L'ancien chef de la garde républicaine a donc prêté serment au Gabon comme président en promettant une nouvelle constitution et un retour à terme du pouvoir aux civils. A quelle échéance ? Aussi dans l'actualité, la Russie conditionne un nouvel accord sur les céréales ukrainiennes à la possibilité d'exporter à nouveau ses propres denrées agricoles, et l'Ukraine qui change de ministre de la Défense. On va plus loin avec Anne Nivat, Gauthier Rybinsky et Cyril Payen à Libreville.
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00:00 On est toujours ensemble sur France 24. Bonjour, bienvenue si vous nous rejoignez.
00:05 On va plus loin dans un instant avec Anne Nivar, reporter de Gare indépendante.
00:08 Bonjour Anne. - Bonsoir Raphaël.
00:09 Et Gautier Rybinski, ancien correspondant à Moscou, grand reporter également et chroniqueur international ici à France 24.
00:16 Bonjour Gautier. - Bonsoir Raphaël.
00:17 Et au sommaire, dans un instant, il était jusque la chef de la garde républicaine, le général Brice Oligine-Guémat.
00:23 Prêt de serment comme nouveau président de la transition au Gabon,
00:26 il promet une nouvelle constitution et le retour des exilés politiques.
00:30 Elle va livrer gratuitement ses céréales à 6 pays d'Afrique dans les prochaines semaines, la Russie confirme.
00:35 À l'occasion d'une rencontre avec le président turc Erdogan, à Sochi, Vladimir Poutine demande qu'on laisse la Russie exporter librement ses denrées agricoles
00:42 comme contrepartie au retour à la Corse sur les céréales ukrainiennes. C'est tout de suite, on va plus loin.
00:53 Le voilà donc installé, le temps d'une transition. Pour quelle durée ? C'est là toute la question.
00:58 Le général Brice Oligine-Guémat, jusque la chef de la garde républicaine, a prêté serment aujourd'hui.
01:03 C'est lui qui préside désormais au destiné du Gabon. Joanne Asitruc.
01:07 C'est devant la cour constitutionnelle du Gabon que le général Brice Oligine-Guémat prête serment ce lundi matin.
01:16 La cérémonie est retransmise à la télévision.
01:19 Je jure de préserver en toute fidélité le régime républicain, de respecter et de faire respecter la charte de la transition et la loi,
01:30 de remplir mes fonctions dans l'intégrité supérieure du peuple, de préserver les acquis de la démocratie,
01:40 l'indépendance de la patrie et l'intégrité du territoire national.
01:46 À 48 ans, Brice Oligine-Guémat est désormais président de la transition.
01:50 Il succède donc à Ali Bongo, qu'il a lui-même évincé par un coup d'État le 30 août, quelques jours après la présidentielle.
01:59 Dans son discours, il promet une nouvelle constitution, de renforcer la lutte contre la corruption ou encore d'organiser de nouvelles élections.
02:08 Nous entendons remettre le pouvoir aux civils en organisant de nouvelles élections, libres, transparentes et crédibles, dans la paix sociale.
02:21 Des promesses qui semblent faire écho aux volontés de la population.
02:24 Nous sommes là présentes pour applaudir le geste de notre président, celui qui nous a libérés.
02:31 Ce n'est pas un coup d'État. Ce n'est pas un coup d'État.
02:35 Il n'y a jamais eu de coup d'État au Gabon. On a été emprisonnés pendant 56 ans.
02:41 En revanche, aucune information n'a été donnée à l'heure actuelle sur la date à laquelle le pouvoir sera rendu aux civils,
02:48 ni sur la durée de la période de transition.
02:52 Et sur place, à Libreville, pour France 24, on retrouve à présent Cyril Paillin.
02:56 Cyril, comment est vécue justement à Libreville où vous trouvez cette cérémonie d'investiture ?
03:03 Écoutez, très clairement aujourd'hui, toute la ville, tous les habitants de Libreville étaient focalisés,
03:08 quel que soit leur avis, quel que soit leur scepticisme ou cette manière d'être un peu attentiste sur l'avenir,
03:15 étaient focalisés sur cette investiture qui a été organisée en grande pompe.
03:20 Et là, la ville est de nouveau sous couvre-feu.
03:24 C'est un couvre-feu important qui gêne un peu les habitants de Libreville
03:28 parce qu'il commence à 18h et finit à 6h.
03:31 Donc la ville derrière moi est morte, on ne peut pas sortir.
