"Yannick" de Quentin Dupieux avec Raphaël Quenard, Blanche Gardin, Pio Marmaï et Sébastien Chassagne.
En salles le mercredi 2 août 2023.
En salles le mercredi 2 août 2023.
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Court métrageTranscription
00:00 Yannick, ça serait genre son équivalent sportif.
00:05 Ça serait un gars qui déboule bille en tête tout nu de la tribune, qui rentre sur le stade.
00:10 - Qui met un but. - Et qui au lieu de se faire chasser par les agents de sécurité,
00:14 il prend le ballon, il essaie de dribler tout le monde et il met un but.
00:17 Tu vois ce que je veux dire ?
00:18 Le mec qui me pique ma femme et il faut que je sois sympa !
00:21 Oui, sois sympa !
00:22 Il a chopé une bactérie épouvantable quand il faisait un safari au Kenya.
00:25 Et c'est quoi la suite du programme ?
00:27 Tu vas m'annoncer que t'es enceinte ?
00:29 Ouais !
00:30 Ouais !
00:31 Pardon.
00:32 Je pense qu'il y a un pépin dans votre histoire.
00:34 J'ai du mal à accepter qu'un spectacle qui c'est censé me remonter le moral,
00:37 ça me fait l'effet inverse.
00:39 Non mais je pense que vous n'êtes pas du tout en train de vous rendre compte, monsieur,
00:42 mais en fait là, ça se fait pas du tout ce que vous faites.
00:44 Ma direction de casting me montre comment on fait sur tous les projets.
00:48 Elle passe des auditions auxquelles je n'assiste pas,
00:51 parce que je trouve ça embarrassant d'être là à critiquer des jeunes comédiens.
00:54 Donc je n'y vais pas, je regarde des vidéos.
00:58 Et elle me présente Raphaël Kenard,
01:00 mais c'était son favori, mais elle me le dit pas,
01:02 parce qu'elle a ce chic-là de ne pas vouloir m'influencer.
01:06 Bon, il se trouve que c'est mon favori aussi, mais j'ai un doute.
01:08 Je me dis, est-ce que c'est un dégénéré ou est-ce que c'est un comédien ?
01:12 Parce qu'en fait, il était tellement réel sur la vidéo, je suis sûr que c'est vrai.
01:16 Son audition était tellement réelle que j'ai eu un doute sur ses capacités à être un comédien.
01:21 J'avais l'impression de voir un vrai mec.
01:23 Et en fait, non, j'ai rencontré un comédien super habité, hyper intense tout de suite.
01:27 Donc je me suis dit, putain, ah oui, il se passe un truc.
01:29 Après, on tourne "Mandibule".
01:30 Il faut savoir qu'on a commencé le tournage de "Mandibule" par sa séquence
01:35 et qu'avec David et Grégoire, on a passé le tournage, l'intégralité du tournage, à l'imiter.
01:41 C'est-à-dire qu'on avait tellement envie qu'il revienne que tous les jours,
01:45 on imitait ses répliques parce qu'il a un phrasé particulier, etc.
01:49 Mais juste, il y a quoi dans la valise ?
01:51 Ça, c'est pas ton problème.
01:53 Toi, Tombly, tu penses même pas à ça.
01:55 Toi, ce que tu fais, c'est que tu prends la valise chez Michel Michel,
01:58 tu la fous dans le coffre de ta bagnole, tu fermes bien ton coffre, OK ?
02:02 Et après, tu fais ton trajet calmement, tu déposes la valise à l'autre mec et puis c'est tout.
02:08 D'accord.
02:08 Ensuite, je tourne "Fumé fait tousser" et on tourne cette scène que moi, j'adore,
02:13 qui est mon moment favori de ce film.
02:17 Vous savez quoi, c'est Noël.
02:18 Je donne 50 balles à qui c'est qui veut bien appuyer sur le bouton vert à ma place.
02:21 Non, non, non, non, non, c'est Femmé Diac qui vont régler ça à ta place.
02:23 Et toi, tu vas sortir tes couilles, les prendre à deux mains,
02:27 nous sortir le diamètre de la machine et nous, on va recommencer à bosser.
02:30 Allez !
02:31 OK.
02:32 Et emballé par ce bordel, on se tape dans la main avec Raphaël
02:36 sur l'envie de faire un truc tous les deux, que tous les deux en fait, voilà.
02:39 Où il serait pas un petit morceau, où il serait le gros morceau lui-même.
02:47 Il n'y a pas moyen que ça continue, vous voulez me torturer ou quoi ?
02:49 Vous savez monsieur, vous voulez qu'on fasse quoi en fait exactement ?
02:51 Vous voulez qu'on fasse quoi ?
02:52 Quentin, c'est un artiste à la singularité, qui se repère en deux plans.
02:58 Tu sais que c'est un film de Quentin et une signature
03:01 qui est tellement marquée, tellement forte.
03:04 Il attaque la vie dans un angle qu'on n'avait pas vu venir,
03:08 tu vois, dans un angle un peu inédit.
03:10 Et c'est un peu ça que tu fais.
