Mohamed Merah, l'histoire d'un enfant de banlieue devenu l'ennemi public n°1

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00:00:00 - Hé, Mohamed, tu filmes, là ? - Non, je filme pas, je fais mes photos.
00:00:03 Ce jeune homme de 23 ans, c'est Mohamed Merah.
00:00:06 - Vas-y, tu me dis quand je prends la photo.
00:00:07 Quelques jours avant les meurtres.
00:00:08 Dans un mois, il va assassiner lâchement 7 personnes, parmi lesquelles 3 enfants.
00:00:15 Le 10 février 2012, il est filmé par un ami à la montagne.
00:00:21 - On y va ? - Vas-y, on y va.
00:00:24 - Viens, on fait la noire, en face. - On fait la noire ?
00:00:26 - Wouhou !
00:00:28 Wouhou !
00:00:30 Les 3 copains ont quitté Toulouse et leur cité pour venir skier dans cette station du Jura.
00:00:35 - Attends-moi, Mohamed !
00:00:37 Vas-y, dernière ronde !
00:00:38 Mohamed est plutôt bon skieur, habitué depuis tout petit à passer des vacances au sport d'hiver.
00:00:43 - Il est là, sans toutes les bosses.
00:00:50 Allez, Mohamed !
00:00:52 Sur ces images, le jeune homme semble heureux et détendu.
00:00:57 - Ça va, tu t'es rattrapé, quand même ?
00:00:59 Un jeune homme souriant et plein de vie, rien ne laisse présager qu'il va être à l'origine d'un drame national.
00:01:06 Dans 30 jours, pourtant, Mohamed Merah va abattre froidement 3 militaires, un père de famille et 3 enfants.
00:01:16 - C'est parti, on y va !
00:01:18 - C'est parti !
00:01:21 [Musique]
00:01:24 [Musique]
00:01:53 Mars 2012.
00:01:55 La France est sous le choc, effarée par les tueries commises par Mohamed Merah.
00:02:00 En pleine campagne présidentielle, les Français découvrent avec stupeur que le monstre tueur d'enfants est un jeune de banlieue à peine âgé de 23 ans.
00:02:09 Mais qui est-il vraiment ?
00:02:13 Et comment en est-il arrivé à tuer cette personne de sang-froid ?
00:02:21 Notre enquête retrace l'histoire invraisemblable de ce gamin de banlieue devenu l'ennemi public numéro 1 au nom d'un islam radical.
00:02:28 De Toulouse où il entretient des liens troubles avec la police, jusqu'au Pakistan où il bascule dans le fanatisme,
00:02:36 nos investigations montrent un autre visage de Mohamed Merah, souvent à contre-courant des versions officielles.
00:02:42 - Comment a-t-il pu commettre de telles horreurs ?
00:02:46 - Comment a-t-il pu se comporter à ce point comme un salaud ?
00:02:50 Mohamed Merah a filmé tous ces meurtres.
00:02:53 Ses vidéos sont indiffusables, nous avons reconstitué chaque crime le plus fidèlement possible.
00:03:00 Tout a commencé à Toulouse par le meurtre d'un militaire, le maréchal des logis-chefs, Imad Ibn Ziyathen.
00:03:11 Cet après-midi-là, le parachutiste est un peu en avance.
00:03:15 Il attend un acheteur intéressé par sa moto.
00:03:20 Sa Suzuki Bandy est en vente depuis quelques semaines sur Internet.
00:03:26 Et pour prouver qu'elle est bien entretenue, Imad a précisé sur l'annonce "je suis un soldat".
00:03:34 - Il a marqué "je suis militaire". Si il n'aura pas marqué "je suis militaire", il sera là, dans mon fils. Il est mort parce qu'il est militaire.
00:03:41 Les 2 hommes se sont donnés rendez-vous sur le parking de ce gymnase désaffecté, proche de la Cité de l'Espace à Toulouse.
00:03:49 L'acheteur arrive enfin.
00:03:53 - A un moment donné, je me suis dit "je suis un soldat".
00:03:58 L'acheteur arrive enfin.
00:04:01 - A un moment donné, un homme qui arrive vêtu de noir, avec un casque noir sur un scooter noir, s'approche.
00:04:09 À peine descendu de son scooter, l'homme en noir se retourne subitement vers Imad et pointe le visage du militaire avec un pistolet.
00:04:18 - Apparemment, il lui a dit "voilà, tu es militaire". Mon fils lui a dit "oui, je suis militaire". Et alors ? Il a dit "je vais te tuer".
00:04:28 L'homme semble hésiter, mais face au refus du militaire de s'agenouiller, il lui tire une première balle dans la tête.
00:04:35 Puis une deuxième, alors qu'il gîte au sol.
00:04:40 L'inconnu prend le temps de ramasser une douille et s'enfuit à toute vitesse, laissant le corps d'Imad sans vie.
00:04:48 La police l'ignore encore, mais c'est le 1er meurtre d'une longue liste.
00:04:54 Un promeneur qui a assisté au meurtre raconte la scène aux enquêteurs.
00:05:09 Pour eux, le crime est lié à un trafic de drogue.
00:05:14 - Le tueur qui abat quelques fois de main avec son arme à 2 reprises, qui l'achève au sol, on se dit "bon, c'est un règlement de compte plus qu'autre chose, vu le mode opératoire".
00:05:21 - Donc on va mener une petite enquête sur l'entourage, voir la personne qui c'est.
00:05:25 - Il me dit "madame, votre fils, est-ce qu'il y a un frère qui jaloux, par exemple le grand, il peut le tuer ? Est-ce que votre fils il a un problème d'argent, il a trafiqué quelque chose ?"
00:05:39 L'enquête s'oriente vers un banal règlement de compte. L'affaire ne remonte même pas jusqu'au ministre de l'intérieur de l'époque.
00:05:46 - Au départ, lorsqu'il y a un 1er assassinat d'un militaire à Toulouse, c'est un assassinat. Et par conséquent, c'est une enquête ordinaire qui se met en place.
00:06:00 Une enquête ordinaire qui va pourtant prendre quelques jours plus tard une toute autre dimension.
00:06:06 4 jours après la mort d'Iban Ziathen, la police n'a toujours pas le moindre indice. C'est un nouveau drame qui va faire progresser l'enquête.
00:06:24 Il a lieu à Montauban, à quelques kilomètres de Toulouse. La ville abrite le 17e régiment du génie parachutiste. Les berets rouges sont partout dans les rues.
00:06:36 Ce jour-là, les 3 copains, Abel Chenouf, Mohamed Legouade et Loïc Liber, retirent de l'argent au distributeur.
00:06:45 A aucun moment, ils ne prêtent attention à l'homme en noir qui vient de garer son scooter derrière eux.
00:06:53 L'homme casqué s'approche des militaires d'un pas déterminé. Il est armé. Il va abattre froidement les 2 premiers paras d'une balle dans la nuque.
00:07:03 Et tire sur le 3e qui tente de s'enfuir. Dans la précipitation, l'homme fait tomber l'un de ses chargeurs au sol. Il ne le ramasse pas, mais il va récupérer là encore les douilles éparpillées sur le sol.
00:07:19 Loïc Liber est aujourd'hui paraplégique. Mohamed Legouade et Abel Chenouf, eux, sont morts sur le coup.
00:07:27 Cette fois-ci, les enquêteurs disposent de nombreux éléments pour tenter d'identifier le tueur.
00:07:32 A commencer par la vidéosurveillance. La scène a été intégralement filmée par les caméras du guichet automatique. Et ce qu'elles montrent se révèle très instructif.
00:07:48 - Un homme de 1m75, 1m80, casqué, donc on n'a pas de signalement au niveau du visage. Mince, froid, déterminé et qui s'en va rapidement une fois son forfait commis, quoi.
00:07:59 La vidéosurveillance permet aussi d'identifier le modèle du scooter. Un T-Max de couleur noire.
00:08:09 Elles révèlent également aux enquêteurs un détail qui leur fait froid dans le dos. L'homme est équipé d'une caméra qu'il a placée sur son torse. Le tueur filme l'intégralité de ses meurtres au plus près de ses victimes.
00:08:22 Les caméras de la ville ont ensuite pris le relais et filmé le tueur au scooter pendant sa fuite. On y découvre l'homme lever son arme vers le ciel comme un signe de victoire.
00:08:37 Sur la scène de crime, c'est le chargeur oublié par le tueur qui va parler. Les 7 balles qu'il contenait sont envoyées pour expertise au labo de la police scientifique de Toulouse.
00:08:47 C'est la même arme qui a tué à Toulouse et à Montauban.
00:08:53 - Lorsqu'il y a cette agression contre d'autres parachutistes à Montauban, c'était le 15, ça prend une autre tournure.
00:09:06 Une course contre la montre s'engage alors car le tueur de paras peut tuer à nouveau à tout moment.
00:09:12 L'affaire est désormais prise très au sérieux au plus haut sommet de l'Etat et une piste est alors très vite privilégiée.
00:09:21 - Toutes les victimes sont des militaires d'origine maghrébine et immédiatement vient à l'esprit des enquêteurs et des magistrats qui les coiffent l'impression que peut-être il faut suivre une piste d'extrême droite.
00:09:41 Deux jours seulement après la tuerie de Montauban, un caporal proche de la mouvance d'extrême droite est en garde à vue.
00:09:48 C'est un suspect idéal, il est passionné de moto et tireur d'élite dans une caserne proche de Montauban.
00:09:54 Mais son emploi du temps va le disculper.
00:09:58 Sont également entendus des propriétaires de scooters T-Max et de Colt 45 dans la région de Toulouse.
00:10:05 Mais toutes ces auditions ne mènent nulle part.
00:10:10 Ce sont les recherches informatiques qui vont faire apparaître pour la première fois le nom d'Emera dans la procédure.
00:10:18 Les enquêteurs sont remontés sur l'annonce en ligne du premier soldat tué.
00:10:23 Pour eux, le tueur l'avait forcément consulté afin de choisir sa première victime.
00:10:29 Leur hypothèse, son but était de tuer un militaire.
00:10:33 Il aurait donc tapé deux mots clés, moto plus militaire.
00:10:39 Des milliers de données informatiques sont analysées.
00:10:43 Et après deux jours d'investigation, la police judiciaire établit une liste de suspects.
00:10:49 Neuf personnes avaient consulté l'annonce de monsieur Ziaten.
00:10:54 Il y en avait trois qui étaient sur Toulouse.
00:10:57 Et parmi elles, il y avait Zoubika Aziri, la mère de Abdelkader et Mohamed Merah.
00:11:02 Qui tous deux étaient signalés comme islamistes activistes.
00:11:06 Cette liste de suspects publiée dans la presse est établie dès le 17 mars 2012.
00:11:12 Elle montre bien qu'une semaine avant le meurtre, l'ordinateur de madame Aziri s'est connecté à deux reprises à l'annonce du militaire.
00:11:20 Aziri, c'est le nom de la mère de Mohamed et Abdelkader Merah.
00:11:25 Ses deux fils auraient utilisé sa connexion Internet.
00:11:29 Ils sont fichés comme islamistes radicaux.
00:11:32 Et ils sont surveillés depuis des années par les services de renseignement, comme le prouvent ces notes confidentielles en notre possession.
00:11:42 Pourquoi la police ne les a-t-elle pas interpellés immédiatement ?
00:11:46 Pour de nombreux spécialistes, c'est un immense raté.
00:11:50 Merah aurait pu être neutralisé bien avant qu'il ne commette d'autres tueries.
00:11:56 - Dimanche soir, il apparaît dans les radars. On va dire "on va le chercher", et puis c'est tout.
00:12:00 - Je dis "on doit aller le chercher, le placer en garde à vue et vérifier".
00:12:03 - On a des indices concordants qui prouvent que bon, c'est un individu.
00:12:06 - En plus, s'il a un palmarès, s'il a un dossier derrière lui, on va le chercher. On se pose pas de questions, si vous voulez.
00:12:11 - Vous savez, c'est toujours facile de refaire l'histoire après.
00:12:14 - Il fallait faire aussi des recoupements avec les informations de la PGI. Il suffit pas d'avoir des suspicions.
00:12:20 - Heureusement, en France, on n'interpelle des gens que sur des faits, sur des certitudes.
00:12:27 Pourtant, selon nos informations, Bernard Squarsini, alors patron du renseignement,
00:12:32 recommandait, lui, d'interpeller l'Emera, dès le 18 mars, la veille du massacre de l'école juive.
00:12:39 Mais la police judiciaire ne l'aurait pas suivie, focalisée sur la piste de l'extrême droite.
00:12:45 - C'est impensable. Il y a des enfants, si vous voulez, qui ont été tués, moi, ça me bouffe.
00:12:52 - Il y a d'autres enfants, des militaires, ce sont des enfants, ils pourraient être mes gosses, si vous voulez.
00:12:57 - Et il y a un loupé terrible.
00:12:59 Un loupé qui va coûter cher, la tuerie de l'école juive va avoir lieu le lendemain matin.
00:13:05 - Bonsoir à tous. La France désemparée. Édition spéciale sur cette fusillade dans une école juive à Toulouse.