03:35 Mais il y a eu une pluie assez forte juste en clôture de cette investiture.
03:40 Alors ici, comme ailleurs d'ailleurs, c'est de bonne augure.
03:43 Donc voilà les commentaires à chaud que font les partisans du Nouvel Homme Fort du Gabon.
03:48 Mais plus sérieusement, il y a eu cette grande cérémonie plein de solennité
03:54 où on a vu des gestes d'apaisement, de réconciliation avec l'ensemble du corps de la société
04:00 gabonaise, pas uniquement l'armée qui l'a soutenue dans le putsch,
04:05 mais également une partie, une grande partie de l'opposition.
04:08 Et puis surtout, l'ancien régime, puisqu'une bonne partie du gouvernement ont donc démis
04:15 le gouvernement bongo, le dernier, dont le Premier ministre qui était absent depuis le coup,
04:20 était présent parmi les dignitaires aux premières loges.
04:23 Donc le message est clair.
04:25 Il y a eu, on l'a vu évidemment dans ce sujet, des annonces importantes,
04:29 libération de prisonniers politiques, le retour de la démocratie,
04:33 mais in fine, il n'y a pas de calendrier pour la fin de cette transition,
04:36 ni vraiment clairement des élections.
04:38 Donc évidemment, ça alimente le scepticisme de certains ici.
04:41 Oui, c'est ce que j'allais vous demander, parce que ces demandes de nouvelle constitution
04:44 par ce président de transition, cette annonce d'une libération prochaine des prisonniers politiques,
04:48 d'un retour à terme du pouvoir au civil, les Gabonais que vous avez rencontrés,
04:51 ceux qu'on a entendus dans le reportage semblent y croire,
04:53 mais ceux que vous avez rencontrés, vous, ils y croient ?
04:58 Encore une fois, il y a eu un vrai engouement, une libération au lendemain du 30 août.
05:05 Les scènes de liesse populaire dans les rues de Bras-à-Ville,
05:07 le fait qu'on porte les militaires pour les remercier d'avoir, je cite,
05:12 "libéré le pays de plusieurs décennies des bongos",
05:16 ça c'est quelque chose qui a été vécu vraiment comme une réalité.
05:19 On sent bien qu'il y a ce chapitre, un nouveau chapitre qui commence
05:25 et que quelque chose a changé.
05:27 Maintenant, encore une fois, après ce qui était un peu comparable
05:31 à une sorte d'euphorie, un peu comme l'indépendance,
05:34 on le dit, on l'entend souvent d'ailleurs,
05:35 c'est une nouvelle indépendance qu'on est en train de vivre,
05:38 il y a quand même le pas de côté de certainement une bonne partie de la population,
05:43 mais c'est une inconnue, j'aurais du mal évidemment à la quantifier,
05:45 mais une bonne partie de la population qui a évidemment vécu le joug
05:49 du père et du fils bongos, où il n'y avait pas de liberté de la presse,
05:54 on le sait, une difficulté quand même à vivre pour beaucoup de Gabonais,
05:58 où il y a cet attentisme je dirais prudent,
06:01 on attend de voir notamment la formation du prochain gouvernement
06:04 qui est annoncé dans quelques jours, ça, ça va être un test extrêmement important
06:08 parce que si on fait du nouveau avec de l'ancien,
06:10 on peut penser qu'il y aura encore une fois beaucoup de scepticisme
06:13 dans les rues de Libreville et puis du Gabon.
06:16 Dans le contexte que l'on connaît actuellement en Afrique de l'Ouest, Cyril,
06:20 quel est le sentiment au Gabon envers la France ?
06:23 Alors, c'est un coup d'État qui a eu lieu dans un des précarés évidemment de la France,
06:28 ça n'échappe à personne, c'est une des capitales même je dirais
06:31 du système de la France-Afrique.
06:33 Le président français, nous étions avec lui, est venu il y a quelques mois
06:36 pour dire que c'était terminé, pour autant évidemment,
06:38 il vient à l'esprit évidemment cet effet domino après cette myriade de putsch
06:44 en Afrique de l'Ouest, le Niger, le 26 juillet, on en parlait,
06:48 avec l'émergence, non pas peut-être d'un coup d'État,
06:51 l'émergence, non pas peut-être d'un sentiment, mais d'un discours
06:54 anti-français très très appuyé.
06:56 Ici au Gabon, on ne pense pas vraiment qu'on arrive à ce genre de scénario,
07:01 en même temps le Niger était un peu dans la même logique,
07:03 donc c'est difficile à dire.
