Fin mars, l'Assemblée nationale a autorisé, à titre expérimental, l'utilisation de la vidéosurveillance assisté par l'intelligence artificielle. Elle doit permettre la sécurisation « de manifestations sportives, récréatives ou culturelles ». Comment fonctionne cette vidéosurveillance algorithmique et surtout faut-il en avoir peur ? Noémie Levain de La Quadrature du Net, nous répond en vidéo.
#vidéosurveillance #JO Paris 2024 #Sécurité #Cybersécurité #Intelligence Artificielle #IA #high-tech
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00:00 à travers un outil d'automatisation et d'analyse comme la vidéosurveillance algorithmique,
00:05 on donne un pouvoir énorme à la police, qu'elle n'avait pas auparavant, d'être omniscient.
00:10 La vidéosurveillance algorithmique, c'est le principe d'utiliser les images de vidéosurveillance
00:15 et de poser un algorithme, un logiciel d'intelligence artificielle dessus,
00:19 pour les analyser et retrouver des comportements ou des situations qu'on aura appris à l'algorithme.
00:25 Donc on fournit à l'algorithme énormément de données, des données personnelles,
00:28 des données de nos corps qui marchent dans la rue,
00:30 et ensuite on fait reposer sur ces algorithmes le choix de déclencher une alerte
00:34 et de décider qui mérite d'être regardé dans l'espace public.
00:38 Et cette vidéosurveillance algorithmique, elle pose d'énormes problèmes d'un point de vue technique,
00:42 au regard de la complexité de la technologie qui est utilisée et qui n'est pas maîtrisable par l'humain,
00:47 mais surtout d'un point de vue politique.
00:49 Parce qu'à chaque étape de la vidéosurveillance algorithmique, il y a des choix qui sont faits.
00:53 La vidéosurveillance algorithmique, comme l'intelligence artificielle,
00:55 ce n'est pas une baguette magique, il y a des humains derrière.
00:58 Donc ça commence déjà par définir qu'est-ce qui est suspect, qu'est-ce qui est anormal.
01:02 Donc dans les exemples qui sont aujourd'hui en place en France
01:05 et qui vont être en place avec cette loi sur les Jeux Olympiques,
01:08 il y a par exemple le fait de marcher à contresens,
01:11 le fait d'être au sol après une chute,
01:13 le fait qu'il y ait un groupe trop important de personnes.
01:15 Et là on peut se questionner à quel moment ces comportements sont véritablement suspects.
01:20 Ce n'est pas une infraction, ce n'est pas spécialement bizarre,
01:23 c'est juste le fait de ne pas marcher dans la rue.
01:25 Et donc on voit que derrière cet outil, il y a une vision politique de l'espace public,
01:30 de vouloir contrôler ce qui s'y passe et notamment ça peut être détourné.
01:35 Un groupe qui se forme, ça peut très bien être une manifestation,
01:39 comme un groupe d'amis qui se retrouvent.
01:40 Donc la surveillance de manière générale, elle est utilisée pour contrôler puis pour réprimer.
01:45 Et donc la vidéosurveillance algorithmique, elle s'ajoute à cet arsenal,
01:49 sauf qu'elle a en puissance, elle a dans son fonctionnement même et dans son objectif même,
01:55 l'idée de mettre une norme, de discriminer, de choisir qui est normal et qui n'est pas normal,
02:01 selon des normes définies par les entreprises et par la police.
02:05 En fait, il faut comprendre qu'à travers un outil d'automatisation et d'analyse
02:10 comme la vidéosurveillance algorithmique, on donne un pouvoir énorme à la police,
02:15 qu'elle n'avait pas auparavant, d'être omnisciente, de pouvoir voir ce qu'elle ne voyait pas
02:19 et surtout de pouvoir décider elle-même de ce qui est suspect ou pas suspect.
02:23 Et on voit aujourd'hui que c'est souvent les mêmes populations,
02:27 les mêmes endroits qui font l'objet de surveillance.
02:30 Par exemple, les drones ont été légalisés il y a peu de temps
02:33 et ils sont principalement utilisés aux frontières, dans les quartiers populaires et en manifestation.
02:38 Et plutôt que de se poser la question de comment on peut faire sécurité autrement,
02:41 on accentue de plus en plus la surveillance sans à nouveau reconsidérer
02:46 quels sont les principes démocratiques.
02:49 Une population n'a pas à être surveillée par principe, par son État.
02:54 [Musique]