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Le roman graphique “Femme, vie, liberté”, dirigé par Marjane Satrapi sort en librairie ce jeudi 14 septembre. Un an après la mort de Mahsa Amini, l’ouvrage raconte l’année de révolution que vient de vivre l’Iran. Pour la dessinatrice Bahareh Akrami, que nous avons rencontrée, il est crucial de ne pas laisser ce combat tomber dans l’oubli.

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Transcription
00:00 Le 16 septembre 2022, la mort de Masah Amini provoquait en Iran une onde de choc immense.
00:07 Trois jours après son interpellation par la police des Mers, qui lui reprochait de ne
00:11 pas porter correctement son voile, la jeune femme de 22 ans mourait à l'hôpital.
00:15 Et la révolution déclenchée par sa disparition dure toujours.
00:18 Un an plus tard, la population continue de défier le régime islamique et ses interdits.
00:23 Le roman graphique « Femmes, Vies, Libertés » dirigé par Marjan Satrapi et édité par
00:28 l'iconoclaste, retrace les temps forts de cette année de révolution.
00:32 Bahareh Akrami est l'une des 20 dessinatrices et dessinateurs dont les travaux sont rassemblés
00:37 dans ce livre.
00:38 Moi je viens d'une famille de réfugiés politiques iraniens qui sont partis dans les
00:41 années 80.
00:42 Ils avaient fait la révolution contre le Shah mais aussi ils étaient restés dans
00:46 l'opposition contre les ayatollahs.
00:47 Donc moi ma famille ça fait 44 ans qu'elle est même en exil dans une forme d'opposition
00:54 et qu'elle est active.
00:55 Ça c'est mon histoire personnelle, ce qui fait que quand Masah Jinnah est morte et
00:58 que le mouvement, la révolution a été enclenchée, moi je participais avec des amis, à des
01:05 collectifs.
01:06 Donc moi ce que j'ai fait, j'ai commencé à faire une revue dessinée et c'est cette
01:09 revue dessinée qui a fait que Marjan Satrapi m'a sollicité.
01:14 C'est l'opportunité de partager avec un encore plus grand nombre de personnes, relayer
01:20 la voix des Iraniens, expliquer, raconter ce qui se passe en Iran.
01:23 C'est bientôt les un an et on n'en entend plus parler.
01:26 En Iran, ils sont en train d'emprisonner des milliers de familles, de proches, de victimes
01:32 pour les empêcher justement de participer à des commémorations dans les semaines à
01:36 venir parce qu'en fait la révolution elle est encore là.
01:39 Le feu il couvre sous la cendre et il suffit encore d'une étincelle pour que ça reparte
01:43 et ils ont peur de ça.
01:44 C'est pour ça qu'il faut que nous ici en Europe on en parle et on relaye parce que
01:49 là-bas en fait on est entendu et ça leur donne aussi de la force pour continuer leur
01:55 combat.
01:56 Le roman graphique retrace les événements de cette année de révolution en commençant
02:06 par le début, la mort de Massa.
02:09 Massa Jina c'était une jeune fille kurde qui était montée à Téhéran et donc elle
02:13 se fait attraper par la police des mœurs.
02:16 Et ce qui se dit c'est que si ça avait été une téhéranaise peut-être qu'ils ne l'auraient
02:19 pas tapé comme ça.
02:20 C'était un peu la jeune fille de province qui monte et on profite de ça et puis en
02:24 plus elle vient d'une minorité kurde qui est vraiment opprimée en Iran.
02:29 Donc il y avait vraiment ça et puis ce ras-le-bol de contrôler le corps des femmes.
02:35 Et puis aussi il faut surtout le dire il y a ces deux femmes journalistes qui ont parlé
02:38 les premières.
02:39 Donc on a choisi de les mettre elles en avant dans le livre en faisant un portrait.
02:44 Nini Lufar c'est la première qui a pris en photo le père et la grand-mère de Massa
02:49 Jina à l'intérieur de l'hôpital et qui l'a posté sur les réseaux sociaux, sur
02:53 son compte Twitter.
02:54 Et Eloé en fait elle est allée couvrir les funérailles.
02:58 Quand il y a eu ces funérailles, les femmes ont spontanément levé le voile.
03:03 Et ça Eloé l'a raconté dans son journal.
03:06 Et donc c'est ces deux femmes là qui sont une part très très importante du lancement
03:10 de cette révolution.
03:11 Et qui sont actuellement en prison, elles en courent la peine de mort.
03:15 La traduction du livre en persan sera disponible gratuitement en Iran.
03:18 J'y aurons compris.
03:19 Quand je dessine, je m'engage et je donne mon avis.
03:23 Mon personnage c'est pour expliquer, enfin pour donner mon point de vue.
03:27 Il y a les faits que je relate et après il y a mon avis.
03:30 Et en fait je veux que le lecteur il sache que c'est mon avis.
03:33 Et donc c'est pour ça que c'est représenté par un personnage qui est moi qui parle.
03:37 Après le canard c'est ma conscience.
03:38 Donc c'est souvent des choses qu'on pourrait se dire que si c'est moi qui les dis c'est
03:42 un peu politiquement incorrect.
03:44 Et en fait le canard permet de faire passer ça comme la petite voix.
03:47 Ça j'y tiens particulièrement dans mon travail.
03:50 Quand je relate des faits un peu journalistiques, la partie factuelle c'est écrit dans un
03:55 langage correct.
03:56 Le reste c'est écrit comme on parle dans la vraie vie.
03:59 Après ces 12 mois de révolte, la République islamique tient toujours, comme le raconte
04:03 le livre.
04:04 Mais elle montre tout de même des signes de faiblesse.
04:06 Souvent on a l'impression que les révolutions ça va se faire comme ça.
04:10 Mais non, en fait si on regarde la révolution française, si on prend dans sa globalité
04:14 même l'histoire de la France, on peut pas dire que tout de suite il y a eu la révolution
04:19 et après c'était bon quoi.
04:20 Ça se passe pas comme ça.
04:21 Ça met beaucoup de temps.
04:22 Déjà j'ai l'impression qu'il y a beaucoup plus de solidarité entre les gens.
04:26 Dans le sens où avant, peut-être que quand une femme était dévoilée et qu'elle se
04:30 faisait alpaguée en fait par la police des mœurs et qu'elle était embarquée, personne
04:34 ne s'opposait.
04:35 Aujourd'hui on voit beaucoup de gens qui prennent la défense de ces femmes et qui
04:39 chassent les militians.
04:41 Après il y a beaucoup de femmes aussi qui ne portent plus le voile maintenant.
04:44 Et comme il y en a beaucoup, ils peuvent rien faire.
04:46 C'est indéniable que cette révolution, elle était avant tout une révolution féministe
04:50 mais très vite en fait elle a été soutenue par les hommes.
04:52 Et c'est un peu la différence avec d'autres moments dans l'histoire de l'Iran.
04:56 C'est une révolution qui se fera avec les femmes et les hommes iraniens ensemble, main
05:01 dans la main.
05:02 Et je crois qu'au bout d'un moment, ils en auront besoin parce que ça va prendre du
05:05 temps.
05:06 [Musique]

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