07:05 Il y a eu en marge, pour être très franc, de cette investiture
07:09 où il y avait donc tous des partisans de le Nouvel homme fort du Gabon,
07:12 quelques mots appuyés contre la France.
07:14 La France accusée, d'après ses partisans d'avoir aidé,
07:19 à piller le Gabon avec l'ère d'Ali Bongo et d'Omar Bongo,
07:25 et qu'il fallait que la France s'en aille.
07:27 Mais c'est un sentiment qui est encore diffus,
07:30 qui n'est pas un discours que l'on entend partout, loin sans faux,
07:33 mais évidemment la question de la contagion de ce sentiment anti-français,
07:38 de la bouc-émissarisation des Français dans ces précarés français,
07:42 peut-être quelque chose qu'il faut en tout cas garder à l'esprit.
07:45 Merci Cyril Paillin pour France 24 à Libreville,
07:48 qui a donc suivi aujourd'hui cette cérémonie d'investiture
07:51 et ce nouveau président de transition,
07:53 dont vous allez observer les premiers pas dans les prochains jours pour nous.
07:56 Merci Cyril Paillin.
07:59 On vient de le voir, peut-être poindre aussi un début de scepticisme envers la France,
08:03 même si c'est encore extrêmement diffus, on le comprend, au Gabon,
08:07 où la situation est différente,
08:08 et telle d'ailleurs si différente de ce qu'on a observé ces derniers jours,
08:13 au Mali bien sûr, au Burkina Faso aussi, et au Niger,
08:16 où d'ailleurs le Premier ministre, un nommé par les militaires, vient de le dire,
08:19 des échanges d'après lui seraient en cours pour que les forces françaises se retirent rapidement,
08:23 c'est le souhait, on le sait, exprimé sous forme même d'exigence par la jeune,
08:26 qui a pris le pouvoir au Niger,
08:28 est-on face à des situations de nature si différentes que cela ?
08:31 Est-ce que cela peut expliquer, à N'iva, l'indulgence dont on fait preuve jusqu'à présent,
08:35 l'ONU, l'Union africaine, et même la France,
08:38 parmi les pays de l'Union européenne, envers ce qui se passe aujourd'hui au Gabon ?
08:42 Mais je crois que tout le monde est dans l'attente,
08:44 mais en même temps, on se rend bien compte qu'il y a des discours différents.
08:48 On a le ministre Sébastien Lecornu, de la Défense française,
08:52 qui a lui-même fait la différence entre la situation au Gabon et la situation au Niger,
08:58 je pense que la ministre des Affaires étrangères français le fait aussi,
09:02 mais je ne suis pas sûre que faire cette différence
09:08 soit bien perçue par les opinions publiques en Afrique.
09:11 On a plutôt l'impression qu'il y a une géographie variable des pouches.
09:16 Indulgence envers le Tchad et le Gabon, et ce n'est pas forcément le cas ailleurs, c'est ça ?
09:19 Évidemment.
09:21 Alors Prigogine, le feu Prigogine, assassiné, le défunt Prigogine,
09:28 a dit quand même quelque chose qui était assez intéressant sur le pouche au Niger,
09:32 puisqu'il n'a pas vécu le pouche au Gabon.
09:34 Il avait comparé le coût d'État au Niger avec, justement, la seconde indépendance du pays,
09:38 comme ce que le correspondant vient de dire par rapport au Gabon.
09:41 Donc on voit bien, quand même, sans saisir,
09:46 parce qu'il ne faut pas prétendre que nous, ici, nous saisissons tout ce qui se passe,
09:48 les tenants et les aboutissants, il y a des changements profonds qui viennent,
09:55 évidemment qui sont mis en pratique par des jeunes militaires au pouvoir,
09:59 et ça, ça ne fait jamais plaisir aux démocraties,
10:01 mais en même temps, c'est quand même l'expression d'une volonté populaire.
10:08 En tout cas, on l'a vu au Gabon. Donc moi, je serais très attentiste.
10:11 Oui. Alors effectivement, lorsqu'on observe la situation,
10:14 on pourrait tenter de comparer les deux.
10:16 On a au Niger tout de même un président sorti des urnes,
10:18 dont l'élection n'a pas été contestée, en tout cas, du moins, pas ici, en Europe.
