Charlotte d’Ornellas : «La note vise surtout à décrédibiliser la France au niveau international, notamment auprès du monde musulman»

  • l’année dernière
La journaliste Charlotte d’Ornellas était l’invitée de Face à l’info, ce jeudi 7 septembre, sur CNEWS. Elle s’est exprimée sur la note des renseignements généraux concernant l’abaya : «La note vise surtout à décrédibiliser la France au niveau international, notamment auprès du monde musulman».
Transcript
00:00 -C'est nos confrères du Parisien qui ont eu accès à cette note,
00:04 à ce document confidentiel,
00:06 et qui s'attardent sur le flot d'attaques organisés.
00:09 Ce qui est intéressant, c'est que sur le plan de la BAYA,
00:12 on a les discussions de savoir si c'est religieux ou non,
00:15 de savoir si c'est la liberté de la personne
00:18 ou de la France d'imposer une manière de s'habiller
00:21 pour aller à l'école, mais tout ça n'est vu que sous le prisme
00:24 des individus ou de leur liberté religieuse.
00:27 Dans cette note, on comprend ce qui devrait saisir d'effroi
00:31 tous les responsables politiques.
00:33 Ils pourraient se positionner différemment,
00:36 mais à partir du moment où vous avez une offensive organisée,
00:39 qu'on détectait les services de renseignement,
00:42 ça devient une question politique.
00:44 Ils disent qu'il y a eu des étapes dans la rédaction.
00:47 Ils étudient les réseaux sociaux,
00:49 parce qu'il y a beaucoup d'antrismes militants.
00:52 D'abord, il y a eu le silence.
00:54 Ensuite, il y a eu une déferlante de messages en ligne,
00:57 qui sont tous arrivés en même temps.
00:59 Il y a peu de doutes sur l'offensive organisée.
01:01 Les services se disent eux-mêmes surpris
01:04 du rôle pris en particulier par la Turquie.
01:06 Il est pris par une... Comment dire ?
01:09 Une organisation qui s'appelle
01:11 l'Organisation internationale de soutien aux prophètes de l'islam.
01:15 La Baye n'est pas religieuse,
01:16 mais ça a un rapport avec le prophète de l'islam.
01:19 C'est une structure proche des frères musulmans
01:22 qui a été créée en 2021 à Istanbul.
01:25 Vous voyez le titre,
01:26 Organisation internationale de soutien aux prophètes de l'islam.
01:30 Ce n'est pas spécialement leur zone d'influence,
01:32 pas spécialement la Turquie ou les pays alentours.
01:35 C'est le monde entier et en particulier l'Europe.
01:38 La note nous dit qu'elle se bat
01:40 pour l'interdiction du blasphème partout dans le monde.
01:43 On l'a vu à diverses occasions.
01:45 Elle vit à décrédibiliser la France au niveau international,
01:49 notamment auprès du monde musulman.
01:51 Par le biais d'une campagne de diffamation en arabe
01:55 sur les réseaux sociaux et par le biais...
01:57 Là, c'est encore plus beau.
01:59 Un débat télévisé a été organisé sur une chaîne publique turque
02:03 en anglais entre des universitaires qui, je cite,
02:06 "théorisent les fondements racistes et coloniaux
02:09 "de l'interdiction française de la baïa dans les écoles."
02:12 Ce sont les termes qui sont dits.
02:14 Là, il faut s'attarder,
02:16 parce que cette organisation dénonce quoi ?
02:19 L'oppression contre les musulmans,
02:21 le fait, ouvrez les guillemets,
02:23 d'empêcher les étudiantes d'accéder à l'éducation.
02:26 C'est magnifique. Le détournement est lunaire.
02:29 Le mouvement s'en prend à, je cite encore,
02:31 "des décisions répressives
02:33 "revenant aux âges d'obscurité et d'ignorance."
02:36 Et enfin, les valeurs de la République française
02:38 à l'époque d'Emmanuel Macron
02:41 auraient conduit à ce que 12 % des femmes
02:44 soient violées au moins une fois.
02:46 Vous comprenez ce qui se passe ?
02:48 Ces gens-là ont étudié tous les arguments
02:50 qu'il y a dans le débat public,
02:52 et ils les ont retournés contre la décision de la baïa
02:55 en prenant un vocabulaire progressiste
02:58 dans le débat public français.
03:00 La dernière chose qui crédibilise cette note des renseignements,
03:03 c'est qu'elle a quelques jours, la note,
03:06 "d'une tentative de convergence entre des professeurs
03:09 "issus d'établissements du 93 et du 94,
03:11 "Sensani et Valdemarne,
03:13 "et des collectifs islamistes."
03:15 Hier, nous avons parlé de ce lycée de Stein
03:18 où le personnel s'est mis en grève
03:20 contre la politique islamophobe du gouvernement.