00:13:15 - Un homme casqué a tué froidement 4 personnes, dont 3 jeunes enfants.
00:13:19 - L'émotion est immense, la campagne électorale est mise entre parenthèses.
00:13:23 - Qui est cet homme toujours en fuite ? Pourquoi ces crimes ?
00:13:26 Le mode opératoire est le même que pour les meurtres des paras.
00:13:31 Les enquêteurs en sont convaincus, le tueur vient à nouveau de frapper dans cette école juive.
00:13:37 Et la scène insupportable a été intégralement filmée par les caméras de surveillance.
00:13:44 Il est 8h05. La plupart des élèves sont déjà dans l'établissement.
00:13:56 Sur le trottoir, Jonathan Sandler, un professeur de l'école, est avec ses 2 fils.
00:14:04 Un homme avec un casque blanc arrive sur un scooter T-Max, blanc cette fois-ci.
00:14:11 Personne ne remarque son pistolet mitrailleur en bandoulière.
00:14:15 Pierre Lassry est le père d'une élève qui a pu échapper au tueur.
00:14:20 Il a visionné les bandes de vidéosurveillance.
00:14:23 - On voit effectivement un type sur son scooter qui poirote, qui est là, qui bouge pas.
00:14:31 Après, ça dégénère, la bande, c'est absolument insoutenable.
00:14:35 Il a simplement dégainé une arme et il a tiré sur les 3 ou 4 personnes qui se trouvaient là.
00:14:41 L'homme au scooter tire une 1re rafale, mais son arme s'enraye.
00:14:45 Il s'empare alors d'un Colt 45 et va commettre un acte d'une immense lâcheté
00:14:50 en abattant froidement le père et son fils de 5 ans.
00:14:54 - On sent quelqu'un qui est complètement à l'aise dans cette action.
00:14:58 Il est complètement à l'aise. Il est comme un joueur de tennis qui joue bien au tennis.
00:15:02 C'est un tueur qui tue bien.
00:15:03 L'assassin poursuit les enfants dans l'école.
00:15:06 Le comble de l'horreur est atteint lorsqu'il tue Gabriel, 4 ans, et la petite Myriam, d'une balle dans la tête.
00:15:13 - Je me souviens de ces images terrifiantes que j'ai vues,
00:15:16 sur lesquelles on voit Juan Menmera se baisser pour se mettre à la hauteur de la tempe d'un bambin.
00:15:24 C'est quelque chose d'absolument insoutenable.
00:15:26 - Ça reste quelque chose de monstrueux. C'est un vrai monstre qui est venu ce matin-là.
00:15:34 L'assassin a fait 4 morts et 1 blessé.
00:15:38 Et cette fois-ci, il a tué des enfants juifs.
00:15:43 Myriam Monsonego, 7 ans.
00:15:47 Arie Sandler, 5 ans.
00:15:50 Gabriel Sandler, 4 ans.
00:15:54 Et leur père, Jonathan Sandler, 30 ans.
00:16:00 L'affaire devient une tragédie nationale.
00:16:03 La campagne présidentielle se fiche subitement,
00:16:06 et le jour même, Nicolas Sarkozy et François Hollande font le déplacement en urgence à Toulouse.
00:16:13 - Ce sont des images qu'on avait vues dans d'autres pays, mais qu'on n'avait jamais vues dans le nôtre.
00:16:19 Toute la communauté nationale est bouleversée, est à vos côtés.
00:16:23 Ce n'est pas une école des juifs, une ville qui ont été touchées, c'est la France toute entière.
00:16:33 Des moyens exceptionnels sont alors déployés pour stopper la course sanglante du tueur.
00:16:39 200 enquêteurs sont mobilisés sur toute la France.
00:16:42 Le groupe d'intervention du RAID rejoint également Toulouse.
00:16:49 Le renseignement intérieur est désormais qu'aux saisies de l'affaire.
00:16:53 Les policiers du contre-espionnage local visionnent la vidéosurveillance.
00:16:57 Ils ont l'impression de connaître le tueur.
00:17:01 - Les agents du renseignement aussi sont sur le coup,
00:17:03 et en visionnant les vidéos de l'école, pensent reconnaître Mohamed Merah
00:17:08 par rapport à son allure, sa démarche, sa façon de se tenir, la façon de conduire le scooter.
00:17:15 Mohamed Merah, un jeune Toulousain que les services de renseignement locaux connaissent bien.
00:17:21 En 2011, ils l'ont surveillé des mois durant en raison de ses liens étroits avec les milieux islamistes.
00:17:27 À 23 ans, le jeune homme, issu d'une cité sensible,
00:17:32 est aussi connu des services de police pour une douzaine d'actes de délinquance.
00:17:37 - C'était caillassage, c'est des actes de violence envers les personnes sociales et intelligentes,
00:17:42 c'est un vol à l'arraché, un vol de sac à main sur le ménage d'une arme, je crois.
00:17:47 On le voit dans des voitures volées, sur des scooters volés, il para dans le quartier.
00:17:51 Il est quand même assez connu à ce niveau-là.
00:17:53 Mais son grand frère Abdelkader fait un suspect plus crédible pour les enquêteurs.
00:18:00 - Donc on apprend sur Abdelkader Merah qu'il est un islamiste radical,
00:18:06 qu'il pratique un islam fondamentaliste, salafiste,
00:18:10 que sa femme est entièrement boîlée, qu'il est parti en Égypte
00:18:13 apprendre l'arabe, l'enseignement religieux.
00:18:16 Abdelkader ou Mohamed, l'un des deux est-il le tueur au scooter ?
00:18:22 Les enquêteurs vont en avoir le coeur net
00:18:24 dès le lendemain du massacre de l'école juive.
00:18:28 Depuis plusieurs jours, les policiers font le tour des concessionnaires
00:18:36 qui vendent des scooters T-Max, du même modèle que celui utilisé lors des meurtres.
00:18:41 Dans ce magasin, un vendeur leur confie qu'un jeune propriétaire de T-Max
00:18:46 est venu lui poser de drôles de questions.
00:18:49 - Cette personne s'est présentée pour savoir comment on pouvait enlever
00:18:53 un tracker d'un Yamaha T-Max.
00:18:56 C'est le système qui permet de localiser le véhicule comme il est volé.
00:19:02 Cet homme, le vendeur s'en souvient.
00:19:05 Il s'appelle Mera, mais il ne sait pas de quel frère il s'agit.
00:19:09 L'un des Mera possède donc un scooter T-Max.
00:19:14 Sans oublier la connexion de l'ordinateur de la mère à l'annonce du militaire.
00:19:19 Le lien avec la famille Mera devient une évidence.
00:19:23 La piste de l'extrême droite est alors abandonnée.
00:19:27 - Tous les services de police qui étaient sur le TV
00:19:29 mettent des surveillances en place sur les différents domiciles,
00:19:32 que ce soit sur le frère Abdelkader à Haute-Rive
00:19:35 comme sur rue du sergent Vigny à Toulouse pour Mohamed Mera.
00:19:39 Les policiers entament donc une planque devant le logement d'Abdelkader,
00:19:44 à Haute-Rive, à 40 km de Toulouse.
00:19:47 Il a emménagé ici, dans ce pavillon, il y a quelques mois avec sa femme.
00:19:52 À Toulouse, une 2e équipe tente de localiser Mohamed
00:19:57 à sa dernière adresse connue, le 17 rue du sergent Vigny.
00:20:01 Un policier en tenue d'agent EDF
00:20:03 place même discrètement une caméra devant son domicile.
00:20:07 Elle va enregistrer toutes les allées et venues.
00:20:10 Le jeune homme occupe un 2 pièces dans ce quartier tranquille de Toulouse.
00:20:15 L'appartement est situé au 1er étage.
00:20:18 Derrière les volets clos, les policiers en planque ne remarquent aucun signe de vie.
00:20:25 Mais le jeune homme est peut-être chez lui.
00:20:28 Il a l'habitude de rester cloîtré des jours entiers à jouer aux jeux vidéo.
00:20:32 Ce lundi 19 mars, en tout cas, les policiers ignorent s'il est dans son appartement.
00:20:38 Il leur faudra attendre le lendemain pour enfin l'apercevoir.
00:20:42 Mais qui est vraiment Mohamed Mera ?
00:20:47 Musique douce
00:20:50 Qui était Mohamed Mera ?
00:21:04 Sa mère, Zulira, estime le savoir mieux que quiconque.
00:21:08 - Je suis moi.
00:21:09 Près d'un an après les faits, elle décide de s'exprimer publiquement pour la 1re fois.
00:21:14 La mère de Mohamed vit aujourd'hui dans ce studio, loin de Toulouse et des Siens.
00:21:19 Et elle tient à dire ce qu'elle sait sur son fils et sur sa famille.
00:21:23 - Mohamed, t'en as ça, de Mohamed ?
00:21:26 - Regarde la maman de Mohamed, il est pas terroriste.
00:21:33 Elle est civilisée, la Mohamed.
00:21:36 Regarde qu'elle est bonne.
00:21:37 - Vous comprenez pourquoi il a fait tout ça ?
00:21:40 - Je comprends pas.
00:21:42 - Qu'est-ce que vous vous dites dans votre tête ? Qu'est-ce qui s'est passé ?
00:21:45 - Je sais pas. Je sais pas.
00:21:48 J'ai rien compris.
00:21:50 Elle est bonne, belle gosse, elle est gentille, elle est...
00:21:55 D'un coup, elle est...
00:21:58 Elle est changée. Moi, je sais pas.
00:22:01 Je sais pas pourquoi il est devenu comme ça.
00:22:07 Il est mort.
00:22:11 Il a pris beaucoup de chavux avec lui.
00:22:14 Cette photo parue dans la presse, c'est celle de Mohamed,
00:22:17 mort après l'assaut du Raid.
00:22:19 Zulira la regarde souvent en pleurant, pour son fils,
00:22:22 mais aussi pour ses victimes.
00:22:25 - Je pleure pour lui, pour les autres.
00:22:28 J'ai pas pleuré rien pour mon fils.
00:22:33 J'ai pleuré pour les autres, les victimes.
00:22:40 Moi, jamais il a parlé de Mujahideen,
00:22:43 jamais il m'a parlé de djihad, jamais il m'a parlé de trucs comme ça.
00:22:47 C'est pour ça que je croyais pas. Non.
00:22:50 Je croyais pas Mohamed comme ça.
00:22:52 Après...
00:22:54 J'ai commencé...
00:22:57 Fouiller dans ma tête, dans le passé.
00:23:00 J'ai rien trouvé.
00:23:06 - Le passé de son fils, c'est d'abord une enfance perturbée.
00:23:10 En 1981, les parents de Mohamed, tous les 2 originaires d'Algérie,
00:23:16 s'installent en France, dans un HLM près de Toulouse.
00:23:19 Ensemble, ils ont 5 enfants, 2 filles et 3 garçons.
00:23:24 Mohamed est le petit dernier.
00:23:27 L'enfant n'a que 5 ans lorsque sa mère demande le divorce.
00:23:32 Zoulira se retrouve seule pour élever ses 5 enfants.
00:23:36 Elle ne travaille pas et vit avec seulement 400 euros d'allocation.
00:23:40 Zoulira perd très vite toute autorité sur ses enfants.
00:23:44 - Ce moment-là, j'étais jeune, j'arrivais pas à...
00:23:48 M'élever mes enfants, je dis la vérité, c'est dur pour moi.
00:23:52 Il faut un homme à la maison.
00:23:54 Si j'ai laissé le papa, on arrive pas comme ça.
00:23:58 - Pour Alain Penin, qui a expertisé Mohamed,
00:24:01 son manque de repères a eu de graves conséquences sur son développement.
00:24:05 - Il lui manque un père présent qui nomme la loi,
00:24:11 qui la fait respecter et surtout qui assure la sécurité psychologique de la mère.
00:24:16 Parce que la mère est totalement démunie à ce moment-là,
00:24:20 surtout que la fratrie est relativement nombreuse
00:24:23 et que les moyens financiers ne sont pas au rendez-vous.
00:24:26 - En 1997, Mohamed n'a que 9 ans lorsque l'alerte est donnée.
00:24:31 Un rapport des services sociaux décrit alors
00:24:34 une situation familiale nocive pour l'enfant.
00:24:37 - Mohamed rentre de l'école à l'heure qu'il veut,
00:24:40 se met à table s'il le désire et se couche d'eux-mêmes.
00:24:44 L'enfant est en danger par manque d'un cadre éducatif minimum.
00:24:48 - A l'âge de 9 ans, Mohamed est séparé de sa mère et placé en foyer.
00:24:56 - Il voulait pas aller au foyer, il voulait pas rester dans le foyer.
00:24:59 Il voulait pas. Il pleure, il tape, il pleure.
00:25:02 Il m'a dit "Maman, s'il te plaît, tu me laisses pas tout seul, tu me laisses pas tout seul".
00:25:06 Des fois, c'est moi qui l'amène.
00:25:08 Il court derrière moi jusqu'au grillage.