10:22 Dans le cas du Gabon, les militaires qui ont pris le pouvoir prétendent rétablir
10:26 une forme d'ordre constitutionnel, ou en tout cas, rendre aux électeurs
10:29 le sens de leur message. Ont-ils raison ? Et surtout, a-t-on raison de faire la distinction ?
10:34 On a tout de même condamné la méthode, ici en France, celle du coup d'État.
10:37 Oui. Le problème, en pareil cas, c'est qu'on a une tentation, c'est d'être très formaliste.
10:43 C'est-à-dire, on considère un coup d'État, on dit "un coup d'État, c'est condamnable,
10:48 quelle qu'en soit la raison". Or, il y a des régimes,
10:52 on ne va pas citer les plus importants, mais il y a des régimes
10:56 où si vous voulez changer quelque chose, il est très difficile de le faire
10:59 sans une forme, justement, d'entorse à un ordre, quel qu'il soit.
11:03 Regardez, on part du Gabon. Ceux qui ont tenté, y compris le récent opposant,
11:11 ceux qui ont tenté, justement, par les urnes... - Le grand os.
11:13 - Voilà. D'arriver à quelque chose. Bien.
11:16 Savent très bien que les urnes étaient truquées de telle manière
11:19 qu'ils n'avaient quasiment aucune chance. - Ils n'y arriveraient pas.
11:21 - Bon. Et que s'ils suscitaient un mouvement citoyen dans la rue,
11:25 le risque était évidemment que la mitraille fasse son oeuvre
11:28 et qu'il n'y ait plus personne. Et que donc, à partir de là,
11:31 c'est vrai qu'il faut regarder quels sont les tenants et les aboutissants.
11:35 Mettre à bas une dynastie qui a plumé le Gabon, c'est une chose qui n'est pas
11:41 la même que celle que vous disiez à l'instant, c'est-à-dire le renversement
11:44 d'un président, quel qu'il soit, quel que soit ce qu'on pense de son action,
11:48 mais qui a été élu démocratiquement. Que la France s'accorde de cette affaire,
11:53 parce que ça lui permet de se refaire une virginité, en disant, vous voyez,
11:56 nous sommes aussi capables d'envoyer promener les vieux barbons
12:00 des régimes africains. Ça, ça vient comme une aubaine pour la France,
12:03 bien sûr qu'elle en profite, parce qu'elle sait aussi que ce sentiment
12:08 anti-français dont vous parliez avec Cyril Payen, il faut essayer de le désamorcer.
12:12 D'ailleurs, ce qui est intéressant, c'est que... - On aura du mal, ça.
12:15 - Oui. Mais ce qui est intéressant, c'est que ce qui semble marcher au Gabon,
12:18 je dis pour l'instant, c'est que Ali Bongo lui-même avait fait sien
12:23 pour un certain nombre de tirades antifrançaises, pensant justement
12:27 récupérer un assentiment de la rue. On a bien vu d'ailleurs qu'il avait décidé
12:31 d'interdire RFI et France 24, c'est un bon, même pour ceux qui n'ont qu'une oreille
12:35 et qu'un oeil, c'est pas mal comme baromètre de savoir ça.
12:38 Mais c'est intéressant parce que ce sentiment anti-français, on se le dispute.
12:42 Et à partir du moment où il a été plus ou moins instrumentalisé
12:46 par l'ancien pouvoir, il semblerait, je dis bien, il semblerait qu'il soit
12:51 partiellement désamorcé par le nouveau pouvoir.
12:55 - Est-ce qu'il exagère effectivement de rétablir ?
12:57 - Voilà, pas sans plaindre. - Mais là, vous parlez du Gabon, Gauthier.
13:00 - Oui, mais tout à fait, je parle du Gabon, c'était simplement pour dire que...
13:04 - Finalement, il y a une concurrence avec l'instrumentalisation du sentiment anti-français.
13:08 - Ah ben bien sûr, bien sûr, vous avez raison. Simplement, je pense qu'on a raison
13:12 aussi de s'employer au cas par cas, à dire voilà ce qui se passe,
13:17 ça n'est pas la même chose. C'est vrai qu'un coup d'État, si vous avez par exemple
13:20 demain un coup d'État en Chine, on ne va pas s'en plaindre, sincèrement.
13:24 - Mais Gauthier, parlons de la Russie, la mutinerie ratée de Prigojin,
13:27 tout le monde avait envie qu'elle réussisse. Donc il y a coup d'État et coup d'État,
13:32 c'est compliqué de donner son avis par rapport à un coup d'État.