03:22 La boucle est bouclée, finalement, par rapport à cette note.
03:26 -Les 16 attaques viennent de Turquie,
03:28 comme on se disait, ce n'est pas la première fois,
03:31 on a eu l'occasion d'en parler à plusieurs reprises,
03:34 que le monde musulman s'attaque à la France sur ce terrain.
03:37 Faut-il réellement s'inquiéter ?
03:39 -Ce qui est amusant, ce n'est pas le mot,
03:42 mais ce qui retient l'attention,
03:44 c'est que la note faisant état d'un antrisme étranger
03:47 en France sur cette loi inquiète beaucoup plus largement
03:50 que ce qui se passe en France tout court.
03:53 Ca m'a étonnée. Je vais vous dire pourquoi.
03:55 On avait vu au moment de l'interdiction du voile
03:58 des signes religieux, que le monde musulman
04:01 s'était attaqué, on va dire, la laïcité à la française.
04:04 Il y avait eu la question des caricatures.
04:06 Souvenez-vous au moment où Emmanuel Macron
04:09 avait pris la défense de Samuel Paty
04:11 et de la manière dont il avait fait son cours
04:14 et que la France était enflammée
04:16 contre Emmanuel Macron en l'accusant d'islamophobie.
04:19 Dans un monde mondialisé, c'est problématique
04:21 que le monde musulman parle aussi mal de la France.
04:24 Par ailleurs, sur le terrain des relations diplomatiques,
04:28 c'est une question qui se pose.
04:30 Mais c'est surtout inquiétant en France. Pourquoi ?
04:33 Parce que la déstabilisation turque,
04:35 si je puis dire, elle n'a même plus besoin de la Turquie.
04:38 On va reprendre les arguments. Islamophobie d'Etat,
04:41 colonialisme auprès des populations d'origine étrangère
04:45 et de cultures revendiquées étrangères,
04:47 racisme amalgame, on a les mêmes à la maison.
04:50 Il n'y a plus besoin de la Turquie.
04:52 Il n'y a pas besoin de cette offensive turque.
04:55 Elle participe, mais elle a des relais puissants
04:57 à l'intérieur de la France.
04:59 Je note que dans le débat public, on s'inquiète de la Turquie,
05:02 mais dans le débat public, vous noterez que tous ces mots-là,
05:06 le contre-discours global et des autorités de l'Etat
05:09 sont vers l'extrême droite pour reprendre l'extrême droite.
05:13 Le contre-discours n'est pas du tout aussi virulent,
05:16 même en France. Or, ce sont exactement les mêmes mots.
05:19 Qui est la poule, qui est l'oeuf, peu importe.
05:22 La Turquie se sert d'une offensive qui est déjà présente en France,
05:25 ce qui rend l'entrisme encore plus percutant, si on veut.
05:29 Ensuite, ces pays ont une influence par le biais de leurs ressortissants,
05:33 ce qu'ils appellent eux-mêmes leurs ressortissants,
05:36 qui ont parfois la double nationalité,
05:39 parfois pas, mais peu importe,
05:41 et que la France a bien voulu entretenir.
05:43 Pourquoi je dis ça ?
05:45 Un, on a en France une archipélisation culturelle
05:48 qui est inquiétante, parce que c'est un ferment de division
05:51 évident sur le terrain de la culture.
05:54 Mais dans le monde, c'est évidemment un biais
05:56 absolument redoutable d'entrisme, précisément de puissance étrangère,
06:01 par le biais de leur culture.
06:02 Or, quand vous accueillez des populations d'origine étrangère,
06:06 en effet, et que,
06:08 parallèlement à cet accueil massif,
06:12 pendant des décennies, vous diabolisez l'assimilation,
06:16 vous diabolisez ceux qui prônent l'assimilation,
06:19 vous n'en faites même plus une option politique défendable,
06:22 vous lui préférez un droit à la différence,
06:25 c'était le slogan de SES Racisme,
06:27 vous célébrez la fierté de la double appartenance
06:30 et en même temps, vous pratiquez une repentance
06:32 de votre pays vis-à-vis du reste du monde.
06:35 Mais quelle est la légence privilégiée pour ceux que vous accueillez ?
06:39 Évidemment, la légence initiale,
06:41 la légence d'origine sur le terrain culturel.
06:44 Ensuite, les pays d'origine n'ont plus qu'à se servir
06:47 dans ce dispositif.
06:49 Et quand, par ailleurs, vous accompagnez l'implantation
06:52 d'une religion, car l'islam est une question nouvelle
06:55 à la France, quand, en parallèle,
06:57 vous accompagnez l'implantation d'une religion
07:00 sans prendre en compte sa particularité culturelle,
07:03 vous êtes étonné par les conséquences des décennies plus tard.
07:07 (Générique)
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