00:25:11 Une fois, il pleure, moi, je pleure.
00:25:14 Il a pleuré beaucoup. "Maman, maman, s'il te plaît, tu me laisses pas tout seul.
00:25:22 "Maman, maman, tu me laisses pas tout seul, tu me laisses pas tout seul".
00:25:25 Après, j'ai pleuré, j'ai descendu, j'ai pris le bus, j'ai parti.
00:25:29 Il a souffert beaucoup.
00:25:32 Maintenant, je croyais, c'est ma faute qu'il ait devenu comme ça.
00:25:36 J'ai été forcée avec son père.
00:25:43 Je regrette beaucoup.
00:25:51 Mohamed grandit, toujours balloté de foyer en foyer.
00:25:55 Au fil des ans, les éducateurs décrivent un jeune homme intelligent et réactif,
00:25:59 mais devenu incontrôlable, comme dans ce rapport de 2002.
00:26:03 L'adolescent a alors 14 ans.
00:26:06 Il injurie, insulte les filles.
00:26:09 Chaque jour, nous devons intervenir pour une dégradation, un vol, un conflit,
00:26:14 une agression dont Mohamed est l'auteur.
00:26:16 Il refuse l'autorité des adultes, autant qu'il réclame leur affection.
00:26:21 Quant à l'autorité paternelle, elle est pulvérisée.
00:26:24 Le jour où son père est condamné à 4 ans de prison pour trafic de c*****.
00:26:29 14 ans, c'est aussi l'âge où Mohamed a ses premiers accès de violence.
00:26:35 A cette période, il agresse brutalement une assistante sociale qui tentait de le consoler.
00:26:41 Swadmera est la soeur aînée de Mohamed.
00:26:45 D'habitude, son voile ne lui cache pas le visage.
00:26:48 Elle le masque face à notre caméra pour protéger son anonymat.
00:26:52 Il y a quelques mois, ses propos avaient suscité l'indignation.
00:26:57 Lorsque filmée en caméra cachée par son frère Abdelghani, elle lui avait déclaré...
00:27:02 Swad avait ensuite condamné publiquement les meurtres commis par son frère.
00:27:13 Et l'enquête ouverte pour apologie du terrorisme avait finalement été classée sans suite.
00:27:18 Aujourd'hui, aucune charge ne pèse sur elle concernant les tueries.
00:27:22 Elle accepte de nous parler de son frère et de son effroyable dérive.
00:27:27 - Il a manqué d'affection. Il n'a pas eu ce que nous, on a eu.
00:27:32 C'est-à-dire cette vie de famille. Les deux parents, les 4 enfants ensemble.
00:27:37 Dès qu'on faisait pas ce qu'il voulait...
00:27:42 Il s'énervait, il claquait les portes.
00:27:44 Quand on essayait de parler avec lui, qu'on essayait de lui expliquer certaines choses,
00:27:47 il dit "vas-y, parle". Et ça, jusqu'à la fin, je ne ferai que ce que j'aurais décidé.
00:27:52 Très tôt, sa mère s'était inquiétée de la personnalité très perturbée de son fils.
00:27:57 - À partir de 6h.
00:27:59 Elle m'a dit "maman, j'en ai un bonhomme dans ma tête qui me parle, qui me parle".
00:28:02 On a rigolé. Moi, je croyais qu'il...
00:28:05 Après, il s'est énervé. Il m'a dit "moi, je dis la vérité, toi, tu rigoles".
00:28:08 J'ai dit "Mohamed, qu'est-ce qu'il y a ? Qu'est-ce qu'il dit ?"
00:28:10 Et il m'a dit "j'en ai 2 personnes dans ma tête".
00:28:14 - C'est 2 personnes dans la tête ? - 2 personnes dans la tête, oui.
00:28:17 Il m'a dit "un moi et une autre personne".
00:28:20 Wallah ! Je te le jure. Il m'a dit ça plusieurs fois.
00:28:25 À l'adolescence, Mohamed ne parle plus du bonhomme dans sa tête.
00:28:30 Il passe désormais ses journées dans la cité toulousaine des Isards.
00:28:35 C'est le quartier de son enfance.
00:28:38 Toute la famille a vécu dans cette maison, près du terrain de foot.
00:28:41 Tous les jours, avec les jeunes de César, dans le... Dans le...
00:28:48 Le bar des mains. Ils regardent.
00:28:51 Ils discutent, les jeunes, là-bas.
00:28:54 Peu à peu, il tombe dans l'engrenage de la petite délinquance.
00:28:59 Bagarre, vandalisme, agression.
00:29:04 C'est souvent le jeune homme parade dans la cité au volant de voiture ou de scooter, parfois volé.
00:29:08 Dans ce clip, réalisé par les jeunes du quartier,
00:29:15 on voit Mohamed, sur ce scooter ou sur ce quad,
00:29:18 prendre tous les risques pour épater ses copains.
00:29:21 Il aime montrer qu'il est à la hauteur, qu'il est aussi bon que les autres
00:29:29 et même plus fort que les autres.
00:29:31 Je pense qu'il veut être pris au sérieux
00:29:33 et que son problème, c'est que, bon, il est un peu gringalé,
00:29:37 pas très costaud, dans des rapports de violence,
00:29:40 il n'est pas tellement susceptible de s'imposer.
00:29:43 Il faut qu'il ait l'air de quelqu'un, bon, qu'on peut remarquer et qui est séduisant.
00:29:47 - A l'âge de 16 ans, le jeune homme semble se calmer un peu
00:29:52 et entame un CAP de carrosserie.
00:29:55 En stage, chez différents employeurs,
00:29:57 il se révèle être un apprenti plein d'avenir.
00:30:01 - Il a fait un CAP de carrossier, qu'il n'a pas validé,
00:30:04 mais en revanche, tous ses patrons s'accordent pour dire
00:30:07 que c'était un garçon sérieux, qui travaillait bien, etc.
00:30:09 - Sa passion, c'était les automobiles, la carrosserie.
00:30:13 Il était perçu comme quelqu'un d'extrêmement doué.
00:30:16 - Il n'est pas allé au bout, il ne s'est pas vraiment inséré.
00:30:19 C'est particulier, puis après, il a basculé dans autre chose.
00:30:22 - Cette autre chose, c'est la délinquance.
00:30:26 Entre 16 et 19 ans, l'apprenti carrossier, le jour,
00:30:30 participe à des cambriolages et vole des voitures la nuit,
00:30:33 dans Toulouse.
00:30:35 Le jeune Mohamed suit la mauvaise pente.
00:30:37 Mais qui imagine alors qu'il deviendra,
00:30:39 quelques années plus tard, un tueur,
00:30:41 traqué par toutes les polices de France ?
00:30:56 4 ans plus tard, on retrouve Mohamed.
00:30:59 Il a maintenant 23 ans.
00:31:01 Il l'ignore, mais son immeuble est surveillé depuis la veille,
00:31:05 car il est soupçonné d'être l'auteur des tueries.
00:31:08 Ce matin-là, les policiers en planque vont finir par l'apercevoir.
00:31:15 Un hélicoptère survole le quartier à basse altitude.
00:31:22 Intrigué par ce vacarme,
00:31:24 Mera met enfin le nez dehors.
00:31:27 - Mera a été logé, si je puis dire, le mardi, le 20 mars.
00:31:41 Au petit matin du mardi, il a ouvert ses volets,
00:31:44 donc il y avait une certitude.
00:31:46 Claude Guéant participe à la recherche de Mera.
00:31:49 - C'est une certitude.
00:31:51 Claude Guéant participe alors à une cellule de crise à Toulouse.
00:31:54 Dans le plus grand secret, il est décidé que le RAID
00:31:57 interpellera les 2 frères Mera dans la nuit, à 3 h 30 du matin.
00:32:00 - Le calcul avait été fait qu'à 1 h, probablement, il dormait.
00:32:04 Sensiblement avant le moment de la prière,
00:32:07 que sans doute il allait faire, c'était le moment opportun.
00:32:11 En attendant la nuit devant chez Mohamed,
00:32:14 la surveillance est en place.
00:32:16 De nombreux policiers planquent autour de son immeuble
00:32:19 et quadrillent le quartier.
00:32:21 Tout est prêt pour l'interpeller.
00:32:24 Pourtant, malgré ce dispositif exceptionnel,
00:32:28 Mohamed va parvenir à sortir de chez lui,
00:32:31 sillonner Toulouse pendant 6 heures
00:32:35 et rentrer à son appartement comme si de rien n'était,
00:32:39 sans que les policiers ne s'en aperçoivent.
00:32:42 Voici son parcours étonnant, étape par étape.
00:32:46 1re halte à 19h30.
00:32:51 Il rend d'abord visite à son ami Touria.
00:32:54 Elle ne se doute pas une seconde qu'il vient de tuer 7 personnes,
00:32:58 dont 3 enfants.
00:33:00 - Il rentre par là, je lui ouvre la porte, il rentre.
00:33:03 Les enfants, ils descendent, ils disent "bonjour, tonton",
00:33:06 ils lui faisent la bise et tout, d'accord ?
00:33:08 Après, je les fais visiter, je dis "bon, ben voilà, là,
00:33:10 ce sera ta chambre, je lui dis "ben ici, ce sera ta salle de bain".
00:33:13 - C'est lui qui vous avait demandé de l'héberger ?
00:33:16 - Oui, oui, il m'a demandé, ça, il m'a dit quand je l'ai vue,
00:33:19 il m'a dit "est-ce que tu peux m'héberger, me rendre un service ?"
00:33:22 Il y avait pas de souci, je suis pas du genre à poser des questions.
00:33:24 Moi, si on me demande, si on a besoin de moi,
00:33:26 je ouvre la porte et je ouvre mon coeur avec grand plaisir, en fait.
00:33:29 Mohamed cherche certainement une planque
00:33:32 pour échapper à la traque des policiers.
00:33:35 Mais il ne montre aucun signe de nervosité à Touria.
00:33:39 - Je l'ai vue souriant.
00:33:41 "Ça va, Touria, bien ? Tu vas bien, les enfants ?"
00:33:43 Voilà. Mais moi, maintenant, avec le recul, parce que sur le moment...
00:33:47 - Il était si calme, tout ça, si posé ?
00:33:49 - Si calme, posé, posé, mais vraiment...
00:33:52 adorable.
00:33:54 Après, il m'a dit "je vais acheter une pizza, est-ce que tu veux quelque chose ?
00:33:57 Tu veux quelque chose à manger ?" J'ai dit "non, merci, c'est gentil", et voilà.
00:34:00 Bon, il a posé ses affaires dans la chambre, où il devait dormir.
00:34:03 Mohamed laisse 2 sacs dans la chambre.
00:34:09 A l'intérieur, les policiers le découvriront plus tard,
00:34:12 des vêtements propres, une petite caméra,
00:34:15 et sur cette carte mémoire, les images des tueries qu'il a lui-même filmées.
00:34:20 Le sac de sport contient aussi un courrier écrit de la main de Mohamed.
00:34:25 Visiblement, son testament.
00:34:28 "Voilà le message d'un serviteur d'Allah et d'un soldat d'Al-Qaïda.
00:34:32 "Oh, vous, les Français, nous vous combattons
00:34:35 "pour vous combattre, mes frères, en Afghanistan.
00:34:38 "Le jour de nos attaques, ça a été le plus beau moment de ma vie.
00:34:41 "Deux issues s'offrent à moi, soit la prison avec la tête haute,
00:34:45 "soit la mort avec un grand sourire."
00:34:48 Mohamed quitte l'appartement à 21h30.
00:34:52 Touria ne le reverra plus. Dans moins de 6h,
00:34:55 il sera retranché chez lui, face au raid.
00:34:58 La jeune fille ne comprend toujours pas comment son ami
00:35:02 a pu en arriver à commettre de tels actes.
00:35:05 - C'était un bon... C'était un bon gars. C'était un bon garçon.
00:35:10 C'était un bon garçon.
00:35:15 C'est dommage. Dommage. Il a fait n'importe quoi.
00:35:28 - En sortant de chez Touria, Mohamed continue tranquillement
00:35:32 son parcours dans Toulouse, alors que les policiers
00:35:35 quadrillent son immeuble, le croyant toujours chez lui.
00:35:38 Mera a maintenant prévu de médiatiser ses meurtres.
00:35:42 D'abord, il va poster la vidéo de ses massacres
00:35:46 à la chaîne Al Jazeera. Il espère qu'elle diffusera
00:35:49 des extraits de ses tueries.
00:35:51 Puis, vers minuit, il s'arrête à une cabine
00:35:56 où vient adjoindre Eba Kalondo, rédactrice en chef
00:35:59 chez France 24. Calmement, il revendique
00:36:03 l'ensemble des incidents, dit-il, de Toulouse et de Montauban.
00:36:07 - Il était très cohérent, très prudent, très...
00:36:12 Prédéterminé de faire passer son message.
00:36:15 C'était quelqu'un qui voulait être entendu,
00:36:17 très convaincu que ce qu'il a fait était nécessaire
00:36:21 pour la dignité des musulmans.