13:35 - Le Portugal n'est devenu démocratique dans les années 70 qu'avec...
13:38 - La révolution des œillets, alors je citerai que d'aucuns s'inquiètent,
13:41 et c'est le cas d'ailleurs de l'opposition, l'opposant Alberondo, ça que vous mentionnez,
13:44 la semaine dernière, s'est ému de ce qu'il appelle, lui, une révolution de palais
13:47 qui ne viserait qu'à maintenir en poste des bongos.
13:50 - Oui, ça a l'air d'être le cas, puisque le poutchiste en chef qui a prêté serment
13:57 fait partie de la famille bongo, etc., et qu'il vient du Serail.
14:01 Mais moi je pense que ce qui est intéressant aussi d'essayer de comprendre,
14:05 c'est, parce que je suis française, ça m'intéresse, c'est le rapport justement aux Français.
14:10 Et le rapport aux Français, il passe par le rapport au djihadisme.
14:14 C'est-à-dire que nous, Français, nous disons, et le ministre Lecornu l'a redit,
14:19 que nous légitimons notre présence sur place, parce qu'on nous a demandé de venir
14:23 pour combattre le djihadisme.
14:25 Or, il me semble que, bon d'abord, on pourrait gloser longtemps sur
14:30 est-ce que les opérations étaient efficaces, est-ce qu'on n'est pas restés trop longtemps, etc.
14:34 Mais les opinions publiques aujourd'hui en Afrique n'ont pas l'impression
14:38 que nous avons trouvé la solution face au djihadisme.
14:41 Et il me semble aussi que les poutchistes qui arrivent dans cette épidémie de poutches,
14:46 comme dit Emmanuel Macron, pour eux, ça n'est pas du tout important, le rapport au djihadisme.
14:52 Eux, ils veulent le pouvoir.
14:54 Ça ne les intéresse pas ce que nous, nous prenons comme argument pour être sur place.
14:59 Sinon, comme prétexte à s'appuyer sur des milices comme Wagner,
15:02 qui, elles, sont censées jouer le rôle, justement, de la lutte anti-djihadisme.
15:05 Et pas que, parce que vous savez, Wagner, ils n'ont pas d'état d'âme.
15:08 Ils n'ont pas d'état d'âme, ni Prigogine, ni celui qui va le remplacer,
15:11 à expliquer qu'ils sont là pas que pour faire...
15:14 Justement, ils ne tombent pas dans cette erreur, qui, à mon avis, était celle de l'État français,
15:20 qui était de dire que voilà, grâce à nous, le djihadisme allait disparaître.
15:25 Je ne pense pas que ce soit les propos que tienne Wagner.
15:27 - Elle préserve, en tout cas, plus de 50 millions de personnes dans le monde de l'insécurité alimentaire.
15:34 C'est la libre circulation des vraquiers, ces navires chargés de céréales ukrainiennes,
15:37 et qui pourraient bien rester encore au point mort.
15:40 La Russie, qui bloque depuis mi-juillet leur départ des ports ukrainiens,
15:43 continue d'y poser impréalable, qu'elle puisse, elle aussi,
15:46 exporter ses propres denrées agricoles, malgré les sanctions occidentales.
15:50 Vladimir Poutine l'a dit au président turc Recep Tayyip Erdogan,
15:54 venu plaider la cause de l'accord. C'était aujourd'hui à Sochi. Écoutez.
15:58 - Nous ne pouvons pas faire ressusciter cet accord céréalier.
16:02 Je l'ai d'ailleurs dit au président turc.
16:05 Nous le ferons, quoi qu'il en soit, nous le ferons,
16:08 une fois que toutes les conditions seront remplies.
16:12 Une fois que les restrictions sur les exploitations de produits agricoles russes seront levées.
16:18 - Demande de bon sens ou abusif de la part de Vladimir Poutine-Gauthier ?
16:24 - On mélange deux choses qui ne sont pas exactement mélangeables.
16:30 L'accord sur les céréales est une chose qui doit permettre aussi bien,
16:36 en théorie, aussi bien la Russie que l'Ukraine,
16:38 d'exporter des céréales à partir de ce domaine,
16:41 à partir de cette région qui borde la mer d'Oire.
16:44 Or, une fois que la marchandise russe sort de cet endroit-là,
16:48 elle fait face à ce moment-là aux sanctions,
16:51 aux sanctions internationales qui frappent les denrées russes.
