Immigration économique: au-delà des fantasmes, la réalité des chiffres

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Alors que la création d’un titre de séjour pour les métiers en tension fait débat, que représente l’immigration économique en France ? Les explications de Jean-Christophe Dumont, directeur de la division migrations internationales à l’OCDE.
Transcript
00:00 c'est une nouvelle pompe aspirante.
00:01 Un texte qui a plutôt tendance à vouloir assouplir les règles
00:18 en créant notamment un nouveau titre de séjour pour inciter
00:21 à venir travailler en France.
00:23 Ce que prévoit ce nouveau titre de séjour, c'est de permettre à des gens
00:25 qui sont déjà sur les territoires français d'accéder à ce permis
00:29 de travail.
00:30 C'est là la nouveauté, il n'y a plus besoin de faire la demande
00:37 de l'étranger.
00:38 Si on est sur l'autre territoire, y compris si on est en situation
00:40 de guerre, on pourra obtenir ce titre directement.
00:43 L'immigration dans son ensemble a beaucoup augmenté
00:51 ces dernières années.
00:52 On est à environ plus de 300 000 titres de séjour
00:55 délivrés à des migrants permanents en 2022.
00:58 Mais la part qui augmente le plus vite, en termes d'idées reçues,
01:02 ce ne sont pas les réfugiés, c'est l'immigration de travail.
01:05 Ces 52 000 premiers titres qui ont été octroyés en 2022
01:08 à des fins d'emploi, c'est le double de ce qui était octroyé en 2017.
01:12 Et c'est presque trois fois plus que ce qui était octroyé
01:15 il y a dix ans, en 2012, puisqu'on avait un peu moins de 16 000 titres
01:19 à l'époque.
01:20 Donc, c'est maintenant une part de plus en plus importante
01:23 de l'immigration totale en France.
01:26 Et l'immigration de travail, sa part a beaucoup augmenté.
01:29 Elle était environ de 11 % il y a dix ans.
01:31 Elle est aujourd'hui à plus de 24 %.
01:33 Donc, vous voyez, c'est presque un quart des titres de séjour
01:36 qui sont donnés à des fins d'emploi, dont une partie
01:39 à des personnes hautement qualifiées, notamment au travers du passeport
01:42 talent, qui en total répond à presque 18 000, 19 000 titres en 2022,
01:47 mais aussi à des migrants moins qualifiés, notamment des saisonniers.
01:50 Les travailleurs saisonniers sont encore plus nombreux
01:53 et multipliés par dix en dix ans pour atteindre 10 000 personnes en 2022.
01:57 Et puis, ce qu'on appelle les autorisations exceptionnelles
01:59 au séjour pour motif économique, c'est en réalité des régularisations
02:03 parce qu'il est d'ores et déjà possible d'être régularisé
02:05 si on a une offre d'emploi.
02:06 Ça représente environ 11 000 titres en 2022.
02:09 En ce qui concerne les titres pour motif économique,
02:17 on retrouve à peu près une partie de la population
02:20 qui est encore plus éloignée de l'emploi.
02:22 Pour le motif économique, on retrouve à peu près ce triptyque,
02:26 à l'exception du fait que pour les Algériens,
02:27 comme il y a des conditions particulières
02:29 qui sont liées à l'accord franco-algérien sur l'immigration,
02:32 ils sont beaucoup moins présents dans les titres économiques,
02:34 ils utilisent d'autres titres de séjour.
02:36 Et donc, on retrouve en premier lieu les Marocains, pour 17 %, environ,
02:39 les Tunisiens, et en troisième position, les Américains,
02:43 qui ont principalement des titres relativement qualifiés.
02:47 L'immigration, de toute façon, joue un rôle important
02:49 dans la croissance de la force de travail,
02:51 puisque ça contribue presque à un petit peu moins de deux tiers
02:53 de l'augmentation de la force de travail en France,
02:56 et de manière plus prépondérante encore
02:59 dans les professions qui sont en croissance.
03:01 Donc, on pense à la fois à des professions moins qualifiées,
03:03 bien entendu, le secteur d'informatique et de la technologie,
03:07 environ 17 % de l'emploi immigré dans ce secteur,
03:10 mais on pense aussi à des secteurs moins qualifiés,
03:12 en forte croissance, comme le secteur de l'immigration,
03:14 ou aussi à des secteurs moins qualifiés, en forte croissance,
03:16 comme le secteur de la sécurité,
03:17 où les immigrés représentent plus d'un quart de l'emploi total.
03:20 Et puis, les immigrés sont aussi représentés
03:22 dans des secteurs qui sont en déclin,
03:24 dont l'emploi baisse d'année en année.
03:26 Près d'un tiers des recrutements dans ces secteurs
03:29 ont le fait d'immigrer dans l'ensemble de l'Union européenne,
03:31 c'est aussi le cas à peu près en France.
03:33 Et dans ces secteurs, on retrouve des secteurs de l'artisanat,
03:36 peut-être de la métallurgie, des secteurs manufacturiers,
03:38 dont l'emploi baisse, mais finalement,
03:40 pour lesquels il est de plus en plus difficile
03:42 de trouver des travailleurs locaux,
03:44 parce qu'évidemment, ces travailleurs s'aperçoivent
03:46 qu'il y a peu, disons, d'avenir dans ces métiers,
03:48 et ils se dirigent vers d'autres métiers.
03:49 Ils répondent à des besoins
03:56 où il y a peu, finalement, de travailleurs natifs,
03:58 et puis ils répondent aussi à des besoins
03:59 où, encore une fois, l'emploi est en forte croissance,
04:02 et où, finalement, la main-d'œuvre nationale disponible
04:04 n'est pas suffisante pour répondre totalement aux besoins.
04:07 Il peut y avoir ponctuellement des effets de concurrence,
04:10 c'est quelque chose qu'on observe notamment
04:13 entre les différentes vagues d'immigrés.
04:15 Les immigrés qui sont arrivés il y a quelques années
04:17 se retrouvent potentiellement en compétition
04:18 avec les immigrés qui sont arrivés plus récemment.
04:20 Ça répondra sans doute à une partie des besoins,
04:28 mais comme c'est des gens qui sont souvent déjà employés dans les secteurs,
04:30 ça ne répondra pas à la totalité
04:32 des besoins de recrutement de ces secteurs.
04:34 Il est nécessaire, en plus de cette politique de régularisation très ciblée,
04:38 de mettre en place d'autres mesures
04:40 de façon à accroître l'attractivité des emplois dans ces secteurs,
04:43 notamment en revalorisant les conditions de travail,
04:47 voire les conditions salariales.
04:48 Cette régularisation ne pourrait avoir d'impact
04:51 sur les besoins de ces secteurs
04:52 que si elle est prise dans un ensemble de politiques publiques plus larges.
04:56 Sous-titrage Société Radio-Canada
04:58 [Musique entraînante diminuant jusqu'au silence]

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