00:36:24 Mohamed raccroche après 14 minutes de conversation.
00:36:28 Puis il retourne à son appartement vers 1h du matin.
00:36:33 Les nombreux policiers en planque devant son immeuble
00:36:38 ne l'avaient pas vu sortir. Ils ne le verront pas
00:36:41 non plus rentrer chez lui. Aujourd'hui encore,
00:36:44 de nombreuses questions demeurent sur le tour
00:36:47 de passe-passe de Mera. Comment l'homme le plus recherché
00:36:50 de France a-t-il pu échapper à la vigilance de la police
00:36:53 pendant près de 6 heures ?
00:36:55 - Est-ce que vous savez comment Mera a réussi à échapper
00:36:58 à la surveillance des policiers ?
00:37:00 - Non, très honnêtement, c'est un point qui, pour moi,
00:37:02 est resté complètement nébuleux. Il y a effectivement
00:37:05 une suspicion de sortie de son appartement.
00:37:08 Je n'ai jamais eu d'explication là-dessus.
00:37:10 - Il y a eu quelques erreurs, probablement ?
00:37:12 - Je ne sais pas, je ne sais pas, je ne sais pas.
00:37:14 - Absolument pas ? - Non, je ne sais pas.
00:37:16 Je ne sais pas.
00:37:17 - Ça n'est pas remonté jusqu'à vous.
00:37:20 Pour tenter de comprendre, nous nous rendons un an plus tard
00:37:23 dans la résidence rue du Sergent Vigné,
00:37:25 où vivait Mohamed Mera.
00:37:27 Monsieur et Madame Lopez étaient déjà les gardiens
00:37:32 de la résidence à l'époque des faits.
00:37:34 Eux non plus ne comprennent toujours pas
00:37:36 comment les nombreux policiers présents sur place
00:37:39 ont raté Mera ce soir-là.
00:37:41 - C'est quoi, ici ? - L'appartement.
00:37:45 - C'est un appartement ? - Oui.
00:37:47 - C'est quoi, ici ? - L'appartement de Mohamed Mera.
00:37:52 Où se sont déroulés...
00:37:56 Les assauts.
00:37:58 - Par où il serait passé, alors ?
00:38:00 - Ben, on pense qu'il serait passé, voilà, par là.
00:38:06 Pour la gardienne, c'est une évidence.
00:38:10 Mohamed Mera est tout simplement passé par le sous-sol.
00:38:13 - On est passé par le garage à vélo.
00:38:16 Le garage à vélo, dont la sortie donne sur l'arrière du bâtiment.
00:38:22 En sortant de son appartement,
00:38:25 le jeune homme sur ses gardes n'aurait donc pas emprunté
00:38:28 la sortie principale, à l'avant de l'immeuble,
00:38:31 celle que surveillaient les policiers
00:38:34 et qu'il filmait en continu.
00:38:36 - Il est sorti, donc, par là.
00:38:41 - Pourquoi ils l'ont pas vu ?
00:38:44 Est-ce qu'ils voulaient le voir ? Est-ce qu'ils voulaient pas le voir ?
00:38:47 Qu'est-ce qu'ils avaient projeté ? - Est-ce qu'ils étaient là-derrière ?
00:38:50 - Moi, je sais pas. Moi, je serais à leur place.
00:38:54 Quand je vais devant une entrée pour surveiller quelqu'un,
00:39:00 je fais d'abord une approche de tout l'immeuble
00:39:03 pour voir quelles sont les sorties.
00:39:05 Ils étaient quand même un paquet.
00:39:08 Même s'ils étaient 10 devant et 10 derrière,
00:39:10 le gars, il sortait pas. C'est pas possible.
00:39:12 - Il peut pas sortir ailleurs que par l'entrée principale ?
00:39:14 - Non. Mais par là, il pouvait...
00:39:16 Si l'immeuble était cerné, il pouvait pas sortir.
00:39:18 - Cette grande porte blanche
00:39:21 serait donc la sortie empruntée par Merat ce soir-là.
00:39:24 Passée cette porte, le parcours est à découvert
00:39:28 et il n'y a pas foule dans ces rues très larges.
00:39:31 Un homme seul ne peut pas passer inaperçu.
00:39:35 - Apparemment, il y a eu une faille dans le dispositif de surveillance.
00:39:39 C'est vachement polémique, ça, en ce moment-là.
00:39:41 - Apparemment, il serait passé par un endroit derrière
00:39:43 qui était pas surveillé, quoi.
00:39:45 Alors pourquoi cet incroyable raté ?
00:39:49 Le patron du renseignement toulousain
00:39:51 n'a pas souhaité nous fournir d'explications.
00:39:54 Cette nuit du 21 mars, en tout cas,
00:39:58 Merat est tranquillement chez lui
00:40:00 après son escapade dans Toulouse.
00:40:02 Il est déjà 1h du matin,
00:40:05 mais il accomplit consciencieusement sa prière du soir.
00:40:09 Une habitude prise il y a quelques années
00:40:11 lors de son séjour en prison.
00:40:13 4 ans plus tôt, Mohamed avait alors 19 ans.
00:40:29 A cette époque, il suivait toujours son CAP de carrossier,
00:40:34 mais n'avait pas pour autant arrêté ses bêtises.
00:40:38 Le 18 décembre 2007,
00:40:40 il est condamné à 18 mois de prison ferme
00:40:43 pour avoir agressé et volé une vieille dame.
00:40:46 Sa première incarcération.
00:40:48 Un séisme dans la vie du jeune homme.
00:40:51 Alain Penin réalise alors son expertise psychologique
00:40:55 à la maison d'arrêt de Seyss, près de Toulouse.
00:40:58 Le jeune homme lui avoue n'avoir plus qu'un seul centre d'intérêt.
00:41:01 - Lorsque je lui demande ce qui l'intéresse désormais
00:41:04 dans la vie, ce n'est plus les voitures,
00:41:07 ce n'est plus les vêtements, ce n'est plus les filles,
00:41:10 ce n'est plus les discothèques, il me dit maintenant,
00:41:13 il y a quelque chose qui m'intéresse beaucoup,
00:41:16 c'est la lecture du Coran.
00:41:18 - Il a commencé à demander les livres.
00:41:20 Les livres pour comprendre la prière, pour lire le surat,
00:41:23 comme ça, comme celui-là.
00:41:25 Il a un vide dans sa tête et voulait devenir droit, il m'a dit ça.
00:41:29 - Droit ? - Droit.
00:41:31 - Vous étiez contente qu'il commence à lire le Coran
00:41:34 et à faire la prière ? - Bien sûr, contente, bien sûr.
00:41:37 - Pourquoi ? - Parce que c'est une autre religion, Charles.
00:41:40 Et oui, j'aime bien mes enfants devenir...
00:41:43 Comme vous.
00:41:47 Catholique, il faut partir à l'église dimanche,
00:41:49 faire la prière et tout ça, nous aussi.
00:41:52 - Mon hypothèse, à l'époque,
00:41:55 c'est que cette façon de s'intéresser à l'islam
00:41:59 est une manière un peu symbolique
00:42:01 de retrouver le personnage paternel
00:42:03 et de trouver une certaine sécurité
00:42:05 qui lui a fait cruellement défaut jusque-là.
00:42:07 - Et pourquoi il a commencé là-bas à lire le Coran ?
00:42:09 - Je sais pas, je sais pas.
00:42:11 - C'est des gens qui lui ont dit... - Non, non, non, non,
00:42:13 y a personne qui l'a dit, non.
00:42:15 Il l'a fait tout seul.
00:42:17 Est-il incité par ses co-détenus
00:42:19 ou est-ce pour donner un sens à sa vie ?
00:42:21 Dès son entrée en détention,
00:42:23 Mohamed se met en tout cas à pratiquer assidûment sa religion.
00:42:27 Dans sa cellule, le jeune homme lit régulièrement le Coran
00:42:31 et il se lève désormais en pleine nuit pour prier.
00:42:34 - Pourquoi y a beaucoup de jeunes qui vont là-dedans ?
00:42:37 C'est parce qu'ils sont dans une période
00:42:39 où ils sont paumés, souvent.
00:42:41 C'est pour ça qu'il y a des conversions à Maison Marais,
00:42:43 que des jeunes délinquants, des jeunes toxicaux
00:42:46 vont vers l'islam rigoriste.
00:42:48 Parce qu'ils ont enfin un sens à leur vie.
00:42:50 C'est pas tellement un sens à leur vie, en tout cas,
00:42:52 une discipline dans leur vie.
00:42:54 - Mohamed, il commence à pratiquer,
00:42:56 on n'a pas été élevé dans la prière,
00:42:58 on n'a pas été élevé dans l'islam réellement, quoi.
00:43:00 Comme moi, je le pratique aujourd'hui,
00:43:02 on n'a pas été éduqué de cette façon.
00:43:04 Tout le monde a prié très, très tard.
00:43:06 On nous a pas du tout éduqué dans la religion.
00:43:09 Sur cette photo prise lors de sa détention,
00:43:14 Mohamed se laisse pousser la barbe et les cheveux,
00:43:17 signe de sa récente conversion.
00:43:19 Mais dans la prison,
00:43:24 personne ne croit vraiment à son intérêt soudain pour l'islam.
00:43:27 - Il est passé pour quelqu'un qui n'était pas sérieux,
00:43:31 que c'était du fantasme et que c'était de la bouffonnerie.
00:43:34 Parce qu'il dit parfois "Vive Al-Qaïda", etc.,
00:43:37 mais personne ne prend ça au sérieux.
00:43:39 Et pourtant, bon, il se passe des choses, là, à ce moment-là,
00:43:42 dans son esprit et dans son coeur,
00:43:44 socialement ou en tout cas par les autres.
00:43:47 Il est regardé comme quelqu'un qui, bon,
00:43:50 cherche à jouer un personnage,
00:43:52 mais qui n'est pas à la hauteur du personnage qu'il cherche à jouer.
00:43:55 - Son sourire dissimule un profond mal-être.
00:43:59 Le jeune détenu ne supporte pas les moqueries
00:44:03 et souffre de l'enfermement.
00:44:05 Après un an d'incarcération, le jour de Noël 2008,
00:44:10 il tente de se pendre avec son drap, dans sa cellule.
00:44:13 Quelques jours plus tard,
00:44:16 il explique son geste au psychologue qui l'examine.
00:44:20 - Il m'en dit qu'il avait un réel désir de mort
00:44:23 et avait véritablement le désir d'en finir, à l'époque.
00:44:27 - Il vous a expliqué pourquoi il... - Non.
00:44:30 Non, je voulais pas parler de ça.
00:44:33 - Pourquoi ? - J'aime pas.
00:44:35 Les choses qui passaient, j'aime pas...
00:44:38 Contenir, parler, parler, parler, parler. Non.
00:44:41 - Mohamed a 21 ans lorsqu'il sort de prison, en septembre 2009.
00:44:49 Libre, mais mal dans sa peau,
00:44:51 il va désormais montrer à ses proches un double visage.
00:44:54 Côté pile, Momo continue ses rodéos dans la cité,
00:44:59 joue au foot et sort en boîte de nuit.
00:45:02 Côté face, il se rebaptise secrètement Abu Yousouf,
00:45:07 se radicalise et fréquente des intégristes,
00:45:10 les frères, comme il les appelle.
00:45:12 Pour sa sœur, Souad,
00:45:16 la relation de Mohamed avec les intégristes religieux
00:45:19 n'aurait pas duré très longtemps à sa sortie de prison.
00:45:22 - Il les a fréquentés, mais très peu.
00:45:25 De suite après, il s'est éloigné d'eux.
00:45:27 Mohamed était quelqu'un de... Comment dire ?
00:45:30 Qui s'emporte vite, et quand on le suit pas,
00:45:33 quand on n'est pas d'accord avec lui, ça dégénère assez vite, quoi.
00:45:37 Donc quelque part, je pense qu'il se plaisait plus
00:45:40 avec les jeunes de quartier qu'avec les frères.
00:45:43 - Il allait beaucoup à la mosquée, Mohamed ?
00:45:46 - A cette époque, son éducation religieuse,
00:45:59 Mohamed se la forge essentiellement tout seul, sur Internet.
00:46:03 Sur de nombreux sites en libre accès,
00:46:12 il visionne en boucle des vidéos de prédicateurs radicaux du monde entier.
00:46:16 Certains encouragent les attaques terroristes
00:46:21 et le martyrent au nom de l'islam.
00:46:24 - J'appelle ça l'autoradicalisation.
00:46:27 C'est des individus qui vont passer,
00:46:29 qui sont dans un terreau favorable,
00:46:31 mais qui vont faire leur propre trajectoire personnelle
00:46:35 avec peu de contacts extérieurs,
00:46:37 et là-dessus, Internet joue un rôle majeur.
00:46:40 Et il va s'embourber, là,
00:46:43 dans une interprétation salafiste, radicale.
00:46:47 Et il va rechercher là-dedans ce qui lui permet d'exister.
00:46:51 - Gavé de vidéos ultra-violentes,
00:46:55 Mohamed va déraper très sérieusement,
00:46:57 pour la première fois, en juin 2010.