16:56 Donc le problème n'est pas dans l'accord céréalier,
16:59 il est dans le fait que, indépendamment,
17:02 et rappelons quand même que la Russie a déclenché cette guerre,
17:06 il y a des sanctions qui la frappent.
17:08 Et donc à partir de là, que dit Poutine au fond ?
17:11 Son exigeant, ça serait de dire "nous on veut pouvoir exporter aussi".
17:15 D'autant plus que ce qui se passe dans la conquête de l'Afrique,
17:19 puisqu'on en parlait à l'instant,
17:21 et qui est très importante pour Poutine,
17:23 non seulement commercialement mais sur un plan aussi, on va dire, idéologique,
17:26 eh bien on s'aperçoit que les denrées, par exemple ukrainiennes,
17:30 qui atteignent l'Europe la plupart du temps,
17:32 ensuite sont répercutées, redistribuées vers l'Afrique.
17:36 Et là, Poutine se dit "mince, ce prêt que j'aimerais bien avoir carré pour moi,
17:40 en Afrique, est en train de me passer sous le nez à cause de cela".
17:44 Et donc, bien sûr, ça remue tout ce qui est de l'ordre des sanctions,
17:48 c'est-à-dire aussi le fait que la Russie et que la banque agricole russe
17:51 aient été exclues du dispositif SWIFT,
17:54 qui est un dispositif de paiement rapide,
17:57 et voilà sur quoi on bute.
18:00 Alors, moi ce que j'ai remarqué quand même, c'est que jusqu'à présent,
18:04 et on ne peut que s'en féliciter,
18:07 qu'il n'y a pas eu d'obus russes qui sont venus plomber des navires ukrainiens,
18:13 parce que justement, dans cette tentative de séduction de l'Afrique,
18:16 ça serait catastrophique que Poutine, justement, passe pour être la fameur,
18:21 parce que, très sincèrement, il n'en a pas grand-chose à faire,
18:24 mais que s'il passait pour être la fameur de l'Afrique,
18:27 ça serait gravissime pour lui.
18:29 Donc il y a cet enjeu, certes commercial, mais en deux mots,
18:33 celui qu'il répète depuis un certain nombre de mois maintenant,
18:36 qui consiste à dire que la Russie se veut le blason et la figure de proue
18:40 d'un anticolonialisme africain,
18:42 alors que l'histoire de la Russie, ça risque d'être une histoire coloniale.
18:46 - Oui, mais ça, les Africains ne l'entendent pas comme ça,
18:48 ils ne le voient pas du tout comme ça.
18:49 Sur ce coup-là, il réussit parfaitement son coup.
18:52 Et il ne passe pas non plus pour la fameur.
18:55 Qu'est-ce qu'il a dit aujourd'hui lors de sa conférence de presse avec Erdogan ?
18:59 Il a répété quelque chose qu'il avait dit au mois de juillet,
19:01 mais là, il a bien insisté en disant qu'il allait envoyer des céréales
19:03 à six pays africains, gratuitement.
19:06 Donc c'est vraiment un beau coup, si je puis dire.
19:09 - Soutent en bombardant le port fluvial d'Ismaïl,
19:11 d'où se trouvent précisément des infrastructures céréalières ukrainiennes.
19:15 - Oui, absolument. Mais oui, mais ça, c'est parce que c'est la guerre.
19:17 Effectivement, alors moi, évidemment, je ne donne pas raison à Vladimir Poutine.
19:20 J'explique simplement ce que fait, quelle est la stratégie de Vladimir Poutine.
19:24 La stratégie de Vladimir Poutine, c'est un bras de fer.
19:27 C'est de continuer ce bras de fer et de profiter justement
19:30 de cette réunion avec Erdogan, qui n'a rien réglé.
19:32 Puisque Erdogan est arrivé, tous les deux en sont partis en disant
19:36 qu'il fallait continuer à trouver une solution avec l'ONU.
19:40 Donc ça n'a rien réglé, mais ça a permis à Vladimir Poutine
19:43 de dire ce qu'il a dit tout à l'heure.
19:44 C'est-à-dire, un, je vais apporter des céréales, moi, gratuitement
19:48 à ces pays africains et sans doute le Qatar va se joindre à moi.
19:51 C'est ce qu'il a dit.
19:52 Et deuxièmement, il a dit autre chose, ça nous énerve un peu du sujet,
19:55 mais quand même, je le dis.
19:56 Il a dit que la contre-offensive ukrainienne était un échec.