03:11 Outre ça, il y a le dialoguiste de génie pour moi,
03:15 parce qu'on ne peut pas changer un mot avec Quentin.
03:16 Donc si c'est mal écrit, on serait inévitablement nuls.
03:19 Attends, regarde.
03:21 - Michael ? - Ouais ?
03:25 Ça arrive souvent.
03:27 - Mickael, dis, je suis avec ta tante, qui est un peu sous le choc.
03:31 Est-ce que tu lui redirais ce que tu viens de me dire ?
03:34 Pour la rassurer un peu.
03:35 Pour moi, c'est un médiocre brillant.
03:37 Il passe sa réaction avec tellement de naïveté,
03:40 tellement de pureté qu'il en est inévitablement gracieux.
03:44 Quand bien même lui-même est médiocre, parce que c'est un médiocre brillant,
03:48 son authenticité, sa pureté, elle contient son implacable grâce.
03:54 Il y a une phrase que j'adore, c'est une phrase de Bertolt Brecht,
03:57 qui dit "il y a pire que de voler une banque, c'est d'en fonder une.
04:02 Et bien il y a pire que d'interrompre une œuvre,
04:07 il y a mieux que d'interrompre une œuvre et de la contester, c'est d'en créer une."
04:11 Lui, ce personnage, est au-dessus de tout ça,
04:15 dans la mesure où il déroule une pensée hyper construite
04:19 et qui fait écho à un vécu, à des frustrations personnelles, etc.
04:24 Du coup, il est passionnant.
04:25 Quoi ?
04:25 Yannick, ce serait son équivalent sportif.
04:33 Ce serait un gars qui déboule bille en tête tout nu de la tribune,
04:37 qui rentre sur le stade,
04:38 et qui au lieu de se faire chasser par les agents de sécurité,
04:42 il prend le ballon et essaie de dribbler tout le monde et il met un but.
04:46 Mais du coup, dans la vraie vie, il y aurait ces agents de sécurité là
04:49 qui viendraient faire avorter sa démarche.
04:53 Mais du coup, Yannick, il peut aller au bout.
04:55 Je dis pas qu'il dribble tout le monde, qu'il fait des retournées acrobatiquées,
04:57 parce que la pièce qu'il délivre peut être contestable à ses envois,
05:02 mais il dribble et il délivre.
05:03 On peut partir en sucette à n'importe quel moment, cette histoire.
05:06 D'accord ?
05:08 La simplicité, c'est presque un terrain plus compliqué que...
05:11 Enfin, c'est ce qu'il y a de plus compliqué, je pense, au cinéma.
05:14 De se foutre à poil, et je le dis tout le temps sur ce film,
05:19 j'ai pris un risque assez lourd,
05:21 mais eux l'ont pris avec moi et c'est plus lourd pour eux,
05:25 parce qu'en fait, il n'y a aucun moyen de se planquer pour eux.
05:27 C'est-à-dire que c'est un film où tu foires deux répliques de suite,
05:33 t'es pas habité, tu le sens pas et ça marche pas,
05:35 et le film s'écroule.
05:37 Et c'est surtout un film comme celui-là,
05:41 il n'y avait aucun moyen de sauver les comédiens au montage.
05:44 C'est un film qui est à poil, complètement à poil.
05:46 Je pouvais pas d'un seul coup faire une pirouette absurde,
05:48 ouvrir une porte et puis faire un...
05:51 Voilà, c'est un film qui est complètement à poil,
05:56 et c'est pour ça que c'était passionnant à faire,
05:58 puisqu'en fait, tout ce qu'on tournait,
06:00 chaque micro-seconde de ce qu'on tournait devait être brillant,
06:06 sinon c'était ennuyeux instantanément.
06:08 Et il y a plein de moments dans le tournage
06:09 où on a traversé des moments qui étaient moins...
06:13 Voilà, la fatigue, etc.
06:14 nous a emmenés dans des endroits qui étaient moins savoureux,
06:16 ça se voyait tout de suite,
06:18 et on voyait le film merdique possible.
06:20 On l'a frôlé plein de fois.
06:22 On l'a vu, hein.
06:23 Ouais, bah oui, bah oui.
06:24 Parce que lui, à force de parler, parler, parler,
06:26 il y a des moments où il s'endormait,
06:28 où les paroles sortaient de manière moins...
06:31 C'est risqué, parce que c'est quand même des plâtrés,
06:35 tu vois, qui sont un peu conséquentes,
06:37 les monologues et tout.
06:38 Et comme il nous dit, comme c'est une réalisation
06:41 qui nettoie toute forme de tralala,
06:44 qui est complètement hors de tout ça,
06:47 et bien c'est clinique, quoi.
06:50 Du coup, nous, on doit faire un truc au bistouri.
06:55 Il n'y a même pas un support de musique ou je ne sais pas quoi.
06:58 Effectivement, c'est peut-être le mot de notre promo,
07:00 c'est "sans tralala".
07:01 C'est "sans tralala", c'est vrai.
07:03 Aucun tralala.
07:04 ♪ ♪ ♪