Mai Zetterling, pionnière du cinéma féministe

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00:00 Quand j'ai commencé, il y a environ 12 ans, je me considérais avant tout comme cinéaste.
00:04 Et maintenant, ce qui compte davantage pour moi, c'est d'être d'abord une femme avant que d'être un metteur en scène.
00:09 La réalisatrice suédoise Maisa Terling pose un regard inédit sur la place des femmes dans la société des années 1960.
00:16 Provocante et moderne, elle a marqué l'histoire du cinéma féministe.
00:20 Dans les années 1940, elle commence une carrière d'actrice et se fait connaître dans "Tourment",
00:26 un film écrit par le futur réalisateur suédois Ingmar Bergman.
00:30 Elle y joue le rôle de Bertha, une jeune fille ivre et désespérée, sauvée par un jeune homme.
00:34 Dans les années 1960, elle passe derrière la caméra.
00:37 Maisa Terling déplore la manière dont les actrices sont filmées du point de vue du cinéaste homme.
00:42 Ce qu'on appelle le "male gaze", un concept formulé par la réalisatrice Laura Mulvey en 1975.
00:48 Le regard des femmes sur les femmes est très important au cinéma.
00:52 Je pense qu'ici, habituellement, les femmes présentées par les films sont soit des jolies secrétaires,
00:57 soit des prostituées, soit des mères de famille et des épouses horriblement ennuyeuses.
01:01 Et en général, on ne s'éloigne jamais de ces trois stéréotypes.
01:05 Je pense que tout ça doit changer parce que les femmes deviennent maintenant plus fortes, plus puissantes et aussi plus intéressantes.
01:14 Et il faut montrer ce changement et cette évolution dans les films.
01:17 Je pense que la femme comme objet sexuel avoue que c'est triste et tellement limité.
01:22 Son premier film, "Les amoureux", met en scène le destin de trois femmes sur le point d'accoucher à la veille de la Première Guerre mondiale.
01:28 Elle raconte de manière crue la maternité, la sexualité et le mariage.
01:33 Présenté en compétition officielle au Festival de Cannes en 1965,
01:37 le film a bousculé les téléspectateurs à cause de certaines scènes de nudité.
01:41 Influencées par les codes de la nouvelle vague, May Zetterling entremêle théâtre et vie réelle dans "Les filles".
01:47 Trois actrices de théâtre voient une mise en abyme de la pièce qu'elles jouent, une farce antique,
01:51 et de leur quotidien régi par la domination masculine, ce qui les pousse à engager une révolte pour défendre leurs droits.
01:57 - S'il te plaît, essaie de ressembler un peu plus intéressée.
02:05 - Dans "Les filles", j'ai montré des femmes travaillant ensemble vers un même but.
02:11 Aujourd'hui, je veux montrer ce qu'une vieille femme solitaire pense qu'est la liberté.
02:21 Sa rencontre avec Lucienne Griveaux, une ancienne ouvrière, célibataire peu conformiste pour l'époque, inspire May Zetterling pour un documentaire.
02:30 - Moi, je suis pas mariée parce qu'à la guerre de 14, j'avais 20 ans.
02:35 Alors, ça a tout arrêté, les mariages. J'ai resté tout seule. Je souffre pas du tout de la solitude.
02:42 Elle met en scène leur discussion avec la comédienne Madeleine Boucher dans le rôle de Lucienne.
02:47 - On m'appelle Madame. Moi, je suis une demoiselle.
02:51 Évidemment, j'aurais pu me marier, mais j'aime pas ça l'esclavage, moi.
02:56 Les maris, il faut s'en occuper, il faut leur faire à manger, et il faut leur obéir.
03:01 On peut pas tout ce qu'on veut, moi. Il faut manger à l'heure, il faut manger ce qu'il veut.
03:05 Qu'est-ce qu'il y a de drôle dans un mari ? Rien. Rien que des ennuis.
03:11 Son regard inédit et décalé lui donne une place importante dans le bouillonnement du mouvement féministe des années 1970.
03:18 - J'ai d'autre part un projet avec Simone de Beauvoir de travailler sur un film d'après son livre "Le deuxième sexe".
03:27 Et elle souhaite que ce soit moi qui le fasse. Ce livre a été très important pour moi, comme pour beaucoup de femmes,
03:32 et c'est devenu une sorte de bible que l'on cite dans tous les ouvrages consacrés aux femmes aujourd'hui.
03:36 Mais le film ne verra finalement jamais le jour faute de financement,
03:39 ce qui la pousse à créer l'Association internationale des femmes cinéastes,
03:43 aux côtés d'autres grandes réalisatrices, comme Agnès Varda.
03:46 Maisie Starling meurt en 1994 d'un cancer à Londres, laissant derrière elle des œuvres tombées dans l'oubli.
03:52 - Aaaaaaaah !
03:55 Sous-titrage Société Radio-Canada
03:59 ♪ ♪ ♪

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