20:00 Et on ne l'entend pas souvent le dire ça.
20:02 Je pense qu'il attendait cette possibilité de cette conférence de presse
20:07 pour pouvoir le dire.
20:08 - Oui.
20:09 - C'est un événement qui se déroule en tout cas au moment où
20:13 Volodymyr Zelensky, lui, remplace son ministre de la Défense.
20:17 Le signe que la contre-offensive ne saurait entraver la lutte
20:22 contre la corruption.
20:23 Emmanuelle Chaz à Kiev pour France 24.
20:26 - Ce remplacement, il ne vient pas comme une surprise ici à Kiev,
20:30 puisque comme vous l'avez mentionné,
20:32 Alexis Lesnikoff était mêlé à plusieurs affaires de corruption.
20:36 En tout cas, son ministère l'était.
20:38 Et au titre de ministre, on lui avait demandé plusieurs fois.
20:42 L'opinion publique, notamment, avait envisagé sa démission.
20:48 Il avait dit qu'il le ferait si des preuves de corruption
20:51 lui étaient apportées.
20:52 Finalement, c'est le président Volodymyr Zelensky
20:54 qui aura pris cette décision.
20:56 La démission d'Alexis Lesnikoff qu'il a présentée devant
21:00 le Parlement ukrainien a été adoptée.
21:03 Volodymyr Zelensky a déjà désigné un successeur
21:06 qui devrait également être approuvé par le Parlement ukrainien.
21:09 Il s'agit de Rostem Umerov.
21:12 C'est un ancien député, un député tatar de Crimée
21:17 qui devrait donc remplacer Alexis Lesnikoff.
21:20 - Pas de panache, Aniva, de remplacer un ministre de la Défense
21:24 en pleine contre-offensive, au motif, quand même,
21:27 pour des motifs de probabilité.
21:28 - Je pense qu'il n'est pas question de panache,
21:30 il est question de nécessité.
21:32 C'est-à-dire que d'abord, ce limogé aurait dû se produire plus tôt.
21:38 Tout le monde en parle, finalement, depuis janvier,
21:40 puisque son ministère et deux personnes de son ministère
21:42 avaient été limogées à ce moment-là.
21:44 Et c'est donc qu'il n'y avait pas assez de preuves
21:47 qu'il n'a pas voulu le faire plus tôt, Volodymyr Zelensky.
21:50 Mais en même temps, moi, je suis absolument convaincue
21:52 du fait que ça n'a rien à voir avec la poursuite de la guerre
21:54 et la conduite de la guerre.
21:55 C'est donc uniquement parce qu'il est nécessaire à l'Ukraine,
21:59 aujourd'hui, pour pouvoir continuer à être le bon élève
22:03 qui va rentrer dans les institutions européennes, etc.,
22:05 de montrer qu'elle lutte contre la corruption.
22:07 Ce n'est pas facile de faire la guerre,
22:09 gouverner et en même temps combattre la corruption.
22:12 Simplement, un dernier mot, je voudrais souligner le fait
22:14 que Zelensky n'avait pas l'air très à l'aise, quand même,
22:16 quand il l'a limogée.
22:18 Et surtout, il ne l'a pas remerciée pour le travail fait jusqu'à présent.
22:21 - Oui. Gauthier, comment lisez-vous, justement,
22:24 ce changement de braquet ?
22:26 Un Tatar de Crimée, c'est peut-être pas anodin
22:28 à l'heure où l'Ukraine se tourne, justement, sur le front sud.
22:33 Et puis, ce gage donné, tout de même, aux Occidentaux, d'une certaine manière.
22:37 - Alors, effectivement, c'est un gage aux Occidentaux,
22:40 c'est le bon élève ukrainien.
22:41 C'est aussi, je pense, une manière de prévenir
22:46 certaines fissures, certaines fêlures de la société ukrainienne.
22:49 Il y a, depuis quelque temps, un certain nombre,
22:52 notamment, on l'a vu entre ceux qui sont au front
22:55 et qui reprochent beaucoup, par exemple, à ceux qui sont à Kiev
22:58 et qui ont les moyens de "bien vivre", entre guillemets.
23:01 Il y a quelque chose qui frotte, il y a quelque chose qui ne va pas.
23:04 Là, la prise de conscience que l'on peut avoir
23:07 quand on est dans une guerre, c'est que la corruption,
23:10 c'est un facteur aussi de mort.