00:47:00 Il a alors 21 ans et invite chez lui un adolescent du quartier
00:47:05 à regarder des vidéos de propagande islamiste,
00:47:08 des exécutions de femmes infidèles,
00:47:11 des décapitations d'Occidentaux par des talibans.
00:47:14 Le garçon de 14 ans rentre chez lui,
00:47:17 traumatisé par ce qu'il vient de voir.
00:47:20 2 jours plus tard, Mera déboule dans la cité.
00:47:27 Il est furieux.
00:47:29 Il vient d'apprendre que la mère du jeune homme
00:47:31 a porté plainte contre lui.
00:47:33 La sœur tente de s'interposer,
00:47:36 mais Mohamed s'en prend très violemment à elle.
00:47:39 La jeune fille est hospitalisée le jour même.
00:47:44 Et comme le prouve ce certificat médical de l'hôpital,
00:47:47 Mohamed l'a bien amochée.
00:47:49 Traumatisme crânien, oeil au beurre noir
00:47:53 et lèvres supérieures éclatées.
00:47:56 La police veut entendre Mera,
00:47:59 mais le jeune homme est introuvable.
00:48:01 Il refuse de se soumettre à l'autorité policière.
00:48:05 Une défiance qu'il renouvellera 2 ans plus tard
00:48:08 avec une rage décuplée
00:48:10 lorsque le RAID tentera de l'extraire de son appartement.
00:48:13 3h10.
00:48:27 Mohamed a fait sa prière du soir
00:48:30 et il ne dort toujours pas.
00:48:33 Il l'ignore encore,
00:48:35 mais le RAID s'apprête à intervenir dans quelques minutes.
00:48:39 Dehors, l'unité d'élite se prépare à intervenir chez lui.
00:48:45 L'interpellation est toujours prévue à 3h30 du matin.
00:48:49 Les policiers, lorsqu'ils interviennent,
00:48:52 ont la mission de l'interpeller
00:48:55 et de tout faire, bien entendu,
00:48:58 pour que l'interpellation se fasse en le gardant vivant.
00:49:02 Interpeller Mera vivant,
00:49:04 c'est un ordre donné par le président de la République en personne.
00:49:08 - L'enjeu était de dire que le président et son équipe
00:49:11 ont résolu une crise majeure, terroriste,
00:49:14 quelque temps avant les élections.
00:49:16 Mais évidemment, ça entraîne un stress et une ingérence du politique
00:49:20 et tout ça fait monter l'assaut
00:49:23 et ça peut perturber l'intervention.
00:49:26 - Effectivement, l'intervention du RAID
00:49:29 ne va pas du tout se dérouler comme prévu.
00:49:32 3h15.
00:49:35 Mohamed est dans son salon
00:49:37 lorsqu'un bruit qui provient du ray de chaussée l'interpelle.
00:49:41 Il le reconnaît, c'est le verrou de la porte d'entrée de l'immeuble.
00:49:47 Quelqu'un vient d'y pénétrer.
00:49:58 Mohamed ne le sait pas,
00:50:00 mais le RAID vient d'entrer dans son immeuble.
00:50:03 L'unité d'intervention progresse dans le noir
00:50:06 pour rester le plus discret possible.
00:50:09 En silence, les policiers du RAID
00:50:15 arrivent devant la porte du suspect.
00:50:18 Mohamed s'empare de son arme, un Colt 45.
00:50:24 Car quelque chose n'est pas normal.
00:50:27 Si quelqu'un était entré dans l'immeuble,
00:50:30 il aurait forcément allumé la lumière.
00:50:33 De l'autre côté, le RAID se prépare à installer
00:50:37 le bélier pneumatique pour enfoncer la porte.
00:50:40 Mais la manoeuvre occasionne un bruit à peine perceptible.
00:50:44 Sauf pour Mohamed,
00:50:48 qui comprend que la police est derrière la porte.
00:50:53 Le patron du RAID était sur les lieux.
00:50:56 Quelques jours après les faits,
00:50:59 il avait accordé cette interview pour détailler l'intervention.
00:51:03 - Il va, à cette occasion, blesser 2 de mes hommes.
00:51:06 L'un va prendre une balle dans la cuisse
00:51:09 et l'autre va prendre une balle dans l'épaule.
00:51:12 J'ai un fonctionnaire de police face à la porte
00:51:15 avec son gilet pare-balles qui va prendre une balle dans la cuisse.
00:51:19 J'ai un fonctionnaire de police face à la porte
00:51:22 avec son gilet pare-balles qui va prendre 2 projectiles.
00:51:25 S'il n'avait pas de gilet pare-balles, il était mort.
00:51:28 - Les policiers ripostent en tirant dans la porte.
00:51:32 Mohamed, lui, ne compte pas se rendre.
00:51:38 Il se barricade chez lui.
00:51:47 - Approchez, approchez! Je sais ce que j'ai à faire!
00:51:50 - Mais tu veux que je te jette en l'air, hein?
00:51:53 Mais ça, c'est la gestion de Dieu, le calme de la pandémie!
00:51:56 - J'ai tapé la France!
00:51:59 - Ma mission, c'est de le prendre en vie.
00:52:02 Si ma mission avait été de le neutraliser par tout moyen,
00:52:05 à 3h30 du matin, le mercredi, c'était réglé.
00:52:08 Avec l'armement que nous avons et le calibre
00:52:11 et la puissance de feu que nous avons, c'était réglé en 3 minutes.
00:52:14 Dès lors, le forcené se prépare à résister.
00:52:17 Il s'isole dans la salle de bain,
00:52:20 la pièce la plus retranchée de l'appartement, sans fenêtre.
00:52:23 Celui qui se surnomme lui-même le messager d'Allah
00:52:26 pense à se vêtir d'une djellaba
00:52:29 avant d'enfiler un gilet pare-balles.
00:52:32 Mohamed est prêt à se battre,
00:52:35 arme à la main,
00:52:38 une sacoche pleine de munitions à ses côtés.
00:52:41 - Il est un guerrier
00:52:44 qui est rentré en phase de combat contre l'Etat français.
00:52:47 Donc on se met sur une base de repli, en protection,
00:52:50 pour tenir les issues, de manière à s'assurer qu'il ne s'échappe pas.
00:52:53 Et on entame cette fameuse phase de négociation.
00:52:56 2h après le 1er assaut raté du Raid,
00:52:59 la situation est figée.
00:53:02 Mehra est toujours cloîtré dans sa salle de bain.
00:53:05 La police décide alors de couper le gaz
00:53:08 et l'électricité.
00:53:11 Le forcené est plongé dans l'obscurité
00:53:17 comme l'ensemble du quartier.
00:53:20 Dès l'aube, le secteur est bouclé.
00:53:27 Le Raid se prépare au siège.
00:53:30 Il faut maintenant tout faire pour que Mehra se constitue prisonnier.
00:53:33 Sans force, il est rappelé par un homme
00:53:36 qui l'institue prisonnier, sans faire d'autres blessés.
00:53:39 Devant l'immeuble de la rue du sergent Vigné,
00:53:42 un négociateur du Raid tente d'entrer en contact avec le forcené.
00:53:46 - Mohamed, tu m'entends ?
00:53:49 Je suis le négociateur du Raid.
00:53:52 Il faut qu'on parle tous les deux.
00:53:55 Je vais t'envoyer quelqu'un avec un toki.
00:53:58 Il va te le jeter par la fenêtre.
00:54:01 Et pour nous prouver ta bonne volonté,
00:54:04 tu vas nous balancer une de tes armes en échange.
00:54:07 T'as bien compris ?
00:54:10 - Au même moment, à 40 km de là,
00:54:13 à Haute-Rive, Abdelkader Mehra, le grand frère de Mohamed,
00:54:16 est interpellé à son domicile avec son épouse.
00:54:19 Contrairement à son frère, il n'oppose aucune résistance
00:54:22 et se laisse emmener au commissariat central de Toulouse,
00:54:25 où il va être longuement interrogé.
00:54:28 Considéré comme un salafiste,
00:54:31 proche de la mouvance islamiste toulousaine,
00:54:34 les enquêteurs le soupçonnent d'avoir joué un rôle
00:54:37 dans les meurtres de Toulouse et Montauban.
00:54:41 Au petit matin, rue du Sergent Vignier,
00:54:44 Mohamed a accepté d'échanger l'un de ses Colt 45
00:54:47 contre un Tokiwoki du Raid.
00:54:50 Le forcené est prêt à parler,
00:54:53 mais il exige que son interlocuteur soit un policier
00:54:56 du renseignement toulousain qu'il connaît.
00:54:59 Marché conclu, le fonctionnaire est amené en urgence
00:55:02 au QG du Raid, un appartement réquisitionné à une voisine.
00:55:05 "Nous avons reconstitué les échanges
00:55:08 "qui ont eu lieu entre Mohamed Mera
00:55:11 "et le policier du renseignement."
00:55:15 -J'ai quelqu'un de déterminé, t'as vu,
00:55:18 j'ai pas fait ça pour me laisser faire attraper.
00:55:21 Là, on négocie, on est en train de négocier.
00:55:24 Après, en dehors des négociations,
00:55:27 n'oublie pas que j'ai les armes à la main.
00:55:30 Je sais ce qui va se passer, je sais comment vous opérez
00:55:33 pour intervenir. Je sais que vous risquez de m'abattre,
00:55:36 c'est un risque que je prends.
00:55:39 Sachez qu'en face de vous, vous avez un homme,
00:55:42 je l'aime comme toi, vous aimez la vie.
00:55:45 -Il nous a tout dit. Le fait que le seul regret qu'il avait,
00:55:53 c'est de ne pas avoir tué plus de monde dans l'école juive
00:55:57 et de ne pas avoir eu le temps de tuer plus de militaires.
00:56:00 -C'était un personnage très cruel,
00:56:03 très renfermé, très convaincu, déterminé.
00:56:07 Voilà ce qu'on a appris de lui.
00:56:10 -Mon but dans ces attentats, c'était de tuer en priorité
00:56:13 les militaires, parce que ces militaires-là sont engagés
00:56:16 en Afghanistan, et tous leurs alliés, de la police,
00:56:19 de la gendarmerie, de la police nationale, de tout.
00:56:22 -Ma mission, c'était de pouvoir s'assurer de sa personne
00:56:26 jusqu'à l'extrême limite de nos possibilités en vie.
00:56:30 C'est la raison pour laquelle on a accordé
00:56:33 toutes les chances à Mohamed Merah de pouvoir se rendre
00:56:36 après une phase très longue de négociations
00:56:39 et de réunions avec les militaires.
00:56:42 -Il va concevoir, lui, finalement, comme une phase de revendication,
00:56:45 quasiment un testament, où il va complètement assumer
00:56:48 l'ensemble des actes qu'il a commis à Toulouse et Montauban.
00:56:51 -En début d'après-midi, le patron du RAID estime
00:56:54 que la stratégie du dialogue est la bonne.
00:56:57 Le forcené est beaucoup plus calme et semble prêt à coopérer.
00:57:01 D'ailleurs, 12 heures après le début du siège,
00:57:04 Merah envoie un signal très positif aux policiers
00:57:07 en leur fournissant les clés de sa planque.
00:57:10 Un box où, selon lui, seraient cachées de nombreuses preuves matérielles.
00:57:14 Des policiers se rendent immédiatement
00:57:20 à l'adresse indiquée par Merah, tout près de son domicile.
00:57:24 Mohamed n'a pas menti.
00:57:27 Il s'agit bien du fameux scooter T-Max
00:57:30 repéré sur les scènes de crime.
00:57:34 Le numéro d'immatriculation a été grossièrement maquillé.
00:57:38 Le "C" a été transformé en "O".
00:57:41 Le scooter et un casque ont été repeints en blanc.
00:57:44 Pour passer inaperçu, le tueur avait en effet changé d'apparence
00:57:48 avant de se rendre à l'école juive.
00:57:51 Les enquêteurs mettent aussi la main sur le Colt 45,
00:57:55 qui a servi pour les tueries.
00:58:00 Mohamed Merah vient de fournir toutes les preuves de sa culpabilité.
00:58:04 Sa reddition semble bien engagée.
00:58:07 En fait, le jeune homme bluffe.
00:58:10 Il n'a pas du tout l'intention de se rendre.
00:58:13 Cette faculté à jouer double jeu,
00:58:16 il l'avait déjà exercée 2 ans auparavant, à l'été 2010.
00:58:21 ...
00:58:24 -Le 17 juillet 2010,
00:58:36 Mohamed quittait la France et ses ennuis judiciaires
00:58:39 pour s'envoler vers la Syrie.
00:58:41 Lors d'un voyage de 4 mois,
00:58:43 il réussissait à traverser une dizaine de pays sensibles
00:58:46 du Proche-Orient.
00:58:48 Voici comment Merah est passé inaperçu
00:58:51 alors qu'il avait déjà en tête des idées de djihad.
00:58:55 Mohamed commence par bourlinguer un mois en Syrie.
00:59:01 A chaque étape,
00:59:03 il envoie à sa famille des photos de lui par e-mail.
