très content
25:31 - de pouvoir travailler avec vous.
25:32 - Je suis très content
25:33 - de pouvoir travailler avec vous.
25:34 - Je suis très content
25:35 - de pouvoir travailler avec vous.
25:36 - Je suis très content
25:37 - de pouvoir travailler avec vous.
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25:40 - Je suis très content
25:41 - de pouvoir travailler avec vous.
25:42 - Je suis très content
25:43 - de pouvoir travailler avec vous.
25:44 - Je suis très content
25:45 - de pouvoir travailler avec vous.
25:46 - Je suis très content
25:47 - de pouvoir travailler avec vous.
25:48 - Nous avons absolument
25:49 - nous avons absolument
25:50 - sauvé le navire.
25:52 - Merci.
25:53 - Merci.
25:56 - Merci.
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