23:13 C'est-à-dire que quand vous avez tel personnage
23:16 qui, dans la hiérarchie de l'armée, va accepter de ne pas,
23:20 par exemple, j'invente, mais de ne pas vérifier l'équipement des soldats
23:24 parce qu'il a touché une enveloppe, cet équipement se verrouille
23:27 ou se grippe au moment où on en a besoin,
23:30 c'est trois soldats qui meurent. Et je pense que le caractère concret
23:34 de ce que peut entraîner la corruption devient patent
23:37 en cas de guerre. Quant aux tatars, oui, de Crimée,
23:40 oui, bien sûr, parce que c'est quoi ? C'est aussi le symbole
23:43 de l'impérialisme russe et stalinien, la manière
23:46 dont on déporte ces gens-là.
23:49 J'ajoute une chose. Aujourd'hui, il y avait donc cette réunion
23:52 avec Erdogan. La Turquie soutient depuis toujours les tatars.
23:55 Les tatars de Crimée, bien sûr. Donc, il y a, oui, une forme de...
23:59 - D'habileté politique aussi. - Oui, d'habileté politique aussi,
24:03 oui, parce que ça n'est pas complètement... Oui, ça n'est pas
24:06 complètement innocent. Bien sûr, c'est un pied-de-nez,
24:10 effectivement, au caractère répressif de l'État russe
24:13 à travers les décennies, mais c'est aussi une manière de dire
24:16 on est un État, justement, vous parliez de se tourner vers le sud,
24:19 il y a la Turquie. La Turquie fait un grand écart.
24:22 Donnons-lui une raison d'écarter encore plus les muscles.
24:26 - Un mot rapidement de ces attaques de drones explosifs.
24:29 Kiev assure qu'un au moins aurait atteint la Roumanie, qui est,
24:32 évidemment, dément. Comment comprenez-vous ces allégations,
24:35 ce démenti, Anne ? - Non, mais moi, je pense que si la Roumanie dément,
24:38 c'est que les faits sont là et que le drone n'a pas atterri
24:41 en Roumanie. Sinon, la Roumanie ne démentirait pas.
24:44 La Roumanie n'a aucune raison de ne pas dire la vérité.
24:47 - Mais Kiev a raison de jouer un peu les pousse-au-crime dans cette affaire.
24:50 - Je ne sais pas si Kiev a raison ou pas, mais c'est la stratégie de Kiev
24:53 depuis toujours, c'est la guerre. La guerre, c'est comme ça.
24:56 Rhétoriquement, ça ne changera pas le cours de la guerre.
24:59 Et les Russes font exprès de lancer des drones sur ce Danube.
25:03 - C'est le même cas que ce missile tombé en Pologne
25:06 dont les Ukrainiens prétendaient qu'il avait été tiré par les Russes ?
25:09 - Oui, ils avaient été un peu rapides. - C'est vrai que les Ukrainiens
25:12 ont intérêt à démontrer que cette guerre n'est pas une guerre
25:15 qui a réussi à l'Ukraine. On connaît le discours.
25:19 Là où je suis un peu plus incertain, c'est que la Roumanie
25:23 n'aurait également aucun intérêt à dire que ça soit exact.
25:27 - Si c'était vrai. - Si c'était vrai.
25:29 Parce qu'il ne faudrait surtout pas que l'affaire prenne une enveloppe,
25:33 une dimension, quand vous savez aussi qu'il y a des conseillers français
25:37 en Roumanie qui ont peut-être dit "il y a un pétard qui est tombé,
25:40 on ne va pas en faire un drame". - C'est possible.
25:42 - Merci à vous deux, merci Yann Nivar, Gauthier Iwinski.
25:45 C'était "On va plus loin", prochain journal dans 3 minutes.
25:47 - Il y a 60 ans, Martin Luther King prononçait l'un des discours
25:58 les plus marquants du XXe siècle, le fameux "I have a dream".
26:02 Nous sommes retournés sur ses traces à Atlanta, cette ville
26:05 qu'il a vue grandir, organiser aussi sa lutte pour les droits civiques.
26:09 - Le chemin pour l'égalité entre noir et blanc semble ici encore long.
26:12 La fracture économique et le racisme, toujours bien réel.
26:16 - On a fait de grands pas en avant, mais on a aussi reculé quelques fois.
26:20 - La dignité, l'importance et la valeur des Noirs ne sont toujours pas respectés.
26:26 - Cap Amérique, présenté par Elisabeth Allain.
26:29 À regarder sur France 24 et France24.com.
26:32 !