00:59:06 Sur celle-ci, il est à la grande mosquée des Omeyad, à Damas.
00:59:11 -C'est le prophète Yahya.
00:59:14 Il racontait, il est très content.
00:59:17 Il m'a dit de manger là-bas les bières.
00:59:21 Mais le dernier, il m'a dit,
00:59:23 "Maman, y a pas mieux que la France."
00:59:26 -Après un mois en Syrie, Merah ne tient pas en place.
00:59:30 Il rejoint d'abord Mossoul, en Irak,
00:59:33 où il ne passe que quelques jours.
00:59:35 Puis le voilà déjà à Beyrouth, pour 2 nuits seulement.
00:59:39 Que cherche-t-il ?
00:59:41 Probablement des contacts pour accomplir son djihad.
00:59:45 Sans succès, on le sait aujourd'hui,
00:59:48 car les services secrets locaux n'ont remarqué à l'époque
00:59:51 aucun lien sur place avec des filières djihadistes.
00:59:54 Merah continue bille en tête son périple insensé.
00:59:57 Le 5 septembre 2011, il rejoint Jérusalem en taxi.
01:00:01 Il pose fièrement devant la mosquée Al-Aqsa,
01:00:05 le 3e lieu saint de l'islam.
01:00:08 ...
01:00:10 -J'ai dit, t'es arrivé jusqu'à là-bas ?
01:00:13 "Ah, la, la, tel courage !"
01:00:15 Il m'a dit, "Oui." "Comment t'es passé ?"
01:00:18 "J'ai passé. Avec les filières, on a passé."
01:00:21 -Grâce à son passeport français,
01:00:23 les autorités israéliennes le laissent pénétrer sans problème
01:00:27 dans les territoires palestiniens de Cisjordanie.
01:00:30 Mais il ne traîne pas.
01:00:32 2 jours plus tard, il part pour l'Egypte,
01:00:35 pour se réunir avec ses amis pendant un mois.
01:00:38 Sur ses photos, Mohamed n'a pas vraiment l'allure
01:00:41 d'un fanatique religieux.
01:00:43 Pourtant, il rumine déjà des projets de guerre sainte.
01:00:47 -Là, on a le sentiment qu'il cherche une caution.
01:00:50 Il cherche quelqu'un qui lui dise, oui, le choix du djihad,
01:00:54 c'est le bon. Vas-y, fais-le.
01:00:57 -Pour le juge Marc Trévidique, son parcours au Proche-Orient
01:01:01 est typique des jeunes fondamentalistes
01:01:03 qui veulent faire le djihad.
01:01:05 -Ils vont là, à l'endroit qui symbolise le djihad.
01:01:09 C'est un besoin d'aller voir les vrais.
01:01:12 Les vrais, ce sont, dans l'imaginaire,
01:01:15 les moudjahidines d'origine.
01:01:17 Ceux qui, vraiment, sont sur le terrain,
01:01:20 ont réussi à instaurer, par moments, la charia.
01:01:24 Et eux, c'est ça. Le djihad, c'est ça, c'est ce territoire.
01:01:28 C'est ce qu'on leur a vendu sur les sites islamistes, sur Internet.
01:01:32 -Pour trouver les vrais combattants,
01:01:34 Mohamed s'envole pour l'Afghanistan,
01:01:37 à peine une semaine après son séjour en Égypte.
01:01:40 L'apprenti djihadiste a même un plan en tête,
01:01:43 d'une naïveté désarmante.
01:01:45 Il compte se faire enlever par des talibans
01:01:48 et leur dévoiler ses intentions de djihad.
01:01:51 Il pourra alors, espère-t-il, combattre les mécréants à leur côté.
01:01:55 -Il va rechercher, établir les contacts
01:01:58 qui vont lui permettre d'être quelqu'un
01:02:01 qui va enfin être pris au sérieux,
01:02:03 parce qu'il pourra dire "je suis allé en Égypte,
01:02:06 "je suis allé en Afghanistan, j'ai établi des contacts".
01:02:09 Il va chercher toutes les possibilités
01:02:12 de montrer qu'il est quelqu'un dans l'islam
01:02:15 et qu'il est à la hauteur d'une radicalité dans la religion.
01:02:19 -Mohamed cherche, mais en Afghanistan,
01:02:22 rien ne se passe comme il l'espérait.
01:02:25 Le 22 novembre 2010, 9 jours seulement
01:02:28 après son entrée sur le territoire,
01:02:31 Mehra est interpellé par la police afghane
01:02:34 lors d'un contrôle à Kandahar, en pleine zone de guerre.
01:02:37 Intrigué par ce Français qui traîne au coeur du fief taliban,
01:02:41 les Afghans le confient aux militaires américains.
01:02:44 Mais Mehra n'a pas l'air dangereux.
01:02:47 Les djihads le renvoient sur Kaboul.
01:02:50 Par précaution, ils inscrivent sur leur "no-fly list",
01:02:53 interdit de vol vers les Etats-Unis.
01:02:56 L'information de son arrestation à Kandahar
01:02:59 est alors transmise aux autorités françaises.
01:03:02 Le 5 décembre 2010, Mehra est déjà de retour en France.
01:03:09 Son djihad est un fiasco.
01:03:12 Au total, le jeune banlieusard a voyagé pendant 4 mois
01:03:16 et a traversé 10 pays.
01:03:19 Un long périple, coûteux pour un jeune homme de 23 ans.
01:03:23 - Je lui ai dit "combien ça t'a coûté ?"
01:03:26 Il me fait billet d'aller, billet de retour.
01:03:29 Il me dit "tout compris, j'en ai eu pour moins de 4 000 euros".
01:03:32 - 4 000 euros alors que Mohamed ne travaille plus depuis des mois.
01:03:36 Et comme l'atteste se relevait de compte que nous nous sommes procurés,
01:03:40 il ne touche que 390 euros au mensuel de Pôle emploi.
01:03:44 Alors avec quel argent a-t-il financé son voyage ?
01:03:48 Sa sœur Souad admet avoir acheté en ligne, avec sa propre carte bancaire,
01:03:52 le billet d'avion de son frère pour la Syrie.
01:03:56 - Ce n'est pas moi qui ai financé son voyage.
01:03:59 Je lui ai juste prêté la carte bleue pour pouvoir le payer sur Internet.
01:04:03 Mais l'argent, il me l'a donné.
01:04:06 L'argent de son billet qui était de 3,5 euros, il me l'a remboursé.
01:04:09 Ce n'est pas moi qui lui ai payé le billet. Ce n'est pas un cadeau.
01:04:12 - Pourquoi il ne paye pas avec sa carte ?
01:04:15 - Parce qu'il a la carte bleue, tout simplement.
01:04:18 Selon sa mère, Mohamed aurait financé seul l'intégralité de son voyage
01:04:23 en retapant une vieille BMW revendue à prix d'or.
01:04:27 - Combien il a vendu la voiture ? 22 000 euros.
01:04:30 Il a acheté 4 000, même pas 4 000 euros.
01:04:34 Il a réparé bien chez son patron.
01:04:38 Chez son patron, il a vendu 22 000 euros.
01:04:40 - Vous êtes sûr de ça ?
01:04:41 Parce que quand on achète une voiture 4 000 euros,
01:04:43 on la revend pas à 22 000 euros.
01:04:45 - Ah si, c'est un billet, moi. C'est un billet, comment il a rendu ?
01:04:49 Si la famille ne l'a pas aidée financièrement,
01:04:54 que savait-elle de ses projets de djihad ?
01:04:57 - La famille a toujours un rôle.
01:05:00 Alors bénéfique, maléfique, pas dans le passage à l'acte,
01:05:04 mais dans ce qu'il fait un individu tel qu'il est.
01:05:07 - Quel est le niveau de responsabilité d'implication des autres ?
01:05:09 Ça, c'est un problème, parce que c'est pas déterminé.
01:05:12 Mais Swad devait connaître un certain nombre de choses,
01:05:14 comme toutes les femmes dans ces milieux-là
01:05:16 ont toujours eu beaucoup, beaucoup d'informations.
01:05:18 - Ce qu'il faut se dire, c'est que si vraiment on savait quelque chose
01:05:22 ou si on se doutait de quelque chose,
01:05:24 on n'aurait jamais pris le risque de se mouiller
01:05:26 au point de payer un voyage avec sa propre carte bleue.
01:05:29 Moi, j'étais complètement ignorante de ses projets.
01:05:32 Swad n'aurait donc rien su des intentions de djihad de son frère.
01:05:38 Ce mail que Mohamed lui a envoyé le 8 septembre 2010
01:05:41 semble le confirmer.
01:05:43 Il est alors à Jérusalem, et il reproche à sa sœur
01:05:48 de n'avoir pas régularisé sa situation auprès de Pôle emploi.
01:05:53 - "La lettre pour mon chômage, tu l'as envoyée ?
01:05:56 "Ca risque de te prendre du temps pour aller chercher une feuille et un stylo.
01:06:00 "Moi, de mon côté, le temps que tu répondes à un mail de merde,
01:06:04 "j'ai eu le temps de partir au Liban.
01:06:06 "Le lendemain, j'ai visité Beyrouth, je suis allé à la mer,
01:06:08 "et puis je suis revenu en Syrie.
01:06:10 "Et de là, je suis parti en Jordanie. J'ai trouvé un hôtel, je me suis promené."
01:06:14 - Mohamed évoque ses visites touristiques,
01:06:17 ses problèmes administratifs, sa voiture.
01:06:20 Mais à aucun moment dans ses mails,
01:06:22 il ne fait référence au djihad ou au moudjaïdine.
01:06:25 Il ne met pas sa sœur dans la confidence.
01:06:29 Et il est même très agressif à son égard.
01:06:32 - "À cause de toi, j'ai les nerfs.
01:06:35 "Ca me prend la tête, donc je coupe définitivement les liens avec toi.
01:06:39 "Et une dernière fois, me calcule pas, Swad.
01:06:43 "Tu peux pas savoir comment je m'en fous de toi.
01:06:46 "Aujourd'hui, t'es comme Kader, Aïcha et Abdel.
01:06:49 "Rien à foutre de vous tous."
01:06:51 - Mohamed, déjà brouillé avec ses autres frères et sœurs,
01:06:56 décide de couper les ponts avec Swad.
01:06:59 Ils ne se reverront pas pendant plus d'un an.
01:07:03 À son retour de voyage, le 5 décembre 2010,
01:07:07 l'apprenti djihadiste est de plus en plus isolé à Toulouse.
01:07:11 Isolé, mais pas si seul.
01:07:14 Car à peine un mois plus tard, le 7 janvier 2011,
01:07:18 Mehra est sous surveillance.
01:07:21 Les militaires afghans viennent d'alerter les autorités françaises
01:07:35 qu'un certain Mohamed Mehra a été contrôlé
01:07:38 quelques semaines plus tôt à Kandahar.
01:07:41 La direction du renseignement intérieur français, la DCRI,
01:07:45 prend l'information au sérieux et décide d'ouvrir une enquête.
01:07:49 C'est le renseignement toulousain qui est chargé de surveiller Mehra.
01:07:55 Le jeune homme est vite localisé.
01:07:57 Il vit seul aux 17 rues du Sergent-Vignier.
01:08:00 Entre janvier et août 2011,
01:08:04 les enquêteurs réalisent 1 200 heures de surveillance sur le terrain.
01:08:10 Une caméra est même placée dans la maison d'un voisin.
01:08:13 Elle filme en continu l'entrée de son immeuble.
01:08:17 Mehra est ici filmé devant chez lui en juin 2011.
01:08:24 Cheveux plaqués en arrière, vêtements de marque, jeans, baskets.
01:08:29 Le jeune homme n'affiche aucun signe religieux.
01:08:32 Les surveillances montrent par ailleurs qu'il ne fréquente pas de mosquées.
01:08:37 En apparence, Mehra semble se tenir tranquille.
01:08:41 Il travaille de temps en temps comme carrossier dans un garage
01:08:44 et il s'est remis à jouer au foot dans la cité.
01:08:47 Mais comme à son habitude, Mohamed joue double jeu.
01:08:52 Et les agents du renseignement qui le surveillent ne se laissent pas duper.
01:08:56 D'abord, ils constatent que Mehra n'utilise pas de portable.
01:09:02 Le jeune homme préfère appeler depuis une cabine en bas de chez lui.
01:09:06 Comme s'il voulait brouiller les pistes.
01:09:09 Plus inquiétant, Mehra passe des journées entières enfermées chez lui,
01:09:14 dans la pénombre, totalement seul.
01:09:17 Les gardiens de la résidence où vivait Mohamed
01:09:21 ont connu ce locataire qui ne faisait pas parler de lui.
01:09:24 - Un jeune homme tout à fait ordinaire.
01:09:27 Je veux dire un peu fashion victime, hein.
01:09:29 Toujours très bien habillé. - Propre, rasé.
01:09:32 - Parfumé, quand on le croisait, on sent son odeur de parfum.
01:09:37 "Bonjour, au revoir, bon courage, monsieur, madame.
01:09:40 "Il fait beau, il pleut, il fait froid."
01:09:43 Voilà.
01:09:45 Rien à signaler, donc, jusqu'en mai 2011.
01:09:49 Un officier du renseignement toulousain sonne à leur porte.
01:09:53 Ce policier, que nous appellerons Karim,
01:09:57 demande aux gardiens de jeter un oeil discret sur un certain Mohamed Mehra.
01:10:02 - Un matin, je suis entré dans l'immeuble,
01:10:05 je me suis rapproché de la porte de Mohamed Mehra,
01:10:08 et j'ai dit "T'as, y a quelqu'un."
01:10:10 Donc, comme j'avais son numéro, ce policier,
01:10:13 j'ai dit "Je vais l'appeler, comme il m'a demandé de le tenir informé,
01:10:17 "je vais l'appeler." Et le temps que je sors de mon téléphone,
01:10:20 quelqu'un me tape sur l'épaule, je me retourne,
01:10:23 et c'était ce jeune homme qui est en face de moi, Mohamed Mehra,
01:10:26 il me dit "Qui êtes-vous ?" Je lui ai dit "Je suis le gardien de la résidence."
01:10:29 Il m'a dit "Excusez-moi", et il est reparti.
01:10:32 Ca m'a inquiété parce que je l'ai pas senti arriver derrière moi.
01:10:35 Je suis arrivé, j'ai monté les escaliers doucement,
01:10:37 j'ai mis mon oreille doucement, je suis sorti doucement,
01:10:39 et tap, il était derrière moi.
01:10:41 Ca prouve bien que c'était quand même quelqu'un qui était sur le qui-vive.
01:10:44 C'est quelqu'un de méfiant.
01:10:47 - Mehra, méfiant, le policier du renseignement, Karim,
01:10:52 le sait déjà pertinemment.
01:10:55 Toutes les notes de surveillance rédigées par son service
01:10:58 décrivent, mois après mois,
01:11:00 le comportement toujours plus inquiétant du jeune homme.
01:11:04 - Mehra se comporte comme quelqu'un qui se sait surveiller.
01:11:10 Un comportement dangereux et irresponsable
01:11:13 lors de la conduite de son véhicule,
01:11:15 ayant parfois pour objectif évident de rompre toute finiture.
01:11:20 La source confirme le comportement paranoïaque de Mohamed Mehra.
01:11:26 Mais c'est une note datée du 3 mars 2011
01:11:29 qui interpelle particulièrement aujourd'hui.
01:11:32 Les policiers y soupçonnent Mehra d'être impliqué dans un projet djihadiste.
01:11:37 - Plusieurs éléments significatifs
01:11:40 laissent supposer l'implication de Mehra
01:11:42 dans une filière d'acheminement de combattants
01:11:45 vers les zones tribales afghano-pakistanaises.
01:11:48 - La note ne donne pas plus de précision.
01:11:52 Mais comment expliquer qu'avec de tels soupçons,
01:11:55 le renseignement toulousain n'ait pas décidé d'agir ?
01:11:58 Pourquoi, pendant ces 7 mois de surveillance,
01:12:02 Mehra n'a-t-il pas été interrogé ou arrêté ?
01:12:06 - Au vu des éléments détenus à ce moment-là
01:12:10 par la DCRI, par la DGSE,
01:12:12 par l'ensemble des services de renseignement,
01:12:15 Mohamed Mehra aurait pu être arrêté.
01:12:18 Plus de 1 200 heures de surveillance.
01:12:21 Tout un effectif déployé pour le surveiller,
01:12:25 et pourtant, il n'a pas été arrêté.
01:12:27 - Il y a eu une erreur.
01:12:29 - Flagrante.
01:12:31 - Je vous rappelle qu'en France,
01:12:33 nous avons la chance de vivre dans un état de droit.
01:12:36 Vous n'interpellez pas des gens comme ça,
01:12:38 quand vous l'avez décidé.
01:12:40 D'abord, les interpellations se font sur décision judiciaire
01:12:43 ou sur flagrant délit.
01:12:45 Et elles ne se font jamais sur délit d'opinion
01:12:47 ou intention de voyage.
01:12:49 Pour que quelqu'un puisse être interpellé,
01:12:51 il faut qu'il commette quelque chose
01:12:53 qui est contraire à la loi.
01:12:55 Malgré toutes ces observations,
01:12:57 jamais n'est apparu le moindre début
01:12:59 d'une intention féminine.
01:13:01 - La législation judiciaire existe, c'est assez facile.
01:13:03 Je ne parle pas forcément d'instruction,
01:13:05 mais au moins une enquête préliminaire parquet
01:13:07 pour savoir s'il y a une infraction qui tient la route,
01:13:09 ce n'est pas difficile.
01:13:11 - Pourquoi ne l'a-t-on pas fait ?
01:13:13 - Dans l'hypothèse...
01:13:15 - La ferme ERA, c'est la ferme ERA.
01:13:17 - Mais de toute façon, le système antiterroriste,
01:13:19 il est fait pour éviter les attentats.
01:13:21 S'il y a un attentat, c'est qu'il y a eu une erreur.
01:13:23 Cette photo semble confirmer
01:13:25 que le renseignement toulousain
01:13:27 ait pu commettre une erreur.
01:13:29 Elle est issue de la surveillance des policiers
01:13:31 et elle montre que Mera
01:13:33 est encore observée le 17 août 2011.
01:13:35 Et malgré les soupçons qui pèsent sur lui,
01:13:39 les policiers vont le laisser
01:13:41 s'envoler tranquillement,
01:13:43 deux jours plus tard,
01:13:45 vers l'eldorado des djihadistes,
01:13:47 le Pakistan.
01:13:49 Durant deux mois,
01:13:59 à l'été 2011,
01:14:01 Mera va sillonner le pays,
01:14:03 depuis Lahore jusqu'aux zones tribales,
01:14:05 à la recherche de djihadistes.
01:14:07 Et cette fois-ci, il va les trouver.
01:14:09 Nous sommes partis au Pakistan
01:14:13 pour faire un incroyable périple
01:14:15 et rencontrer ceux qui l'ont aidé à devenir un terroriste.
01:14:17 Mohamed a obtenu un visa touristique
01:14:23 dix jours plus tôt.
01:14:25 Il voyage en règle.
01:14:27 Officiellement,
01:14:29 il cherche une épouse musulmane.
01:14:31 A son arrivée à Lahore le 20 août,
01:14:33 il joue les touristes, comme à son habitude,
01:14:35 se filmant devant les monuments de la ville,
01:14:37 le vieux fort,
01:14:39 la grande mosquée
01:14:41 et celle que l'on surnomme
01:14:43 la tour Eiffel de Lahore.
01:14:45 Mohamed vient d'acheter un téléphone pakistanais
01:14:49 avec une carte prépayée
01:14:51 et le soir de son arrivée,
01:14:53 la première personne qu'il s'empresse d'appeler,
01:14:55 c'est sa maman,
01:14:57 pour la rassurer.
01:14:59 - Je lui dis "Mohamed,
01:15:01 si un pays est dangereux,
01:15:03 si un pays est dangereux,
01:15:05 si tu vois des djihadistes partout là-bas,
01:15:07 pourquoi tu veux... "
01:15:09 Mohamed envoie aussi régulièrement
01:15:11 des mails à sa famille,
01:15:13 depuis son adresse Abu Yousouf.
01:15:15 A Lahore,
01:15:17 il se connecte à sa messagerie dans ce taxiphone,
01:15:19 juste à côté, le sait-il,
01:15:21 du bâtiment des services secrets pakistanais.
01:15:23 Ce document,
01:15:27 établi quelques mois plus tard par les policiers français,
01:15:29 répertorie toutes les connexions
01:15:31 internet de Mera au Pakistan.
01:15:33 Cette liste nous permet aujourd'hui
01:15:37 de retracer son itinéraire
01:15:39 à travers tout le pays.
01:15:41 En 2 mois de voyage,
01:15:43 Mera traverse une dizaine de villes pakistanaises.
01:15:45 Il réussit même à rejoindre les zones tribales,
01:15:49 puis s'arrête à Abbottabad
01:15:51 pour se recueillir devant la maison
01:15:53 où a été tué Ben Laden.
01:15:55 Un long périple
01:15:57 de plus de 3 500 km
01:15:59 en bus et en voiture.
01:16:01 Mohamed cherche obstinément les talibans,
01:16:05 comme il l'avait fait en Afghanistan.
01:16:07 - Il a envie de combattre, ça, c'est sûr.
01:16:11 Il a envie de faire quelque chose.
01:16:13 Il multiplie les contacts,
01:16:15 il multiplie toutes les démarches
01:16:17 pour mettre en place
01:16:19 le système de justification.
01:16:21 Et il faut qu'il puisse penser
01:16:23 qu'au moment où il va agir,
01:16:25 il le fait avec l'autorisation divine,
01:16:27 qu'on le trouve fanatique.
01:16:29 - C'est à Islamabad,
01:16:31 début septembre 2011,
01:16:33 que Mohamed va enfin trouver celui qu'il cherche.
01:16:35 Selon les experts du terrorisme international,
01:16:39 l'homme qui a aidé Mera au Pakistan
01:16:41 est très certainement
01:16:43 Abdulaziz Ghazi.
01:16:45 L'imam, qui fut un proche de Ben Laden,
01:16:49 dirige la mosquée rouge,
01:16:51 l'une des plus radicales du pays.
01:16:53 L'homme peut être un sésame
01:16:55 pour tous les djihadistes qui veulent partir au combat.
01:16:57 Mais comment Mohamed,
01:16:59 jeune banlieusard toulousain,
01:17:01 a-t-il pu approcher cet imam puissant ?
01:17:03 Selon ses propres aveux,
01:17:07 ce fut un jeu d'enfant.
01:17:09 Il s'enventra auprès des hommes du Raid
01:17:11 quelques mois plus tard,
01:17:13 lors du siège de son appartement.
01:17:15 Rue du Sergent Vigné,
01:17:27 en fin d'après-midi,
01:17:29 le Raid est toujours retranché dans sa salle de bain.
01:17:31 Seul face au Raid,
01:17:33 qui tente toujours de négocier sa rédition
01:17:35 dans les meilleures conditions.
01:17:37 Mais pour l'instant,
01:17:39 Mohamed veut parler.
01:17:41 Et les policiers écoutent avec beaucoup d'intérêt,
01:17:43 ce qui ressemble à des aveux.
01:17:45 - J'ai fait plusieurs pays
01:17:47 afin de trouver les frères.
01:17:49 Tous les autres pays que j'ai faits,
01:17:51 en Afghanistan non plus, je les ai pas trouvés.
01:17:53 Je les ai trouvés au Pakistan.
01:17:55 - T'es resté combien de temps au Pakistan ?
01:17:57 - Deux mois jour pour jour.
01:17:59 J'ai mis environ
01:18:01 une dizaine de jours pour trouver les frères.
01:18:03 Ranne de l'État, j'ai gagné leur confiance.
01:18:07 Pour gagner leur confiance,
01:18:11 Mohamed explique y être allé
01:18:13 au culot.
01:18:15 - A Islamabad,
01:18:17 je suis rentré dans une certaine mosquée
01:18:19 et j'ai vu un homme dont j'avais entendu dire
01:18:21 qu'il soutenait les talibans ouvertement.
01:18:23 J'ai parlé avec lui
01:18:25 en lui disant que je voulais rejoindre Al-Qaïda,
01:18:27 les talibans, tout ça.
01:18:29 De là, il m'a envoyé chez un émir des talibans.
01:18:31 Et après, j'ai rejoint les frères.
01:18:33 Ça m'a surpris.
01:18:35 Tout ça me paraissait trop facile.
01:18:41 L'émir de la mosquée dont parle Mohamed,
01:18:43 celui qui leur ait aidé à rejoindre les talibans,
01:18:45 serait donc cet homme,
01:18:47 l'imam de la mosquée rouge d'Islamabad.
01:18:49 Abdulaziz Ghazi est un radicaliste
01:18:53 qui appelle ouvertement au djihad contre l'Occident.
01:18:55 Il a accepté de nous rencontrer.
01:18:57 Il ne nie pas avoir reçu
01:18:59 Mohamed Merah il y a quelques mois.
01:19:01 - Oui, je l'ai peut-être rencontré.
01:19:05 C'est bien possible, mais je ne me souviens plus.
01:19:09 Je rencontre tellement de gens.
01:19:11 Des dizaines d'étudiants viennent me voir chaque jour
01:19:13 pour prendre mes conseils.
01:19:15 Si quelqu'un vient me demander des conseils
01:19:19 pour faire le djihad,
01:19:21 je ne stoppe pas, bien au contraire.
01:19:23 Le djihad est très important.
01:19:25 Il fait partie de notre religion.
01:19:27 C'est une réaction contre la cruauté et l'injustice.
01:19:31 Les gens qui meurent en martyr,
01:19:35 les armes à la main,
01:19:37 comme certains de mes étudiants dans le passé,
01:19:39 sont des personnes bénies.
01:19:41 Il y a un parfum subtil qui émane de leur tombe.
01:19:45 Nous lui rappelons que Merah
01:19:49 a tué des innocents, des enfants.
01:19:51 Mais l'imam, loin de condamner ses crimes,
01:19:53 va même jusqu'à les justifier,
01:19:55 un sourire aux lèvres.
01:19:57 - Si Merah a commis ses actes au nom de l'Islam,
01:20:01 alors c'est un martyr.
01:20:05 Un propos extrêmement choquant et inacceptable.
01:20:07 L'imam a-t-il aidé Merah à rejoindre les talibans
01:20:11 dans les zones tribales ?
01:20:13 C'est probable.
01:20:15 Car après son séjour à Islamabad,
01:20:17 Mohamed disparaît des écrans radars.
01:20:19 Entre le 28 septembre et le 9 octobre,
01:20:21 plus aucune connexion Internet
01:20:23 n'est activée depuis sa boîte mail.
01:20:25 En fait, Merah est déjà parti pour Miranjah,
01:20:29 à l'ouest du pays,
01:20:31 pour apprendre le maniement des armes
01:20:33 et le comportement de djihadistes.
01:20:35 Nous allons suivre sa trace.
01:20:37 Mais impossible pour nous de pénétrer
01:20:43 dans les zones tribales.
01:20:45 Nous confions notre caméra à Mohamed,
01:20:47 un cameraman originaire de la région.
01:20:49 Car à Miranjah,
01:20:51 les étrangers sont vite considérés
01:20:53 comme des espions.
01:20:55 - C'est simple.
01:20:57 Aucun étranger ne peut aller là-bas
01:20:59 sans la permission des talibans.
01:21:01 Si on arrêtait de le faire,
01:21:03 se ferait arrêter ou tuer immédiatement.
01:21:05 Très rares sont ceux qui ont pu filmer
01:21:09 sur cette route périlleuse
01:21:11 qui mène aux zones tribales.
01:21:13 Mais grâce à son autorisation exceptionnelle,
01:21:15 notre cameraman va pouvoir pénétrer
01:21:17 dans les territoires tenus par les talibans.
01:21:19 Miranjah est à une demi-journée d'Islamabad.
01:21:23 Merah y est emmené par un taliban en moto
01:21:27 qui connaît la route et ses dangers.
01:21:29 Le secteur n'est pas contrôlé par l'armée,
01:21:31 mais il faut montrer patte blanche
01:21:33 lors des nombreux checkpoints
01:21:35 qui parsèment le parcours.
01:21:37 Sur le bord de la route,
01:21:39 des bâtiments en ruines,
01:21:41 entièrement détruits par les drones américains.
01:21:43 Mohamed n'est pas rassuré.
01:21:45 Il craint à tout moment de tomber dans un guet-apens.
01:21:47 Mais après 10 heures de route,
01:21:51 il arrive sain et sauf à Miranjah.
01:21:53 Il traverse ce bazar d'un autre temps
01:21:57 où aucune femme n'a le droit de circuler.
01:21:59 Enfin, le camp de djihadistes
01:22:07 où il espère être entraîné.
01:22:09 Un camp comme celui-ci,
01:22:11 selon notre cameraman,
01:22:13 qui n'est pas autorisé à le filmer de plus près.
01:22:15 Merah est d'abord conduit
01:22:21 dans une maison isolée
01:22:23 où il va être interrogé sur sa foi
01:22:25 et sur ses intentions de djihad.
01:22:27 Et après quelques jours,
01:22:29 une fois les doutes levés,
01:22:31 les talibans acceptent de le présenter
01:22:33 à cet homme,
01:22:35 Moez Garzalaoui,
01:22:37 qui à l'époque recrute et forme
01:22:39 des djihadistes du monde entier pour Al-Qaïda.
01:22:41 Il parle français
01:22:43 et devient très vite le confident de Mohamed,
01:22:45 son instructeur,
01:22:47 son mentor.
01:22:53 Sur ces images de propagande islamiste,
01:22:55 ces jeunes djihadistes sont filmés
01:22:57 dans un camp d'entraînement.
01:22:59 C'est dans un camp comme celui-ci
01:23:01 que Merah a lui aussi reçu fin septembre 2011,
01:23:03 une formation expresse
01:23:05 de deux jours aux armes de poing,
01:23:07 au kalachnikov et aux grenades.
01:23:09 Et comme ce jeune moudjaïdine,
01:23:17 Mohamed perd très vite tout discernement.
01:23:19 Entraîné dans un fanatisme délirant,
01:23:21 il aurait même essayé fièrement
01:23:23 une ceinture explosive comme celle-ci.
01:23:25 Quelques mois plus tard,
01:23:27 avec la même arrogance,
01:23:29 il racontera ses exploits au Raid.
01:23:31 Toujours retranché dans sa salle de bain,
01:23:45 Mohamed parle depuis des heures aux hommes du Raid,
01:23:47 sidérés par le récit de son entraînement au Pakistan.
01:23:49 - Et toi, c'est quoi l'entraînement que t'as suivi ?
01:23:51 Tu peux m'en parler ?
01:23:53 Attaqué la France,
01:24:11 Merah s'y était préparé dès son retour du Pakistan.
01:24:13 Et son projet n'a jamais été contrarié
01:24:15 par la police.
01:24:17 (musique)
01:24:19 - Après sa rapide formation
01:24:31 dans les zones tribales du Pakistan,
01:24:33 Mohamed était de retour à Toulouse
01:24:35 le 19 octobre 2011.
01:24:37 Cette fois-ci,
01:24:41 il rentrait fort du permis de tuer
01:24:43 accordé par son mentor.
01:24:45 Mais aussi très fragilisé
01:24:47 par une sévère hépatite A.
01:24:49 Son foie n'a pas supporté
01:24:51 la nourriture des zones tribales.
01:24:53 Mohamed se remet lentement sur pied.
01:25:07 Et un mois après son retour du Pakistan,
01:25:11 le 14 novembre 2011,
01:25:13 il se rend à une convocation
01:25:15 du renseignement toulousain.
01:25:17 Le brigadier,
01:25:19 un certain Karim, souhaite l'interroger
01:25:21 sur son voyage.
01:25:23 Karim connaît bien Merah.
01:25:25 Il a participé à sa surveillance
01:25:27 quelques mois plus tôt.
01:25:29 Et c'est lui qui avait laissé sa carte de visite
01:25:31 au gardien de son immeuble.
01:25:33 Merah, comme à son habitude,
01:25:37 donne le change.
01:25:39 Il revendique une pratique modérée de l'islam
01:25:41 et se présente comme un baroudeur.
01:25:43 Pour preuve,
01:25:45 il montre ses photos touristiques
01:25:47 prises en Syrie, en Égypte ou au Pakistan.
01:25:49 En revanche, bien sûr,
01:25:51 il ne dit rien de son passage
01:25:53 dans les zones tribales.
01:25:55 L'entretien dure plusieurs heures
01:25:57 et si l'on en croit le rapport des policiers,
01:25:59 Merah a réussi à les convaincre
01:26:01 du but simplement touristique
01:26:03 de ses voyages.
01:26:05 - Mohamed Merah nous a déclaré
01:26:07 s'être rendu au Pakistan
01:26:09 dans un but touristique.
01:26:11 Cette rencontre n'a pas permis
01:26:13 de faire le lien entre Mohamed Merah
01:26:15 et un éventuel réseau djihadiste.
01:26:17 - Attendez, on sait très bien qu'un gars
01:26:23 qui se radicalise, qui a une fiche américaine,
01:26:25 qui a déjà été en voyage
01:26:27 et qui y retourne,
01:26:29 qui va faire du tourisme,
01:26:31 attendez, on est demeuré ou pas ?
01:26:33 C'est pas la peine des flics.
01:26:35 - Nous avons rendez-vous avec un policier du renseignement
01:26:37 qui connaît bien le dossier.
01:26:39 Il témoigne anonymement
01:26:41 car il risque sa place.
01:26:43 Mais il veut dénoncer le manque de professionnalisme
01:26:45 du service qui surveillait Mohamed Merah.
01:26:47 - Quand on est au service de renseignement,
01:26:51 comment on peut croire ça ?
01:26:53 Comment on peut croire ça ?
01:26:55 - Selon ce policier,
01:26:57 Karim aurait au contraire bien compris
01:26:59 que Merah cherchait un filon djihadiste.
01:27:01 Il pouvait donc devenir
01:27:03 une excellente source de renseignement,
01:27:05 un indique précieux pour son service.
01:27:07 - Déjà, à un moment, il a dû penser
01:27:11 "C'est pas mal, j'ai quelqu'un qui peut aller
01:27:13 jusqu'en Afghanistan, au Pakistan et tout."
01:27:15 Il a dû se dire
01:27:17 "C'est bon, je vais, c'est ça,
01:27:19 je vais avoir des renseignements
01:27:21 intéressants en Pakistan, en Afghanistan."
01:27:23 - On va lui dire
01:27:25 "Écoute, voilà, on sait que tu fais un certain nombre de choses,
01:27:27 c'est pas encore allé trop loin,
01:27:29 tu peux peut-être revenir dans le droit chemin
01:27:31 où on peut fermer les yeux sur un certain nombre
01:27:33 de tes activités. En échange,
01:27:35 tu nous donnes un certain nombre d'informations
01:27:37 sur les gens que tu fréquentes,
01:27:39 sur les pays dans lesquels tu vas.
01:27:41 C'est au sens propre ce qu'on appelle un indique,
01:27:43 une balance."
01:27:45 - Karim a-t-il décidé
01:27:47 de faire de Merah une source
01:27:49 à son retour du Pakistan ?
01:27:51 Les conclusions de l'entretien du 14 novembre
01:27:53 envisageaient en tout cas cette option.
01:27:55 - Mohamed Merah
01:27:57 est apparu comme quelqu'un d'assez malin
01:27:59 et ouvert, qui pourrait présenter
01:28:01 un intérêt pour notre thématique
01:28:03 en raison de son profil voyageur.
01:28:05 - Merah, de son côté,
01:28:09 semblait prêt à devenir un indique.
01:28:11 Il en aurait parlé à sa soeur
01:28:13 juste avant son entretien avec Karim.
01:28:15 - Elle me dit
01:28:17 "Soit, si jamais on me propose
01:28:19 de bosser, pour eux, je bosse."
01:28:21 Et moi, je lui dis "Mais...
01:28:23 Mais t'es malade ?
01:28:25 Tu veux être une balance ?"
01:28:27 Elle me dit "Si, si, si, si, si on me demande,
01:28:29 je travaille pour eux."
01:28:31 Donc voilà, il...
01:28:33 Et j'ai appris aussi, après les événements,
01:28:35 que son ex avait surpris plusieurs conversations
01:28:37 assez amicales
01:28:39 avec l'officier qu'il appelait régulièrement.
01:28:41 Je pense que c'était son contact, en fait.
01:28:43 C'est avec lui qu'il parlait
01:28:45 juste après son retour de...
01:28:47 - Du Pakistan. - Du Pakistan, oui.
01:28:49 - Je le répète, il n'était en aucune façon
01:28:51 un indicateur.
01:28:53 - Vous le savez ? - Je le dis de façon catégorique.
01:28:57 - Vous le sauriez, s'il cesse ? - Oui, bien sûr.
01:28:59 Pourtant, après l'entretien du 14 novembre,
01:29:09 il n'existe plus de note
01:29:11 de renseignement sur Mera.
01:29:13 Le jeune homme n'est donc plus du tout
01:29:15 surveillé.
01:29:17 A-t-il conclu un pacte
01:29:19 avec le renseignement ?
01:29:21 Devenir un indique en échange de l'arrêt
01:29:23 des surveillances ?
01:29:25 Pendant 4 mois, en tout cas,
01:29:27 il a les mains libres pour préparer ses crimes
01:29:29 sans que personne ne voit rien venir.
01:29:53 Mera aurait réussi à manipuler
01:29:55 les services de renseignement,
01:29:57 et Karim en particulier.
01:29:59 Il s'en vantera, triomphant,
01:30:01 lors du siège de son appartement.
01:30:03 Rappelez-vous, dès le début du siège,
01:30:05 Mera avait exigé de parler
01:30:07 à un policier qu'il connaissait.
01:30:09 Ce policier, c'est le fameux Karim.
01:30:11 Mohamed ne l'a pas choisi au hasard.
01:30:13 Il est fier de l'avoir manipulé,
01:30:15 et il prend un malin plaisir
01:30:17 à le narguer.
01:30:19 - Alors, vous avez dit
01:30:21 que vous étiez un peu
01:30:23 en colère,
01:30:25 parce que vous avez été
01:30:27 en colère, parce que vous avez été
01:30:29 en colère, parce que vous avez été
01:30:31 en colère, parce que vous avez été
01:30:33 en colère, parce que vous avez été
01:30:35 en colère, parce que vous avez été
01:30:37 en colère, parce que vous avez été
01:30:39 en colère, parce que vous avez été
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01:32:49 en colère, parce que vous avez été
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01:34:47 en colère, parce que vous avez été
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